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Europe

Assemblée instituante européenne : cap sur le soixantième anniversaire du Traité de Rome

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Annoncer le lancement du processus d’Assemblée instituante au Sommet des chefs d’Etat à Rome, en mars 2017 ; achever les panels régionaux pour mai 2018 ; mettre sur la table du nouveau Parlement et de la nouvelle Commission les propositions issues de ce processus citoyen. Voilà le calendrier idéal pour une initiative innovante de démarche citoyenne.
 
Que de choses se sont passées depuis le mois de juin ! Dans ma dernière lettre périodique, il y a six mois, je vous avais raconté l’écho rencontré par l’idée d’Assemblée instituante européenne, après le Brexit. Et je concluais : « il ne suffit pas aujourd’hui de dire ce qu’il faut faire, il faut aussi dire comment le faire et avec qui. C’était le pragmatisme visionnaire de Jean Monnet. C’est ce dont il faut faire preuve aujourd’hui. »
 
Les événements de ces derniers mois ont confirmé ce diagnostic et cette urgence : Brexit, Trump, montée partout en Europe des partis populistes et du sentiment euro-sceptique, voire carrément anti-européen, les institutions européennes prennent conscience que le logiciel qui les a fait fonctionner les a égarées. Le réveil n’en est que plus douloureux. Mais si les colloques et les analyses savantes se multiplient, on ne peut pas dire que les solutions se bousculent au portillon.
 
En octobre, une grande conférence « Reflecting on Europe » a réuni à Bruxelles le gratin des communicateurs. Ils en sont encore tous à aller expliquer au bon peuple tout ce que l’Europe leur apporte. Ça ne marche plus du tout !
 
En novembre s’est tenue la conférence annuelle de prospective, organisée par ESPAS (European strategy and policy analysis system), qui réunit toutes les institutions européennes. Trois leçons s’en dégagent :
1. il faut frapper un grand coup, la politique des petits pas ne peut plus marcher ;
2. il faut repartir des citoyens
3. il faut repartir du niveau local
J’ai pu y présenter brièvement l’idée de processus instituant européen : c’était la seule proposition concrète mise sur la table, et la seule qui réponde à ces trois leçons.
 
Tout ceci explique que la proposition d’Assemblée instituante, lancée en avril comme une bouteille à la mer, trouve un tel écho. Je vous ai envoyé avec ma lettre de juin le scénario du processus. Vous en trouverez ici le résumé.
 
Notre première idée a été d’en faire une Initiative citoyenne européenne (ICE), telle que prévu par le traité de Lisbonne. Beaucoup d’entre vous aviez accepté de faire partie du groupe initiateur de l’Initiative. Un grand merci. Nos amis experts de l’Europe nous ont dissuadé de la lancer : c’est une procédure lourde et, la proposition d’Assemblée instituante ne relevant pas des compétences de la Commission, c’eût été un coup d’épée dans l’eau.
Nous avons adopté, avec Patrick Lusson et Armel Prieur qui portent l’initiative avec moi, une démarche plus directe : faire connaître la proposition et commencer à réunir les multiples conditions de sa réussite. Qui sont les protagonistes essentiels ? D’un côté les régions, de l’autre les institutions européennes, en particulier le Conseil européen, la Commission, le Parlement et le Comité des régions, qui est à Bruxelles la voix officielle des collectivités territoriales.
 
Quel calendrier ? il est tout trouvé. Le processus doit durer deux ans : la première année pour les panels de citoyens régionaux, la seconde pour leur réunion à Bruxelles. Il doit donc être encadré par trois dates hautement symboliques :
– le 25 mars 2017 : soixantième anniversaire du traité de Rome, date de naissance officielle de l’Union ;
– le 9 mai 2018 : soixante dixième anniversaire du Congrès de la Haye, par où tout a commencé ;
– fin mai 2019 : élections au Parlement européen puis renouvellement de la Commission.
 
Annoncer le lancement du processus au Sommet des chefs d’Etat à Rome, en mars 2017 ; achever les panels régionaux pour mai 2018 ; mettre sur la table du nouveau Parlement et de la nouvelle Commission les propositions issues de ce processus citoyen. Voilà le calendrier idéal.
 
Du côté des régions, la Présidente de la Région Bourgogne Franche Comté, Marie Guite Dufay, a, dès le mois de juillet 2016, décidé de s’engager dans le processus et entraîne maintenant dans son sillage les régions Occitanie, Centre Val de Loire et Bretagne. Elle a eu une magnifique intuition : la construction de l’Europe doit constituer le nouvel horizon des jumelages, si nombreux, entre régions européennes et en particulier entre Régions françaises et Länder allemands. Dès novembre, le land de Rhénanie Palatinat, jumelé de longue date avec la région Bourgogne, s’est engagé dans cette voie.
 
