Déjà inscrit ou abonné ?
Je me connecte

rejoignez gratuitement le cercle des lecteurs de UP’

Il vous reste 2 articles gratuits

abonnez-vous pour profiter de UP’ sans limite

Jean-Charles de Castelbajac. L’imagination au pouvoir

Jean-Charles de Castelbajac

Pour leur prochain temps fort, dès cette fin d’année, Les Abattoirs de Toulouse consacrent une grande exposition à Jean-Charles de Castelbajac, créateur visionnaire à la croisée de la mode et de l’art, créateur de mode et artiste protéiforme. Présentant près de 300 œuvres, vêtements, objets de design, dessins, photographies, ‘’L’Imagination au pouvoir’’ est une invitation à découvrir les multiples facettes d’un artiste à l’inventivité sans limite. L’exposition se propose d’inviter tous les publics à un voyage immersif au cœur de l’univers de cet artiste avant-gardiste, qui raconte six décennies de création, déployées dans près de 900 m².

Créer a été un refuge, puis une résistance, une réponse à la dureté de mon enfance. C’est devenu, au fil du temps, l’architecture de mon style et de ma personnalité.
Très jeune, je construisais des « châteaux » à partir d’éléments détournés. À 18 ans, mes premières vestes réalisées à partir de couvertures ont suivi ce concept. J’ai toujours eu une affection particulière, une tendresse pour les matériaux pauvres, les tissages bruts, à l’aspect rude, d’origines incontrôlées, parfois issus de déchets textiles.
Ma mère dirigeait à Limoges un atelier d’une quarantaine de couturières, sa virtuosité en coupe transformait mes élucubrations sans bride en vêtements-maisons. Avec elle, j’ai échafaudé un style personnel d’inspiration à la fois rurale et chevaleresque, design et rock’n’roll.
C’est ainsi qu’à la fin des années 60, je suis monté à l’abordage du monde de la mode, avec un manifeste où mon savoir-faire se liait à l’Arte Povera ou à Supports/Surfaces, sans que je ne connaisse ces mouvements. Ces premières années ont été la pierre angulaire de ma carrière. Mon imagination a pris le pouvoir, sans limite. Mes défilés étaient des performances, mes vitrines, des installations, mes robes, des tableaux, mes manteaux, des sculptures, mes meubles, des mobiles.
Dès 1985, j’initie les vêtements accumulations, faits d’objets détournés : ours en peluche, chapeaux de paille, gants de cuir, pelotes de laine, lunettes… transformant ainsi le vêtement en œuvre, au-delà de sa fonction, pour créer des sculptures en marche.
À partir de 1980, je convoque les couleurs primaires, rouge, bleu, jaune, étendards de la pop culture, ainsi que les logos, les cartoons et les slogans, comme une réponse contemporaine à ma passion pour l’héraldique médiévale et l’histoire. Cette gamme chromatique courte devient ma signature, une empreinte stylistique, un lien entre toutes mes expériences créatives, de mon travail de tricot pop, prémices du streetwear, à l’art sacré au moment des JMJ de 1997 ou de la réouverture de Notre-Dame de Paris en 2024.
Le principe de collaborer avec d’autres artistes ne m’a jamais quitté. De Keith Haring à Hall. Haus, de Lady Gaga à Robert Mapplethorpe, de Malcolm McLaren à Pedro Winter et Vladimir Cauchemar. Cela s’inscrit dans la quête de réinventer mon écriture, dans une curiosité sans cesse renouvelée pour les talents émergents et la musique de demain.
Le terme Art total s’impose à moi pour décrire mon travail protéiforme et ma démarche anticipatrice du décloisonnement et de la porosité des disciplines artistiques. Je suis un artiste qui a utilisé la mode comme un médium.
Le dessin a été mon outil lors de ces conquêtes artistiques, sur le papier, puis sur les murs des villes où mes anges à la craie essaiment.
Aujourd’hui, je découpe, puis je colle. Mon trait a disparu. Il n’y a ainsi plus de frontière entre mon geste créatif et les espaces que j’investis, comme aux Abattoirs de Toulouse, où se côtoieront mes créations détournées, mes dessins, mes rencontres, mes couleurs, au plus près du public pour un voyage immersif, joyeux et émouvant. « L’Imagination au pouvoir » raconte mon chemin de création durant six décennies.
J’aimerais qu’elle montre la voie aux jeunes talents en devenir. »
Jean-Charles de Castelbajac

