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Les réseaux sociaux au secours des océans du monde

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Les écosystèmes océaniques sont en déclin. Dans un nouveau rapport publié fin avril dans le Journal des sciences marines du Conseil International pour l’Exploration de le Mer (CIEM), des spécialistes de la conservation marine et des professionnels des données d’IBM révèlent de nouvelles façons dont la technologie et les réseaux sociaux pourraient modifier le partage des données océaniques pour transformer les méthodes de gestion de l’océan.
 
Comment réduire le gaspillage de données pour aider à gérer les océans du monde ? Sachant que les trois principaux obstacles au partage et à l’utilisation des données sont le téléchargement, l’agrégation et la navigation. Il existe des solutions techniques et culturelles qui pourraient faire tomber ces barrières et être mises en œuvre dans le contexte d’une machine combinatoire (montrée comme une roue ci-dessous) qui fournit elle-même une plateforme pour la découverte et l’accès aux données provenant de nombreux outils et applications différents.
L’avenir de la santé des océans et de la planète dépend de la capacité à coordonner des actions efficaces pour résoudre les causes de la dégradation environnementale. L’amélioration de l’accès aux données et de leur utilisation améliorera grandement la capacité de planifier, de mettre en œuvre et de surveiller les répercussions des politiques de gestion, tout en permettant à la communauté scientifique de poursuivre ses études sur notre environnement.
 
Ilustration : © Vanessa González-Ortiz

Les écosystèmes océaniques en déclin

La conservation et la gestion des océans ne suivent pas le rythme de l’évolution rapide de notre planète (1). De nombreux mammifères marins luttent pour survivre (2), les populations de poissons continuent de diminuer et les écosystèmes des récifs coralliens meurent (3). Les zones hypoxiques s’étendent (1) et les plastiques ont infiltré presque toutes les parties du milieu marin (4). Le changement climatique et les facteurs de stress locaux ont de profondes répercussions sur les systèmes socio-écologiques océaniques (5).
Des solutions fondées sur des données probantes sont nécessaires pour résoudre ces problèmes océaniques afin de mieux gérer un océan en évolution rapide (6). Pour élaborer de telles solutions, les données disponibles doivent être utilisées au mieux afin de comprendre les causes et les tendances des changements dans les composantes physiques, écologiques et sociales des systèmes océaniques, mais aussi pour éclairer les modèles de changement océanique et ses effets sur les écosystèmes et les populations, pour évaluer les scénarios associés aux mesures proposées et pour savoir si les politiques sont efficaces (7). La nature globale et dynamique de l’océan et de ses écosystèmes signifie que l’acquisition et le partage des données doivent se faire à une échelle sans précédent et à un rythme plus rapide. L’évolution rapide de l’environnement mondial signifie que nous devons constamment réévaluer et mettre à jour ce que nous savons. Le temps presse.
 

Des données désordonnées

Pour mieux les observer, il existe heureusement davantage de données océaniques et de portails de données qu’auparavant (8). Les plateformes de télédétection recueillent continuellement des pétaoctets de données d’observation de la Terre (p. ex. les programmes Landsat et Sentinel). Des milliers de scientifiques travaillent d’arrache-pied à la collecte de données sur le terrain (9). Des dizaines de plateformes en ligne sont en train de voir le jour où les scientifiques peuvent partager des données et y accéder. Pourtant, nous avons encore besoin de plus de données pour gérer efficacement les océans. Bien que les satellites, les bouées et d’autres approches techniques aient aidé à cartographier et à surveiller les propriétés physiques et chimiques d’une grande partie de l’océan, jusqu’à 90 % des fonds marins demeurent non cartographiés et non surveillés.
 
