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Vaccin Covid-19 : Les pays riches ont réservé la moitié des futures doses

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Un groupe de pays riches représentant 13% de la population mondiale a pré-acheté la moitié des futures doses de vaccins contre le Covid-19 (1), selon un communiqué publié ce jeudi 17 septembre par l’ONG Oxfam. Pourtant, tout semble indiquer que le coronavirus qui fait trembler le monde pourrait s’imposer comme un virus endémique, présent pour longtemps, avec des pics de virulence saisonniers. Et dans cette hypothèse, les experts médicaux craignent qu’il n’y ait pas assez de vaccins pour tout le monde.

Sur 5.303 milliards de doses, 2.728 seront accaparées par les pays de l’Union européenne, le Royaume-Uni, les États-Unis, l’Australie, le Japon, la Suisse, Israël, Hong Kong et Macao.

La logique de ces pays est de s’approvisionner par précaution auprès de multiples fabricants concurrents, dans l’espoir qu’au moins l’un de leurs vaccins se révèle efficace, mais le rapport souligne avec urgence la difficulté qu’aura une partie de la population mondiale à trouver des vaccins dans la période initiale, alors qu’un dispositif de mutualisation internationale appelé Covax, soutenu par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), est boycotté par Washington et manque de financements.

Les Etats-Unis dès le mois de mai, puis le Royaume-Uni, l’Union européenne, le Japon et d’autres pays ont signé de multiples contrats garantissant en avance la production et la livraison de doses si les essais cliniques en cours étaient concluants. Les Américains se feront même livrer des doses dès octobre, afin d’être prêts à les distribuer dans les 24 heures suivant une éventuelle autorisation sanitaire.

Le groupe AstraZeneca, partenaire de l’université d’Oxford, a signé le plus de ces contrats de façon publique, mais Sanofi, Pfizer, Johnson & Johnson, la biotech américaine Moderna, le laboratoire chinois Sinovac et l’institut russe Gamaleïa ont aussi pré-vendu des centaines de millions de doses dans le monde, parfois sous la forme de partenariats avec des fabricants locaux (1).

Au-delà des cinq principaux candidats vaccins, les contrats de vaccins signalés révèlent également de fortes inégalités entre les pays. Selon Oxfam, des contrats ont déjà été signés auprès de cinq de ces fabricants en phase 3 d’essais cliniques pour 5,3 milliards de doses, dont 51% pour des pays développés dont ceux ci-dessus ainsi que l’Australie, Hong Kong, la Suisse et Israël (les chiffres n’incluent pas les contrats pour les vaccins n’étant pas encore en phase 3). Le gouvernement britannique a réussi à conclure des accords sur plusieurs vaccins candidats de premier plan, équivalant à cinq doses par habitant. En revanche, l’analyse d’Oxfam révèle que le Bangladesh n’a jusqu’à présent obtenu qu’une dose pour neuf personnes. Le reste a été promis à des pays en développement dont l’Inde (où se trouve le fabricant géant Serum Institute of India), le Bangladesh, la Chine, le Brésil, l’Indonésie et le Mexique.

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Les Etats-Unis de Donald Trump (330 millions d’habitants) ont réservé un total de 800 millions de doses auprès de six fabricants, et l’Union européenne (450 millions d’habitants) a au moins acheté 1,5 milliard de doses, selon un décompte de l’AFP.

« L’accès vital aux vaccins ne doit pas dépendre d’où on habite, ni de l’argent qu’on a« , a regretté Robert Silverman, d’Oxfam.

Le rapport d’Oxfam

51 % des doses promises des principaux candidats vaccins COVID-19 seraient déjà accaparés par les pays riches, a donc averti ce jour Oxfam, alors que les ministres de la santé et des finances des pays du G20 se réunissent aujourd’hui même pour discuter de la pandémie mondiale. 

