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Les pays méditerranéens créent un centre régional pour lutter contre la crise climatique

Alors que la Méditerranée se réchauffe à un rythme parmi les plus rapides au monde (1), les Parties à la Convention de Barcelone ont franchi une étape majeure en rendant opérationnel un Centre d’activités régional sur les changements climatiques (CC/RAC), basé à Ankara. Cette nouvelle structure, conçue pour coordonner et renforcer l’action climatique dans l’ensemble du bassin, suscite l’espoir d’une réponse collective plus efficace face à une région déjà en dépassement du seuil de 1,5 °C. Saluant cette décision, OceanCare exhorte les États méditerranéens à élaborer sans délai un plan régional ambitieux d’atténuation, alors que le budget carbone du bassin pourrait être épuisé dès 2035 si les émissions restent au niveau actuel.

Lors de la deuxième journée de la 24e Conférence des Parties (COP24) à la Convention de Barcelone, en vertu de laquelle le Plan d’action pour la Méditerranée du Programme des Nations Unies pour l’environnement est mis en œuvre par les États riverains, un Centre d’activités régional sur les changements climatiques (CC/RAC) a été approuvé et rendu opérationnel. Le CC/RAC sera basé à Ankara, en Turquie. Se félicitant pour cette décision des Parties, l’organisation internationale de conservation marine OceanCare a appelé à l’élaboration urgente d’un ambitieux Plan régional d’atténuation des changements climatiques pour la région méditerranéenne.

La région méditerranéenne est reconnue comme un point chaud climatique :

  • La deuxième région du monde où le réchauffement est le plus rapide. Seule l’Arctique se réchauffe plus vite.
  • Dépassant déjà le réchauffement de 1,5 degré par rapport aux niveaux préindustriels.
  • La température de surface de la mer Méditerranée a augmenté de 1,5 °C au cours des 40 dernières années, menaçant la stabilité climatique et le bien-être de toute vie dans la région.
  • Le budget carbone restant pour maintenir le réchauffement climatique dans la région méditerranéenne en dessous de 2 degrés sera épuisé d’ici à 2035 si les émissions restent au niveau actuel.
  • Le réchauffement climatique engendre des souffrances humaines, met en péril la sécurité alimentaire et la disponibilité de l’eau pour l’agriculture et d’autres usages, et provoque une dégradation de l’environnement, notamment une hausse des températures, une perte de biodiversité et une vulnérabilité côtière accrue, ainsi qu’une augmentation de la fréquence des événements extrêmes tels que les vagues de chaleur, la sécheresse ou les inondations meurtrières dans le bassin méditerranéen.

Un rapport de l’IRD (Institut de Recherche pour le Développement) soulignait déjà dès 2016 que la Méditerranée agit comme un véritable « laboratoire » du changement climatique, tant les pressions y sont amplifiées. En raison de son histoire géologique et de son climat semi-aride, ce bassin ne représente que 1,5 % de la surface terrestre mais concentre la plupart des risques auxquels l’humanité est confrontée. Sur l’ensemble de son pourtour, s’additionnent risques naturels, perturbations du cycle de l’eau, transformations des sols et des couvertures végétales, érosion de la biodiversité et défis politiques majeurs : inégalités dans l’accès aux ressources, disparités économiques grandissantes entre les rives nord et sud, flux migratoires intenses et urbanisation littorale galopante.

La singularité méditerranéenne se traduit par un réchauffement déjà supérieur à +1,5 °C, alors que la moyenne mondiale n’a augmenté que d’environ +0,9 °C depuis le début de l’ère industrielle. Cette intensification locale s’explique par la latitude du bassin, son caractère semi-fermé et l’encerclement par des massifs montagneux, combinés à de fortes pressions humaines sur les zones côtières. Les climatologues observent ainsi une élévation marquée de la température de surface de la mer, une baisse des précipitations, une diminution des apports fluviaux et une hausse de l’évaporation. Ensemble, ces phénomènes conduisent à un assèchement général de la région et à une multiplication des vagues de chaleur, tant en fréquence qu’en durée.

D’ici la fin du siècle, les modèles climatiques prévoient un réchauffement des eaux jusqu’aux couches profondes de la Méditerranée, accompagné d’évolutions incertaines de la salinité, susceptibles d’altérer les échanges d’eau avec l’océan Atlantique. Le rôle du bassin méditerranéen dans le transfert de chaleur et de sel pourrait ainsi être profondément modifié. Rappelons que ce 22 juin 2025, la température de la Méditerranée occidentale avait augmenté de 5°C par rapport à l’année dernière.

