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biobanques et santé

Les Biobanques: eldorado de la médecine sur mesure ?

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Les Biobanques sont méconnues. Pourtant, ce sont des banques pour la vie, notre santé, au sens propre, comme au sens figuré. Elles sont partout, dans les hôpitaux (environ 90 centres de ressources biologiques en France). Lorsqu’un patient donne son sang, son ADN, n’importe quel échantillon biologique pour un simple diagnostic, les biobanques peuvent – avec le consentement du patient – récupérer une partie du prélèvement pour la recherche médicale. La structure des Biobanques décide aujourd’hui de lancer un nouveau site internet, afin de sensibiliser le grand public au besoin de donner ses échantillons. Explications.

Accepter de donner ses échantillons aux biobanques, c’est permettre à la France de contribuer pleinement à la recherche internationale sur le cancer, les maladies comme Parkinson, Alzheimer, les scléroses en plaque, les maladies génétiques, les allergies, le diabète et toutes les maladies cardiovasculaires etc. Bref, la plupart des maladies.

Ces centres de ressources biologiques n’étaient pas coordonnés, organisés, harmonisés (grâce au data management et aux big data notamment) de manière à fournir une force de frappe majeure à la recherche médicale.
C’est aujourd’hui le cas grâce à l’infrastructure BIOBANQUES (créée grâce aux investissements d’avenir issus du grand emprunt). 82 biobanques (sang, ADN, cellules, cerveau, tissus tumoraux etc.) adhèrent à cette structure majeure qui a bouleversé les process, la qualité, la traçabilité des biobanques et de leurs échantillons.
Des équipes de chercheurs du monde entier peuvent désormais s’adresser à cette structure unique pour trouver des centaines, voire des milliers d’échantillons sur leur maladie, pour tester de nouveaux médicaments à grande échelle par exemple.

Deux biobanques sont installées sur le site de la Pitié Salpétrière à Paris : NeuroCEB, qui capitalise des cerveaux de toute la France sur les maladies d’Alzheimer, Parkinson ou encore la Sclérose en plaques ; et la Banque d’ADN et de cellules pour de nombreuses maladies comme les cancers et des affections génétiques.
Elles abritent 182 000 tubes de cellules ou d’ADN, et en reçoivent 3 500 nouveaux par an, avec des équipements rares à découvrir.

Une immense collection d’échantillons de tissus humains, de sang, d’urine, de plasma ou de lignées cellulaires, prélevés dans les hôpitaux et conservés dans des conditions optimales afin que les chercheurs, qu’ils travaillent pour le secteur public ou pour des laboratoires de l’industrie pharmaceutique, puissent en disposer gratuitement. Mais aussi des données médicales diverses (âge, sexe, habitudes alimentaires, antécédents médicaux, arbres généalogiques…).
L’enjeu est de fabriquer des médicaments plus efficaces et moins coûteux pour les systèmes de santé, parce qu’ils seront mieux adaptés aux patients. Les biobanques sont l’outil d’une « médecine sur mesure » grâce à une connaissance toujours plus fine des pathologies et la prédiction de la réponse au traitement (efficacité, tolérance) en fonction du sexe, du style de vie, de facteurs ethniques et génétiques. (Source : Le Monde 19 aôut 2014).

Neuf pays en Europe (l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, l’Estonie, la France, la Grèce, Malte, les Pays-Bas et la Suède) ont participé dès le début à l’aventure. 270 institutions de 33 pays sont maintenant engagées. 

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Quels enjeux pour les biobanques ?

La collecte organisée des échantillons biologiques d’origine humaine et le stockage de ces échantillons jouent un rôle central en recherche clinique et translationnelle.
C’est pour cette raison que plusieurs centaines de biobanques existent à travers le monde, principalement aux états-Unis et en Europe, différentes dans leurs modes de fonctionnement, leurs buts, leurs dates de mise en place, la nature et la taille des collections qu’elles conservent et distribuent. Dans le domaine de la santé, la plupart des biobanques collectent des échantillons dans le cadre des soins, seule justification acceptable pour des procédures invasives de prélèvement. La constitution de collections par « requalification» de ces échantillons issus du soin relève ensuite de « stratégies » plus ou moins définies, reflétant essentiellement le recrutement principal de l’établissement hôte de la biobanque, et l’antériorité des programmes de recherche dans l’environnement scientifique géographiquement proche.

