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Géo-ingénierie

Des technologies pourraient-elles réguler l’embrasement du climat ?

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Le dernier rapport annuel sur l’état du climat est sans appel : 2015 est l’année la plus catastrophique en matière de dérèglement climatique, dans toute l’histoire moderne. Et 2016 s’annonce pire encore.
La lutte contre le changement climatique est donc devenue un enjeu d’urgence absolue. Les voies de réduction des émissions de gaz à effet de serre et les mesures d’adaptation préventives s’imposent. De nombreux secteurs sont concernés, de l’agriculture à l’industrie, en passant par les transports ou les protections côtières. Il faut intensifier les actions engagées, mais peut-on mettre en œuvre des mesures plus radicales, celles de géo-ingénierie climatique notamment ? Les avis sont partagés à l’Académie des Technologies qui a publié un important rapport sur la question.
 
La lutte contre le réchauffement climatique est plus que jamais au cœur des travaux de très nombreuses équipes scientifiques dans le monde. Développement de sources d’énergie moins polluantes, captage et stockage du CO2, énergies alternatives, les chantiers ouverts, notamment dans la dynamique de l’Accord de Paris (COP 21), sont innombrables. « L’inaction aurait des conséquences graves, inacceptables pour la France et aussi mondialement ». C’est par cette mise en garde que commence le rapport rédigé par l’Académie des technologies Technologies et changement climatique : des solutions pour l’atténuation et l’adaptation.
 
Le rapport préconise de mobiliser ou amplifier le potentiel technologique destiné à atténuer le changement climatique ou à en atténuer les effets attendus. Il est en revanche plus réservé sur les technologies destinées modifier globalement les phénomènes dont on connait l’impact sur le changement climatique. Le rapport pointe particulièrement deux techniques de géo-ingénierie : celle consistant à intervenir sur le bilan radiatif en atténuant le rayonnement solaire afin de réduire la température moyenne de la planète ; l’autre concerne l’extraction du CO2 atmosphérique en modifiant les cycles biochimiques.
 
La figure ci-dessus présente les principaux concepts de la géoingénierie du climat. 
Les voies de captation et de stockage du CO2 atmosphérique (en bleu) sont différenciées des voies de gestion
de l’équilibre radiatif de la planète, en particulier via le rayonnement solaire (en rouge)
 

Réduire le bilan radiatif

Plusieurs technologies sont actuellement à l’étude pour réduire les rayonnements du soleil afin de tempérer le climat. Certaines de ces méthodes sont considérées par l’Académie des technologies comme peu réalistes ou dangereuses :
 
– La mise en place de réflecteurs spatiaux permettant de renvoyer une partie de l’énergie solaire. Cette solution est évoquée comme une possibilité. Toutefois le déploiement de ces réflecteurs n’a pas été étudié en détail, sans doute en raison du faible degré de réalisme de cette technologie, confirmé par un rapport récent du Centre national d’études spatiales.
 
L’injection stratosphérique d‘aérosols soufrés, ou de précurseurs d’aérosols, est sans doute la méthodologie qui, sans être souhaitable, semble la plus crédible du point de vue technologique. Ces technologies d’injection d’aérosols soufrés n’existent pas, mais semblent, selon les auteurs du rapport, pouvoir être développées à peu de frais, au moins de manière assez « rustique ». L’Académie des technologies souligne toutefois que les effets induits par cette méthode ne sont pas bien connus. Les modifications climatiques induites par l’injection d’aérosols stratosphériques sont relativement peu pilotables et leurs effets sur la physico-chimie de la stratosphère, en particulier sur l’équilibre de l’ozone, restent encore mal connus.
 
L’ensemencement troposphérique, pour augmenter la réflectivité des nuages bas, a également été proposé, en particulier au-dessus des océans. Selon le rapport, les effets climatiques sont encore moins bien maîtrisés que dans le cas de l’injection stratosphérique. Ces technologies ne sont pas simples. Elles impliquent la pulvérisation de grosses quantités d’eau de mer, qui contiennent des impuretés, et un refroidissement par évaporation des aérosols de sels marins injectés qui font retomber la masse d’air.
 
