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Vaccin : Malgré les annonces, la bataille est loin d’être gagnée

Vaccin : Malgré les annonces, la bataille est loin d’être gagnée

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Dans l’océan de grisailles auquel la pandémie de Covid-19 nous a habitués depuis de longs mois, les bonnes nouvelles concernant le vaccin tombent l’une après l’autre depuis quelques jours. Pfizer puis Moderna annoncent des vaccins imminents, efficaces à plus de 90 %. Le bout du tunnel serait donc proche ? Peut-on y croire vraiment ? Malgré les espoirs, l’heure doit être à la prudence. Le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé a prévenu lundi qu’un vaccin ne suffira pas à lui tout seul à vaincre la pandémie de Covid-19. La bataille contre le Covid n’est pas proche de son terme. Voici pourquoi.

Un vaccin ne suffira pas

Le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé a prévenu lundi qu’un vaccin ne suffira pas à lui tout seul à vaincre la pandémie de Covid-19. « Un vaccin va compléter les autres outils que nous avons, pas les remplacer », a déclaré Tedros Adhanom Ghebreyesus.

Le directeur général, comme plusieurs de ses adjoints, se sont employés ces derniers jours à tempérer l’optimisme qui s’est fait jour la semaine dernière quand Pfizer et BioNTech puis la firme Moderna ont annoncé que des données préliminaires des essais de leur vaccin en phase III montrait une efficacité supérieure à 90 %. « Cela laissera encore beaucoup de champ au virus pour opérer », a-t-il mis en garde, exhortant à ne pas prématurément mettre fin aux mesures qui permettent de contrôler l’expansion du Covid-19, comme les tests, la quarantaine, le suivi des cas contacts, etc.

Aucun vaccin n’est encore totalement prêt

200 projets de vaccins contre le Covid-19 sont en cours à travers le monde, d’après une note de l’Organisation mondiale de la santé (en anglais) publiée en novembre. Parmi les 48 projets les plus avancés, actuellement testés sur des êtres humains, on retrouve les projets de vaccin de Pfizer-BioNTech et de Moderna, mais aussi celui du laboratoire chinois Sinovac, celui des laboratoires Novavax (Etats-Unis), celui d’AstraZeneca et de l’université d’Oxford (Royaume-Uni) ou encore le candidat vaccin issu de l’alliance franco-britannique entre Sanofi et GSK.

Mais ces projets étant toujours en cours, la prudence est de mise. Les recherches sur les vaccins de Pfizer-BioNTech et de Moderna, qui suscitent une vague d’espoir à travers le monde, n’ont ainsi pas encore été examinées par des pairs ni publiées dans une revue scientifique. Le groupe Pfizer a prévenu qu’il voulait poursuivre l’essai clinique jusqu’à ce que 164 cas positifs au Covid-19 soient identifiés parmi les participants. Ce nombre pourrait être atteint début décembre, selon Bill Gruber, l’un des scientifiques de Pfizer. De son côté, Moderna a également prévenu que ces données provisoires n’avaient été obtenues que sur la base de 95 personnes contaminées.

Il faudra obtenir une autorisation de mise sur le marché

Avant d’être mis sur le marché, les vaccins doivent, comme le reste des médicaments, obtenir une autorisation des autorités sanitaires des pays dans lesquels ils sont déployés. À condition que l’efficacité de son vaccin soit confirmée, le groupe Pfizer a prévu de déposer une demande d’autorisation à l’Agence américaine des médicaments fin novembre. Idem pour Moderna, qui prévoit de demander une autorisation de mise sur le marché « dans les prochaines semaines » aux Etats-Unis.

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En Europe, l’Agence européenne des médicaments (EMA), qui a pour mission d’autoriser et contrôler les médicaments dans l’Union européenne, a mis sur pied une procédure accélérée, qui lui permet d’examiner les données de sécurité et d’efficacité des vaccins au fur et à mesure de leur parution, avant même qu’une demande formelle d’autorisation soit déposée par le fabricant. Moderna est devenu, lundi 16 novembre, le troisième projet de vaccin soumis à cet « examen continu », après ceux d’Oxford-AstraZeneca puis de Pfizer-BioNTech début octobre. L’agence prévoit, « si les données sont solides », de donner son avis favorable à un vaccin « d’ici la fin de l’année », a indiqué samedi 14 novembre son directeur, Guido Rasi, dans un entretien au journal italien Il Sole 24 Ore. Le feu vert final sera ensuite donné par la Commission européenne, afin que les laboratoires puissent commercialiser leur vaccin dans toute l’UE.