Pour ces raisons, beaucoup de biobanques en santé se sont «spécialisées» sur certaines pathologies bien définies. C’est ainsi le cas pour la biobanque des établissements de santé de la région niçoise, fortement orientée sur la pathologie thoracique, thyroïdienne, et oto-rhino-laryngologique. Dans certains cas, les collections peuvent être créées dans le cadre de la conduite d’essais cliniques, mais elles sont en général assorties d’un « embargo » en faveur du promoteur de l’étude.
Les collections conservées dans ces biobanques peuvent être utilisées pour étudier la physiopathologie des maladies représentées, et identifier de nouveaux biomarqueurs diagnostiques, pronostiques, ou théragnostiques.

Très différentes de ces biobanques thématisées sont les biobanques à vocation épdémiologique. Celles-ci ont pour missions l’étude et le suivi de populations sur de longues périodes, afin de surveiller le développement naturel et/ou la progression de différentes maladies. Les cohortes de personnes concernées sont d’un ordre de grandeur très différent de celles représentées dans les biobanques thématisées (de 100 000 à 500 000 personnes), les échantillons étant en général obtenus par des procédures peu invasives (ponction veineuse, écouvillonnage, recueil d’urine…), qui ne menacent pas l’intégrité physique de la personne qui s’y soumet. Le but essentiel est de mettre en évidence des facteurs génétiques et/ou environementaux favorisant le développement des maladies humaines, ce qui nécessite la possibilité de suivre les personnes inclues sur une période d’au moins 10 à 15 ans.

Les tumorothèques représentent la majorité des biobanques thématisées par pathologie, ce qui témoigne à la fois de la forte intégration de la biologie dans le diagnostic des cancers, et de la vitalité de la recherche (Revue Francophone des Laboratoires – Janvier 2010 – n°418 // 51 anatomie et cytologie pathologiques) clinique et translationnelle en oncologie. Le défi auquel sont aujourd’hui confrontées les tumorothèques est de pouvoir constituer rapidement des collections de taille suffisante pour accélérer la conduite d’études cliniques ou translationnelles.

La diminution progressive du coût des biotechnologies, en particulier des analyses génomiques à haut débit, impose le développement de biobanques très structurées,
«professionnalisées », afin de pouvoir utiliser un volume suffisant d’échantillons de très grande qualité associés à des annotations cliniques complètes et parfaitement
orientées sur une thématique prédéfinie. Plusieurs tests évaluant le pronostic des maladies humaines ont pu être établis grâce à la constitution des biobanques. Ainsi, des études réalisées sur de larges séries d’échantillons biologiques de qualité, mis à disposition par des biobanques, devraient permettre de définir de nouvelles approches pour diagnostiquer, prévenir et traiter les maladies humaines. Le développement d’une «médecine personnalisée» pourrait donc dépendre, du moins en partie, de telles plateformes biopathologiques.

Il apparaît très important d’améliorer les coopérations entre les biobanques de plusieurs villes et même de plusieurs nations afin de potentialiser les moyens mis
pour un projet de recherche ciblée. Plusieurs exemples récents montrent cette volonté de mettre en commun et de relier les biobanques. L’INCa a développé en 2004
plusieurs programmes nationaux d’excellence spécialisée (PNES), l’un axé sur une tumeur fréquente, le cancer du poumon, l’autre sur une pathologie tumorale plus rare, le cancer du rein (www.e-cancer.fr).
Le développement de ces programmes scientifiques n’a été rendu possible que grâce à la constitution en parallèle d’un réseau de tumorothèques fortement orientées sur la pathologie thoracique ou rénale. A titre d’exemple, les tumorothèques de Grenoble, Nancy, Caen, Strasbourg, Tenon et Nice (www.biobank06.com) participent aux projets du PNES poumon. De la même façon, la structuration des cancéropôles en France a permis une harmonisation des pratiques de « biobanking » et d’optimiser progressivement la qualité des annotations cliniques associées aux échantillons, en sensibilisant les différents responsables des tumorothèques. Un exemple est fourni par le Cancéropôle PACA dans lequel les tumorothèques des différents partenaires institutionnels (centres de lutte contre le cancer et hôpitaux publiques de la région niçoise et de la région marseillaise) ont exporté l’ensemble des données concernant les échantillons biologiques sur un site consultable en ligne par les utilisateurs potentiels des collections à des fins de recherche (www.biobank-paca.com).
Un autre exemple de coordination des biobanques est donné à plus grande échelle par le projet « Biobanking and biomolecular resources research infrastructure » (BBMRI) se développant en Europe, dans la continuité des recommandations mises en place antérieurement à l’échelon européen. Longtemps rares, les projets de mise en réseau se multiplient aujourd’hui, avec l’association de tumorothèques géographiquement contiguës, ou réunies par un thème scientifique partagé. L’expérience montrera dans les années à venir quelle est celle de ces approches qui est la plus efficace. (Source : « Les biobanques en France: enjeux et contraintes » Revue Francophone des Laboratoires – Janvier 2010)

