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Les robots ouvrent la voix !

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C’est un nouveau défi microtechnique au service de la santé  que viennent de relever des chercheurs, chirurgiens et instituts de recherche européens, avec le lancement du premier prototype européen de robot endoscopique pour la micro-chirurgie laser des cordes vocales qui vient de passer avec succès  les tests pré-cliniques. 

La chirurgie des cordes vocales concerne les lésions cancéreuses, essentiellement liées au tabac (3 000 nouveaux cas par an) mais aussi, de plus en plus souvent, des lésions bénignes chez les personnes qui sollicitent beaucoup leur voix. Elle nécessite, afin de garantir la préservation de la voix du patient, une précision de l’ordre de 50 à 100 micromètres (environ le diamètre d’un cheveu). Or, à l’heure actuelle, la chirurgie utilise un laser dont la source est située à 40 centimètres de la bouche du patient, ce qui limite sa maniabilité et la précision du geste. Par ailleurs, le chirurgien opère à travers un microscope, et le tissu à traiter doit donc être dans le champ de visée, ce qui implique une position très inconfortable pour le patient, source de douleurs cervicales post-opératoires.

Pour pallier ces inconvénients, le projet européen μRALP (1), porté par l’Institut italien des technologies, et associant entre autres l’institut FEMTO-ST et le CHRU de Besançon, développe un robot dédié à la chirurgie assistée des cordes vocales. Ce nouveau dispositif consiste en un endoscope flexible qui permet de visualiser les cordes vocales et d’amener la source laser à l’intérieur du patient, à 20 mm de sa cible.
Véritable défi microtechnique, l’endoscope proposé embarque des éclairages en lumière froide, deux caméras miniatures pour assurer une vision en 3D, un laser chirurgical doublé d’un laser qui fait office de pointeur pour le chirurgien, et enfin, le micro robot de 1 cm3 qui va, grâce aux images fournies par les caméras, guider ces lasers le long de la trajectoire de référence dessinée par le chirurgien directement dans l’image à l’aide d’une tablette tactile. Grâce à une technique de fluorescence, des filtres aideront à déterminer s’il existe une zone cancéreuse au niveau de la lésion et augmenteront la précision du geste. Avec ce nouveau procédé, le chirurgien devrait obtenir une précision de l’ordre d’une centaine de micromètres.

Après de nombreuses étapes techniques de recherche et de développement, des essais pré-cliniques sont effectués sur des cadavres à l’institut d’anatomie de l’Université de Franche-Comté pour la validation du concept du prototype actuel. Les essais de ce jour portent sur l’insertion de l’endoscope, la visualisation 3D, l’ergonomie du poste de travail et le guidage laser.

Les caractéristiques du robot endoscopique

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A l’heure actuelle, la chirurgie des cordes vocales souffre de plusieurs inconvénients, tant pour le chirurgien que pour le patient. Pour davantage d’ergonomie, les équipes européennes du projet µRALP ont conçu un dispositif permettant d’amener à la fois les technologies d’imagerie et les outils de chirurgie au plus près du site à opérer, dans le corps du patient. Le prototype conçu est un endoscope robotisé incluant un système d’éclairage, des caméras, et des lasers, manipulables à distance par le chirurgien, et qui dispose en outre d’une interface de visualisation en réalité augmentée.

Un accès aux organes à opérer : le robot est porté par un endoscope, tige flexible insérée au fond de la gorge du patient, au plus près des cordes vocales (20 mm). Ce dispositif pourra être adapté pour la microchirurgie d’autres parties du corps, comme le tube digestif.

Un micro-robot pour contrôler finement le laser : un micro-robot de moins d’1 cm3, guidé par retour visuel, assure l’orientation du faisceau laser pour une chirurgie précise des cordes vocales. Concrètement, le chirurgien dessine, sur une tablette tactile affichant les images préopératoires, la trajectoire que doit adopter le laser. En comparant en temps réel les images filmées au tracé défini par le chirurgien, le micro-robot ajuste la position et l’orientation du faisceau laser.

Une interface homme-machine dopée par la réalité augmentée

L’imagerie par fluorescence
Le projet a développé un système d’imagerie par fluorescence, pour visualiser le tissu cancéreux. En effet, les cellules de la tumeur contiennent des protéines particulières, qui émettent une lumière fluorescente lorsqu’elles sont éclairées par un laser à une longueur d’onde de 405 nm. Etant donné que la fluorescence disparaît rapidement après la mort, cette propriété n’est pas testée lors des essais sur cadavres. Mais les scientifiques testent le dispositif sur des tumeurs des cordes vocales juste après leur exérèse au CHRU. Ils exploitent les propriétés de fluorescence sur différentes bandes spectrales pour aider au diagnostic dont le « gold standard » reste aujourd’hui l’examen histologique.

Visualisation en réalité augmentée
Dans le casque de réalité augmentée seront à terme projetées les images préopératoires, les images filmées en temps réel par les caméras, ainsi que le signal de fluorescence. Ce dispositif rendra possible l’ablation complète de la tumeur, en minimisant les dommages aux tissus sains.

Un système intelligent et sûr

Le micro-robot met en œuvre des algorithmes de contrôle adaptatif. A terme, il devrait être capable de s’adapter au changement d’apparence du site chirurgical au cours de l’intervention.
Le système améliore aussi la sécurité de l’opération, par exemple en filtrant les éventuels tremblements du chirurgien.

Des partenaires complémentaires

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Ce projet collaboratif européen µRALP réunit cinq institutions de trois pays. Porté par l’Institut Italien de Technologie (IIT), il associe l’institut FEMTO-ST (UFC/CNRS/ENSMM/UTBM), les Universités de Hanovre (Allemagne) et de Gênes (Italie) et le CHRU de Besançon.