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Les zones en rouge foncé sont celles où la température de l’eau a augmenté de 5 degrés. • © Copernicus

CC/RAC : Une coordination régionale des mesures climat 

La création du CC/RAC constitue une réponse institutionnelle directe à l’urgence climatique qui pèse sur le bassin méditerranéen. Décidé lors de la 23ᵉ réunion des Parties à la Convention de Barcelone, le CC/RAC est officiellement intégré au dispositif du Plan d’Action pour la Méditerranée (PAM / UNEP-MAP) en tant que nouveau Centre d’activités régional.
Hébergé en Turquie, via l’institution hôte identifiée comme l’« AIDAM » affiliée à l’Université d’Ankara, ce centre a vocation à devenir le pivot de la coordination régionale des mesures climat — sans imposer de surcoût au Fonds de confiance méditerranéen, l’État hôte prenant en charge les coûts d’établissement.

Au-delà de son rôle symbolique, le CC/RAC est appelé à, dans les mois qui viennent, définir un mandat clair — via une cartographie du système UNEP/MAP et une évaluation de ses composantes — puis, une fois validé, à décliner des actions concrètes : suivi et évaluation des impacts du changement climatique en Méditerranée, appui technique aux pays riverains pour concevoir et mettre en oeuvre des plans d’atténuation et d’adaptation, et consolidation des synergies entre les différents centres du PAM (pollution marine, zones côtières, biodiversité, etc.).

Ainsi, l’opérationnalisation du CC/RAC — saluée par des ONG comme OceanCare — marque une étape stratégique, car elle dote la Méditerranée d’un cadre institutionnel spécifiquement dédié au climat, susceptible de traduire les engagements globaux en politiques régionales concrètes.

Mandat du CC/RAC : un cadre régional dédié à l’action climatique
Le Centre d’activités régional sur les changements climatiques (CC/RAC), nouvellement créé dans le cadre de la Convention de Barcelone et du Plan d’action pour la Méditerranée (PAM/PNUE), a pour mandat principal de renforcer la coordination régionale face à l’urgence climatique. Sa mission prioritaire consiste à appuyer les Parties contractantes dans l’élaboration de politiques cohérentes et fondées sur la science, en assurant un suivi régulier des impacts climatiques, une évaluation des vulnérabilités et une mise en cohérence des réponses nationales avec les engagements de l’Accord de Paris. Le CC/RAC doit ainsi devenir la référence régionale pour la planification climatique en Méditerranée.

Missions opérationnelles : soutien technique, renforcement des capacités et intégration des politiques
Conçu comme un centre d’expertise au service des États méditerranéens, le CC/RAC est chargé de fournir un appui technique direct aux gouvernements, d’accompagner le développement de stratégies d’atténuation et d’adaptation, et de faciliter la mise en œuvre de mesures ambitieuses de réduction des émissions. Ses missions incluent également le renforcement des capacités institutionnelles, la formation, la promotion de bonnes pratiques et l’harmonisation des approches méthodologiques dans l’ensemble du bassin. Le Centre aura également un rôle clé dans l’amélioration de la collecte et du partage de données climatiques afin de soutenir une prise de décision éclairée.

Une valeur ajoutée stratégique pour une Méditerranée plus résiliente
En devenant un pôle régional dédié exclusivement au climat, le CC/RAC vient combler un manque structurel au sein du système PAM. Il permettra de créer davantage de synergies entre les centres existants — pollution, biodiversité, gestion côtière — et de positionner le climat au cœur des politiques de protection du milieu marin. Son implantation à Ankara, soutenue par l’État hôte, garantit une stabilité institutionnelle et financière qui doit faciliter la mise en place d’un programme de travail pluriannuel. Pour OceanCare comme pour de nombreux experts, ce nouveau centre constitue une plateforme essentielle pour permettre aux États méditerranéens de dépasser les approches fragmentées et de construire une réponse collective à la hauteur de l’urgence climatique.

Conseil et soutien aux pays méditerranéens

Les États riverains de la Méditerranée ont adopté le mandat du nouveau Centre d’activités régional sur les changements climatiques (CC/RAC) dans le cadre du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) et du Plan d’action pour les États membres (PAM ), ce qui constitue une étape stratégique pour renforcer le système PNUE/PAM et améliorer sa réponse aux changements climatiques. OceanCare a réagi à la création du CC/RAC en soulignant l’importance fondamentale de l’inclusion, dans son mandat, du conseil et du soutien aux pays en matière d’atténuation.

« Si les États de la région méditerranéenne sont véritablement déterminés à respecter l’Accord de Paris et à contenir le réchauffement climatique en dessous de 2 °C, ils n’ont d’autre choix que de mettre en œuvre d’urgence des mesures efficaces pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. L’occasion d’atteindre l’objectif plus ambitieux de 1,5 degré, qui aurait permis de réduire considérablement les effets dévastateurs et coûteux, est déjà manquée. Nous exhortons les États de la zone de distribution à assumer leurs responsabilités, à s’engager par le biais du nouveau Centre d’activités sur les changements climatiques de la Convention de Barcelone et à élaborer un plan d’atténuation ambitieux pour l’ensemble de la région », déclare Nicolas Entrup, directeur des relations internationales d’OceanCare.