Augmenter l’albédo des surfaces est une autre méthode évoquée dans le rapport. L’albédo est le pouvoir réfléchissant d’une surface. Par exemple les zones recouvertes de neige réfléchissent plus de rayonnement solaire, amplifiant le refroidissement de la surface terrestre. Les rapporteurs de l’Académie des technologies distinguent ici les surfaces maritimes (où une augmentation de la réflectivité par microbulles apparaît peu réaliste) des surfaces continentales où une augmentation plus locale peut s’apparenter à des techniques d’adaptation (cultures plus réfléchissantes, bâtiments peints en blanc).
Dans tous les cas, un climat régulé par de telles technologies de gestion du rayonnement solaire connaîtrait néanmoins des changements résiduels assez forts à l’échelle régionale, en particulier en termes de possibles changements des régimes de précipitations.
 

Extraire le CO2 atmosphérique

Le rapport énumère une liste de techniques ou technologies qui ont pour objectif de s’attaquer à la cause première du changement climatique en réduisant la quantité de gaz à effet de serre (GES) présente dans l’atmosphère. Si, en principe, ces techniques ou technologies peuvent concerner n’importe quel GES de longue durée de vie, dans la pratique seules des techniques concernant le dioxyde de carbone ont véritablement été considérées jusque-là. Un certain nombre de méthodes ont ainsi été proposées :
 
L’extraction de CO2 via la biosphère terrestre : reforestation, afforestation, stockage accru dans les sols via des modifications des techniques agricoles et culturales, toutes ces techniques d’initiative locale sont praticables sous réserve de conditions économiques réalistes…
 
Le stockage de carbone dans les sols via un « bio-charbon » obtenu par pyrolyse de la biomasse cultivée. La durée de stockage de tels bio-charbons n’est toutefois pas connue de façon très précise.
 
L’extraction via la biosphère marine. Certaines zones océaniques pourraient en effet voir leur richesse en phytoplancton être augmentée par apport de fertilisants, tels le fer. Des expériences de tels enrichissements océaniques ont été menées, avec toutefois des résultats très variables : la chaîne « phytoplancton – zooplancton – animaux supérieurs » est en effet très complexe. L’Académie des technologies rappelle que ces expériences font actuellement l’objet d’un quasi-moratoire.
 
La captation atmosphérique par des voies chimiques. Si les technologies sont identifiées (adsorption sur des solides, absorption par des solutions plus ou moins alcalines – CaO, NaOH…–, avec ou sans catalyseur…), la forte dilution du dioxyde de carbone atmosphérique rend néanmoins, selon les rapporteurs, cette méthode peu efficace, en dehors évidemment de la captation à la source sur les sites émetteurs (centrales, cimenteries…). Ces technologies focalisent une certaine activité de recherche, en particulier à l’étranger, dans la mesure où elles pourraient bénéficier à d’autres procédés industriels liés au dioxyde de carbone et pourraient devenir économiquement viables dans des scénarios présentant des ruptures technologiques importantes quant à la production d’énergie décarbonée de bon marché.
 
La conclusion du rapport de l’Académie des technologies mesure combien le le concept même de géo-ingénierie est lourd d’enjeux, de valeurs et de représentations. Les auteurs appellent toutefois à bien distinguer entre les technologies irréalistes (miroirs spatiaux) ou inefficaces à l’échelle du problème climatique (augmentation de l’albédo des surfaces), les technologies dangereuses car susceptibles de déclencher des effets secondaires ou des rétroactions de portées inconnues (ensemencement océanique ou atmosphérique), et les technologies qui pourront être des aides à la réduction des émissions de GES, comme certaines techniques d’extraction de carbone.
 
Les limites et les risques de ces technologies doivent être pleinement prises en compte, évitant ainsi qu’elles ne puissent être vues comme des solutions miracles, prétexte à l’inaction en matière d’atténuation et d’adaptation au changement climatique. D’autant plus que, dans l’état actuel, ces méthodes restent au niveau de propositions conceptuelles.
D’une part certaines méthodes ne semblent pas capables d’agir de façon significative à l’échelle globale.
D’autre part les rétroactions susceptibles d’être déclenchées dans la complexité du système climatique, rétroactions pouvant entraîner des effets secondaires incontrôlés et néfastes (sur la biosphère, sur les circulations atmosphériques et océaniques…) ne sont pas étudiées et comprises au niveau nécessaire. Enfin certaines des technologies nécessaires ne sont pas maîtrisées de telle sorte que leur niveau de maturité technologique reste très bas.
 
 
Image d’en-tête : injection dans l’atmosphère d’aérosols soufrés naturels lors de l’éruption du volcan Calbuco au Chili (imgur.com)

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