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Addictions : ce que l’on doit changer

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Selon une note des services de lutte contre les trafics de stupéfiants, la concentration en THC de la résine de cannabis est passée de 11% à 26,5% en huit ans. D’après les spécialistes, plus sa qualité augmente, plus le risque de développer une maladie psychiatrique est grand et plus l’addiction est importante.
Nous avons interviewé le Docteur Cutarella, psychiatre, addictologue, pour un éclairage sur les mécanismes d’addiction au cannabis.
 
Le Plan national de mobilisation contre les addictions 2018-2022, validé par le cabinet du Premier ministre en décembre dernier, a été adopté discrètement en janvier 2019. 73 000 décès par an en France sont dus au tabac, et 49 000 à l’alcool. Des chiffres qui « ne sont pas acceptables » pour Edouard Philippe, appelant à « changer nos regards et nos habitudes » sur ces consommations. Mais il n’en oublie pas pour autant les risques et les dommages des consommations de substances psychoactives.
Afin de protéger nos concitoyens, en particulier les plus jeunes, leurs niveaux de consommation étant parmi les plus élevés en Europe, quel que soit le produit en cause, le gouvernement a donc adopté un plan contre les addictions comprenant 6 axes, 19 priorités et plus de 200 mesures. Inscrit sur le long terme, pour être compatible avec l’atteinte des objectifs en matière de prévention, il indique les priorités et les principales mesures à mettre en œuvre, avec un thème fort : Ce que l’on doit changer.
 
Nous avons demandé son avis au Docteur Christophe Cutarella, psychiatre, addictologue, tabacologue et membre du collège scientifique de la Fondation Ramsay Générale de Santé.
 
UP’ : Quels sont les mécanismes de l’addiction au cannabis ?
 
Dr Christophe Cutarella : Globalement il s’agit des mêmes mécanismes que dans les autres types d’addiction avec produits ou même sans produit. Pour le cannabis, quelques spécificités évidemment sont à prendre en compte : l’action de la molécule de THC sur certains récepteurs que l’on appelle CB1. Ces récepteurs sont présents en très grande partie dans tous le système nerveux central, on peut donc comprendre aisément leur impact sur nos actions régies par le cerveau !
 
UP’ : Le cannabis est-il à l’origine de maladies psychiques ou à des troubles du comportement ?
 
CC : Oui !
 
UP’ : Comment les repérer ?
 
CC : Avant de les repérer il faut savoir les prévenir ce qui paraît être encore plus important. Ces pathologies peuvent être notamment des problématiques d’ordre psychotique et potentiellement augmenter le risque de développer de schizophrénies. Un repli sur soi, un désintérêt pour les relations sociales, amicales ou amoureuses, des troubles du sommeil, une irritabilité, une plus grande impulsivité, et tout simplement les difficultés de concentration peuvent être des symptômes annonciateurs de ces pathologies.
Des symptômes dits positifs comme l’apparition de délires, d’hallucinations peuvent être également une symptomatologie qui doit pousser à consulter un spécialiste c’est-à-dire un psychiatre.
 
UP’ : Y-a-t-il plus de consommation / consommateurs de Cannabis aujourd’hui qu’il y a 20 ou même 10 ans, sachant que 41 % des jeunes de 15-16 ans trouvent facile d’obtenir du cannabis (chiffres 2015) ? Si oui, Comment expliquez-vous le phénomène ? Sommes-nous passés d’une consommation de « loisir » et de « plaisir » à un nouveau type de consommation ? 
 
CC : Clairement, oui. Les consommations aujourd’hui ont changé. Il y a toujours des consommations d’alcool mais les modes de consommation sont plutôt dans la recherche pure de la défonce que le plaisir, je dirais. Peut-on dire que fumer quand on prend des substances psycho actives est un véritable loisir ? N’est-t-il pas le rôle du contexte et de son association qui en fait le but recherché ? Car consommer un joint de cannabis entre amis une fois à l’occasion n’a rien à voir avec développer une addiction et consommer tous les jours à but auto thérapeutique pour des troubles du sommeil par exemple.
 
UP’ : Le cannabis altère-t-il les capacités d’apprentissage et la motivation, quand on sait qu’à 17 ans, les jeunes ont un usage régulier de cannabis ? Si oui, à quel âge est-ce le plus dangereux ?
 
CC : Oui bien sûr ! Plus la consommation est importante, plus cela génère d’un impacte potentiellement irréversible sur le cerveau. Une consommation avant 17 ans peut être problématique notamment parce qu’elle est réalisée sur un cerveau encore immature.
 
UP ‘ : Que pensez-vous d’une consommation thérapeutique de cannabis pour soulager certaines douleurs / maladies ? Si oui, lesquelles ? Et dans quelles proportions ?
 
CC : Oui cela a été étudié ! Et il y aurait un intérêt à cela, bien sûr que ses prescriptions doivent être encadrées et indiquées en fonction des éléments cliniques et d’une prescription spécialisée.
 
UP’ : Etes-vous pour une légalisation du cannabis thérapeutique ?
 
CC : Évidemment car cela permettrait de mieux cibler les antalgiques et de diminuer les prescriptions excessives d’antalgiques opiacés, ou encore des surconsommations de benzodiazépines.
 
UP ‘ : Que pensez-vous de la société canadienne Tilray, parmi les leaders mondiaux de la filière du cannabis thérapeutique, qui ambitionne de s’établir en Europe ?
 
CC : Je ne connais pas cette société mais il est évident qu’une société à but lucratif qui exploite une nouvelle niche commerciale reste à surveiller. Quoi qu’il en soit, un usage du cannabis thérapeutique n’est pas le même qu’un usage récréatif et donc potentiellement plus addictif car non régulier, il est ouvert au deal.
 
UP ‘ : Pourquoi est-il pertinent de dédier un plan de prévention sur l’addiction au cannabis ?
 
CC : Je pense qu’il est important d’intégrer le cannabis dans un plan de prévention au même titre que le tabac ou l’alcool mais aussi d’autres substances. Il y a énormément de consommateurs et du fait que cette substance soit considérée illicite, elle reste souvent cachée.
Ouvrir un plan pour pouvoir en parler et laisser un temps de parole à ceux qui sont dans des consommations excessives, et donc en difficulté avec cela, me paraît tout à fait judicieux. Cela permettrait à plusieurs types de professionnels acteurs dans ce domaine de travailler ensemble et de produire un plan de prévention à destination des consommateurs, notamment des plus jeunes. Il paraît également important de ne pas oublier les parents souvent démunis dans ce genre de circonstances.
 
UP’ : Quels moyens ont les parents, éducateurs, … pour aider à la prévention ?
 
CC : Aujourd’hui en France il existe quelques moyens mais pas énormément non plus, comme les CJC : Consultation Jeunes Consommateurs. Certaines associations permettent de communiquer dans les établissements scolaires et faire de la prévention auprès des jeunes ce qu’il faut faire impérativement. Il y a également Santé publique France qui permet de communiquer à ce sujet. Plusieurs personnes comme moi agissent également en milieu professionnel afin de faire de la prévention mais aussi de la sensibilisation auprès des personnes a priori non concernés, et qui pourrait l’être par leur entourage ou leur profession.
 
Propos recueillis par Fabienne Marion
 
 
Photo d’entête © Lars Hagberg / AFP
 

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