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Le financement du développement durable en manque d’idées ?

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Les engagements pris par les Nations unies en 2015 dans le cadre des Objectifs de développement durable (ODD) et de l’Accord de Paris sur la lutte contre le changement climatique sont appelés à modifier les priorités et modalités de financement des banques de développement. Celles-ci doivent contribuer à éradiquer la pauvreté et la faim, ou encore améliorer les systèmes d’éducation et de santé, et sont également en première ligne pour décarboner les économies, protéger la biodiversité et assurer la gestion durable des ressources marines – le tout avec l’ambition d’entraîner les investisseurs privés. Qu’en est-il trois ans après le lancement des ODD et la signature de l’Accord de Paris ?
 

Financer le développement durable est possible avec l’épargne actuelle

L’Agenda 2030 pour le développement durable et ses 17 ODD, inclus les objectifs de l’Accord de Paris, ont un coût estimé entre 5 000 et 7 000 milliards de dollars par la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED), dont environ 3 000 milliards de dollars pour les seuls pays en développement (PED). C’est beaucoup et c’est très peu.
C’est beaucoup par rapport aux quelques 144 milliards annuels d’aide publique au développement (montant global en 2017). Raison pour laquelle les banques et agences de développement n’ont de cesse d’affirmer que sans effet d’entraînement massif sur les investissements privés, les dépenses publiques ne pourront pas contribuer significativement aux objectifs globaux que la communauté internationale s’est fixée. Cependant, 3 000 milliards, c’est aussi très peu. Avec un PIB mondial qui va bientôt atteindre les 130 000 milliards de dollars, les besoins de financement non couverts des PED représentent tout juste 2,5 % de la richesse mondiale, les besoins globaux environ 5 % – soit cinq fois moins que l’épargne mondiale disponible. L’Agenda 2030 est donc en réalité un agenda très bon marché si on se souvient qu’il en va de la transformation radicale de nos sociétés et de nos économies.
 
À l’échelle globale, la disponibilité des financements n’est donc pas un problème : ils font partie de la solution. La conséquence paradoxale de ce constat est que les institutions de Breton Woods (nées en 1944) et les agences d’aide au développement se retrouvent dans une situation inédite de devoir apporter la preuve de leur savoir-faire et de leur valeur ajoutée face à des « concurrents » qui, comme elles, ont un accès facile à des capitaux bon marché. Il n’y a plus de position dominante dans l’octroi de prêts bonifiés ou de dons : ce que la Banque mondiale refuse à un pays au motif d’incompatibilité avec l’ambition sociale et environnementale de l’Agenda 2030, la China Development Bank peut l’offrir par exemple, ou encore des investisseurs institutionnels se portant acquéreurs d’émissions obligataires en vue de diversifier leur portefeuille.
 
La diversité de l’offre de financements se traduit aujourd’hui par une forte hétérogénéité dans les choix et les pratiques de financement « durable ». À titre d’exemple, la plupart des banques multilatérales ont choisi de réduire et pour certaines de supprimer les financements de centrales à charbon, quand les fonds d’investissement et les banques nationales de développement des pays émergents tardent encore à le faire. La définition même de ce qu’est un financement lié à la lutte contre le changement climatique, pour rester dans le même registre, varie selon les institutions, de sorte qu’il est à peu près impossible d’avoir une idée claire de l’étendue des financements d’atténuation et d’adaptation dans les pays en développement aujourd’hui.
 

Une concurrence dans l’offre de financement, mais aussi dans les idées

Les rencontres annuelles du FMI et de la Banque mondiale, qui cet automne se tiennent à Bali, servent dans ce contexte à la fois de forum et de vitrine. Sans plus bénéficier de leur hégémonie, comme ce fut le cas dans les années 1980 et 1990, les deux institutions sœurs y abordent des sujets dépassant les questions de développement au sens le plus étroit (avec une place importante donnée au numérique), tout en démontrant, par leur capacité de convocation de banquiers mais aussi de chercheurs et de représentants d’ONG de la planète, qu’elles disposent d’un avantage encore incontesté dans l’offre de ces capitaux si précieux qui sont les normes et les idées.
 
À côté de l’offre concurrentielle de prêts, de dons et de services de « de-risking », les nouveaux acteurs du financement que sont les investisseurs institutionnels, les philanthropes et les banques nationales de développement ont aujourd’hui une carte à jouer. Grâce à leur connaissance spécifique du contexte des pays dans lesquels ils opèrent et/ou de la flexibilité dans la mise au point de programmes de prêts concessionnels, des acteurs tels que les banques nationales de développement disposent d’atouts non négligeables pour faire émerger et financer des projets inscrits dans des trajectoires soutenables de développement, dans le contexte spécifique de chaque pays.
C’est le cas notamment des membres de l’International Development Finance Club (IDFC), réunissant les principaux établissements de financement du développement des pays du G20. L’hétérogénéité des pratiques de financement « durable » au sein de ce club en fait un laboratoire grandeur nature du financement des ODD. Les banques nationales de développement et les autres types de nouveaux financeurs doivent maintenant trouver les moyens de comparer leurs pratiques et d’évaluer leurs résultats, dans une logique d’émulation et de transparence permettant de spécifier et de conforter leur rôle dans la lente conquête de la durabilité.
 
Tancrède Voituriez, Directeur du programme Gouvernance du Développement Durable IDDRI
 
Source : IDDRI 
 

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