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Mobilité : 2019, l’an 1 du Plan vélo ?

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La France s’est fixé l’objectif ambitieux de tripler la part du vélo dans la mobilité d’ici 2024 et a adopté un Plan national pour y parvenir. Les élus réunis au sein du Club des villes et territoires cyclables et les parlementaires mobilisés dans le cadre du Club des élus nationaux pour le vélo ont réaffirmé, ce jeudi 24 janvier, lors de leur conférence de presse annuelle, le rôle que le vélo doit enfin jouer dans la transition écologique afin d’accélérer la lutte contre le changement climatique, de préserver la qualité de l’air et la santé et de lutter contre la crise économique et les inégalités.
 
Présenté le 14 septembre dernier par le Premier Ministre, ce très attendu Plan national vélo et mobilités actives, représentant 350 millions d’euros pour cofinancer des infrastructures, veut traduire – pour la première fois – une ambition nationale pour faire du vélo un mode de déplacement à part entière et la volonté d’accélérer la réalisation du « système vélo » dans les territoires, à toutes les échelles et pour tous les publics. Mais attention, le vélo ne doit pas faire l’objet « d’économies budgétaires », ont averti ce jour les associations, au moment où la crise des « gilets jaunes » entraîne une diminution des recettes fiscales.
 
Pour Pierre SERNE, Président du Club des villes et territoires cyclables,« les planètes paraissent alignées, en ce début d’année, pour faire du vélo un service à la mobilité à part entière dans tous les territoires y compris périurbains et ruraux ! L’année 2018 a été agitée mais a marqué un tournant pour la prise en compte nationale du vélo. Ce qui doit maintenant être confirmé dans les faits. En ce début 2019, le Grand débat national est censé servir à entendre les Français, faisons qu’il soit aussi une occasion de faire monter des solutions et d’élaborer ensemble un accompagnement des changements de comportement de consommation et de mobilité. D’ailleurs, le vélo est une possible clé de l’apaisement des tensions autour de la transition écologique et de ses impacts sociaux et territoriaux. Les collectivités locales, elles, sont déjà en action puisqu’elles assurent l’essentiel de l’effort public en faveur du vélo. Une stratégie nationale et le retour d’aides de l’Etat pour accélérer la transition vers des territoires cyclables, voilà qui constitue un potentiel cadre favorable. A condition bien sûr que l’Etat tienne ses promesses en termes de financements et de calendrier pour la mise en œuvre des mesures du Plan vélo. C’est ainsi que la France pourrait enfin ne plus figurer parmi les mauvais élèves de l’Europe en matière de vélo. En tout cas comptez sur nous pour déployer ensemble cette solution de mobilité simple, concrète, à moindre coût, bonne pour la santé et pour la planète et qui donne à chacun plus de liberté et d’autonomie ! ».
 

2018 aura été l’année du vélo, 2019 transformera-t-il l’essai ?

Pour la première fois, la stratégie nationale en faveur du vélo et des mobilités actives flèche des objectifs quantifiés – 9% de part modale en 2024 – et inscrit des aides de l’Etat. Avec 350 millions d’euros sur sept ans, soit 50 millions d’euros par an, on est en retrait du scenario 2 du rapport du Conseil d’orientation des infrastructures et des besoins des collectivités pour accélérer la réalisation d’itinéraires cyclables et de stationnement vélo.
200 millions d’euros par an pour quoi faire ? Premier chantier, résorption des coupures urbaines et rétablissement des continuités piétonnes et cyclistes dans les territoires, avec la réalisation de réseaux express vélo et de liaisons inter-agglomérations ; le rabattement à vélo vers des modes de transports collectifs, le stationnement vélo dans les équipements publics, les gares et dans le cadre des opérations de rénovation urbaine et la poursuite du schéma national véloroutes et voies vertes.
Cependant, la Dotation de soutien à l’investissement local, dès 2018, a été mobilisée pour le développement des mobilités actives. En 2019, ce sont 15% des 570 millions de la DSIL qui permettent de soutenir des projets vélo et mobilités actives avec une participation de l’Etat de 33%, soit 85 millions d’euros qui s’ajoutent donc aux 50 millions du fonds vélo.
 
Le Club des villes et territoires cyclables insiste sur la nécessité de ces financements au regard des défis à relever et des objectifs fixés ; aussi faut-il veiller à la sanctuarisation et à la pérennisation de ces aides en 2019 et à leur reconduction les années suivantes. Ainsi qu’à ce que les modalités et conditionnalités de l’appel à projets du fonds vélo ne restreignent pas sa portée, en dissuadant ou écartant des porteurs de projets, et ne fragilisent ainsi le principe même du concours financier de l’Etat.
 
Selon l’association Paris en selle, qui recense scrupuleusement tous les nouveaux aménagements cyclables dans la capitale, la Ville n’a réalisé que 23 % des aménagements cyclables promis en début de mandat. Mais, si les chantiers arrivent à leur terme, c’est 51 % du réseau qui sera bouclé fin 2019.
 