A qui appartient les échantillons des biobanques ?

Les échantillons des biobanques continuent, juridiquement, d’appartenir aux individus qui ont accepté de prêter à la science un morceau d’eux-mêmes, si infime soit-il. La confiance dans les autorités qui contrôlent l’ensemble du processus garantit leur adhésion, tout comme l’information dispensée aux patients, notamment grâce aux associations qui les regroupent, devenues des partenaires à part entière de la recherche.

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L’OCDE, dans un rapport « Lignes directrices sur les biobanques et bases de données de recherche en génétique humaine », donne un certain nombres de recommandations visant à fournir des orientations en matière de constitution, gouvernance, gestion, fonctionnement, accès, utilisation et fermeture des biobanques et bases de données de recherche en génétique humaine (« BGH »), qui sont des ressources structurées pouvant être utilisées à des fins de recherche génétique et qui contiennent des matériels biologiques humains et/ou des informations générées par leur analyse, et un nombre important d’informations associées.

Précieux outil pour la recherche mais source de préoccupations éthiques et marchandes

Dans une interview au Monde l’an dernier, le sociologue Herbert Gottweis, professeur à l’université de Vienne, déclare, « qu’ainsi, après avoir fragmenté le corps humain afin de comprendre son fonctionnement, l’âge postmoderne « reconstitue, avec une infinité de fragments, un corps global virtuel » dans le but de soigner des corps réels, qui réagissent différemment aux traitements en Europe, en Afrique ou en Asie : la biobanque signant l’avènement d’une « nouvelle forme de corporalité transnationale et virtuelle, conforme à l’esprit de notre temps ».
Et ce corps virtuel, tournant à l’infini dans la galaxie informatique, ouvre des perspectives vertigineuses. Grâce aux biobanques, pourra-t-on bientôt produire des avatars d’êtres humains ou d’animaux de laboratoire afin de tester, sans risques ni états d’âme, les médicaments du futur ?

Dans un livre sorti en 2009 au PUF dans la collection Que sais-je ?, les auteures (1) cherchent à cerner la réalité de ces biobanques : entre économie de marché et santé publique, les « biobanques », par leur nouveauté et leur ampleur, apparaissent à la fois comme un précieux outil pour la recherche médicale et comme une source de vives inquiétudes. L’ouvrage replace les biobanques dans leur contexte historique, scientifique, économique et juridique, interroge leur légitimité éthique et décortique les problèmes qu’elles posent en matière de propriété et d’accès à leur contenu.

Le Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé, dans le rapport d’un avis rendant compte d’une série de discussions communes menées en 2002 et 2003 entre le Conseil National d’éthique allemand et le Comité Consultatif National d’Ethique Français (CCNE), ne dit pas autre chose :« Les activités de collection et de traitement des échantillons biologiques d’origine humaine et des données d’information en résultant, plus particulièrement du fait de la recherche génétique suscitent des interrogations éthiques majeures. » 
Les deux comités d’éthique, se posant des questions à propos de la collecte, du traitement, du stockage et de l’utilisation d’échantillons en provenance du corps humain et des données d’information en résultant, considèrent tous deux qu’une clarification de la part du législateur est nécessaire.  Il faut prendre en compte la chaîne de responsabilités, le consentement libre et éclairé des donateurs, conciliant collecte, conservation, traitement et utilisation des éléments et données rassemblés dans les biobanques, le développement de la recherche avec la protection de l’individu est donc nécessaire. 

 

(1) Les auteures : Agrégée des facultés de droit, Florence Bellivier est professeur à l’Université Paris X Nanterre et Christine Noiville est docteur en droit, chargée de recherches au CNRS. Elle dirige le Centre de recherche en droit des sciences et des techniques (UMR8056, Université Paris 

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