Produire un vaccin en quantité suffisante prendra du temps

Une fois ces autorisations obtenues, encore faut-il pouvoir produire suffisamment de doses pour pouvoir distribuer le vaccin à un gigantesque marché. L’alliance Pfizer-BioNTech assure être en mesure de produire 50 millions de doses d’ici la fin de l’année et 1,3 milliard en 2021. L’entreprise de biotechnologie américaine Moderna prévoit, elle, de fournir 500 millions à un milliard de doses en 2021.

Ce résultat, qui n’est pas immédiat, reste néanmoins très rapide comparé aux vaccins classiques. En cause, ces deux candidats vaccins utilisent la technologie de l’ARN messager (ARNm), qui repose sur des gènes synthétiques pouvant être générés et fabriqués en quelques semaines, et produits à grande échelle plus rapidement. La lutte contre le Covid-19 a aussi bénéficié d’un énorme coup d’accélérateur, en particulier grâce à des financements publics.

« La production [du vaccin] a été lancée en parallèle [des essais], sans certitude qu’il serait approuvé par les autorités de santé », explique enfin au Figaro David Lepoittevin, directeur de l’activité vaccins chez Pfizer France. Et les groupes pharmaceutiques ont mobilisé beaucoup plus de sites de production qu’ils ne le font habituellement, détaille Le Monde.

Pour s’assurer la livraison des futures doses, les gouvernements se sont d’ailleurs dépêchés de conclure des accords. Le gouvernement américain a par exemple signé un contrat de 1,95 milliard de dollars avec Pfizer, et de 2,5 milliards de dollars avec Moderna. La Commission européenne a, de son côté, conclu quatre contrats de ce type, avec Pfizer-BioNTech, AstraZenaca, Johnson & Johnson, et Sanofi-GSK. Des accords préliminaires ont aussi été conclus avec CureVac et Moderna.

La conservation d’un vaccin pourrait être compliquée

L’accès au vaccin dépendra aussi de la capacité à transporter et stocker les doses, parfois en les maintenant congelées à de très basses températures. Le vaccin sur lequel travaille Pfizer-BioNTech est fragile : il doit être stocké à -70 °C, alors que « la plupart des congélateurs dans la plupart des hôpitaux du monde sont à -20 °C », relève Trudie Lang, professeur de recherche en santé mondiale à l’université d’Oxford. « L’approvisionnement ne pourra pas se faire dans les pharmacies qui ne sont pas équipées » de congélateurs spécifiques, souligne donc Bruno Pitard, directeur de recherche au CNRS à l’université de Nantes, alors que ceux-ci coûtent, à l’unité, environ 10 000 euros, indique Le Monde. BioNTech a toutefois assuré qu’une fois sorti des congélateurs spéciaux, son vaccin pourrait être conservé pendant cinq jours dans un réfrigérateur classique, entre 2 et 8°C.

Le groupe Pfizer et certains gouvernements préparent un protocole de livraison depuis plusieurs mois à partir des centres de distribution de la société pharmaceutique aux Etats-Unis, en Allemagne ou en Belgique. Mais « rien de tout cela n’a eu lieu dans les pays à revenu faible ou intermédiaire », note aussi auprès de l’AFP Rachel Silverman, chargée de mission au Center for Global Development. Partout, il faudra aussi trouver le personnel suffisant pour injecter les doses de vaccin, alors que les soignants sont déjà très accaparés par l’épidémie.

De son côté, Moderna, dont le vaccin est basé sur la même technologie que celui de Pfizer et BioNTech, assure dans un communiqué que son médicament pourrait être conservé dans un réfrigérateur normal pendant 30 jours, et jusqu’à six mois à -20 °C.