Accélérer le Plan national vélo

L’appel à projets de l’Ademe « vélo et territoires » lancé dès l’annonce du Plan vélo et mobilités, en septembre 2018, destiné à anticiper l’appel à projets du « Fonds mobilités actives » avec le financement d’études, de services et de chargés de mission dans les territoires de moins de 250 000 habitants a rencontré un énorme succès : 165 projets vélo candidats à la clôture le 10 décembre représentant plus de 17 millions d’euros d’aide demandées pour un coût total des projets de 35 millions d’euros.
 
©Robert Doisneau « Leçon de vélo » [Bike Lesson], 1961.
 

Mais la mise en œuvre du Plan national vélo et mobilités actives doit s’accélérer pour respecter les échéances qu’il a fixées. A commencer par une des mesures les plus ambitieuses du Plan et pourtant, la plus évidente : la généralisation de l’apprentissage du vélo qui appelle la mise œuvre de moyens à la hauteur de l’enjeu et l’implication de l’Education nationale. Le « savoir-rouler » prévoit que chaque enfant sache se déplacer à vélo et connaisse les règles élémentaires du code de la route à son entrée au collège à l’horizon 2022.
 
De même pour le suivi des objectifs assignés à la SNCF en matière de stationnement vélo sécurisé dans les gares d’ici 2024. Rappelons que la Loi portant réforme ferroviaire disposait déjà en 2014 que la SNCF devait élaborer un plan de déploiement et de financement d’équipements de stationnement vélo dans et aux abords des gares prioritaires en concertation avec les collectivités locales… lequel n’a jamais été présenté depuis par l’opérateur malgré les relances du Club des villes et territoires cyclables.
Enfin, le pilotage du Plan vélo et mobilités actives n’est toujours pas précisé. Il est pourtant indispensable à sa réussite, avec la mise en œuvre de toutes les mesures et le respect des échéances.
 

Les réticences des collectivités

Les collectivités locales réunies au sein du Club des villes et territoires cyclables regrettent un certain nombre d’engagements, comme la disparition des obligations en matière de stationnement pour les vélos dans les bâtiments (suppression de l’article (ex art. 17) : « Toute personne qui procède à des travaux sur un parc de stationnement annexe » équipant certains bâtiments (ceux accueillant un « service public » ou « à usage industriel ou tertiaire »), devra se doter « d’infrastructures permettant le stationnement des vélos ».)
Les collectivités s’interrogent également sur l’interdiction d’aménager des places de stationnement 5 mètres en amont des passages piétons (ex. art. 17 : « aucun emplacement de stationnement ne peut être aménagé sur la chaussée cinq mètres en amont des passages piétons, sauf si cet emplacement est réservé aux cycles et cycles à pédalage assisté. »)
Même si le Gouvernement envisage de faire évoluer la réglementation (Code de la route) dans ce sens, cette obligation devrait être inscrite dans la loi en lien avec les enjeux réaffirmés de transfert modal et de sécurité routière.
 
Autre divergence : l’impossibilité de cumuler (sous conditions : rabattement vers une station de transport public) le bénéfice du forfait mobilité durable et du remboursement de 50% de l’abonnement transport en commun. 
 
Enfin, la loi ne donne pas d’outils prescriptifs aux collectivités pour réguler les nouveaux opérateurs de mobilité et notamment les offres de vélos et trottinettes en free-floating. Mais seulement la possibilité, pour les autorités organisatrices, d’établir des prescriptions minimales (conditions d’usage, gestion des épaves…) que les opérateurs devront respecter sous peine de sanction. La délivrance de licence et la possibilité de lever une redevance sont donc exclues.
 
En matière de sécurité des déplacements, la suppression (article 5) de l’obligation pour les agglomérations de plus de 100 000 habitants, tenues de mettre en place un PDU (désormais « plans de mobilité »), d’effectuer le suivi des accidents impliquant au moins un piéton ou un cycliste (disposition de la loi solidarité renouvellement urbain (SRU) de 2001 qui affichait la sécurité des déplacements comme un des objectifs prioritaires des PDU) est un problème. De même que, dans les dispositions relatives à l’ouverture des données, la suppression de la collecte des données relatives « à l’accessibilité des principaux itinéraires piétons entre un point d’arrêt prioritaire et les pôles générateurs de déplacements. »
 

Travail de l’artiste Clet Abraham de détournement d’un panneau de signalisation (Place Viktoria-Luise à Berlin, Allemagne)

Les incitations économiques, de puissants leviers

L’année 2018 s’est achevée avec l’inscription, dans la Loi de Finances pour 2019, d’une des mesures du Plan vélo demandée par le Club des villes et territoires cyclables et le Club des élus nationaux pour le vélo depuis 2015 : L’article 145 ouvre droit, désormais, à la réduction d’impôt sur les sociétés pour la location de flottes de vélos. Avant cette date, elle était réservée à l’achat de vélos. Or les entreprises optent le plus souvent pour la location longue durée et les solutions clé en main (incluant location, entretien, séance de remise en selle, information des salariés…) que proposent de nouveaux acteurs et qui – comme pour la voiture ! – répondent mieux à leurs besoins.
 
