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Tara Coral : 18 mois d’exploration pour révéler les secrets des récifs qui résistent au changement climatique

Dix ans après le départ de Tara Pacific et dans un contexte d’accroissement du blanchissement corallien, la goélette scientifique Tara part ce 14 décembre 2025 de son port d’attache, Lorient, pour sa prochaine expédition : Tara Coral. Pendant 18 mois, Tara naviguera dans le Triangle de Corail, véritable Amazonie de l’océan, pour comprendre pourquoi et comment certains coraux résistent au réchauffement climatique, et éclairer les futures stratégies de conservation.

L’expédition Tara Pacific (2016-2018) a permis d’étudier la biodiversité des récifs et leur réponse au changement climatique et aux pressions humaines locales. L’expédition Tara Coral (2026-2028) prolonge cette démarche en collaboration avec les acteurs locaux, dans une zone qui n’avait pas été étudiée, le Triangle de Corail. Ce que les scientifiques découvriront pourrait avoir un impact fondamental sur les stratégies de conservation des récifs dans le monde et dans cette « Amazonie » de biodiversité », explique Romain Troublé, Directeur général de la Fondation Tara Océan.

Des coraux résistants au réchauffement climatique  

Le corail, unité fonctionnelle des récifs, est à la fois un animal dont le fonctionnement réside dans la symbiose entre sa partie animale et les zooxanthelles, petites algues situées sur ses tentacules lui permettant de recevoir jusqu’à 90 % de ses besoins nutritifs. De la même façon que nous vivons avec notre microbiote intestinal, le corail vit en collaboration au sein de l’holobionte corallien constitué des zooxanthelles, des bactéries, des virus et des champignons. Lors d’un épisode de blanchissement, la hausse de la température de l’océan entraîne une rupture de la symbiose avec les zooxanthelles.

© Yun Faillard

“Contrairement aux précédentes études menées à l’échelle mondiale ou à l’échelle des bassins, Tara Coral se concentre sur la seule grande région récifale où la couverture corallienne est restée
relativement stable malgré les fortes tendances au réchauffement de l’océan. Cela constitue un laboratoire naturel extraordinaire permettant d’identifier les mécanismes de résilience.” précise
Paola Furla, directrice scientifique, université Côte d’Azur.

Poisson corail  © Maeva Bardy

Bien qu’ils ne couvrent que 0,2 % de la surface de l’océan, les récifs coralliens abritent 25 % de la biodiversité marine connue. Véritable oasis de l’océan, ils offrent à la fois refuge, nourriture et habitat, et rendent de nombreux services écosystémiques faisant vivre plus de 500 millions de personnes, surtout dans l’océan Pacifique, avec une valeur estimée à plus de 2 700 milliards $/an (Costanza, R. et al., 2014).
Plus de 40 % des espèces de coraux sont menacées d’extinction, par des menaces à la fois globales (hausse de la température, acidification de l’Océan, augmentation du niveau de la mer) mais aussi locales (pratiques de pêche destructrices et surpêche, développement côtier intensif, pollution terrestre). Contrairement à d’autres régions du monde où le réchauffement climatique a entraîné un blanchissement généralisé des coraux, les récifs du Triangle de Corail ont conservé leur couverture corallienne. Cette région du Pacifique Ouest qui s’étend sur 6 pays à travers 5,7 millions de km² est un véritable hotspot de biodiversité. Le Triangle de Corail concentre 1⁄3 des récifs coralliens du monde et une très forte diversité avec 3⁄4 des espèces coralliennes connues (environ 600 espèces différentes). Zone prioritaire de conservation aux données scientifiques fragmentées, le Triangle de Corail représente un enjeu stratégique dans la conservation corallienne face à ce défi à la fois environnemental, social et économique.

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Plongée et prélèvements avec Sylvain Agostini, Pete West, Tara Océan

Pour comprendre comment fonctionne cette thermotolérance et identifier les coraux de demain, la Fondation Tara Océan et plus de 40 partenaires scientifiques ont conçu l’expédition transdisciplinaire Tara Coral.

Tara Coral : une expédition scientifique majeure  

L’heure n’est plus uniquement à documenter les tendances et le déclin des récifs coralliens. L’expédition Tara Coral veut percer le secret des coraux résistants au réchauffement climatique dans le Triangle de Corail. Leur exposition passée aux stress thermiques, l’effet des vagues internes, leur génétique, leurs symbiotes, leur microbiome, leur diversité et leur façon de s’organiser ensemble : autant de pistes que l’expédition explorera pour comprendre ce qui protège les récifs”, explique Serge Planes, directeur scientifique, directeur de recherche CNRS.

Marseille mission UNOC – © Valentin Lauféron – Fondation Tara Océan

L’expédition Tara Coral testera différentes hypothèses pour expliquer le phénomène de résistance :

  • une plus grande diversité d’organismes au sein des écosystèmes
  • la présence d’espèces plus résistantes
  • une sélection d’individus préadaptés au changement climatique en raison de leur environnement local et de leur passé climatique
  • une remontée d’eaux froides (micro-upwelling)

Une approche globale sur l’écosystème

Durant 18 mois consécutifs, la goélette Tara sillonnera le Triangle de Corail sur un parcours de 30 000 miles nautiques, soit plus de 50 000 km, et traversera 6 pays pour un total de 26 escales. Tara restera 35 jours sur chacun des 10 sites d’échantillonnage prévus et les équipes scientifiques adopteront une approche globale sur l’écosystème et se concentreront sur 4 genres de coraux : les acropores, les millépores, les porites et les pocillopora.