Pour Carlos Bravo, spécialiste des politiques océaniques chez OceanCare, « La Méditerranée subit actuellement, avec une intensité croissante, le scénario climatique négatif que le monde s’efforce d’éviter en raison de ses conséquences désastreuses. Face à l’échec de la communauté internationale au Brésil, lors de la COP30 de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), à s’entendre sur les mesures nécessaires, il est extrêmement urgent que les pays méditerranéens adoptent également des mesures plus ambitieuses au niveau régional, dans le cadre de la Convention de Barcelone ».

La Convention de Barcelone offre une plateforme essentielle pour la coopération et le dialogue régionaux, permettant aux pays d’élaborer des plans d’action collectifs qui concilient protection de l’environnement, équité et stabilité économique.

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En amont de la COP24, OceanCare a commandé au Centre basque pour le changement climatique (BC3) une étude scientifique visant à calculer le budget carbone restant pour la région méditerranéenne, afin de respecter l’Accord de Paris. Cette étude calculait l’effort annuel moyen de réduction des émissions nécessaires dans la région et analysait les différentes manières de répartir cet effort entre les parties contractantes selon divers principes et critères. Le rapport montre que le budget carbone de la Méditerranée serait dépassé dès 2035 si les émissions restent au niveau actuel et que, pour respecter les objectifs de l’Accord de Paris, il faudrait réduire les émissions de 6 % par an en moyenne entre 2030 et 2050.

« Les autorités nationales des pays méditerranéens doivent comprendre qu’elles ne pourront pas protéger leurs populations si elles ne réduisent pas les émissions comme indiqué dans notre rapport. L’intérêt national rejoint les intérêts supranationaux, car le climat ne connaît ni frontières ni délais. Je crois que la crise climatique persiste et s’aggrave depuis des décennies parce que les représentants des pays restent focalisés sur leurs intérêts nationaux sans comprendre que la sécurité de tous est indissociable de celle de chacun. Nous connaissons les solutions depuis des décennies. Il est temps de les mettre en œuvre », déclare la Docteure María Victoria Román, auteure principale du rapport BC3 (2), qui a présenté les conclusions de ce dernier lors d’un événement parallèle à la COP24, auquel ont également participé des représentants du gouvernement français, du CC/RAC, du Réseau méditerranéen d’experts sur le climat et le changement environnemental (MedECC) et d’OceanCare.

Principales conclusions du rapport BC3 :

  • Tous les pays doivent accélérer la réduction de leurs émissions dès maintenant, car le budget carbone restant de la Région sera épuisé d’ici à 2035 si les niveaux de 2023 se maintiennent. Les émissions moyennes doivent diminuer de 6 % par an entre 2030 et 2050.
  • Selon l’une des règles de répartition, plusieurs pays ont déjà dépassé leur juste part et devraient cesser leurs émissions dès 2031.
  • En vertu de la règle par habitant, la région méditerranéenne bénéficie du budget carbone le plus important, ce qui nécessite une réduction annuelle de 5 % entre 2030 et 2050, les émissions moyennes par habitant devant passer de 4,24 tCO₂ aujourd’hui à 2,14 tCO₂ d’ici à 2050.
  • Tout retard dans l’action rendra les mesures d’atténuation beaucoup plus brutales et coûteuses.

Le rapport souligne également les implications pour l’extraction des combustibles fossiles, notant qu’une part importante de ces combustibles doit rester inexploitée pour atteindre les objectifs climatiques.

Pour aller plus loin :

(Source : CP OceanCare, 03/12/2025)

(1) « Réchauffement de la Méditerranée : des effets en cascade » France Culture, 16/02/2024
(1) Rapport BC3 : L’étude part des niveaux de 2030 compatibles avec les CDN de chaque pays et applique, de 2031 à 2100, un scénario global (GCAM NDC-LTT) compatible avec un RCB global de 900 GtCO₂ (2020-2100) – soit un réchauffement d’environ 1,75 °C (50 %) ou 2 °C (83 %) d’ici 2100 – afin d’établir des trajectoires nationales selon chaque règle de répartition. La méthodologie harmonise les données historiques et les projections démographiques et de PIB et présente les résultats par des trajectoires progressives pour éviter des variations irréalistes.
Cette étude s’inscrit dans le cadre des conclusions de la COP28 de la CCNUCC, qui préconisait de tripler la capacité de production d’énergies renouvelables et de doubler l’efficacité énergétique d’ici à 2030, tout en atteignant la neutralité carbone d’ici à 2050. Rapport préparé par María Victoria Román, Emmie Vicedo-Choques, Arkaitz Usubiaga-Liaño, Dirk Van de Ven, Mikel González-Eguino, Jon Sampedro et Iñaki Arto (BC3), pour OceanCare. Octobre 2025.

Photo d’en-tête : Pyrenees-Orientales, 14/08/2023 – Opération des pompiers du Sdis 66 sur le feu de foret en cours sur les communes de Argeles-sur-Mer et St-Andre. Photo AFP

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