Le programme de cette 3ème édition explore la façon dont les thématiques du Palais inspirent des artistes de la scène contemporaine. Histoire coloniale, migrations, rapport au monde vivant, transmission et mémoire sont autant de sujets évoqués à travers les cinq spectacles et concerts qui composent cette nouvelle édition.
La saison s’ouvre avec deux spectacles liés la Méditerranée. Le Dernier Voyage (AQUARIUS) du Collectif F71 revient sur l’odyssée inouïe du navire qui, en juin 2018 et avec de nombreux migrants à bord, erra de côte en côte dans l’attente d’un port de débarquement.
Pour ses premières parisiennes, le spectacle Au milieu des terres du GdRA propose quant à lui un voyage onirique dans lequel artistes et scientifiques aux origines multiples traduisent une Méditerranée plurielle et en deviennent les différentes voix. Entre musique, danse, théâtre et arts visuels, la mer au milieu des terres prend vie.
En novembre, place à la musique avec une soirée de concerts autour de l’univers coloré de la chanteuse Thérèse. D’origine sino-vietnamienne et laotienne, l’artiste militante œuvre à démonter les clichés dont sont victimes les personnes asiatiques par le biais de sa musique pop, rap et électro.
En première partie, Loman, artiste électro-pop franco-japonais, présentera en exclusivité l’un des singles de son nouvel EP.
Le dj set techno groovy de SUSHE viendra clôturer cette soirée avec un mix entre Orient et Occident aux teintes mélodiques envoutantes.
Le Palais accueille ensuite Marine Bachelot Nguyen avec Nos corps empoisonnés, récit bouleversant de la vie hors normes de Tran To Nga. Vietnamienne à la vie d’aventurière, celle-ci continue encore à plus de 80 ans son combat juridique en France et au Vietnam pour la reconnaissance de la responsabilité des multinationales de la chimie dans l’épandage d’agent orange dans son pays.
Pour clore VIVANTS !, le chorégraphe Filipe Lourenço présentera sa toute nouvelle création Cheb dans laquelle musiciens et danseurs font voyager le spectateur entre musiques traditionnelles et actuelles tout en l’invitant à se laisser envahir par la danse.
Programme du Théâtre
LE DERNIER VOYAGE (AQUARIUS) | Collectif F71 À 20h – Durée : 1h30 de spectacle et 30 min de bord plateau.
Entre le 8 et le 17 juin 2018, avec 629 migrants à bord, l’Aquarius, navire de sauvetage en Méditerranée, erre de côte en côte dans l’attente d’un port où débarquer. Après le refus de l’Italie et le silence français, les autorités maritimes compétentes lui donnent enfin l’autorisation d’accoster à Valence en Espagne, à plus de 1500 km de sa position. Durant 10 jours, à la fois isolée et dans l’œil du cyclone médiatique, une communauté humaine, dont le destin est aux mains des décideurs politiques, se forme. Pourquoi empêcher de sauver des vies ? En quoi cette histoire incarne-t-elle le symptôme d’une crise européenne ?
Le Collectif F71
Depuis 2004, le collectif F71 réunit Stéphanie Farison, Emmanuelle Lafon, Sara Louis, Lucie Nicolas et Lucie Valon. Ce qui caractérise leur travail, c’est l’interrogation du réel, de l’histoire et des luttes. Pour construire leur écriture scénique, ils s’appuient sur un corpus diversifié constitué d’archives, de textes littéraires, d’articles, de dessins et recueil de paroles. Après une série de spectacles s’appuyant sur l’œuvre et la figure du philosophe Michel Foucault, ils créent en 2018 Noire, roman graphique théâtral, et le concert dessiné SongBook. S’en suivent Parler la poudre (2022), Move on over or we’ll move on over you (2023) et le karaoké dessiné Hep! Hep! Hep! (2023.
AU MILIEU DES TERRES I LE GDRA – Christophe Rulhes & Julien Cassier À 20h – Durée : 1h30 et 30 minutes de bord plateau.
La Méditerranée parle. En arabe, italien, occitan, français, en fière non-humaine, elle vit ses paysages et ses eaux. Elle délivre une parole sur le littoral, la techno croate, les oliviers, l’acidification et les plastiques. Elle prend les corps de Mounâ, Enza, Chloé, Mondher, Cristòl… Elle rayonne, danse, chante, joue, raconte. Elle vient de Carthage mais court à Lausanne, a grandi à Tunis puis à Marseille. Depuis les plages de Torchiarolo, elle voit l’Albanie et l’île de Corfou où elle a toujours habité. Ayant bien failli mourir en lac étouffé, elle fut Mésogée, au milieu des terres, il y a 245 millions d’années. Elle regarde ces humains qui la nomment et qu’elle a vu naître en ses rives. Elle accompagnera leur crépuscule. « Voudraient-ils faire de moi un cimetière ? ». En sa chair géologique, elle restera le théâtre de soulèvements, de morcellements et de métamorphoses, encore pour 20 millions d’années.
