Déjà inscrit ou abonné ?
Je me connecte

rejoignez gratuitement le cercle des lecteurs de UP’

Il vous reste 2 articles gratuits

abonnez-vous pour profiter de UP’ sans limite

Ces temps crépusculaires ou le passé décomposé

Ces temps crépusculaires ou le passé décomposé, de Mutien-Omer Houziaux – Éditions Les 3 colonnes, 18 décembre 2024 – 290 pages

Dans cet ouvrage, Mutien-Omer Houziaux entreprend une critique sans complaisance de notre époque. Plus qu’un essai de critique sociale, l’ouvrage se présente comme une réflexion sur la dérive de nos sociétés occidentales, prises entre la tentation de l’idéologie et l’érosion de leurs fondements culturels. Loin des discours consensuels, il s’emploie à démonter les illusions d’une société qui, tout en se proclamant progressiste et universaliste, se perd dans ses propres contradictions. 

Dès les premières pages, l’auteur rappelle combien la langue est le miroir d’une civilisation. L’apparition de termes comme homoparentalité ou cisgenre, tout comme la redéfinition de notions anciennes telles que famille ou parent, témoignent selon lui d’une recomposition profonde des structures symboliques. Or ce changement lexical n’est pas neutre : il traduit la volonté d’imposer une nouvelle vision du monde où l’identité se fragmente à l’infini et où les repères traditionnels se dissolvent.

Ce constat rejoint l’idée d’une « société liquide » — une formule empruntée au philosophe et sociologue Zygmunt Bauman — où les valeurs stables et les institutions solides laissent place à une instabilité permanente. Le vivre-ensemble, autrefois synonyme de sagesse et d’équilibre, n’est plus qu’un cache-misère, un mot d’ordre répété pour masquer la désagrégation du lien social.

Le cœur de la critique de Houziaux se concentre sur le wokisme, qu’il décrit comme une idéologie revendicative et envahissante. En prétendant libérer et inclure, ce courant finit par instaurer de nouveaux dogmes contraignants : toute réserve devient suspecte, toute nuance est vite disqualifiée comme « phobie ». Mais l’auteur observe aussi l’émergence d’une contre-réaction : l’ironie, la satire et parfois le simple bon sens redonnent souffle à une société lassée de se voir culpabilisée. L’exemple de l’« homme enceint » illustre bien ce retour du rire comme arme critique.

Sur le plan philosophique, l’ouvrage met en évidence une tension majeure : celle entre la liberté individuelle et l’idéologie collective. Si l’égalitarisme et l’inclusivisme ont pu être porteurs de progrès, Houziaux alerte sur les dérives d’un excès de normativité. Derrière la promesse d’un monde diversitaire et universaliste se cache le risque d’un conformisme idéologique qui nie la complexité humaine. À force de vouloir tout déconstruire, jusqu’à l’innocence enfantine et la langue de Molière, c’est l’héritage culturel et spirituel de l’Occident qui se trouve menacé.

Pourquoi ne pas profiter d’une lecture illimitée de UP’ ? Abonnez-vous à partir de 1.90 € par semaine.

Politiquement, cette réflexion s’inscrit dans une crise plus large des valeurs occidentales : l’individualisme exacerbé, la perte de transcendance, l’affaiblissement de la mémoire historique. Houziaux invite à se demander si une démocratie peut perdurer lorsqu’elle se prive de repères communs et lorsqu’elle confond l’ouverture avec la dissolution.

Mais l’ouvrage n’est pas qu’un réquisitoire. Il est aussi une source d’énergie critique. « Roboratif », il redonne au lecteur la force de penser par lui-même, de résister à l’air du temps et de rire de ses travers. L’humour, parfois corrosif, devient alors une arme de liberté, rappelant que la pensée ne peut s’épanouir que dans la confrontation et la distance.

En définitive, l’ouvrage est bien plus qu’un constat pessimiste : c’est une incitation à reprendre en main notre destin collectif, à préserver ce qui mérite de l’être et à reconstruire, au-delà des slogans, une véritable culture du sens.

La lecture de Ces temps crépusculaires ou le passé décomposé nous a frappés par sa liberté de ton et par la vigueur de sa critique. À l’heure où beaucoup d’essais contemporains se contentent d’accompagner les modes intellectuelles, Mutien-Omer Houziaux ose prendre le contre-pied. Son propos n’est jamais tiède : il tranche, dérange, secoue. On peut être en désaccord avec certaines de ses affirmations, mais c’est précisément cette confrontation qui nourrit la réflexion.

Ce livre oblige à se poser des questions fondamentales : que voulons-nous transmettre ? Sur quoi voulons-nous bâtir l’avenir ? Sommes-nous capables de penser le progrès sans sombrer dans l’idéologie ?

Pour notre part, à la rédaction, nous avons trouvé dans ces pages non pas une invitation au repli, mais un appel à la lucidité et à la responsabilité. C’est un texte qui donne à réfléchir, mais aussi à sourire — et ce sourire, parfois moqueur, est sans doute la meilleure preuve que l’intelligence peut encore résister aux slogans.

Mutien‑Omer Houziaux, né à Rochefort (Belgique) en 1935, est agrégé en Philosophie et Lettres (Université de Liège) et a mené une carrière universitaire prolifique à l’Université de Liège, exerçant comme chercheur, maître de conférences et chef de travaux dans les facultés de sciences appliquées et de médecine
Sa curiosité intellectuelle l’a amené à intervenir dans des domaines variés : dialectologie wallonne, musicologie (notamment autour du chant latin gallican), sociologie et technologies de l’enseignement assisté par ordinateur. Il est reconnu pour ses travaux stimulants dans l’enseignement assisté par ordinateur, notamment l’ouvrage Vers l’enseignement assisté par ordinateur, ainsi que pour ses contributions sur la traduction automatique.
Plus récemment, il a publié plusieurs essais engagés, parmi lesquels : À contretemps. Regards politiquement…, où il réfléchit aux effets du politiquement correct sur la société contemporaine et l’expression publique ; et Les œuvres musicales en latin chanté. À l’écoute des sonorités gallicanes (L’Harmattan, 2006), étude musicologique qui complète ses recherches sur l’authenticité et la tradition musicale latine.

S’abonner
Notifier de

0 Commentaires
Les plus anciens
Les plus récents Le plus de votes
Inline Feedbacks
View all comments
Article précédent

De quelques certitudes dans un monde imprévisible

Prochain article

Être, faire et avoir. Penser la sobriété matérielle par la justice sociale

Derniers articles de sciences humaines et sociales

REJOIGNEZ

LE CERCLE DE CEUX QUI VEULENT COMPRENDRE NOTRE EPOQUE DE TRANSITION, REGARDER LE MONDE AVEC LES YEUX OUVERTS. ET AGIR.
logo-UP-menu150

Déjà inscrit ? Je me connecte

Inscrivez-vous et lisez trois articles gratuitement. Recevez aussi notre newsletter pour être informé des dernières infos publiées.

→ Inscrivez-vous gratuitement pour poursuivre votre lecture.

REJOIGNEZ

LE CERCLE DE CEUX QUI VEULENT COMPRENDRE NOTRE EPOQUE DE TRANSITION, REGARDER LE MONDE AVEC LES YEUX OUVERTS ET AGIR

Vous avez bénéficié de 3 articles gratuits pour découvrir UP’.

Profitez d'un accès illimité à nos contenus !

A partir de 1.70 € par semaine seulement.

Profitez d'un accès illimité à nos contenus !

A partir de $1.99 par semaine seulement.