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Facebook : Les grandes manœuvres

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C’est la numéro 2 de Facebook, Sheryl Sandberg, qui s’est déplacée en personne pour annoncer la bonne nouvelle : le géant des réseaux sociaux va investir dans des startups françaises spécialistes des données individuelles, reconnaissant ainsi le talent de notre pays dans le digital. Cocorico ! Une annonce à quelques millions de dollars investis dans Station F, le projet ambitieux initié par Xavier Niel pour incuber à grande échelle nos meilleures pousses technologiques. En même temps, quelques autres poignées de dollars pour soutenir la création à Science po Paris d’un centre d’innovation des politiques publiques. En arrière-plan, le débauchage par Mark Zuckerberg, le boss de Facebook, des meilleurs talents américains en marketing politique nouvelle génération. Et puis, ces confidences discrètes sur la nouvelle appétence de Zuck pour la grande politique. Alors, au moment où un Donald Trump improbable devient président des États-Unis, Facebook prépare-t-il les grandes manœuvres pour conquérir, au prochain coup, la Maison Blanche ? Mark Zuckerberg, prochain président américain ? Yes he can !
 
Grand tralala et faste municipal pour accueillir Sheryl Sandberg, la COO, n° 2 de Facebook, mardi à la Halle Freycinet à Paris. Sur ce lieu de 34000 m2 imaginé par Xavier Niel pour incuber les meilleures pépites des nouvelles technologies, inauguration de l’espace Station F. Avec un F pour France ou Facebook, peu importe.
 
Facebook n’a pas la réputation d’être particulièrement philanthrope. Si le réseau social mise sur ce creuset des startups parisiennes, c’est pour dénicher « des projets qui valorisent les données pour créer des services utiles à la vie quotidienne, à la santé, aux transports et à l’éducation » indique le communiqué publié à l’occasion de cet événement. Remarquons, au passage, que ces secteurs ne sont pas choisis au hasard : ce sont les piliers de tout bon programme politique. Depuis longtemps déjà, Facebook sait que la maîtrise des données est affaire de pouvoir. Le politique ne peut plus se passer de ceux qui savent utiliser les empreintes numériques des citoyens. Rien n’est donc trop cher pour mieux traiter celles-ci, les décortiquer, les analyser et en tirer la substantifique moelle. Or Facebook est convaincu que la réputation de la France dans la qualité de ses ingénieurs data n’est plus à faire. Déjà, l’année dernière, le réseau avait créé son laboratoire dédié à l’intelligence artificielle à Paris. A cette occasion, il avait recruté quelques-uns de nos meilleurs cerveaux en la matière, au premier rang desquels figure Yann Le Cunn, grand maître du deep learning. Le choix de Paris et de l’incubateur de Xavier Niel n’est donc pas anodin car c’est là que Facebook recrutera, pour ses propres intérêts, la crème de la crème.

LIRE DANS UP : La guerre des cerveaux

Que Facebook investisse dans l’analyse des données et l’intelligence artificielle est finalement tout ce qu’il y a de plus normal. Le géant des données vient chercher du sang neuf là où il se trouve.  Néanmoins, hasard du calendrier ou pas, en même temps, une autre annonce tombe, avec certes moins d’éclat médiatique, mais singulièrement lourde d’intérêt. Facebook a décidé d’investir aussi dans la nouvelle École d’Affaires publiques de Sciences Po Paris. Tout le monde connaît Sciences po mais qu’est donc cette École d’Affaires publiques ? Yann Algan en est le doyen ; il a expliqué le champ de sa mission dans un article publié le 14 janvier dernier par Challenges. Pour lui, il ne s’agit rien de moins, avec cette École, que de faire la révolution ! Une révolution qui fera « évoluer le rôle de l’État vers un État-plateforme, une action publique 3.0 co-construite entre les citoyens et les services publics sur des plateformes. Le levier fondamental de cette transformation repose sur la capacité des plateformes à collecter des données en nombre et à les exploiter pour offrir de nouveaux services aux utilisateurs dans des conditions radicalement différentes, impliquant une co-production avec les usagers et les entreprises, en tirant tout le parti de la créativité de la multitude pour améliorer la vie des citoyens ». On comprend mieux l’intérêt de Facebook pour cette École : les données sont au cœur de sa mission.
 
Pour Yann Algan, l’enjeu est stratégique : « Le moment est venu de dessiner les contours futurs de l’État et de nos institutions en scellant une alliance nouvelle entre tous les savoirs, notamment les sciences humaines et sociales, et les technologies, pour dessiner de nouvelles politiques au service de l’intérêt général. » S’inspirant des méthodes de la Silicon Valley, Sciences Po inaugure aujourd’hui « un incubateur de politiques publiques pour former les responsables de demain à trouver des solutions innovantes et concrètes aux politiques publiques. » Un incubateur financé, entre autres acteurs institutionnels plus classiques, par… Facebook.
 
Révolutionner les politiques publiques est une idée qui trotte dans la tête de Mark Zuckerberg depuis quelques temps. En 2015 déjà, Wikileaks avait révélé les rêves politiques du patron de Facebook. Un email adressé à John Podesta le directeur de campagne d’Hillary Clinton et ancien chef de cabinet de la Maison Blanche sollicitait un entretien. Ce courrier, signé par Sheryl Sandberg, celle-là même qui vient d’annoncer ses investissements parisiens, contenait un passage éloquent : « Il [Marck Zuckerberg] est    particulièrement volontaire pour rencontrer quiconque pourrait l’aider à comprendre comment faire bouger les curseurs sur les questions de politiques publiques dont il se soucie. Il souhaite rencontrer des personnes qui puissent nourrir sa compréhension des opérations politiques pour changer les politiques publiques afin de poursuivre ses objectifs sociaux (comme l’immigration, l’éducation, et la recherche). »
 
Plus récemment, le 10 janvier dernier, Zuckerberg annonce sur son réseau avoir recruté David Plouffe, l’ancien directeur de campagne de Barack Obama. Une semaine auparavant, à l’occasion de ses vœux et de l’exposé de ses « bonnes résolution pour 2017 », le patron de Facebook écrivait que son « challenge » pour 2017 sera « d’aller à la rencontre des gens dans chaque État des États-Unis ». Une résolution qui avait les allures d’une pré-campagne électorale. Il n’en fallait pas plus pour qu’USA Today titre : « Mark Zuckerberg envisage-t-il de se lancer dans la course à la Maison Blanche ? »
 
Cette idée est-elle si fantaisiste que cela ? Mark Zuckerberg, après Trump, pourrait-il être président des États-Unis ? Dans un monde où l’intelligence artificielle se répand partout, où la donnée est le nerf de la guerre, le patron de Facebook n’est pas plus illégitime qu’un « petit » – en comparaison de la fortune de Zuckerberg – milliardaire de l’immobilier. Déjà il gouverne un pays de plus d’un milliard et demi d’âmes : son réseau social. Déjà, il est reçu comme un chef d’État dans tous les coins de la planète. Déjà ses décisions sociétales, économiques ou éditoriales représentent un impact et un poids politique inouï. Alors Zuck Président ? C’est possible. Mais, comme s’en inquiète le magazine Wired « De grands barons des médias ont déjà occupé de hautes fonctions politiques. Mais un baron des médias sociaux s’il était élu président, constituerait une expérience sans aucun précédent en politique et dans la capacité de contrôler nos perceptions. ».
En 2020, année électorale aux États-Unis, Mark Zuckerberg fêtera ses 36 ans ; l’âge légal pour se présenter aux élections présidentielles. Les grandes manœuvres ont commencé.
 
 

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