Sans titre, 2025, dessin et collage, archives Castelbajac © Jean-Charles de Castelbajac

Si la mode est son médium de prédilection, Jean-Charles de Castelbajac est avant tout un créateur inclassable tant son travail est la fusion unique de différentes expressions artistiques. Détournements et collaborations sont au cœur de sa pratique et font du dialogue un mode de création en soi : entre l’art, la mode, la musique, entre l’histoire, le sacré, la pop culture et l’enfance. Explorateur du monde, témoin de son époque et de ses innombrables facettes, l’artiste nourrit très tôt sa carrière d’une quête de liberté, d’une indiscipline assumée, faisant du vêtement à la fois une œuvre, une armure et une parure. Échappant à toute définition figée et se jouant des décloisonnements, son œuvre transgresse les codes et témoigne d’un regard incisif porté sur une époque en mouvement.

Dessin préparatoire pour l’exposition ‘’L’Imagination au pouvoir’’, 2025 © Jean-Charles de Castelbajac

La mode comme médium artistique
Proclamation de la puissance de l’imagination, l’exposition met en avant les différentes dimensions d’un travail commencé dès la fin des années 1960 et poursuivi jusqu’à aujourd’hui. À travers un parcours thématique foisonnant et immersif, ponctué d’installations réalisées spécialement pour les Abattoirs, Jean-Charles de Castelbajac, créateur tout terrain, propose un voyage presque initiatique dans son univers.

Utilisation de matériaux dits pauvres – l’up-cycling –, accumulation, collage, hybridation sont autant de gestes et d’expérimentations jouant d’allers-retours entre la mode et l’art, qui résonnent avec les recherches des grands mouvements de l’histoire de l’art, dont l’Arte Povera, le Nouveau Réalisme ou l’art concep- tuel. Vêtements, dessins, photographies, objets de design et accessoires révèlent ainsi sa capacité à transformer les matières et les idées, afin de proposer un espace de réflexion à la fois artistique, historique et sociétal – un art total, en somme.

Jean-Charles de Castelbajac

L’art et la mode ne font qu’un chez Jean-Charles de Castelbajac. Cette alliance nourrit de riches collaborations qui, avec sa gamme chromatique si reconnaissable, en ont fait sa signature : Robert Malaval, Keith Haring, Cindy Sherman ou encore Bettina Rheims, Robert Mapplethorpe, Olivero Toscani et Lady Gaga, côtoient dans sa carrière André Courrèges, Max Mara, Ligne Roset ou encore des commissions liturgiques pour les Journées Mondiales de la Jeunesse et la réouverture de Notre-Dame de Paris. Ces rencontres avec ses ‘’contemporains’’, dont certaines sont rejouées dans cette exposition, sont le manifeste de la virtuosité joyeuse d’un artiste qui ne cesse de se réinventer. C’est cette capacité à imaginer une autre idée de la mode qui est au cœur de cette exposition, la première dédiée à ce médium aux Abattoirs.

Conçue comme une épopée intime, l’exposition s’ouvre sous la nef des Abattoirs où une assemblée de bannières, colorées, floquées d’images et de formes découpées, tendues à des mâts et suspendues, accueille les visiteurs.

Le parcours s’articule ensuite en huit sections illustrant la richesse et la constance d’une démarche artistique fondée sur le détournement, la transdisciplinarité et la liberté de ton.