Tout le monde ne pourra pas être vacciné immédiatement

Compte tenu des capacités de production limitées des groupes pharmaceutiques, il ne sera pas possible de vacciner tout le monde immédiatement. « L’objectif est que chaque pays soit en mesure de vacciner 20% de sa population d’ici à la fin 2021 », a recommandé vendredi Katherine O’Brien, la responsable de la division immunisation de l’Organisation mondiale de la santé. Les données épidémiologiques soulignent en effet la nécessité d’une distribution équitable du vaccin pour une efficacité maximale. Une étude réalisée par des chercheurs de l’université Northeastern (Etats-Unis) met en évidence que si 50 pays riches monopolisent les deux premiers milliards de doses du vaccin, les décès du Covid-19 seront réduits d’un tiers dans le monde, contre près du double si le vaccin est distribué en fonction de la population d’un pays plutôt que de sa capacité à le payer. Pour contrer les intérêts égoïstes de chaque pays, l’OMS a donc lancé la plateforme Covax, qui regroupe des gouvernements, des scientifiques, des membres de la société civile et du secteur privé, visant à s’assurer une répartition juste et équitable du vaccin.

Dans chaque pays, qui recevra les premières doses ? « Nous commencerons par les catégories les plus exposées, comme les personnes âgées et les travailleurs de la santé », indique Guido Rasi, directeur de l’Agence européenne des médicaments, qui juge qu’il faut vacciner « plus de la moitié » de la population européenne pour « pouvoir assister à un déclin de la pandémie » sur le territoire européen. Dans l’hypothèse d’une mise sur le marché du vaccin en janvier, ses premiers effets sur la propagation du virus « seront visibles dans cinq à six mois, essentiellement l’été prochain », estime-t-il. Pour vacciner tout le monde, « cela prendra au moins un an » et « si tout se passe bien à la fin de 2021, nous aurons une immunisation suffisante », ajoute Guido Rasi.

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En France, la direction générale de la santé a chargé la Haute autorité de santé de plancher sur les scénarios de vaccination possibles. Cette dernière estime que « les professionnels de santé et du médico-social de première ligne constitueront les cibles prioritaires », tout comme les « personnes âgées de plus de 65 ans et celles présentant une comorbidité ». Mais elle considère que le vaccin ne devra pas être obligatoire, au moins dans un premier temps.

Les réticences de la population au vaccin pourraient freiner la couverture vaccinale

Malgré le caractère meurtrier de l’épidémie, une partie de la population hésite à se faire vacciner, voire y est franchement hostile. En France, seul un peu plus d’un habitant sur deux interrogé se dit prêt à se faire vacciner (60%), selon un sondage Odoxa-Dentsu Consulting pour franceinfo et Le Figaro, contre 74% au niveau mondial.

Pourquoi ? L’arrêt momentané, puis la reprise, de plusieurs essais cliniques sur des candidats vaccins, en raison de problèmes de santé détectés chez certains participants, ont peut-être fait craindre une trop grande précipitation dans la conception du médicament. Les théories complotistes – alléguant par exemple qu’un vaccin contre le Covid servira à implanter une puce électronique – sont également particulièrement présentes sur les réseaux sociaux dans le monde francophone, a relevé First Draft, une ONG spécialisée dans la lutte contre les fausses informations, comme le rapporte Ouest-France.

Or, « un vaccin très efficace, sûr et pouvant être fabriqué n’a de valeur pour la santé publique que s’il parvient effectivement aux personnes qu’il doit protéger et s’il est largement utilisé par les populations », a rappelé Katherine O’Brien, la responsable de la division immunisation de l’OMS. Si une minorité de la population est vaccinée, alors la protection générale ne sera pas suffisante pour que le virus arrête de se répandre.

Des questions sur l’efficacité à long terme du vaccin

Le ou les vaccins pourraient ne pas protéger à vie contre le Covid-19, rendant ainsi les populations vaccinées susceptibles d’être contaminées lors d’une vague suivante. « Est-ce que la durée de l’immunité, c’est seulement six mois, un an, deux ans, plus ? Il n’y a que le recul qui permette de le dire », explique à FranceInfo Jean-Paul Stahl, professeur de médecine infectieuse au CHU de Grenoble.

On ignore aussi, pour l’instant, quelle sera l’efficacité d’un vaccin sur les personnes âgées, ou ses effets sur les personnes déjà infectées par le coronavirus, seules les personnes négatives au Covid-19 ayant par exemple été intégrées aux essais cliniques du vaccin Pfizer-BioNTech.

Sources : AFP, Reuters, FranceInfo

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allotoxconsulting***
3 années

Avec l’expérience des personnes primo infectées et qui récidivent, et avec ce virus mutant régulièrement, on ne sait pas définir la durée et l’intensité de la protection vaccinale. Faudra t’il renouveler plusieurs fois les vaccinations ? Et Changer de vaccin.

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