« Forgiven by Nature », une exposition pour (re)découvrir l’œuvre de Gianni Pettena

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Se déployant à La Verrière mais aussi à l’ISELP voisin, l’exposition « Forgiven by Nature » invite à parcourir cinquante années de création menées hors des sentiers battus par Gianni Pettena.  Guillaume Désanges rend ainsi hommage à l’œuvre hybride et engagée de cet architecte de formation, artiste, enseignant et critique né en Italie.
Deux entretiens vidéo permettent au public éloigné de Bruxelles de découvrir installations, projets, dessins et archives en donnant tour à tour la parole à l’artiste puis au commissaire. Et de mesurer combien Gianni Pettena fut un véritable pionnier dans l’attention qu’il a toujours portée à la nature.

Cette exposition est le dernier chapitre du cycle « Matters of Concern | Matières à panser » initié en 2019 par le commissaire Guillaume Désanges à La Verrière à Bruxelles. Un cycle qui se développe autour d’une attention particulière portée à la matière. Empruntant son titre au penseur Bruno Latour, il met en lumière des approches différentes, qui investissent la matière de préoccupations spirituelles, sociales, symboliques, thérapeutiques ou magiques.
D’exposition en exposition, la prise en compte de nouvelles relations de l’art au vivant, aux objets et aux éléments transparaît. Une exploration ouverte, soucieuse de “panser” la matière, autant que d’en saisir le pouvoir transformateur.

L’exposition inaugurale tisse des liens inédits entre des œuvres et des objets actuels et passés, selon une approche dépassant les catégories et hiérarchies traditionnelles, de l’artisanat à l’art, en incluant des pratiques magiques ou thérapeutiques : du vitrail artisanal célébrant Mamadou, le guérisseur de Roubaix, à la danse cathartique et guérisseuse d’Anna Halprin ; des poupées féministes de Raymonde Arcier à la robe symbolique et organique d’Aline Ribière, en passant par les effigies chamaniques de Harald Thys et Jos de Gruyter, etc. La plupart des créateurs réunis ont en commun de repenser les modes d’usage et de production de la matière selon le régime de l’attention, du soin. À travers leurs pensées et leurs gestes se dessine la possibilité d’un pas de côté, d’un réenchantement du monde.

Le cycle se poursuit, aujourd’hui, avec une exposition consacrée à Gianni Pettena, figure majeure de l’Architecture radicale, mouvement qui œuvrait dans les années 60 à l’encontre du caractère normatif dominant de la création dans ce domaine.

Architecte, donc, mais aussi artiste, designer, critique, historien de l’architecture, commissaire d’expositions et enseignant, cet Italien né en 1940 est aussi un pionnier dans l’attention qu’il a toujours portée à la nature. À La Verrière, l’exposition « Forgiven by Nature » rend compte de la transversalité d’une pratique résolument libre, hors des carcans, qui privilégie les matériaux humbles et observe la marche du monde avec lucidité. Issu de la scène florentine, Gianni Pettena est une figure majeure de l’Architecture radicale, un mouvement né en Italie en 1965 (incluant entre autres les groupes Archizoom, Superstudio et UFO), dont le but était de repenser les fondements de l’architecture en critiquant leur caractère normatif et dominant. Il s’agissait de contester tout impératif de construction et de le remplacer par des démarches conceptuelles et artistiques, en imaginant librement des manières alternatives d’habiter le monde. Pour Gianni Pettena plus précisément, la révision des principes de sa discipline passait par la quête d’une « racine première » de l’architecture, à partir d’une observation attentive et curieuse de la nature plus ou moins sauvage. Ainsi, au début des années 1970, c’est en arpentant des paysages désertiques du Sud-Ouest américain qu’il établira les bases d’une production personnelle à la fois réflexive et concrète, idéale et matérielle.

De cette prise de conscience des possibilités architecturales « naturelles » d’écosystèmes épargnés par les marques de la culture industrielle occidentale vont naître de nombreux projets, installations, actions, performances, dessins, mais aussi sculptures, films ou textes, individuels ou collectifs, réalisés ou pas, théorisés ou intuitifs, qui constitueront les bases de son œuvre insaisissable et originale.

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Sorte d’architecte qui ne construit pas ou d’artiste sans objets, la diversité de ses modes d’intervention n’empêche pas une grande cohérence dans les préoccupations et les formes. Des maisons entièrement recouvertes de glace ou de terre en permanente métamorphose à une structure de bois qui récupère les tumbleweeds (ces boules d’herbe sauvage portées par le vent dans les déserts américains) formant un gigantesque building végétal, des photographies de paysages naturels ou d’habitations vernaculaires intitulées «Architectures inconscientes » au décollage d’une partie d’un mur intérieur pour le faire « respirer », d’un château d’eau disparaissant sous une cuirasse de fleurs vivantes à une galerie entièrement recouverte de branches et de feuilles, il s’agit à chaque fois de proposer des expériences sensorielles et conceptuelles inédites. Des gestes simples qui modifient le réel, bouleversent les ordres existants, déjouent nos visions standardisées pour les remplacer par des images fugaces, critiques et utopiques.

Une pratique élargie de l’architecture, libérée et surtout libératrice, qui navigue entre l’activisme, l’art et la poésie.

À l’invitation du cycle « Matters of Concern | Matières à panser », et pour sa première exposition en Belgique, Gianni Pettena propose un projet en deux parties. À La Verrière, une sélection d’objets, maquettes, photographies, dessins, documents, films, installations déplie la pratique généreuse et hybride de l’artiste. Elle permet de saisir le souffle d’un esprit à la fois frondeur, idéaliste et joueur, qui œuvre toujours dans un régime de l’humour et de la subversion, qui n’empêche pas les émotions.

À l’occasion de cette exposition ambitieuse, qui se termine le 13 mars 2021, La Verrière présente une sélection d’œuvres ainsi que de nombreux documents, tandis qu’une installation monumentale issue d’une performance collective accessible au sein de l’Institut supérieur pour l’étude du langage plastique (ISELP) situé à quelques pas. Cette exposition en deux lieux, placée sous la direction de Guillaume Désanges, permet à un large public de se plonger – littéralement – dans la démarche visionnaire de celui qui se définissait comme un « anarchitecte », pour mieux réfuter les frontières entre les disciplines.

Deux entretiens vidéo permettent au public éloigné de Bruxelles de découvrir installations, projets, dessins et archives en donnant tour à tour la parole à l’artiste puis au commissaire.

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