L’Istituto Italiano di Tecnologia (IIT), coordinateur du projet est représenté par Leonardo de Mattos, est responsable de la gestion globale du projet, de la diffusion des connaissances et de l’exploitation des résultats.
L’IIT est intervenu sur le développement de systèmes de télé-opération et d’automatisation pour la microchirurgie, intégrant les différents sous-systèmes logiciels à travers une interface utilisateur simple et intuitive.
L’apport de l’IIT a été très important tout au long des expérimentations et tests, notamment pour son expertise technique préalable sur la manipulation motorisée du laser chirurgical, ainsi que pour ses travaux sur l’ergonomie et la sécurité du système.

L’institut FEMTO-ST est intervenu dans le projet par le biais de deux équipes : l’équipe « MiNaRoB » (MicroNanoRobotique Biomédicale), dirigée par Nicolas Andreff (Université de Franche- Comté), du département « AS2M » (Automatique et Systèmes Micro-Mécatroniques), a conçu plusieurs solutions innovantes pour le micromanipulateur laser, réalisé un dispositif imageur à haute fréquence et développé des algorithmes de commandes originaux. Cette équipe a également joué un rôle transversal capital, en participant à la conception des endoscopes, au développement logiciel et à la réalité augmentée, apportant son expertise dans les domaines des micro-systèmes mécatroniques et optomécatroniques, de l’asservissement visuel (guidage par retour visuel), de la géométrie multi-vues et des systèmes d’imagerie rapide.

L’équipe « PIM » (Photonique pour l’instrumentation médicale),dirigée par Bruno Wacogne (CNRS), du département Optique, a contribué au projet pour l’instrumentation optique et la caractérisation optique des tissus biologiques par fluorescence.

Le partenaire allemand « Leibniz Universität Hannover » (LUH), représenté par Tobias Ortmaier et son équipe « Institut des systèmes mécatroniques », dotée d’une solide expérience dans les projets liant ingénierie et chirurgie, a contribué de manière majeure aux développements technologiques du corps de l’endoscope flexible, à l’intégration matérielle (notamment d’un laser chirurgical fibré), au suivi des déformations des tissus et à la réalité augmentée.

Au CHRU de Besançon, le service d’ORL, dirigé par Laurent Tavernier, et le centre d’investigation clinique (CIC) Inserm 1431 (Lionel Pazart, Bruno Wacogne) ont participé, avec leurs homologues italiens, à la définition des spécifications et contraintes médicales, chirurgicales, cliniques et réglementaires relatives au projet µRALP.
Une base de données multimédia comprenant des informations et images cliniques a été créée, participant ainsi à regrouper et partager les connaissances et données sur les pathologies concernées.
Les équipes du CHRU de Besançon ont également mis en place un essai clinique ex vivo, afin d’appréhender la pertinence de l’utilisation des propriétés optiques de fluorescence des échantillons biologiques pour le diagnostic différentiel des lésions pathologiques ; le service d’anatomopathologie représenté par son chef de service Séverine Valmary-Degano, a ainsi également apporté son aide pour l’analyse histologique des prélèvements.

Enfin, le CIC et le service d’ORL, en collaboration avec le laboratoire d’anatomie de l’Université de Franche-Comté dirigé par Laurent Tatu, ont coordonné les essais pré-cliniques sur cadavres, ayant pour but la validation du concept de l’endoscope robotisé. Les cadavres utilisés étaient ceux de sujets ayant donné leur corps à la Science selon la législation actuellement en vigueur. Les essais se sont déroulés dans les règles éthiques habituelles régissant ce type de procédures scientifiques.

L’« Università degli Studi di Genova » (UNIGE) et son département d’ORL, dirigé par Giorgio Peretti, a participé à la définition des spécifications, contraintes médicales et risques chirurgicaux, apportant sa grande expertise sur les protocoles médicaux concernés afin de guider les développements technologiques au sein du projet μRALP.

L’UNIGE a également fourni de nombreuses iconographies de pathologies du larynx, de microphonochirurgies (microchirurgie de la voix) lasers, et sur l’interaction laser-tissus, pour alimenter et enrichir la base de données en ligne.
Le Pr Giorgio Peretti et son équipe ont également apporté une aide précieuse lors des discussions, sur l’orientation du projet et des tests, grâce à leur expérience en otorhinolaryngologie mais également dans le domaine des innovations technologiques adaptées aux applications biomédicales.

Financement du projet

μRALP est un projet « STREP » de trois ans (janvier 2012 à mars 2015) financé par la Commission européenne à hauteur de 2,65 millions d’euros. Les fonds ont été obtenus lors de l’appel du 7e programme-cadre de recherche et développement (Framework Programme 7), relatif aux technologies de l’information et de la communication (Information and Communication Technologies) et portant sur les « systèmes cognitifs et robotiques opérant dans des environnements du monde réel ».

A terme, ce dispositif médical apportera une véritable valeur ajoutée à la phonochirurgie (chirurgie de la voix). En outre, les dispositifs conçus dans le cadre de ce projet pourront être utilisés dans d’autres systèmes robotiques chirurgicaux. Ainsi, l’institut FEMTO-ST et le CHRU travaillent déjà à la conception d’un endoscope pour la micro-chirurgie laser du tube digestif.

(1) μRALP (prononcer « Microralp ») : microtechnologies and systems for robot-assisted laser phonosurgery (phonochirurgie laser assistée par microrobotique)

www.microralp.eu

Photos : Interface chirurgien-robot développée dans le cadre du projet µRALP par l’Istituto Italiano di Tecnologia et Leibniz Universität Hannover.
© L. Godard/UFC

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