La Chaire UNESCO Alimentations du monde organise son 13ème colloque le 2 février 2024, pour lequel la Chaire a choisi de se pencher sur les rapports qu’entretiennent les jeunes générations (15-30 ans) avec leur alimentation. Incursion dans un monde mystérieux, peuplé de clichés et d’idées-reçues, dont ils jouent d’ailleurs allègrement sur l’affiche du colloque…
Pour son 13e colloque annuel, la Chaire a choisi de se pencher sur les rapports qu’entretiennent les jeunes générations (15-30 ans) avec leur alimentation. Quels nouveaux comportements alimentaires adoptent-elles et quel rôle jouent les réseaux sociaux ? En quoi ces générations réinventent l’engagement et les solidarités à travers l’alimentation ? Quels valeurs et sens recherchent-elles dans le travail agricole ou alimentaire ?
« Nous nous intéresserons donc dans un premier temps aux comportements alimentaires adoptés par les jeunes et en quoi ils sont ou non spécifiques de cette période de la vie. En particulier, nous mesurerons l’influence des réseaux sociaux sur les habitudes d’achat et de consommation ; envisagerons comment l’alimentation est constitutive de la construction de l’identité et du rapport au corps (avec ses troubles associés) et évoquerons les supposées tendances à l’œuvre : individualisation des régimes alimentaires, perte de repères face à la multiplication des discours et injonctions sur l’alimentation, internationalisation et métissage des goûts, etc.
Ensuite, en écho au précédent colloque, nous discuterons des valeurs et du sens que des jeunes recherchent dans le travail agricole ou alimentaire, à travers deux destins singuliers : une entrepreneuse sénégalaise dans l’industrie agroalimentaire et un vigneron nouvellement installé dans les Cévennes.
Enfin, nous verrons comment les nouvelles générations perpétuent ou réinventent des formes d’engagement et de solidarité à travers l’alimentation : la formation de jeunes ambassadeurs du commerce équitable, la constitution de groupements d’achats sur les campus étudiants proposant des produits de qualité à prix raisonnable ou encore le lancement d’une Convention étudiante de l’alimentation durable.
Les « jeunes » ne constituent évidemment pas une catégorie homogène : les attributs socio-culturels, de classe, de genre, etc. peuvent être aussi – sinon plus – importants que la simple classe d’âge. De même, les nouvelles générations sont inscrites dans une société en prise à des évolutions qui nous concernent toutes et tous. Crise écologique, éco anxiété, nouveaux rapports à l’environnement et au travail, fluidité des genres, nouvelle condition numérique à travers des supports médiatiques qui portent en eux-mêmes un autre rapport au monde… Ces bouleversements sociaux, rapides et radicaux, que nous vivons, touchent particulièrement les jeunes générations, creusant peut-être encore plus un certain fossé entre générations. Car face à une grande imprévisibilité de l’avenir, le fossé générationnel semble se creuser encore davantage.
Hasard des actualités, à l’heure où nous nous préparons à débattre de l’alimentation des jeunes, un constat implacable est venu redonner un sens premier au titre décalé de notre colloque (« Mangez jeunesse ! ») : un étudiant sur cinq ne mangerait pas à sa faim… C’est le résultat de l’étude « Bouge ton CROUS » menée par la Fédération des associations générales étudiantes (Fage), principal syndicat étudiant, publiée le 10 janvier dernier. Cette consultation réalisée au second semestre 2023 auprès de plus de 7500 étudiants en France métropolitaine révèle que près d’un sondé sur deux a déjà sauté un repas, faute d’argent. Plus largement, cette étude s’intéresse aux conditions de vie étudiante (logement, transport, salariat, vie sociale, culturelle et sportive) et là encore, le constat est sans appel : la précarité progresse, en lien notamment avec l’augmentation du coût de la vie étudiante.
Hasard du calendrier bis, cette étude paraît au moment même où vient d’être nommé « le plus jeune premier ministre du plus jeune président de la Ve république ». Une nomination qui, au moins symboliquement, porterait à croire au mirage d’une jeunesse qui aurait pris le pouvoir de nos institutions. Mais le vrai pouvoir émancipateur est celui d’être en capacité de se projeter dans l’avenir, de le sentir à portée de main ; alors même que cet avenir est peut-être devenu plus imprévisible que jamais. Dès lors, comment investir sur l’avenir avec une trop grande partie des étudiants qui connaissent la difficulté du quotidien ? Un vrai problème de concordance des temps où le présent ne nourrirait plus l’avenir… »
Damien Conaré, Ingénieur agronome, Secrétaire général de la Chaire Unesco Alimentations du monde à l’Institut Agro, Montpellier SupAgro
Parmi les intervenants, nous aurons le plaisir de compter sur la présence de :
- Camille Peugny, professeur de sociologie à l’Université Paris-Saclay, sur les caractéristiques du temps de la jeunesse
- Marion Vu-Augier de Montgrémier, pédopsychiatre au Centre hospitalier Georges Daumézon (44), CESP – Inserm, sur les troubles du comportement alimentaire chez les jeunes adultes chinoises
- Siny Samba, directrice générale de l’entreprise Le Lionceau, spécialisée dans l’alimentation et la nutrition infantile au Sénégal, sur son parcours professionnel
- Quiterrie Bouchonnet, étudiante en L3 droit et science politique, sur la Convention étudiante de l’alimentation durable
- Lisa Serero, déléguée générale adjointe de la fédération Artisans du monde, sur le programme « Fair future » d’éducation au commerce équitable à destination des moins de 30 ans
- Pascale Ezan, professeure en sciences de gestion à l’Université Le Havre -Normandie, à propos de l’impact des réseaux sociaux sur les comportements alimentaires
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