A la veille de ses vingt ans d’existence, l’association Les Amis du Paysage Français présente du 9 au 18 septembre 2022 l’exposition « De Natura. Trois peintres, trois graveurs » à l’Orangerie du domaine national de Meudon.
Dans le cadre d’une aventure collective née en 2007 du don fait au musée d’Art et d’Histoire de Meudon de la collection de peintures de paysage de Christian Grellety-Bosviel, l’association a organisé, pendant quinze ans, avec le soutien du musée, de nombreuses expositions temporaires célébrant les représentants souvent méconnus du paysage français au XIXe siècle (Jean Laronze, Antoine Chintreuil, Théodore Rousseau, etc.).
Fidèles à cette passion pour la représentation de la nature, l’association souhaite désormais élargir son champ d’horizon en s’ouvrant aux expressions artistiques contemporaines du paysage, d’ici et d’ailleurs.
Conçue comme l’événement fondateur de ce renouveau, l’exposition « De Natura. Trois peintres, trois graveurs » se propose de mettre en lumière six de ces regards d’artistes, féminins et masculins (Jean-Luc Bourel, Christine Jean, Lionel Guibout, Hélène Baumel, Nicole Guézou et Jacques Meunier), et de sonder à travers eux ce que le paysage d’aujourd’hui, à l’instar de celui du passé, recèle de force, de poésie, de mystère et de beauté, tel un arrière-pays que l’on parcourt comme un au-delà de nous-même.
Tout en reflétant des univers aux sensibilités, matières et coloris différents, le travail de ces artistes se caractérise par une passion commune pour la nature et le paysage… les paysages, de France et d’ailleurs, dont ils aiment à parcourir les chemins, les monts et les ondes, comme un territoire secret dont chacun nous livre une part de leur infinie poésie.
Cette exposition aura lieu dans le cadre prestigieux de l’Orangerie du domaine national de Meudon. Quel écrin plus approprié à cette célébration de la nature que cette Orangerie ? Construite au milieu du Grand Siècle par Louis Le Vau, l’édifice, entièrement rénové en 2020, est l’une des dernières orangeries encore en fonction en Île-de-France. Abritant des rigueurs de l’hiver les orangers des domaines de Meudon, de Saint-Cloud et des Tuileries, l’édifice se métamorphose à la belle saison en une cathédrale dédiée à la célébration des arts et de la culture.
Cette exposition a été conçue en regard avec la présentation des dessins, aquarelles et pastels de la collection Grellety-Bosviel qui seront mis à l’honneur dans l’exposition « Evasion : les peintures de paysage sortent des réserves » organisée par le musée d’Art et d’Histoire de Meudon du 10 septembre 2022 au 8 janvier 2023.
Les artistes exposants
Jean-Luc Bourel : La présence de l’invisible
Peintre autodidacte né sur une presqu’île de falaises dans une famille de gens de mer, Jean-Luc Bourel appartient à ces rares artistes discrets que l’on se réjouit d’avoir rencontrés. Privilégiant la forme de la variation, ses œuvres sont empreintes d’une profondeur, d’une poésie et d’une finesse qui n’excluent pas pour autant la puissance. De son atelier ouvert sur le ciel de Bretagne, il recrée, dans l’éclat de ses sensations, les paysages qu’il a parcourus, de la Finlande à l’Irlande, en passant par la Chine, jusqu’aux forêts de l’Argoat et la baie de Morlaix.
Sensible avant tout aux métamorphoses du monde, il en suit obstinément les chemins, tout à la fois lumineux et obscurs, les reliant par d’intrépides passerelles desquelles surgit un univers sauvage qui échappe par là-même à sa disparition. Telles des eaux vives, les couleurs minérales jaillissent de la toile, se métamorphosent et se déposent sur elle comme de fines particules d’embruns. Contempler une œuvre de Jean-Luc Bourel, c’est se plonger dans un royaume d’exil intérieuraux contours indéfinissables et au chromatisme subtil.
Christine Jean : une peinture de l’infini
Formée à l’Ecole des Beaux-Arts du Havre, Christine Jean éprouve ses premières émotions esthétiques dans cette ville moderne et minérale, reconstruite sur les ruines des bombardements de 1944, face à l’océan. Elle est alors saisie par le contraste des coexistences : celle du matériau brut et de l’élément naturel, celle de l’angle droit et de la mouvance, celle de la souffrance et de la beauté. Fascinée par la lumière tout autant que par l’empreinte du temps, Christine Jean peint des paysages désertés par l’homme, recouverts de traces, de strates, d’étirements et d’entremêlements. Affranchie des conventions du monde de l’art, son œuvre est avant tout guidée par l’intuition et l’expérimentation, le jeu des énergies et des métamorphoses, celles de l’eau, de la lumière et de la terre.
