
Je crois que chaque œuvre d’art est un monument ou un mémorial avec une résonance spécifique. C’est ainsi que je conçois les œuvres d’art dans les musées. Ce sont des monuments et des célébrations de certains moments de l’histoire. »Esther Shalev-Gerz, 2018
Œuvre monumentale composée de 24 000 pavés de ciment, The Shadow inscrit au sol, à la façon d’une mosaïque contemporaine ou d’un dessin digital pixélisé, la silhouette grise, étendue, fantomatique, d’un sapin dit de Douglas des forêts primaires canadiennes. Cette « ombre » se grave, se déploie et s’élance horizontalement sur plus de 100 mètres, occupant l’une des places principales du campus de l’université de Colombie-Britannique, à Vancouver, elle-même située sur le territoire ancestral et non cédé du peuple Musqueam. Faisant à la fois affleurer à même la peau urbaine et ressurgir visuellement, dans le présent des sociétés ex et post-coloniales et industrielles, le passé de l’une des premières nations et le souvenir d’une nature effacée, Esther Shalev-Gerz invite le passant et la passante à traverser cette œuvre contestant en elle-même son apparence monumentale, à la fouler, à la vivre et l’éprouver physiquement, à n’en avoir qu’une vision partielle, singulière et individuelle.Esther Shalev-Gerz fait parler non des témoins du passé ou de l’ailleurs, mais des chercheurs au travail ici et maintenant. Ceux donc qui viennent d’ailleurs, elle les fait parler du présent comme du passé, d’ici comme de là-bas. Elle les fait parler de la manière dont ils ont pensé et aménagé le rapport entre un lieu et un autre, un temps et un autre. Mais aussi les dispositifs qu’elle construit sont eux-mêmes des dispositifs qui distendent leur parole, qui la soumettent à la représentation des conditions de leur énonciation et de leur écoute. »Jacques Rancière, « Le travail de l’image », in Esther Shalev-Gerz, catalogue de l’exposition Esther Shalev-Gerz : Ton image me regarde !?, Jeu de Paume, Paris, 2010.
Persona Grata ? : 9e exposition de la collection
À travers l’hospitalité, arrive l’impossible »Jacques Derrida