Le GdRA invite des artistes et des scientifiques à partager une expérience de création. Ensemble ils traduisent la Méditerranée sur scène, en deviennent les parlantes et parlants. Conçu par le collectif Scale, un dispositif de néons robots à leds personnifie la mer, varie les éclats, abyssaux, spectraux, clairs, puis le noir profond et la lueur soudaine d’un blanc vif. Avec la chorégraphie de Julien Cassier, les acrobates danseuses Mounâ Nemri et Chloé Beillevaire déchirent l’espace d’une vague ou d’une ondulation. Enza Pagliara prête sa voix et sa langue des Pouilles italiennes à la mer. Depuis les plages occitanes, Christophe Rulhes exprime des paysages sonores marins. Mondher Kilani, anthropologue suisse de Tunis, donne sa biographie de voyage à la Mer. Avec Catherine Jeandel océanologue et Christophe Rulhes, ils sont les auteurs du texte prononcé par Al bahr al-abiadh almutawassatt : « la mer blanche du milieu ».
NOS CORPS EMPOISONNÉS I Compagnie Lumière d’Août – Marine Bachelot Nguyen À 20h – Durée : 1h20 de spectacle et 30 min de bord plateau.
Nos corps empoisonnés nous plonge dans l’histoire de Tran To Nga, vietnamienne engagée toute sa vie dans de multiples combats, anti-impérialistes, féministes, écologiques. Jeune résistante dans le maquis pendant la guerre du Viêtnam, elle est exposée comme tant d’autres aux épandages américains de l’agent orange. Aujourd’hui depuis la France, elle mène un procès historique contre des firmes agro-chimiques états-uniennes, pour dénoncer les ravages de ce poison dans les organismes et la terre.
Porté par la comédienne Angélica-Kiyomi Tisseyre Sékiné, ce récit théâtral entrelace texte, performance, vidéo, images d’archives se mêlant avec la vie de Tran To Nga. Il raconte la vitalité de corps blessés et contaminés par les tragédies de l’histoire, toujours en lutte et en résilience.
Marine Bachelot-Nguyen
Autrice, dramaturge et metteuse en scène, Marine Bachelot Nguyen se forme en Lettres et Arts du spectacle, et fonde avec cinq autres auteurs la compagnie Lumière d’août. Dans son travail elle explore l’alliance de la fiction et du document, les croisements du corps et du politique, les questions féministes et postcoloniales.
Elle a écrit et créé Courtes pièces politiques (2006), Artemisia vulgaris (festival Mettre en scène 2008), Histoires de femmes et de lessives (2009), « La femme ce continent noir… » (2010), À la racine (festival Mettre en scène 2011), La place du chien (2014). Sa pièce Les ombres et les lèvres (Viêtnam LGBT) a été soutenue par le programme Hors-les-Murs de l’Institut Français et par une bourse du CNL. Elle réside en 2018 à Villa Saïgon (Viêtnam) et à Grenoble (Troisième Bureau/MC2) pour son projet Circulations Capitales, créé en septembre 2019 au Théâtre du Canal (Redon). En 2020 et 2021, elle crée sa pièce Akila, le tissu d’Antigone à la Paillette (festival TNB) et au THV (GO festival, CDN Le Quai). Ses textes ont été également mis en scène par David Gauchard, Charlie Windelschmidt, Anne Bisang, Alexandre Koutchevsky, Hélène Soulié, etc. Ses pièces sont publiées chez Lansman Éditeur et Théâtrales. Elle est aussi membre fondatrice des collectifs HF Bretagne et Décoloniser les Arts.
Programme Musique
THÉRÈSE & GUESTS Vendredi 10 novembre À 20h
Thérèse est une artiste militante pluridisciplinaire d’origine sino-vietnamienne et laotienne qui, par le biais de sa musique, lutte contre le racisme anti-asiatique. Libre, engagée, métissée et exigeante, sa musique nous invite, à l’heure de la cancel culture, à assumer nos différences, voire nos incohérences, pour mieux vivre celles des autres. Après son premier EP émancipateur Rêvalité dans lequel elle évoque son passé et son identité multiple, Thérèse questionne dans metaREverse nos rapports au monde numérique et virtuel. Elle nous transporte au cœur de notre urbanité contemporaine à coup de flow rap, mélodies hyperpop et électronique expérimentale.
Programme Danse
CHEB | Compagnie Filipe Lourenço / Plan-K V À 20h – Durée : 1h de spectacle et 30 min de bord plateau
Avec CHEB, Filipe Lourenço poursuit sa recherche sur les notions de mémoire et de communauté, évoquées dans Pulse(s) et Gouâl. Nous y retrouvons certes son sens de la géométrie, de la répétition, et l’énergie concentrée sur le bassin, mais ici, c’est la musique qui préexiste avant toute intention gestuelle. L’univers sonore de CHEB fait voyager le spectateur entre les musiques traditionnelles du Maghreb et celles d’aujourd’hui. La pièce interroge ainsi le rôle que joue la musique pour l’individu, les communautés ou la société mais aussi les liens entre musiques patrimoniales et musiques actuelles. Les danseurs Kerem Gelebek et Youness Aboulakoul s’inspirent et rentrent en communication avec la musique interprétée par le compositeur François Caffenne et le musicien électronique et percussionniste Nuri. Sur scène, les quatre hommes génèrent et transportent le spectateur dans une matière sonore très forte pour qu’émerge le corps, comme une évidence.
Evénement du 29 septembre au 9 décembre 2023 au Palais de la Porte Dorée – Musée national de l’Histoire de l’immigration – 293, avenue Daumesnil – 75012 Paris