Une approche globale est essentielle afin de comprendre quelles espèces existent, comment elles s’adaptent et interagissent entre elles et avec leur environnement. Pour cela, la science s’organisera en quatre parties avec un protocole de terrain très diversifié.

Échantillonnage sur le terrain :
1) Échantillonnage de l’eau pour les mesures physico-chimiques ;
2) Collecte de microplastiques ;
3) Collecte de sédiments ;
4) Échantillonnage de l’eau pour l’analyse de la biodiversité planctonique ;
5) Photogrammétrie ;
6) Filtration de l’eau pour l’analyse de l’ADN environnemental ;
7) Collecte CORE-DIV ;
8) Échantillonnage ciblé des colonies de coraux ;
9) Collecte d’eau de mer autour des coraux ;
10) Forage des colonies ;
11) Collecte d’aérosols ;
12) Coral Bleaching Automated Stress System (CBASS)

Description du contexte environnemental :
1. Échantillonnage de l’ADN environnemental pour décrire la biodiversité globale du récif à l’aide d’un robot échantillonneur, et une photogrammétrie pour décrire la structure en 3D du récif.
2. Caractérisation de la complexité de l’holobionte corallien
Échantillonnage large des espèces de coraux (fragments, algues, sédiments, eaux, aérosols, éponges) afin de collecter différents types de données pour comprendre l’holobionte corallien et notamment les symbioses.
3. Caractérisation de la résistance au stress de chaleur : À l’aide d’un bassin CBASS (Coral Bleaching Automated Stress System) installé à bord de Tara, des fragments de corail de chaque colonie sont placés dans des aquariums indépendants et exposés à quatre niveaux de température différents (sans stress thermique, stress thermique faible, modéré, et fort) afin de tester la résistance des coraux face au stress thermique pour détecter des biomarqueurs de coraux plus résistants au blanchissement.
4. Géochimie pour le paléoclimat et la paléogénomique : Carottage de corail afin de mesurer les paramètres de croissance du corail, reconstruire le climat et analyser la réponse génomique.
L’expédition Tara Coral est unique en raison de la combinaison de sa portée scientifique, de la standardisation méthodologique, de son orientation géographique et de l’intégration entre les
disciplines et les partenaires. C’est désormais le moment d’agir pour comprendre, préserver et renforcer la résilience des récifs coralliens”, explique aussi Christian Voolstra, directeur scientifique, professeur à l’université Constance.

Une expédition transdisciplinaire conçue en collaboration locale

Une des particularités de l’expédition Tara Coral réside dans son approche scientifique globale qui rassemble différentes expertises scientifiques : plongeur, océanographe, biologiste marin, spécialiste en eDNA, bioinformaticien, microbiologiste, spécialiste en photogrammétrie, spécialiste en microplastique, paléoclimatologue, biochimiste et bien d’autres encore.
Tara Coral est le fruit d’une collaboration étroite à échelle locale dans laquelle 67 scientifiques sont impliqués, 22 femmes et 45 hommes, provenant de plus de 40 partenaires scientifiques, dont 11 issus du Triangle de Corail.

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Résultats scientifiques attendus et perspectives

Au terme de cette expédition, il est attendu d’améliorer la compréhension de la thermotolérance des coraux et de la résilience des récifs dans la zone du Triangle de Corail. Cela permettra de développer des protocoles standardisés, en produisant une science ouverte avec une base de données en accès libre, de transférer les expertises au local (scientifiques, gestionnaires, politiques, éducation) mais aussi de sensibiliser et de mobiliser les acteurs clés.
À plus long terme, l’ambition est de renforcer les capacités de protection et de restauration des récifs dans les zones clés pour la biodiversité, en identifiant les populations de coraux naturellement résistantes et en analysant les mécanismes, caractéristiques et conditions environnementales à l’origine de leur robustesse.

Une aventure pour la science et la société 

Tara Pacific Récifs et poissons – © Johathan Lancelot – Fondation Tara Océan

Renforcer les politiques de conservation à l’échelle internationale

Une place importante sera accordée aux enjeux de conservation en travaillant aux côtés des gouvernements et des acteurs locaux pour identifier et protéger prioritairement ces récifs les plus résistants au réchauffement climatique. La Fondation Tara Océan organisera ainsi plusieurs ateliers science-to-policy à l’occasion des escales de Tara Coral, et participera activement aux sommets internationaux œuvrant pour la conservation des récifs coralliens.

● Partager, un enjeu sociétal

Chaque expédition de la goélette Tara constitue des opportunités d’interpeller la société, de créer des outils innovants pour toucher de nouveaux publics, de partager l’émotion de la découverte. La goélette est un vecteur formidable pour raconter cette histoire. Le partage « Science-Société » s’articulera autour de deux outils de sensibilisation clés – une exposition itinérante dédiée à l’expédition Tara Coral et un outil de médiation scientifique axé sur l’importance mondiale des écosystèmes coralliens – qui seront développés en collaboration avec des acteurs locaux pour en assurer la pertinence culturelle, l’inclusivité et une utilisation pérenne.

● Naviguer pour créer

Parce que l’art fait partie de l’ADN de la Fondation Tara Océan, des artistes embarqueront pour des résidences aux côtés des scientifiques. Une dizaine de créateurs et créatrices de diverses disciplines, issu·es d’un appel à candidatures et de partenariats avec des institutions d’excellence comme l’IRCAM ou la Villa Kujoyama, se succéderont à bord tout au long de la mission. Un temps d’immersion et d’expérimentation unique, durant lequel les artistes imagineront de nouvelles relations à l’Océan et au corail en collaboration avec des artistes locaux.

Photo d’en-tête : Tara Pacific – Macrophotographie d’une Zoanthide Dor © BioOuest Studios – Fondation Tara Océan

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