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Le grand retour en avant de l’économie à l’œconomie

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Comment, dans le contexte de la mondialisation, l’humanité peut-elle concilier les nécessités économiques avec le fait incontournable que les ressources naturelles sont limitées ? C’est la question que posait Pierre Calame dans un ouvrage publié en 2009 aux Editions Charles Léopold Mayer, (ECLM), sous le titre « Essai sur l’œconomie ». On ne peut lutter contre un modèle de pensée, dépassé mais ayant le mérite de la cohérence, qu’en jetant les bases d’une alternative douée d’une cohérence de même force. C’est le sens de sa quête d’aujourd’hui pour laquelle il vient de publier un petit traité d’oeconomie aux éditions ECLM. Le premier racontait une recherche, le second en expose les résultats.
 
Le système actuel de production et d’échange de biens et de services n’atteint pas – et c’est très visible en ces temps de crise – les objectifs que l’on doit assigner aux lois qui régissent les sociétés. Il creuse un fossé profond entre des gagnants, minoritaires, et la masse des perdants qui vivent dans le dénuement.
Dans son premier ouvrage, « Essai sur l

 » (1) Pierre Calame (2) s’intéressait à l’énoncé des règles et à la conception des facteurs qui fondent la production, l’échange et la consommation. Constatant l’impasse du paradigme économique actuel, il démontre que l’économie doit revenir à son sens étymologique, « oïkos », le foyer, la maison commune, et « nomos », la loi. Revenir à l’œconomie, c’est avoir une vision économique plus large, qui recouvre à la fois l’art de l’organisation des échanges matériels et immatériels des êtres humains entre eux, des sociétés entre elles et de l’humanité avec la biosphère. Pierre Calame explore ces questions dans un esprit de réflexion ouverte. Il démontre qu’il est possible aujourd’hui d’assurer à la société la maîtrise collective et démocratique de son propre destin.

 
Le terme « œconomie » renvoie à ce que l’on cherche à bâtir pour l’avenir ; il correspond à la branche de la gouvernance qui organise la production d’échanges et la consommation des biens et services.

Il désigne, selon Pierre Calame, une branche de la gouvernance qui a pour objet de créer des acteurs et des agencements institutionnels, des processus et des règles visant à organiser la production, la répartition et l’utilisation de biens et de services en vue d’assurer à l’humanité tout le bien-être possible en tirant le meilleur parti des capacités techniques et de la créativité humaine, dans un souci constant de préservation et d’enrichissement de la biosphère, de conservation des intérêts, des droits et des capacités d’initiative des générations futures et dans des conditions de responsabilité et d’équité suscitant l’adhésion de tous.

L’envie et la nécessité de formuler une autre théorie de l’économie ne datent pas d’hier

Dès 1971, travaillant sur le développement urbain de l’Algérie, Pierre Calame avait découvert que le « voile monétaire » empêchait de distinguer les flux d’échange d’un territoire avec l’extérieur des flux d’échanges internes, ce qui rendait sa réalité difficile à appréhender.
Puis, dirigeant les services du Ministère de l’Équipement dans une région en pleine crise industrielle du Nord de la France, il avait constaté que notre conception de la monnaie et de l’économie rendait pratiquement impossible la mobilisation des bras ballants au service des besoins non satisfaits.
Les deux dernières décennies du vingtième siècle ont confirmé ses doutes en y ajoutant une composante essentielle : l’incapacité de la théorie dominante à gérer les relations, pourtant décisives, entre l’humanité et la biosphère.
« Nous avons besoin d’une autre théorie économique. Les candidats à la relève ne manquent pas, de l’économie marxiste au développement auto-centré, de l’économie sociale et solidaire au développement durable. Aucun ne répond aux exigences. »
 
Depuis quelques années, sur fond de désillusion à l’égard des grandes idéologies, des myriades d’innovations locales ont fleuri. Suffit-il d’attendre qu’elles se multiplient pour qu’émerge une économie à la hauteur des défis de la transition ? Il en doute.
On ne peut lutter contre un modèle de pensée, dépassé, mais ayant le mérite de la cohérence, qu’en jetant les bases d’une alternative douée d’une cohérence de même force. C’est le sens de sa quête.
 
L’étymologie l’a mis sur la voie. En 1755, l’Encyclopédie jette un « o » à la poubelle : ce qui s’appelait jusque-là « œconomie » devient « économie ». Jusqu’au milieu du 18ème siècle on parlait d’oeconomie et non d’économie. En perdant son « o », l’économie perd aussi progressivement la mémoire de son sens premier (oïkos, maison, nomos, loi), et s’autonomise de la gestion du reste de la société jusqu’à présenter les lois qu’elle énonce comme des lois naturelles auxquelles on ne peut que souscrire. L’œconomie désignait le sage gouvernement de la maison pour le bien commun de la famille. Entendons au 21ème siècle : « le sage gouvernement de la planète au service du bien commun de l’humanité ». L’œconomie est donc une branche de la gouvernance.
 
Aujourd’hui, l’humanité est confrontée à une exigence pressante : assurer le bien-être de tous dans le respect des limites de la planète. Seul un retour à l’œconomie peut permettre de concilier les nécessités économiques avec le fait incontournable que les ressources naturelles sont limitées, et c’est l’objet de ce petit traité. En assumant pleinement son étymologie, l’œconomie devient ainsi la branche de la gouvernance qui s’applique aux domaines particuliers de la production, de la circulation et de la consommation de biens et de services. Pierre Calame démontre que c’est en y revenant qu’il sera possible d’assurer à la société la maîtrise collective et démocratique de son propre destin.
 
Ayant au fil des décennies montré que la gouvernance devait satisfaire à un certain nombre de principes constants, Pierre Calame se retrouvait en pays de connaissance. D’où l’idée de « grand retour en avant, de l’économie à l’oeconomie » : « grand retour » parce que les défis du 21ème siècle, la gestion d’une planète limitée et fragile, sont très comparables à ceux qui prévalaient avant la révolution industrielle ; « en avant » parce que ces défis doivent être relevés avec toutes les ressources intellectuelles et techniques dont nous disposons aujourd’hui.
D’où le plan du petit traité. Dans la première partie, il soumet l’économie actuelle aux critères découlant des principes de gouvernance, ce qui révèle ses insuffisances. Et dans la seconde, il explore ce que devrait être une œconomie qui satisfasse à ces principes. Ce qui l’amène à revisiter par exemple la légitimité des acteurs de l’économie et de la finance, la monnaie, les régimes de gouvernance des biens et services, le rôle des territoires et des filières.
 
L’œconomie, ce n’est pas du prêt à penser, une doctrine qu’il suffit de mettre en œuvre. Ce sera le fruit d’une invention collective dont les principes de gouvernance servent de guide. Son petit traité propose un cadre pour cette invention.
 
Petit traité d’œconomie – Editions ECLM, 23 mai 2018
 
 
  1. Cet ouvrage a reçu le Prix Limantour 2009 de l’Académie des sciences morales et politiques.
  2. Pierre Calame, polytechnicien, ingénieur des Ponts et Chaussées, a travaillé vingt ans au ministère français de l’Équipement où il a occupé diverses responsabilités de gestion territoriale et d’administration centrale. Il en est sorti convaincu de la nécessité d’une réforme radicale de l’État. Après un bref passage dans l’industrie, il a dirigé pendant près de vingt ans une fondation internationale, la Fondation Charles Léopold Mayer pour le progrès de l’homme dont il est actuellement le président.
  3.  

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