La première, Sous couverture, revient sur les débuts du créateur à la fin des années 1960, lorsqu’il réalise ses premières pièces à partir de couvertures, posant les bases d’une pratique d’upcycling avant l’heure. La seconde section, Haute protection, explore la dimension fonctionnelle et protectrice du vêtement, entre armure et abri, à travers les ponchos, manteaux et collections utilitaires conçus dès les années 1970.

La section Mots émoi met en lumière la place de la littérature et de la poésie dans son œuvre, des « robes-poèmes » de 1981 aux « robes-livres » créées pour les cent ans des Éditions Gallimard.

Suivent les Accumulations, « vêtements-sculptures » constitués d’objets du quotidien – peluches, gants, lunettes, pelotes de laine – qui transforment la mode en sculpture en mouvement.

Dans Pop hip-hop : l’héraldique urbain, Jean-Charles de Castelbajac revisite les codes du blason et de l’héraldique à travers les icônes de la pop culture, de Mickey à Marilyn Monroe, de Keith Haring à Andy Warhol, tout en évoquant ses collaborations avec des artistes et des photographes majeurs. L’art de la mode retrace ensuite sa pratique du décloisonnement, ses « robes-tableaux » réalisées avec Ben, Combas ou Messager, et ses incursions dans le design et la scénographie.

La section Habits de lumière dévoile la dimension spirituelle et symbolique du travail de Jean-Charles de Castelbajac et présente ses vêtements liturgiques comme la paramentique de la cérémonie de réouverture de Notre-Dame de Paris en 2024.

Le parcours s’achève enfin sur les œuvres les plus récentes du créateur, avec un focus sur sa pratique du collage. Héritier du dadaïsme et de Raoul Hausmann, il est maître dans l’art d’assembler matériaux, formes et couleurs et de faire dialoguer des horizons multiples. Dessins, papiers découpés, textiles et photographies s’y mêlent dans une profusion de couleurs et de formes.

Commissariat : Lauriane Gricourt, Directrice des Abattoirs, Julien Michel, chargé de recherches.
Scénographie : Pascal Rodriguez, en étroite collaboration avec Jean-Charles de Castelbajac
Musique : composition inédite par Vladimir Cauchemar

Exposition « Jean-Charles de Castelbajac. L’imagination au pouvoir« , du 12 décembre 2025 au 23 août 2026, aux Abattoirs, Musée – Frac Occitanie Toulouse

Photo d’en-tête : Bettina Rheims, Ghislaine Thesmar et les danseuses du ballet de l’Opéra de Paris, Printemps/Été 1982, collection  »Hommage à la bande dessinée » © Bettina Rheims /Adagp, Paris, 2025

S’abonner
Notifier de

0 Commentaires
Les plus anciens
Les plus récents Le plus de votes
Inline Feedbacks
View all comments
Article précédent

Le cinéma politique international à Carcassonne : 47 films, 24 pays, 5 jours pour questionner le monde

Prochain article

"Parade" : Dom Robert et Kate MccGwire au Palais idéal du facteur Cheval

Derniers articles de ARTS & CULTURES

REJOIGNEZ

LE CERCLE DE CEUX QUI VEULENT COMPRENDRE NOTRE EPOQUE DE TRANSITION, REGARDER LE MONDE AVEC LES YEUX OUVERTS. ET AGIR.
logo-UP-menu150

Déjà inscrit ? Je me connecte

Inscrivez-vous et lisez trois articles gratuitement. Recevez aussi notre newsletter pour être informé des dernières infos publiées.

→ Inscrivez-vous gratuitement pour poursuivre votre lecture.

REJOIGNEZ

LE CERCLE DE CEUX QUI VEULENT COMPRENDRE NOTRE EPOQUE DE TRANSITION, REGARDER LE MONDE AVEC LES YEUX OUVERTS ET AGIR

Vous avez bénéficié de 3 articles gratuits pour découvrir UP’.

Profitez d'un accès illimité à nos contenus !

A partir de 1.70 € par semaine seulement.

Profitez d'un accès illimité à nos contenus !

A partir de $1.99 par semaine seulement.