Oxfam a analysé les accords que les sociétés pharmaceutiques et les producteurs de vaccins ont déjà conclus avec des nations du monde entier pour les cinq principaux candidats vaccins actuellement en phase 3 des essais cliniques, sur la base des données recueillies par Airfinity (2). L’agence internationale a également averti que ces mêmes entreprises n’ont tout simplement pas la capacité de fabriquer suffisamment de vaccins pour tous ceux qui en ont besoin. Même dans le cas extrêmement improbable où les cinq vaccins réussiraient, près des deux tiers (61 %) de la population mondiale n’auront pas de vaccin avant au moins 2022. Il est beaucoup plus probable que certaines de ces expériences échoueront, ce qui augmentera encore le nombre de personnes n’ayant pas accès à un vaccin.

Les calculs mettent en évidence un système défaillant qui protège les monopoles et les profits des sociétés pharmaceutiques et favorise les nations riches, tout en restreignant artificiellement la production et en laissant la majorité de la population mondiale attendre plus longtemps que nécessaire pour un vaccin.

L’un des principaux candidats vaccins, développé par Moderna, a reçu 2,48 milliards de dollars de l’argent des contribuables engagés. Malgré cela, la société a déclaré qu’elle avait l’intention de faire des bénéfices avec son vaccin et a vendu toutes les options de son approvisionnement aux pays riches – à des prix allant de 12 à 16 dollars par dose aux États-Unis à environ 35 dollars par dose dans d’autres pays – mettant ainsi la protection hors de portée de nombreuses personnes vivant dans la pauvreté. Bien qu’elle fasse de réels efforts pour augmenter l’offre, selon les rapports, la société n’a la capacité de produire que pour 475 millions de personnes, soit 6 % de la population mondiale.

Oxfam et d’autres organisations dans le monde entier demandent un vaccin populaire, disponible pour tous, gratuit et distribué équitablement en fonction des besoins. Cela ne sera possible que si les sociétés pharmaceutiques permettent la production de vaccins aussi largement que possible en partageant librement leurs connaissances sans brevet, au lieu de protéger leurs monopoles et de vendre au plus offrant.

Les dernières Perspectives de l’économie mondiale du FMI, publiées en juin 2020, prévoyaient que les pertes cumulées de l’économie mondiale pour 2020 et 2021 s’élèveraient à 12 000 milliards de dollars. En utilisant les données fournies par l’accélérateur d’accès aux outils COVID-19 (ACT), Oxfam a calculé que le coût estimé de la recherche, de la fabrication, de l’achat et de la distribution d’un vaccin à tous les habitants de la planète pourrait s’élever à 70,6 milliards de dollars. Par conséquent, le coût de la fourniture d’un vaccin pour tous les habitants de la Terre équivaut à 0,59 % du coût de COVID-19 pour l’économie mondiale.

Chema Vera, directeur exécutif intérimaire d’Oxfam International, a déclaré « Les gouvernements prolongeront cette crise dans toute sa tragédie humaine et ses dommages économiques s’ils permettent aux sociétés pharmaceutiques de protéger leurs monopoles et leurs profits. Aucune entreprise ne pourra jamais répondre à elle seule aux besoins du monde en matière de vaccin COVID-19. C’est pourquoi nous leur demandons de partager leurs connaissances sans brevet et de se mettre derrière un bond en avant de la production pour assurer la sécurité de tous. Nous avons besoin d’un vaccin pour le peuple, et non d’un vaccin à but lucratif« .

Une course au vaccin pleine de risques

La course à un vaccin est pleine de risques, car personne ne sait quels projets réussiront. Cela oblige les entreprises à passer à l’échelle pour produire des millions de doses de vaccin qui pourraient finir par ne plus avoir de valeur.

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Le laboratoire Pfizer, autre concurrent dans la course au vaccin, qui teste plusieurs candidats vaccins, a identifié des usines aux États-Unis et en Belgique et sécurise sa chaîne d’approvisionnement, avec l’objectif d’avoir 10 à 20 millions de doses disponibles d’ici l’automne et des centaines de millions de doses l’année prochaine.

