La méthanisation est souvent présentée comme une panacée énergétique, une réponse aux enjeux climatiques. Pourtant, les affirmations vantant sa neutralité carbone et son caractère écologique occultent de nombreuses réalités. La méthanisation n’est pas un procédé écologique et l’idée qu’elle contribue à la neutralité carbone est erronée, selon Daniel Chateigner, Professeur à l’université de Caen Normandie, physicien cristallographe. Il s’interroge sur la capacité de la méthanisation à être une vraie solution miracle pour l’environnement.
La méthanisation produit principalement du digestat, composé à 90 % de déchets, dont seulement 10 % de gaz, principalement du méthane (CH4) utilisé comme source d’énergie et à 4 % de CO2. Or ce processus n’est pas écologique, contrairement à ce qui est communément promu et l’idée que la méthanisation contribue à la neutralité carbone est erronée. De plus, les fuites de méthane ont été constatées, en moyenne sur toutes les études elles sont de 4,8%, alors qu’une fuite de seulement 1 % suffit à annuler les avantages du bilan carbone, car le méthane a un potentiel de réchauffement global 86 fois plus élevé que celui de CO2 sur 20 ans (durée de vie typique d’un méthaniseur).
Une confusion s’opère entre neutralité carbone et neutralité climatique : la méthanisation, en générant continuellement du méthane et du CO2, ne peut être considérée comme neutre d’un point de vue climatique. De plus, le rythme de la photosynthèse ne permet pas de compenser efficacement la production de gaz, creusant davantage cet écart. Cette erreur d’appellation pèse lourdement sur les générations futures, induisant en erreur sur la véritable empreinte environnementale de cette pratique.
La méthanisation semble donc loin d’être « neutre en carbone ». Elle s’apparente davantage à une création de néo-méthane à partir de cultures dédiées, transformant des ressources potentiellement utiles pour les sols en gaz contribuant à l’effet de serre. En réalité, l’utilisation du biométhane émet deux à six fois plus de CO2 que l’utilisation du gaz naturel.
Quant à l’énergie que la méthanisation peut délivrer, elle se révèle extrêmement faible comparée à d’autres approvisionnements énergétiques connus, avec un Taux de Retour Énergétique probablement inférieur à 1, c’est à dire qu’on récupère moins d’énergie que ce que l’on a dépensé pour la récupérer ! L’énergie solaire, par exemple, offre une capacité bien plus significative, suggérant d’autres voies pour répondre aux besoins énergétiques. L’énergie délivrée par un hectare de panneaux solaires est au moins 100 fois plus grande que celle délivrée par un hectare de cultures.
La notion de fertilisation des sols par le digestat est également remise en question. La méthanisation, en utilisant le carbone de la biomasse pour produire du méthane, prive les sols de cet apport essentiel. Les digestats, loin de rétablir un équilibre naturel, contribuent à la faim en carbone des sols, affaiblissant ainsi leur fertilité. La méthanisation appauvrit les sols.
Certes, la méthanisation offre une couverture des sols avec des cultures intermédiaires, mais cette pratique s’écarte des principes des cultures intermédiaires pièges à nitrates. Les cultures destinées à la méthanisation ne contribuent pas à l’enrichissement des sols et affectent la biodiversité, impactant ainsi la fertilité des sols.
L’idée que le digestat puisse être un bon substitut aux engrais chimiques est également remise en cause. Le digestat liquide, composé en grande partie d’ions ammoniums, ne représente pas une alternative plus assimilable par les plantes, contrairement à ce qui est parfois avancé.
Au cœur de ces débats, la question des subventions allouées à la méthanisation se pose aussi. Bien que les agriculteurs puissent bénéficier de ces aides, elles semblent davantage favoriser les systèmes agricoles intensifs et les grands acteurs de l’énergie, loin des praticiens vertueux de l’agriculture.
La méthanisation doit donc faire partie du mix énergétique, elle doit jouer son rôle, rien que son rôle. Les concurrences sont déjà multiples sur les surfaces agricoles à cause de son développement sans garde fous. Elle doit rester à une échelle locale et modeste. Si nous disposons de vrais déchets (Le déchet vrai est celui qui n’aurait pas une meilleure utilité par ailleurs), nous pouvons les utiliser localement pour produire de l’énergie et non pas distribuer celle-ci sur des réseaux qui fuient eux aussi. Mais si l’objectif est purement énergétique, comme dans sa course effrénée actuelle, nous mettrons en péril nos terres, nos ressources en eau, la santé environnementale dont nous dépendons tous.
Malgré les aspirations à réduire les combustibles fossiles, la méthanisation, en réalité, ne semble pas offrir une alternative écologique convaincante. Sa capacité énergétique limitée, couplée à ses impacts néfastes sur les sols et l’environnement, soulève des préoccupations quant à son rôle dans une transition énergétique réellement durable pour la France.
Daniel CHATEIGNER, Professeur à l’université de Caen Normandie, physicien cristallographe et chercheur au Laboratoire de Cristallographie et Sciences des Matériaux (CRISMAT) du CNRS et coordonnateur du Collectif Scientifique National pour une Méthanisation raisonnable (CSNM).
Encore et toujours beaucoup de fausses vérités sur les fuites, le PRG du méthane, le retour au sol de la matière carbonée, la qualités des sols recevant du digestat etc. Rien de bien scientifique venant d’un scientifique… On est proche de la croyance. Dire que « l’utilisation du biométhane émet deux à six fois plus de CO2 que l’utilisation du gaz naturel. » c’est grave.
Mais bon continuons avec les énergies fossiles, tout va bien !
Merci pour votre commentaire Mr ? Etonnant de critiquer un scientifique lorsqu’on se cache derrière un pseudo ! Lisez et ouvrez les yeux
Je suis tombé sur votre article par hasard, je préfère ceux qui citent leurs sources, comme tout scientifique qui se respecte. Mon nom n’apportera rien au sujet.
Merci Daniel Chateigner pour cet éclairage systémique (à la fois agronomique, énergétique et sociétale). Il est important d’avoir des acteurs qui, hors des lobbyes, se penchent sur les avantages ET inconvénients de cette technique. Je découvre votre site internet, bien documenté, avec intérêt. Bravo.
NB : agronome de formation, je vis à la campagne, entouré d’agriculture