A Bruxelles, tout le monde attend une initiative forte franco-allemande pour relancer l’Europe. Elle ne pourra pas venir à court terme des gouvernements. Tant mieux ! Une initiative conjointe des régions françaises et des länder allemands, quelle meilleure manière d’affirmer le rôle des régions dans la construction du nouveau projet européen ? La proposition est sur la table.
 
J’ai pu présenter le 26 septembre dernier l’idée d’Assemblée instituante aux cadres du Comité des régions européennes. Ci-dessous l’exposé fait à cette occasion. Le Comité est maintenant conscient que la crise européenne le pousse à assumer une responsabilité historique, loin de la fonction purement consultative qui a été la sienne à sa création. Objectif : une interpellation du Conseil européen pour le sommet du 25 mars, appelant à un processus citoyen de refondation de l’Europe.
Le Secrétariat du Conseil européen prête une attention bienveillante à notre initiative. J’y ai exposé la proposition dès le mois de juillet dernier (voir la note lien ci-dessous). L’étape maintenant engagée est de soumettre la proposition à des « sherpas » préparant le Sommet de Rome pour leurs gouvernements respectifs (voir lettre lien ci-dessous). Et, bien sûr, la position du gouvernement français sera déterminante.
 
Le Secrétaire général de l’Elysée, Jean Pierre Jouyet, a déjà manifesté sa sympathie pour notre démarche. Reste à traduire cette sympathie en acte concret, en proposant aux autres Etats membres d’inscrire la démarche citoyenne à l’ordre du jour du Sommet. Nous avons jusqu’à la fin janvier pour y parvenir.
Nous avons aussi multiplié les échanges avec des députés européens. Cette démarche citoyenne intéresse et interpelle.
A vrai dire, ses conclusions nourriront les prochaines élections européennes plutôt que le Parlement actuel. Autrefois, les élus étaient très réservés à l’égard de la démocratie délibérative, y voyant une sorte de concurrence déloyale : n’était-ce pas eux qui représentaient le peuple ? Ces réserves ne sont plus de saison : la crise de la démocratie représentative est telle que toute tentative de vivifier la démocratie est bonne à prendre.
 
Et la Commission direz vous ? Contrairement au Conseil européen, nous n’avons pas besoin d’un engagement de la Commission de prêter attention aux propositions citoyennes : c’est la prochaine Commission qui devra se prononcer et d’ici là il faudra que le processus soit suffisamment fort pour qu’il devienne incontournable d’en prendre les conclusions en considération.
 
La mobilisation des moyens humains et financiers de la Commission est par contre essentielle. La démocratie délibérative, comme on appelle les panels de citoyens, suppose que ces derniers disposent du meilleur de l’information et de l’expertise. Chaque panel devra se tenir dans sa langue maternelle. Le dialogue entre les panels et l’Assemblée européenne nécessiteront des moyens de traduction et d’interprétariat dont seules disposent les institutions européennes. N’est-il pas juste qu’une partie de ces moyens soit mise à la disposition des citoyens, étant financée par leurs impôts ?
La Commission devra aussi prendre en charge une partie du coût des panels régionaux et l’Assemblée européenne. Le Président Jean Claude Juncker, pour sortir l’Europe du marasme, a lancé un grand plan d’investissement. Bravo ! Mais quel est aujourd’hui l’investissement prioritaire, sinon l’investissement humain, le processus citoyen capable d’apporter à l’Europe le souffle et l’enthousiasme dont elle manque totalement aujourd’hui ? Car sans lui, le reste sera à peu près inutile. La proposition est sur la table. Nous saurons dans les prochains mois l’écho qu’elle aura su trouver dans les cœurs des dirigeants européens.
 
Comme vous le voyez, bien du pain sur la planche, bien des incertitudes. Mais si l’on regarde en arrière, quand la bouteille a été jetée à la mer sans grand espoir d’arriver un jour sur une plage, et que l’on constate le chemin parcouru en quelques mois, on ne peut s’empêcher de penser avec Victor Hugo que « rien n’arrête une idée dont l’heure est venue ».
Nous avons besoin de vous tous pour faire avancer la proposition, y compris en Grande Bretagne car bien des amis anglais aimeraient débattre de l’Europe dont ils rêvent.
Joyeux Noël à tous et longue vie à l’Europe !
 
 

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