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Cœur artificiel Carmat

Cette usine française est la première à fabriquer des cœurs artificiels, à la chaîne.

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Cette usine flambant neuf de 1500 m2 située en région parisienne, à Bois-D’arcy, ne fabrique pas des pièces automobiles ou des moteurs d’avions. Non, elle fabrique des cœurs. La première usine de fabrication des cœurs artificiels Carmat vient d’obtenir sa certification et passe au stade industriel. 800 cœurs seront produits ici par an.
 
Pour l’heure, le nouveau site est dédié à l’assemblage de membranes de péricarde bovin (enveloppe entourant le cœur) sur une partie de l’implant appelée à être en contact avec les flux sanguins, une étape fondamentale pour une meilleure biocompatibilité. L’opération est dorénavant exécutée par un bras robotisé pour éviter la moindre déchirure, bulle d’air ou pli sur ce biomatériau fragile et ultra-fin – entre 0,3 et 0,5 millimètre. Des défauts microscopiques mais potentiellement très préjudiciables au bon fonctionnement de la prothèse.
 
 
Auparavant, cette étape se faisait à la main, ce qui « demandait une dextérité incroyable » et une semaine de travail, mais avec « 90% de rebuts » malgré tout, explique à l’AFP le directeur général de Carmat, Stéphane Piat, rencontré sur le site. Aujourd’hui avec la robotisation, « il nous faut 10 minutes et on est proche de 0% de rebut » sur cette étape particulière, se félicite-t-il.
 

Jusqu’à 800 prothèses par an

Il faudra cependant plusieurs jours pour l’assemblage complet du cœur Carmat, qui comprend quelque 400 pièces : biomatériaux et plastiques, mais aussi silicone, titane et composants électroniques.
 
Les autres phases de production sont pour l’heure toujours réalisées sur le site historique de Carmat à Vélizy-Villacoublay, également en banlieue parisienne. Mais elles sont en passe d’être transférées à leur tour à Bois-d’Arcy, qui comprendra au total une cinquantaine de salariés.
« D’ici quelques semaines, on sera capable de produire la prothèse Carmat de A à Z ici pour une capacité maximale potentielle de « 700 à 800″ unités par an » » pronostique M. Piat.
 
La société a produit une petite cinquantaine de prothèses au total pour l’instant, servant à ses tests en interne ainsi qu’à ses essais cliniques.
L’essai clinique « pivot » de Carmat, actuellement en cours en Europe, porte sur environ vingt patients atteints d’insuffisance cardiaque terminale, dont dix au moins ont été implantés à ce jour.
Cette étude doit permettre d’obtenir dès l’an prochain un marquage CE, sésame réglementaire pour démarrer la commercialisation en Europe, selon le calendrier de la société.
 

Tests inspirés de l’aéronautique

Le critère principal de réussite de cette étude est la survie de plus de la moitié des patients à six mois après l’implantation. L’un d’entre eux a par ailleurs subi avec succès une greffe de cœur cet été, après avoir vécu huit mois avec un cœur artificiel.
 
Une première très encourageante pour Carmat. Cependant sa prothèse a toujours vocation à devenir une « thérapie définitive » face à l’insuffisance cardiaque terminale, plutôt que de se limiter à servir de « pont » dans l’attente d’un greffon humain, rappelle M. Piat.
« Il y a plus de 100.000 patients en Europe et aux Etats-Unis (en attente de transplantation cardiaque, NDLR), pour seulement 5.000 donneurs par an dans le monde entier », souligne-t-il.
 
« Seule l’expérience avec les patients nous dira combien de temps le dispositif peut vraiment durer (…). Toutes les parties ont été testées séparément pour durer des années, voire jusqu’à 10 ans, au moyen de tests de résistance inspirés du secteur aéronautique », ajoute-t-il.
 
A Vélizy-Villacoublay, plusieurs cœurs artificiels complets tournent aussi en permanence dans des bains liquides. Le plus ancien d’entre eux bat depuis plus de quatre ans, à 145 battements par minute. Soit environ le double d’une fréquence cardiaque humaine moyenne.
 
Mais même si Carmat affirme que son dispositif gagne en robustesse et en fiabilité, la société a aussi connu un certain nombre de revers et d’imprévus par le passé, qui l’incite à la prudence. « Il faut qu’on soit précautionneux », répète ainsi M. Piat, se gardant par ailleurs d’évoquer le futur prix de la prothèse.
 

Une technique de luxe

Cette technique, indépendamment de la récente actualité de la société, incarne une véritable prouesse technologique et l’aboutissement de vingt années de recherche. Toutefois, elle arrive sans doute un peu tard au regard des promesses de la médecine dite « régénératrice ».
Les thérapies cellulaires en cours de développement démontrent en effet chaque jour un peu plus leur potentiel et avancées. En cardiologie, si elles tiennent leurs promesses, elles vont sérieusement tarir à moyen terme le « réservoir » de patients présentant une insuffisance cardiaque terminale. Mais pour l’heure, le problème ne se pose pas encore en ce sens à Carmat, dont le dispositif révolutionnaire présente l’avantage majeur de pouvoir pallier le manque criant de donneurs pour une transplantation cardiaque dans tous les pays, peut-être dans l’attente de nouveaux traitements.
 
Chaque année, en effet, des milliers de malades décèdent par manque de donneurs d’organes. Actuellement, seuls 350 à 400 patients, en insuffisance cardiaque terminale, peuvent être transplantés en France, tandis que le besoin est trois fois supérieur. Le niveau fixé par Carmat d’implanter chaque année près de 1 000 à 2 000 patients reste donc un objectif ambitieux, si la société parvient à l’atteindre.
Car, bien que le traitement de Carmat ne nécessite pas l’administration à vie de médicaments immunosuppresseurs, le dispositif conserve un niveau de prise en charge élevé, le coût estimé à ce jour de l’ensemble du dispositif étant de l’ordre de 200 à 250 000 euros, auquel il faut ajouter le coût de l’intervention chirurgicale d’implantation. Ce coût rend répréhensible, pour les organismes de santé, la diffusion à large échelle de ce cœur artificiel, et ce d’autant plus s’il ne réduit que faiblement le risque d’une multi-défaillance organique à court terme chez le patient.
 
Source : AFP
Image d’en-tête : Un employé de la société Carmat montre une prothèse de cœur artificiel, le 29 août 2018, à Bois-d’Arcy (AFP-BERTRAND GUAY)
 

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