Le miel est un miracle de la nature, dernier produit non-transformé sur terre. Mais aujourd’hui ce miracle n’est pas assez récolté. L’apiculture en Provence est confrontée à des bouleversements sans précédents. Au-delà de la survie d’une filière, c’est celle de l’équilibre de toute la nature qui est menacée. Les Apiculteurs en Provence prennent aujourd’hui la parole, et dans cette tribune signée par Jean-Louis Lautard, président du syndicat des miels de Provence et des Alpes du Sud pour Les Apiculteurs en Provence, lancent l’alerte.
Certains d’entre nous sont à bout, d’autres ont déjà décidé d’arrêter…La plupart des Apiculteurs en Provence sont en souffrance. Cette fois l’heure est grave car au-delà de la survie des apiculteurs, c’est celle des abeilles dont il s’agit.
Notre rôle consiste à améliorer les conditions de vie des abeilles et à optimiser la production de miel en les rapprochant des plantes mellifères. Une humble tâche que nous ne serons bientôt plus en mesure d’accomplir.
Toute l’année, c’est à bout de bras que nous avons porté nos colonies constatant chaque jour une mortalité inquiétante.
Changement climatique, frelon asiatique, varroa, exposition aux pesticides… nos abeilles souffrent et meurent sans inquiéter quiconque. Le déclin des abeilles, 90% des insectes pollinisateurs, aura des conséquences d’ampleur pour la diversité des espèces végétales et la chaîne alimentaire.
Cette année encore, la sécheresse a fait des ravages sur une nature de plus en plus dégradée. Sans eau, pas de nectar, sans nectar pas de miel. Gardiennes de la pollinisation, nos abeilles sont en première ligne du changement climatique. Elles meurent de faim, de soif et d’épuisement.
En 2023, les récoltes ont donc été bien moindres que les années précédentes. Et quand bien même la production aurait été au rendez-vous, nous n’arrivons plus à vendre à un prix décent qui puisse garantir notre pérennité. Le travail mené depuis 1989 pour distinguer la qualité de nos miels au travers des IGP Miel de Provence et Label Rouge Miel de Lavande est aujourd’hui menacé par une concurrence sourde. Lavande, mais aussi bruyère, romarin, thym… Le miel c’est un produit aussi luxueux que la truffe ou le caviar et pourtant son prix est 100 fois moins onéreux.
Maintenir l’apiculture en Provence, c’est maintenir une activité millénaire. L’apiculture a un rôle essentiel dans la préservation de l’équilibre écologique et dans l’élaboration de ce qui n’est autre que la plus ancienne nourriture du monde, le dernier produit non-transformé sur terre. Aussi, est-il de notre devoir à tous, et de notre responsabilité de lutter pour la survie des abeilles. Mais cette survie passe aussi par celle des apiculteurs professionnels.
Alors, à vous, pouvoirs publics, vous devez désormais entendre l’urgence de cette filière agricole qui ne bénéficie de quasi aucune aide hormis quelques dizaines d’euros par ruche. Pourtant, les frelons pour les abeilles sont l’équivalent des loups pour les brebis.
A vous, aussi, consommateurs, victimes de l’inflation, que l’on pousse à renfort de marketing vers des produits d’importation ou de moindre qualité, si vous le pouvez, choisissez du miel de votre région, car il est bien plus qu’un pot de miel. Il est vos paysages, cette biodiversité unique que l’on trouve en Provence ; il est votre santé par tous les bienfaits qu’on lui reconnaît ; il est un produit miracle.
Nous, Apiculteurs en Provence, considérons notre métier d’utilité publique. C’est donc en lanceurs d’alerte que nous prenons la parole aujourd’hui pour vous rappeler que consommer des miels certifiés de Provence, c’est déjà nous aider.
Jean-Louis Lautard, président du syndicat des miels de Provence et des Alpes du Sud pour les Apiculteurs en Provence