Sous le ciel changeant du Vexin, là où les collines murmurent aux herbes et où les murs séculaires du château de La Roche-Guyon veillent sur le temps, une rencontre s’esquisse entre l’image et le verbe, entre les racines et les ailes. Olivier Verley, photographe du vivant, vient y poser son regard, comme un promeneur cueille la lumière. Sa résidence, intitulée Des plantes aux paysages, tisse les fils d’une double mémoire : celle des feuillages capturés par l’objectif, et celle des vers de son aïeul, Henri Leclerc, poète-botaniste aux mains pleines de tisanes et de rimes. Ensemble, leurs voix composent une partition de lumière et de feuilles, une ode discrète aux plantes qui soignent, aux paysages qui respirent, et aux étourneaux qui dansent dans le vent, comme une ponctuation ailée à cette symphonie du vivant.
Dans le cadre de sa saison culturelle 2025, intitulé « Paysage vivant », s’intéressant à la relation entre le paysage et le vivant qui le compose et l’habite, le château de La Roche-Guyon accueille en résidence le photographe Olivier Verley. Animé par la passion des plantes et du paysage, l’artiste associe dans le cadre de sa résidence son œuvre photographique à l’œuvre poétique et scientifique de son arrière-grand-père, Henri Leclerc (1870-1955), médecin phytothérapeute et poète ayant vécu dans le Vexin français. Du 24 mai au 30 novembre 2025, les amateurs de photographie, de poésie et de sciences vont découvrir une exposition mêlant tirages photographiques, sonnets, installation vidéo, ouvrages scientifiques, mais aussi archives personnelles de l’inventeur du mot « phytothérapie » en 1913.

La résidence de création
Dans les allées silencieuses du Potager-fruitier, là où s’échangent parfums de menthe et secrets d’angélique, Olivier Verley avance, l’appareil à la main, le regard habité par la lumière d’un autre temps. Depuis les années 90, il arpente les paysages du Vexin comme on relit un livre aimé : lentement, avec fidélité. Aujourd’hui, il y revient guidé par les mots de son arrière-grand-père, Henri Leclerc, dont les sonnets, à la fois savants et sensibles, célèbrent les vertus des simples, ces plantes familières et puissantes. Entre les sillons du potager et les lignes des poèmes, Verley cherche une harmonie, une manière de faire dialoguer les formes de la nature et celles de l’esprit. Le château devient alors ce qu’il fut jadis : un laboratoire d’expériences botaniques, un jardin d’idées, un refuge pour la création.

L’exposition

C’est dans l’enfilade des salons, baignés d’une lumière douce et ancienne, que naît l’exposition Des plantes aux paysages, comme un herbier de souvenirs et de regards. Cinquante photographies inédites y dialoguent avec vingt-trois sonnets, chacun dédié à une plante, de l’éclat du pavot à l’ombre bienveillante de la passiflore. Et puis il y a le radis, rose ou noir, et même la ronce, à laquelle on s’égratigne, mais que l’on aime quand même. Le tout murmure une musique discrète, comme une confidence entre deux époques. On y devine, en filigrane, la silhouette d’Henri Leclerc, ami de Verlaine et d’Huysmans, offrant au visiteur non pas une exposition, mais une promenade intérieure, un jardin suspendu entre science et poésie.
L’installation vidéo
Et soudain, dans la Tour carrée, le ciel s’ouvre. Les étourneaux arrivent, nuée mouvante, ponctuation vivante du paysage. Grâce à un protocole patient et singulier, Olivier Verley les a filmés dans leur danse infinie — murmuration, dit-on, comme un souffle ou un mot d’enfant. L’installation Starlings, faite de six plans séquences, invite à lever les yeux, à écouter ce bruissement d’ailes comme on écouterait un poème qui ne veut pas finir. C’est le vent lui-même qui parle.
Les ateliers pédagogiques
En parallèle, dans les écoles du Val-d’Oise, de l’Eure et des Yvelines, les enfants s’essaieront au photogramme, cette alchimie fragile où l’on pose une plante sur une surface sensible et où la lumière vient en révéler l’empreinte. Ainsi, comme les sonnets de Leclerc ou les clichés de Verley, naîtront des images à la fois simples et magiques, traces fugaces de ce qui pousse, éclot, soigne et passe.
Ainsi s’écrit, entre les murs du château de La Roche-Guyon, une histoire de regards et de racines, de feuillages et de mémoire. À travers l’objectif d’Olivier Verley et les vers d’Henri Leclerc, le paysage devient vivant au sens le plus tendre : il respire, il pense, il chante. Cette exposition n’est pas seulement une rencontre entre art, science et poésie — c’est une invitation à ralentir, à s’attarder sur le chant discret des choses simples. À voir dans une feuille de consoude un poème en germe, dans le vol d’un étourneau une question sans réponse. Et peut-être, en quittant le château, le cœur un peu plus léger, repartir avec cette phrase au bord des lèvres : « Voici des fruits, des fleurs, des feuilles et des branches… »

Exposition « Des plantes aux paysages », du 24 mai au 30 novembre 2025 – Château de La Roche-Guyon, 1 rue de l’Audience – 95780 – La Roche-Guyon
→ Inauguration le 5 juin 2025 à 18h, en présence de l’artiste
Photo d’en-tête : Plateau d’Auvers 19 oct. 2020 ©Olivier Verley