Et par l’extension de la prime à la conversion pour le remplacement d’un ancien véhicule (diesel ou essence) à l’achat d’un cycle à assistance électrique neuf : cette évolution fait suite aux propositions du Club des villes et territoires cyclables lors des Assises de la mobilité et dans le cadre du copil du volet transport du Grand plan d’investissement : Achat d’un deux-roues, trois-roues motorisé ou quadricycle électrique neuf : 100 € pour un foyer imposable ; 1 100 € pour un foyer non imposable.
 
Toujours dans le domaine des aides à l’acquisition de vélos, le Plan vélo et mobilités actives prévoit un dispositif d’aide à l’achat de VAE pour remplacer l’actuelle prime à l’achat (très peu sollicitée puisqu’elle ne cible que les ménages non imposables avec une aide de 100 € conditionnée à l’obtention d’une aide de même montant auprès de la commune de résidence). Le Plan prévoit de soutenir l’achat d’un vélo ou d’un vélo-cargo à assistance électrique par le biais des certificats d’économie d’énergie (CEE). Aucune précision n’a été apportées depuis par le gouvernement. Sans doute parce qu’un examen rapide met en évidence que ce dispositif n’est pas du tout adapté.
En effet, si on valorise les économies d’énergie qui résultent du passage au VAE, on obtient des montants assez faibles. Sur la base des données de l’étude d’évaluation des services vélo de l’Ademe, c’est environ 20€ pour l’aide à l’achat et 35€ pour la location longue durée (sur l’ensemble de la durée de vie du VAE…). Au regard du coût d’achat d’un VAE [1], ces montants d’aide n’auraient donc aucun caractère incitatif.
 
De nombreuses études ont montré l’effet levier des aides à l’achat sur le transfert modal de la voiture solo vers le vélo à assistance électrique (VAE), notamment pour les trajets domicile-travail [2]. L’ADEME, en 2016, a mis en évidence qu’une aide financière constitue une incitation nette à la pratique du vélo. La distance moyenne du déplacement à vélo est ainsi plus que doublée passant de 3,4 km à 7,4 km. La moitié des nouveaux utilisateurs sont passés de la voiture au VAE. Rappelons que le Cerema a également mis en évidence que parmi les bénéficiaires de l’aide nationale pour l’achat d’un VAE en 2017 (200 euros sans condition de ressources), 7% d’entre eux ont décidé de se séparer d’une voiture !
Dans une volonté d’augmentation significative de la part modale (triplement inscrit au Plan vélo), c’est donc un levier efficace quand on veut accélérer la diffusion du vélo dans les pratiques et les habitudes de déplacement des Français. Qui permet aussi de créer un marché et de baisser les prix des produits tout en augmentant leur qualité.
 

Comment renforcer les dispositifs d’incitations économiques du Plan vélo et en corriger les imperfections ?

Pourquoi ne pas penser à rétablir la possibilité de cumuler le bénéfice du forfait mobilité durable et du remboursement de 50% de l’abonnement transport en commun, dans le cadre de l’usage combiné du vélo et du transport public ? Puisque l’article 26 du projet de loi dispose que le salarié doit choisir chaque mois entre le forfait mobilité durable et le remboursement de son abonnement TC.
Si la souplesse (« chaque mois ») qui permet de tenir compte de la saisonnalité de l’usage du vélo (notamment dans certaines régions) est intéressante, l’impossibilité de cumuler le bénéfice des deux dispositifs est en revanche un recul vis-à-vis de l’indemnité kilométrique vélo mise en place en février 2016 et de la nécessité d’encourager l’intermodalité vélo/TC, le vélo augmentant la zone de chalandise du transport public et limitant son impact environnemental (moins de parkings auto…).
 
Pourquoi ne pas gébéraliser le forfait mobilité durable pour tous les salariés ? Dans un premier temps, cette obligation pourrait concerner les entreprises de plus de 100 salariés dans le cadre du plan de mobilité qu’elles sont tenues de mettre en place depuis 1er janvier 2018. Avant une rapide généralisation à tous les employeurs.
 
Pourquoi ne pas donner au salarié la possibilité de bénéficier d’une aide de 50 euros par mois s’il opte pour l’achat d’un vélo en leasing/location longue durée avec option d’achat ? Cette aide serait cumulable avec la prise en charge par l’employeur de 50% de l’abonnement de transport public. Autrement dit, la prise en charge par l’employeur de 50% de l’abonnement transport public deviendrait une aide universelle, cumulable avec un dispositif vélo au choix : forfait mobilité durable ou aide à l’acquisition d’un vélo en leasing.
(Source : Club des Villes et Territoires cyclabes – 25/01/2019)
 
 

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Invité
Aveniratoutcrin
4 années

Bonjour,

Déjà 1 an, jour pour jour, que le grand Plan-Vélo a été annoncé par le gouvernement avec l’objectif de tripler la part du vélo dans la mobilité urbaine d’ici 2024.
Mais ce plan national a encore bien du mal à s’appliquer au niveau des localités.

Une grande enquête vient d’être lancée par la FUB (Fédération des Usagers de la Bicyclette) pour établir un “Baromètre des villes cyclables 2019”.
C’est ici : https://barometre.parlons-velo.fr/
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