Alors que le Projet de Loi de Financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2026 prévoit d’étendre les franchises médicales et certains outils de maîtrise médicalisée au secteur dentaire, l’Union Française pour la Santé Bucco-Dentaire (UFSBD) tire la sonnette d’alarme. L’organisation redoute une aggravation des inégalités d’accès aux soins et une remise en cause profonde des efforts entrepris depuis plusieurs années pour promouvoir la prévention et la santé orale en France.
Pour l’UFSBD, la santé bucco-dentaire est un pilier de la santé publique, un enjeu de justice sociale et un levier de prévention reconnu dans la lutte contre les maladies chroniques. Or les dispositions envisagées dans le PLFSS 2026 menacent de fragiliser ce socle essentiel. L’organisation professionnelle alerte sur les conséquences délétères que pourraient avoir ces mesures sur l’accès aux soins bucco-dentaires, en particulier pour les populations les plus modestes. Dans un pays où seuls 50 % des Français consultent régulièrement un chirurgien-dentiste, un tel recul serait, selon elle, incompréhensible.
Un recul pour la prévention et l’accès aux soins
La mise en œuvre de ces mesures, explique l’UFSBD, aurait des effets profondément négatifs sur la prévention et le suivi régulier des patients. Elle viendrait contredire les politiques de santé publique menées depuis plusieurs années par l’État, l’Assurance Maladie et les professionnels du secteur pour améliorer l’accès aux soins dentaires.
Ces efforts, portés notamment par le programme « Générations sans carie », visaient à encourager un suivi préventif régulier et à réduire les inégalités dès le plus jeune âge. Les chiffres restent alarmants : les consultations préventives à 5-6 ans concernent 81 % des enfants de cadres, contre 48 % des enfants d’ouvriers.
Un enjeu de santé publique et de justice sociale
L’UFSBD rappelle que la santé orale est indissociable de la santé générale. Une mauvaise santé bucco-dentaire augmente les risques de développer ou d’aggraver des maladies chroniques. Elle constitue également un marqueur d’inégalité sociale : l’accès aux soins dentaires reste inégal, malgré l’augmentation du nombre de chirurgiens-dentistes formés ces dernières années, qui a permis de commencer à refluidifier l’accès aux soins.
La campagne nationale « On a tous une bonne raison de l’ouvrir ! Un rendez-vous par an chez le chirurgien-dentiste », lancée par l’UFSBD et parrainée par le ministère de la Santé, s’inscrit dans cette logique de prévention active et de sensibilisation du grand public.
Des mesures en contradiction avec les objectifs de santé publique
Le texte du PLFSS 2026 mettrait à mal ces dynamiques positives. L’extension des outils de maîtrise médicalisée au secteur dentaire est jugée par l’UFSBD « incompréhensible ». En freinant la fréquentation des cabinets, elle irait à l’encontre de la politique de prévention souhaitée par les autorités elles-mêmes.
De plus, l’augmentation des franchises médicales sur les soins dentaires, en relevant le reste à charge pour les patients, constituerait un frein supplémentaire pour les foyers modestes. Même si certaines populations resteraient exonérées, l’UFSBD avertit que cette mesure risque d’amplifier le renoncement aux soins et d’accroître les inégalités sociales en santé.
Une dégradation progressive du cadre de prise en charge
L’organisation rappelle que ce n’est pas la première fois que la santé orale est fragilisée par les politiques publiques récentes. En octobre 2023, la modification du ticket modérateur sur les soins dentaires, passé de 30 à 40 %, avait déjà relégué la santé bucco-dentaire au rang de priorité secondaire. En 2025, la fragmentation de la prise en charge des examens bucco-dentaires pour les 3-24 ans et de leurs soins consécutifs a accentué les disparités. De plus, le panier de soins de prévention du gouvernement a totalement omis la santé bucco-dentaire, malgré les appels de l’UFSBD à créer un dispositif « 100 % Prévention », en complément du « 100 % Santé », orienté essentiellement vers le curatif.
La prévention n’est pas une dépense, mais un investissement
Pour l’UFSBD, le recours aux soins dentaires n’est pas une dérive budgétaire, mais un investissement essentiel dans la santé globale. Les affections dentaires étant largement évitables, leur prévention permet de réduire à court terme les dépenses de santé. L’organisation défend le principe fondateur de son action : « Pas de santé sans santé bucco-dentaire », un credo réaffirmé lors de son colloque de santé publique du 16 octobre dernier, consacré au Bien vieillir.
Un appel à reconsidérer la santé bucco-dentaire dans le PLFSS 2026
Face à ces menaces, l’UFSBD exhorte les autorités à faire du PLFSS 2026 une opportunité pour revaloriser la santé bucco-dentaire comme levier majeur de prévention et de justice sociale.
L’objectif : améliorer la qualité de vie des Français, prévenir les effets délétères des maladies chroniques, et réduire les dépenses évitables du système de soins.
Cette mobilisation s’inscrit dans une dynamique internationale, soutenue par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), qui rappelle que les maladies bucco-dentaires sont les affections les plus fréquentes au monde et qu’elles doivent être pleinement intégrées aux politiques de santé publique.
L’UFSBD en appelle donc à la cohérence des politiques publiques : faire reculer la prévention dentaire serait un contresens sanitaire et social. Dans un contexte où la France peine encore à garantir un égal accès à la santé pour tous, préserver la prévention bucco-dentaire, c’est préserver la santé globale et l’équité entre les citoyens.







