Selon un nouveau rapport sur les tendances climatiques, le monde pourrait dépasser le seuil clé de 1,5 degré Celsius de réchauffement de la planète au cours des cinq prochaines années. Il s’agit du dernier signe en date indiquant que nous nous dirigeons à toute vitesse vers un avenir sombre, contre lequel les climatologues nous mettent en garde depuis des années si nous ne changeons pas de cap.
Le rapport publié jeudi par l’Organisation météorologique mondiale et le Met Office britannique indique que la probabilité d’atteindre un réchauffement de 1,5 degré Celsius d’ici à 2025 a « à peu près doublé » par rapport aux prévisions de l’année dernière et s’élève désormais à 40 %. Il existe également une probabilité de 90 % qu’au moins une année entre aujourd’hui et 2025 soit la plus chaude jamais enregistrée.
Le seuil de 1,5 degré Celsius est l’objectif le plus ambitieux fixé par l’Accord de Paris. D’éminents chercheurs en climatologie ont montré que le dépassement de cet objectif entraînerait une catastrophe climatique, en provoquant la disparition massive d’espèces, en rendant la plupart des îles de faible altitude pratiquement inhabitables et en aggravant les phénomènes météorologiques extrêmes.
Le franchissement du seuil de 1,5 degré Celsius pour une seule année n’entraînerait pas immédiatement toutes ces conséquences. Les températures mondiales diffèrent en effet d’une année à l’autre en raison du bruit dans le système climatique. Par exemple, des phénomènes climatiques naturels comme El Niño peuvent faire grimper la température moyenne annuelle. Mais le franchissement d’un seuil critique, même pour une seule année, reste un avertissement dont il faut tenir compte.
Ce sont plus que de simples statistiques
« Ce sont plus que de simples statistiques », a déclaré le secrétaire général de l’OMM, Petteri Taalas, dans un communiqué. Nous pourrions encore atteindre l’objectif de limiter la hausse de la température moyenne. Mais le rapport intitulé « Global Annual to Decadal Climate Update » (mise à jour annuelle à décennale du climat mondial), est un signal particulièrement alarmant : dans l’ensemble, le réchauffement s’accélère, de sorte que les chances d’y parvenir s’amenuisent. Il ne nous reste qu’une seule option : agir vite.
« Dans un monde qui s’est réchauffé de 1,5 degré Celsius, nous nous attendons à ce que la moitié des années soient plus chaudes que 1,5 degré Celsius, et l’autre moitié plus froides », a déclaré Joeri Rogelj, directeur de recherche au Grantham Institute de l’Imperial College de Londres, dans un communiqué, tout en notant que même une seule année au-dessus du seuil reste une « très mauvaise nouvelle ».
Des changements sans précédents nécessaires pour une planète vivable
Ce rapport alarmant intervient alors que les militants du climat célèbrent quelques rares victoires. Dans une décision sans précédent, un tribunal néerlandais a ordonné au géant de l’énergie Shell de réduire sa pollution par le carbone de 45 % d’ici à 2030. Et lors de leurs assemblées annuelles d’actionnaires, les investisseurs mécontents d’Exxon et de Chevron ont réprimandé les deux entreprises pour leur incapacité à mettre en œuvre des plans climatiques sérieux. Ces deux évolutions sont positives, mais le nouveau rapport nous rappelle qu’elles ne sont pas non plus suffisantes. D’autant que d’autres géants de l’industrie fossile comme Total continuent leur business as usual, encouragés par la recherche de dividendes plutôt que par la prise ne compte de stratégies climatiques efficaces.
Comme l’ont conclu les climatologues de l’ONU dans un rapport novateur de 2018 sur l’objectif de 1,5 degré Celsius, des « changements sans précédent dans tous les aspects de la société » seront nécessaires pour garantir une planète vivable. Cela signifie qu’il faudra réduire la pollution par les gaz à effet de serre à un rythme sans précédent, mettre un terme à l’expansion des combustibles fossiles (comme l’a demandé l’Agence internationale de l’énergie au début du mois) et mettre fin aux projets émetteurs tout en supprimant progressivement les industries polluantes.
« Le rapport nous dit une fois de plus que les mesures prises jusqu’à présent pour lutter contre le changement climatique sont totalement insuffisantes et que les émissions doivent être réduites à zéro de toute urgence pour mettre fin au réchauffement de la planète », a conclu M. Rogelj à propos du rapport.
« Il ne nous reste qu’une seule option : agir vite. »
Les scientifiques nous alertant non pas depuis des années mais des décennies pour ne pas dire un siècle, avec ce même conseil, il est aujourd’hui sans doute trop tard… d’autant que même parmi les plus conscients rares sont ceux prêts à abandonner ce qui leur permet de vivre comme ils l’entendent.