Quinze pour cent ou moins de l’océan est aussi bien cartographié que la surface terrestre de la planète (10). Notre manque de compréhension et de surveillance régulière des dimensions biologiques et humaines de l’océan est probablement encore plus pauvre en données. De nombreux habitats, y compris les grands fonds marins, les tranchées océaniques, les eaux glacées, les suintements de méthane et même les récifs coralliens, restent peu étudiés à l’échelle mondiale.
Les lacunes géographiques dans les données sur la biodiversité sont particulièrement aiguës pour de nombreuses parties de l’océan mondial, y compris les zones côtières de l’océan Indien, le sud et l’est de la Méditerranée, les mers polaires et la majeure partie de l’océan côtier sud-américain (11). La proportion d’espèces marines non découvertes est estimée à 80 % (11), de nombreux taxons invertébrés étant particulièrement mal documentés et surveillés (11). Même des organismes aussi grands que les baleines et les dauphins sont constamment sous-évalués et surveillés ; 52 % de tous les cétacés inscrits sur la liste de l’UICN sont considérés comme manquant de données (12). Il existe des données sur bon nombre de ces endroits et organismes, mais elles sont cachées dans des ordinateurs portables et des carnets de notes et ne sont pas disponibles pour les nouvelles analyses nécessaires à la gestion des océans.
 
Bien que désordonnées, ces données peuvent néanmoins contenir des informations importantes, en particulier lorsqu’il existe d’importantes lacunes dans les « bonnes données ». IL faut donc trouver de nouvelles façons d’exploiter ces données, même si la collecte, la gestion et l’archivage des données coûtent cher (13). Si ces données ne sont pas transmises par les producteurs aux utilisateurs, il peut en résulter des occasions manquées d’informer la science, la prise de décision et la gestion et une répétition coûteuse des efforts de collecte de données, qui représentent toutes deux un « gaspillage de données ». Il y a beaucoup à gagner à trouver de nouvelles façons de réduire le gaspillage de données pour aider à gérer les océans du monde.
 

Un cadre de données pour comprendre le partage et l’utilisation des données

Pour prendre des décisions efficaces en matière de gestion des océans, en particulier face aux changements environnementaux mondiaux, il faut pouvoir tirer le meilleur parti possible de ces données. Il existe des solutions techniques et culturelles qui pourraient éliminer les obstacles à la circulation des données. La clé est de combiner les approches techniques et culturelles pour créer des solutions et de puiser dans d’autres secteurs pour apprendre à le faire.
 
Trois catégories de défis au partage et à l’utilisation des données ont été identifiées : le téléchargement, l’agrégation et la navigation. Bien que des progrès considérables aient été réalisés pour améliorer l’opérabilité et la transparence des données océanographiques, l’effet a été largement incrémentiel. Le CIEM propose un ensemble de solutions techniques et culturelles pour surmonter ces défis, y compris l’utilisation du traitement du langage naturel, la traduction automatique des données, les identificateurs de données basés sur le grand livre, les monnaies communautaires numériques, les facteurs d’impact des données et les réseaux sociaux comme moyens de surmonter ces obstacles.
Une façon d’exploiter ces solutions pourrait être une machine combinatoire qui comprendrait des solutions technologiques et de réseautage social pour agréger les données océanographiques et permettre aux chercheurs de découvrir, de naviguer et de télécharger des données, ainsi que de relier les chercheurs et les utilisateurs de données tout en fournissant une source ouverte pour de nouveaux outils de données.
 
Linwood Pendleton, Professeur à l’UBO au laboratoire AMURE de l’IUEM, responsable mondial des sciences océaniques au World Wild Foundation, à l’institut Australien des sciences marines, scientifique de renom, est le principal auteur de cette étude. « Vous ne géreriez pas une entreprise sans disposer de votre inventaire en temps réel, mais c’est exactement ainsi que nous essayons de gérer une grande partie de notre océan », déclare-t-il.  « La grande majorité des données océanographiques restent enfermées dans des carnets, sur des ordinateurs portables et stockées sur des sites Web. Les gestionnaires des océans et des côtes ne peuvent pas utiliser des données qu’ils ne peuvent pas trouver. »
 
Aussi, depuis le mois d’août 2018, sept professionnels des données d’IBM se sont joints à des scientifiques de la conservation des océans du WWF, de l’Université du Queensland et de l’Institut Australien des sciences marines pour un intense atelier de brainstorming visant à identifier les moyens susceptibles de débloquer, organiser et rendre accessibles les données océaniques dont les conservateurs et gestionnaires ont besoin pour assurer la survie des écosystèmes marins dans un monde où le changement climatique et la croissance économique mettent en péril les écosystèmes.
 
