Silence éloquent. Pendant deux heures d’intervention sur TF1 ce 15 décembre, le président de la République a abordé tous les événements qui ont marqué son quinquennat et donné les grandes lignes de sa « vision » pour la France. Mais durant toute cette interview, pas un mot sur le climat, sur les risques que font peser les événements extrêmes, la perte de la biodiversité, les risques migratoires induits par les dérèglements climatiques. Rien de tout cela n’existe. Dormez en paix, bonnes gens, le président vit sur une autre planète…
De la crise sanitaire à celle des Gilets jaunes, en passant par ses relations avec les grands de ce monde et les multiples façons dont sa personnalité intime a été changée par l’exercice présidentiel, Emmanuel Macron a brossé le portrait d’une France tout à son avantage. Dans ce panaroma en forme de plaidoyer pro domo, un silence assourdissant retentissait : la crise climatique, celle du vivant, l’urgence devant laquelle nous devons tous faire face n’existe pas pour le président.
Les glaciers de l’Antarctique fondent au point d’accélérer une montée des eaux catastrophique, les incendies et les événements climatiques extrêmes, les vagues de chaleur meurtrières battent chaque jour des records, la biodiversité s’effondre, des communes du littoral partout sur le globe, et en France aussi, sont obligées de se claquemurer ou de reculer face aux événements, l’Etat français est condamné pour son inaction climatique, la jeunesse du monde s’angoisse pour son avenir et gronde, partout. Les émissions de gaz à effet de serre continuent de plus belle grâce à la voracité de nos sociétés addictives aux combustibles fossiles, tout comme l’usage intensif de produits toxiques pour la nature et la santé humaine. Tout cela se passe sous nos yeux et s’emballe.
Mais aux yeux du président de la République, interrogé par une paire de journalistes à la fois complaisants et bloqués sur des logiciels d’interprétation du monde d’un autre temps, la crise de la planète n’existe pas. Circulez, il n’y a rien à voir. « Où va la France ? » arborait le plateau de cette émission étrange. Sur le sujet du climat, du vivant et de l’avenir de nos enfants, nous ne le saurons pas. Le dérèglement de la planète semble n’avoir aucune incidence sur notre économie, sur notre sécurité, sur notre agriculture, notre alimentation, sur notre urbanisme, notre santé, sans compter sur la survie de centaines de millions d’êtres vivants. Comment préparer la France aux chocs climatiques, comment nous adapter, comment nous équiper, construire de nouvelles infrastructures, changer nos modes de consommation, préserver les plus démunis et anticiper, tout simplement, sur tout ce que nous savons qui nous attend ? Nous ne le saurons jamais.
Un silence qui en dit long sur l’incapacité de nos dirigeants de tous bords, qu’ils soient en exercice ou candidats, à avoir le courage d’aborder de front la question majeure du siècle, source de toutes les autres crises. Triste et tragique défection.