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DNA data

D’ici 3 ans Microsoft promet de stocker des données dans l’ADN

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Aujourd’hui, nos données sont stockées essentiellement sur des supports magnétiques. Imaginons un instant qu’elles puissent être conservées dans de l’ADN, tout comme le sont les données génétiques des organismes vivants. Leur archivage serait alors illimité et tiendrait dans un volume extraordinairement restreint. C’est le pari que fait Microsoft dont les chercheurs annoncent pouvoir stocker à grande échelle nos données dans l’ADN d’ici la fin de la décennie.
 
L’ADN contient les instructions génétiques qui organisent le développement des organismes vivants. Celles-ci sont encodées dans la fameuse double hélice découverte par James Watson et Francis Crick. Les ingénieurs de Microsoft affirment dans la MIT Technology Review être en passe d’utiliser un système de stockage opérationnel inscrit dans l’ADN et fonctionnant dans des datacenters d’ici trois ans.
 
Le stockage des données n’est pas une mince affaire quand on songe qu’un plus grand nombre de données ont été générées au cours des deux dernières années que dans toute l’histoire de l’humanité. Les données s’accumulent de façon exponentielle et s’inscrivent sur des supports magnétiques dont la durée de vie au-delà de trente ans semble problématique. Alors chercher un autre type de support a été depuis des décennies un enjeu majeur. Dans les années 1940, le physicien Erwin, celui que l’on connaît pour son chat dans la boîte de Schrödinger, a proposé un «code-script» héréditaire qui pourrait être embarqué dans une structure non récurrente qu’il a décrite comme un cristal apériodique.
Sa suggestion a inspiré James Watson et Francis Crick pour déterminer la structure hélicoïdale de l’ADN basée sur la recherche de Rosalind Franklin, déclenchant une révolution dans la compréhension de la mécanique de la vie.
 
Bien que des séquences d’acide nucléique aient été utilisées pour recueillir des informations sur les cellules vivantes pendant des milliards d’années, leur rôle dans le stockage des données informatiques a été démontré pour la première fois il y a seulement cinq ans, lorsqu’un généticien de l’Université de Harvard a encodé son livre –y compris les données jpg pour les illustrations– dans un peu moins de 55000 mille brins d’ADN. Depuis lors, la technologie a progressé à tel point que les scientifiques ont pu enregistrer 215 petabytes (215 millions de gigaoctets) d’informations sur un seul gramme d’ADN.
 
Selon le magazine ZDNet, l’ADN peut stocker des données avec des densités record. « L’ADN est le support de stockage connu le plus dense de l’univers » explique Victor Zhirnov, de Semiconductor Research Corporation. L’ADN est bien plus résistant que le silicium. Sa durée de vie est estimée entre cent et mille fois plus longue qu’un dispositif réalisé avec du silicium. La molécule est si stable qu’elle est fréquemment retrouvée dans les ossements de mammouths par exemple. Mais sa caractéristique la plus importante est sa densité. L’ADN peut contenir 1.000.000.000.000.000.000 (c’est à dire un quintillion de bits de données dans un millimètre cube. À cette échelle, stocker toute l’information produite depuis que l’humanité existe pourrait tenir dans un espace de quelques mètres carrés seulement.
 
Le problème avec le stockage de données sur de l’ADN c’est que c’est lent et que c’est cher. Des obstacles qui seraient en passe d’être surmontés selon Microsoft.
L’année dernière la firme informatique avait démontré sa technologie de stockage de données d’ADN en codant environ 200 mégaoctets de données sous la forme de 100 classiques littéraires dans les quatre bases de l’ADN dans un processus unique. Selon la revue du MIT, ce processus aurait coûté environ 800000 $ US à l’aide de matériaux sur le marché libre, ce qui signifie qu’il faudrait qu’il soit un millier de fois moins cher pour en faire une option concurrentielle. Circonstance aggravante, le processus d’encodage est aussi incroyablement lent, avec des données stockées à un débit d’environ 400 octets par seconde. Microsoft dit qu’il faut atteindre environ 100 mégaoctets par seconde pour être viable commercialement. Il est vrai que la conversion de bits numériques en code ADN (constitué de chaînes de nucléotides étiquetés A, G, C et T) reste compliquée et coûteuse en raison du processus chimique utilisé pour fabriquer des brins d’ADN. Pour sa démonstration Microsoft a utilisé 13.448.372 morceaux d’ADN uniques.
 
Microsoft travaille sur cette recherche avec un écosystème d’entreprises et de startups : Twist Bioscience, un fabricant d’ADN situé à San Francisco, DNAScript, Nuclera Nucleics, Evonetix, Molecular Assemblies, Catalog DNA, Helixworks et Genome Foundry.
Jean Bolot, directeur scientifique de Technicolor Research, à Los Altos, affirme à MIT Technological Review qu’il finance ce travail à l’Université de Harvard, dans le laboratoire de George Church, l’expert en génomique. « Je suis convaincu que nous aurons des résultats dont nous pourrons parler dès cette année », dit-il. Il ajoute que sa société a discuté avec des studios de cinéma sur la façon dont ils pourraient utiliser le stockage de l’ADN. Il affirme que la moitié de tous les films réalisés avant 1951 sont déjà perdus parce qu’ils étaient stockés sur du celluloïd. Maintenant les nouveaux formats comme la vidéo haute définition et la réalité virtuelle exigent plus de la capacité des studios à préserver leur travail.
 
Un porte-parole de Microsoft Research a déclaré à MIT Technology Review que la société ne pouvait pas confirmer « des précisions sur un plan de produit » pour l’instant. À l’intérieur de l’entreprise, l’idée de stockage d’ADN est largement défendue mais n’est pas encore universellement acceptée. L’objectif est pour l’heure de mettre sur pied un « système proto-commercial d’ici trois ans stockant une quantité de données sur l’ADN dans l’un de nos centres de données » explique Doug Carmean, architecte chez Microsoft Research.
 
Microsoft garde encore le mystère que sa capacité à baisser les coûts du processus et l’accélérer, mais les progrès dans les biotechnologies montrent chaque jour une baisse du coût du séquençage des gènes, de sorte que l’objectif de la fin de la décennie paraît réaliste.
Quand bien même cet objectif serait atteint, il est probable qu’il ne serait utilisé que dans certaines circonstances pour les clients disposés à payer une solution de stockage spécialisée –comme les archives critiques des données médicales ou juridiques– plutôt que de remplacer les méthodes de stockage à grande échelle courantes.
 
Dans ce domaine, la science-fiction rejoint la réalité à toute vitesse et rien n’interdit de penser que, finalement, le stockage de données fondé sur l’ADN pourrait un jour impliquer des ordinateurs vivants.
En effet, alors que la solution de stockage d’ADN de Microsoft est basée sur des puces, il est possible que les futures versions de stockage impliquent des enzymes ou des bactéries conçues pour effectuer des calculs.
 
Même à l’extérieur des cellules, l’ADN offre potentiellement de nouvelles façons de calculer les données, ouvrant des moyens de réduire rapidement les nombres de certains problèmes, tout comme les ordinateurs quantiques le font pour d’autres domaines des mathématiques. Pour l’instant, il semble que l’ADN ait un rôle solide à jouer pour résoudre un problème très réel de gestion de masses considérables de données, problème qui ne fera que s’aggraver dans le temps.
 
 
 

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