La pandémie de Covid-19 n’est pas achevée, que l’été arrive. Or les spécialistes prévoient qu’il sera chaud et que les températures caniculaires battront des records. C’est déjà le cas, ce mois d’avril et mai dans l’Europe du Sud-Est qui suffoque. L’Organisation météorologique mondiale (OMM) a alerté ce mardi 26 mai sur les risques sanitaires que posent le double défi de la canicule prévue cet été et de la pandémie de Covid-19, et appelé les gouvernements à se préparer.
Les risques sanitaires liés à la chaleur risquent de devenir plus importants alors que l’hémisphère nord est sur le point d’entrer dans une saison estivale avec des températures élevées, préviennent des experts en matière de santé et de climat soutenus par l’OMM. « L’été qui approche dans l’hémisphère nord devrait marquer un nouveau record de chaleur », a indiqué la porte-parole de l’OMM, Clare Nullis Kapp, lors d’un point presse en ligne à Genève, ajoutant que « la Covid-19 amplifie les risques sanitaires liés à la chaleur pour de nombreuses personnes ».
Vulnérables à la fois à la Covid-19 et à la chaleur
De nombreuses catégories de personnes sont vulnérables à la fois à la Covid-19 et à la chaleur. Il s’agit notamment des personnes âgées de plus de 65 ans et surtout celles de plus de 85 ans. Celles souffrant de problèmes de santé sous-jacents telles que les maladies cardiovasculaires, pulmonaires, du rein, diabète et obésité sont également à risque tout comme celles souffrant de problèmes de santé mentale (troubles psychiatriques, dépression).
Les travailleurs essentiels qui travaillent à l’extérieur pendant les périodes les plus chaudes de la journée ou qui travaillent dans des endroits où la température ne peut être contrôlée sont également vulnérables ainsi que le personnel de santé portant des équipements de protection individuelle.
Les femmes enceintes et les personnes vivant dans des établissements de soins de longue durée, surtout sans refroidissement et ventilation adéquats doivent également être suivies. Les personnes marginalisées et isolées (sans-abris, migrants avec barrières linguistiques, personnes âgées vivant seules) et celles disposant de faibles revenus ou d’un logement inadéquat sont également à risque.
Bien que les conditions environnementales jouent probablement un rôle limité pour déterminer où et quand la Covid-19 se produit, la chaleur peut aggraver les conséquences pour les patients atteints par le virus et pourrait augmenter les taux de transmission lorsque les gens se rassemblent à l’extérieur et dans les espaces publics. Par ailleurs, un afflux de patients victimes de chaleur dans les services de santé peut les mettre à rude épreuve à un moment où beaucoup ont déjà atteint un point de rupture en raison de la Covid-19.
Dans les zones touchées par un nombre élevé de cas de Covid-19, un épisode de chaleur grave pourrait entraîner des pertes massives et des impacts sanitaires importants. La peur du public de rechercher des soins de santé pendant la pandémie peut retarder les soins pour des problèmes non liés à la Covid-19, même en cas de besoin critique. Une telle perception et un tel comportement pourraient entraîner la mort évitable de personnes vulnérables qui restent chez elles sans refroidissement adéquat (air conditionné, ventilation, boisson …) et ne quittent pas leur domicile pour des conditions plus fraîches ou des soins de santé.
Quelles actions entreprendre ?
Les experts, appuyés par l’agence onusienne, appellent les gouvernements à être plus solidement préparés pour cet été afin de garantir la sécurité des personnes par temps de chaleur sans augmenter le risque de propagation de la Covid-19.
Toutes les maladies et tous les décès liés à la chaleur peuvent être évités, souligne l’OMM. Mais dans le contexte de la Covid-19, les approches, les communications et la sensibilisation doivent être adaptées aux contextes locaux, et la coordination et la préparation sont nécessaires.
« Au niveau gouvernemental, une coordination et une préparation à la chaleur accrues, notamment l’examen et la modification des plans chaleurs et des orientations locales, devraient avoir lieu maintenant, avant le début de la saison de chaleur », souligne l’agence onusienne.
Les professionnels de santé et premiers intervenants devraient être formés pour surveiller les cas potentiels de stress thermique et devraient être conscients des risques de chaleur supplémentaires auxquels ils peuvent être confrontés lorsqu’ils portent un équipement de protection individuelle et travaillent dans des conditions caniculaires.
« La réduction du nombre de personnes développant des maladies liées à la chaleur devrait être une priorité pour aider à minimiser les admissions dans les hôpitaux déjà surchargés », a déclaré Joy Shumake-Guillemot, responsable du bureau conjoint de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et de l’OMM pour le climat et la santé.
« Les autorités municipales et les professionnels de la santé sont susceptibles de faire face à des choix difficiles sur la façon de trouver un équilibre entre la prévention de la propagation de l’infection, tout en protégeant les personnes des conditions dangereusement chaudes dans lesquelles elles vivent », a reconnu Mme Shumake-Guillemot.
Chaleur + humidité + Covid = un cocktail explosif
Plusieurs études concordent pour annoncer la multiplication des épisodes caniculaires intenses couplés avec des taux d’humidité anormaux. Des chercheurs viennent de publier un article alarmant dans Science Advances. Ils établissent que le nombre d’épisodes d’humidité et de chaleur potentiellement mortels a doublé entre 1979 et 2017, et augmente à la fois en fréquence et en intensité.
L’étude révèle que ces épisodes intolérables d’humidité et de chaleur extrêmes, qui pourraient menacer la survie de l’homme, sont en augmentation dans le monde entier, ce qui suggère que le pire scénario d’alerte sur les conséquences du réchauffement climatique est déjà en cours.
Ces résultats inquiétants surprennent les scientifiques car des études antérieures avaient prévu que de tels événements météorologiques extrêmes se produiraient plus tard dans le siècle, principalement dans les régions tropicales et subtropicales où l’humidité est déjà un problème. « Les études précédentes prévoyaient que cela se produirait dans plusieurs décennies, mais cela montre que cela se produit maintenant », a déclaré au Guardian l’auteur principal, Colin Raymond, de l’observatoire terrestre Lamont-Doherty de l’université Columbia. « La durée de ces événements va augmenter, et les zones qu’ils affectent vont s’étendre en corrélation directe avec le réchauffement climatique ».
Dans des conditions sèches, le corps transpire l’excès de chaleur à travers la peau, où il s’évapore ensuite. L’humidité entrave l’évaporation, et peut même l’arrêter complètement dans des conditions extrêmes. Si le cœur du corps surchauffe, les organes peuvent rapidement commencer à défaillir et entraîner la mort en quelques heures. Une situation aggravée quand elle se produit en même temps qu’une pandémie comme celle du Covid-19.
Source : ONU/OMM