« Nous pensons complètement en dehors de ce qui est normal« , a déclaré Kathrin Jansen, responsable de la recherche et du développement des vaccins chez Pfizer. « Nous proposons des approches uniques, nous entamons des négociations de contrat avec les fournisseurs et nous n’avons pas vu un seul point de données cliniques. C’est du jamais vu. »

Le vaccin de Pfizer, en cours de développement avec la société allemande BioNTech, contient du matériel génétique encapsulé dans une gouttelette de graisse composée de quatre lipides. Avant même de savoir quel vaccin allait être mis au point, Pfizer devait obtenir une quantité suffisante de chacun de ces lipides. Les dirigeants de Pfizer ont besoin d’enzymes pour fabriquer le matériel génétique et ont donc dû trouver des fournisseurs pour s’assurer un approvisionnement suffisant capable de répondre à la demande prévue.

Un accaparement du vaccin

Les experts de santé publique tremblent. Ils voient se former sous leurs yeux une lutte sans merci d’accaparement du vaccin contre la Covid-19.

Les Etats-Unis de Donald Trump (330 millions d’habitants) ont réservé un total de 800 millions de doses auprès de six fabricants, et l’Union européenne (450 millions d’habitants) a au moins acheté 1,5 milliard de doses, selon un décompte de l’AFP.

Des experts en santé publique ont proposé plusieurs modes de répartition mondiale : l’OMS voudrait donner à chaque pays de quoi vacciner 20% de sa population ; un groupe d’éthiciens a suggéré de donner la priorité aux pays où le virus tue le plus. Mais les Etats-Unis ont annoncé il y a déjà plusieurs semaines qu’ils entendaient offrir d’abord le vaccin à tous leurs habitants, et pas seulement aux personnes vulnérables et âgées.

Les scientifiques qui suivent ces dossiers sont catastrophés. Car en jouant le chacun pour soi, les dirigeants qui se livrent à ces jeux ne comprennent pas que le virus se propage au mépris de toutes les lignes géographiques et frontières fabriquées par les hommes. Un pays qui voudrait conserver pour lui tout seul ses vaccins devrait barricader ses frontières et s’interdire tout échange avec l’extérieur. Autant dire un scénario impossible.

« Le modèle des pays qui ne pensent qu’à eux-mêmes ne va pas fonctionner. Même si vous vivez dans un endroit parfaitement exempt de toute infection, vos efforts pour lutter contre le virus seront vains si vous ne fermez pas toutes vos frontières et tous vos échanges commerciaux », se désole au Washington Post Seth Berkley, responsable de Gavi, un partenariat public-privé qui aide à fournir des vaccins aux pays en développement. « C’est un problème mondial qui nécessite une solution mondiale ».

Ce type de « nationalisme vaccinal » a été dénoncé par de multiples responsables de santé publique, et par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, dans un discours mercredi matin devant le Parlement européen : « Pour moi, c’est limpide, nous devons créer une union européenne de la santé plus forte. Le moment est venu de le faire. »

(1) 9 vaccins COVID-19 sont actuellement en phase 3 d’essais cliniques, dont 5 ont fait l’objet d’un accord d’approvisionnement public. Ces vaccins sont développés par AstraZeneca, Gamaleya/Sputnik, Moderna, Pfizer et Sinovac. Les données sur l’approvisionnement et la production de vaccins ont été fournies par Airfinity, la société d’analyse des données et des sciences.

(2) Le calcul pour le Royaume-Uni est basé sur les données d’Airfinity et inclut tous les contrats de vaccins publiés par le Royaume-Uni. Le calcul pour le Bangladesh est basé sur la part du pays dans les doses actuellement disponibles dans le cadre de la garantie de marché Covax, et serait le même pour les 92 pays éligibles à la garantie de marché si le vaccin était distribué de manière uniforme.

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bertrand_lecocq@yahoo.fr
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« Un pays qui voudrait conserver pour lui tout seul ses vaccins devrait barricader ses frontières et s’interdire tout échange avec l’extérieur. Autant dire un scénario impossible » « Le modèle des pays qui ne pensent qu’à eux-mêmes ne va pas fonctionner. Même si vous vivez dans un endroit parfaitement exempt de toute infection, vos efforts pour lutter contre le virus seront vains si vous ne fermez pas toutes vos frontières et tous vos échanges commerciaux ». Il y a tout de même un truc qui m’échappe là dedans. Soit une population vaccinée est protégée, et donc le virus ne circule plus, dans cette… Lire la suite »

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