Lyndon Llewellyn a déclaré que la Grande Barrière de corail était l’un des écosystèmes les mieux étudiés au monde : « La gestion de toutes les données produites par ces études est époustouflante et le flux de données ne fait que s’accroître, s’accélérer et se diversifier à mesure que de plus en plus de scientifiques, d’organisations et de citoyens s’efforcent de les comprendre et de les protéger ».
Grâce aux progrès récents de la technologie de collecte de données, nous disposons de plus de données océanographiques que jamais. Mais le principal défi reste de les stocker et de les rendre accessibles.
« Sortir les données du domaine scientifique et les mettre entre les mains des professionnels de l’océan n’est pas si différent que d’acheminer les produits des artisans aux consommateurs », selon Guillermo Olmedo, un cadre supérieur d’IBM Argentine en Amérique latine.
« En utilisant des méthodes avancées de collecte et de partage des données, la communauté océanographique pourrait ouvrir la voie à un nouveau paradigme de collaboration mondiale et la technologie pourrait également aider les gens à mettre leurs données sur le marché virtuel des idées », ajoute Rahul Jain, un consultant d’IBM Inde.
 

Technologie et réseaux sociaux au service des océans

Le rapport du CIEM ouvre des perspectives avec des propositions sur les facteurs d’impact des données, les interfaces Web qui utilisent l’intelligence artificielle pour automatiser le téléchargement des données, et même la création d’une « machine combinatoire » qui fournirait un guichet unique et un réseau social aux producteurs et utilisateurs de données.
Les machines combinatoires (CM) sont des plateformes technologiques qui peuvent combiner des technologies d’agrégation et de navigation et des réseaux sociaux. Amazon.com, Alibaba, TripAdvisor et d’autres MC commerciaux ont résolu de nombreux problèmes semblables à ceux auxquels est confronté le secteur des données océanographiques, mais appliqués aux produits de consommation, aux marchés et aux voyages.
 
« Débloquer les données, c’est d’abord amener les gens à partager leurs données, ce qui exige un changement de culture. La création d’écosystèmes qui donneront du crédit et de la reconnaissance aux scientifiques qui partagent des données est un moyen d’encourager cela», note Lynette Seow, une consultante d’IBM Singapour.
Ove Hoegh Guldberg, l’un des co-auteurs du rapport, réfléchit sur les résultats : « Nous espérons que ce document fournira une feuille de route afin de trouver des moyens de transformer la façon dont nous utilisons la science pour gérer nos océans. Les Nations Unies ont proclamé les dix prochaines années Décennie des sciences océaniques au service du développement durable et c’est notre première contribution à cette grande entreprise. »
 
Les progrès de la science des données et du réseautage social donnent l’espoir et l’occasion de révolutionner la façon dont seront recueillies et utilisées les données océaniques, mais seulement si les recherches se basent sur la collaboration à l’extérieur du secteur océanique pour tirer le meilleur parti de ce que les autres ont accompli.
 
 
 
Sources : Oxford academic – CIEM / IBM Corporate Service Corps (CSC), WWF- Global Science, WWF-US et le Global Change Institute (CGI) de l’Université du Queensland.

 
  1. WWF, 2018
  2. UICN, 2018
  3. Hoegh-Guldberg et al., 2018 ; FAO, 2018 ; WWF, 2018
  4. Jamieson et al., 2017 ; Haward, 2018 ; Munthe et Jensen, 2018 ; WWF, 2018
  5. Poloczanska et al., 2016 ; Hoegh-Guldberg et al., 2018
  6. Sutherland et al., 2004 ; Fisher et al., 2014 ; Science 20, 2019
  7. Sutherland et al., 2004 ; WWF, 2018
  8. Visbeck, 2018 ; WWF, 2018
  9. COI-UNESCO, 2017
  10. Sandwell et al., 2003
  11. Costello et al., 2010
  12. Parsons, 2016
  13. Arzberger et al., 2004 ; Tenopir et al., 2011 ; Michener, 2015 ; Pisani et al, 2016 ; Rockhold et al., 2016

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