Au travers de son expérience de la matière (la peinture d’abord, mais également la photographie, le cuivre, l’acide, l’encre et le fusain) s’est établi progressivement un parallèle entre les processus à l’œuvre dans la nature et ceux en cours dans sa pratique picturale. Pour Christine Jean, peindre, c’est mettre en œuvre une transformation, celle du monde, de la nature, des paysages, de la germination à la destruction. Aussi a-telle souvent repeint ses tableaux à la manière d’un palimpseste toujours inachevé où se superposent différents plans de matière colorée. Du haut du ciel ou du fond de la mer, ses paysages s’offrent à nos yeux sous un double regard, celui de deux infinis qui se fondent, celui d’en haut et celui d’en bas.
Lionel Guibout : L’insaisissable chair du monde
Peintre, graveur, pastelliste et sculpteur, Lionel Guibout est de ces artistes polyvalents qui font de leur art un mélange insolite d’effervescence, de luxuriance et de poésie. Ancien élève de l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris, Lionel Guibout est pénétré depuis son plus jeune âge par un amour de la nature qu’il parcourt depuis trente ans, tel un poète globetrotter. De la Bretagne à l’Alsace, en passant par le Canada et l’Afrique, jusqu’à l’Islande et la Chine, sa quête est toujours la même : saisir l’impalpable chair du monde, celle qui touche au plus intime de chacun, à cet inconscient collectif qui nous renvoie toujours, d’où que l’on vienne, à quelque chose de chez nous. Pénétré d’un profond respect pour la nature, Lionel Guibout l’écoute, la caresse et l’observe d’abord, sans jamais la contrarier. Puis, il en ramène l’indicible empreinte dans son atelier et la peint. Au travers d’une figuration explosive qui confine à l’abstraction, ses paysages soudain prennent forme, matière et couleur. Regarder une peinture de Lionel Guibout revient à se plonger de manière immersive dans une nature mouvante, vitale et puissante dont les maîtres mots sont avant tout liberté et immensité.
Hélène Baumel : La majesté du paysage gravé
Formée à l’Ecole Régionale des Beaux-Arts de Valence de 1968 à 1973, Hélène Baumel s’oriente rapidement vers la gravure dans l’atelier de Jacques Clerc. Elle y apprend à maîtriser diverses techniques (taille douce, aquatinte, taille d’épargne, bois et linoléum) et révèle ses aptitudes pour le dessin et la couleur.
Installée depuis 1988 dans son atelier personnel à Orsay, elle ne cesse de parcourir la nature qu’elle aime observer dans tous ses aspects, des paysages de montagnes grandioses aux simples plans d’eau. Prendre le temps de regarder, retenir l’essentiel, se laisser bercer par les rythmes et les mouvances et transcrire ensuite ses émotions, les faire partager au travers de formes où l’infiniment petit se superpose à l’infiniment grand, tel est le langage poétique d’Hélène Baumel. Un langage plastique qui ne fait jamais usage d’un simple vocabulaire d’imitation, mais qui va puiser dans la mémorisation des émotions vécues le terreau de son inspiration et de sa création. Contemplative, majestueuse et apaisante, l’œuvre d’Hélène Baumel a fait l’objet de très nombreuses expositions collectives et personnelles et a été récompensée par plusieurs prix. L’artiste illustre également différents recueils de poésie.
Nicole Guézou : La nature sur bois perdu
Après de nombreuses années consacrées à la peinture à l’huile, Nicole Guézou entre en gravure en 2004. Formée à la technique de la taille-douce dans les Ateliers des Beaux-Arts de la Ville de Paris, elle s’initie ensuite par elle-même au travail sur bois, et notamment sur bois perdu dont elle réinvente la technique.
Son émerveillement pour la nature la conduit à parcourir les régions de France en quête de paysages qu’elle se plaît à suivre au fil des saisons, à l’image de sa série « Montagnes », ou à interpréter en jouant sur les formes et les couleurs, comme dans la plupart de ses gravures en taille d’épargne. Décomposant le motif en nuances et formes quasi abstraites, ses gravures sont le fruit d’un travail patient et méticuleux, superposant les couleurs sur une seule planche gravée pour mieux en faire jaillir la lumière. L’œuvre de Nicole Guézou a été présentée à de nombreuses reprises en France et à l’étranger (Chine, Japon, Canada, Etats-Unis et Bulgarie) et récompensée par de nombreux prix dont celui du Salon des Artistes Français.
Jacques Meunier : Regards d’un poète
Après des études de physique à l’École Normale Supérieure, Jacques Meunier est devenu chercheur au CNRS. Originaire d’un milieu familial tourné vers l’art et la nature, il a toujours exercé en parallèle une activité artistique. Ce fut d’abord la peinture à l’huile et le dessin avec une formation aux Ateliers des Beaux-Arts de la ville de Paris, avant de se tourner vers l’estampe et l’aquarelle. Amoureux de la nature sauvage dans toute sa diversité, il aime parcourir longuement les montagnes et les forêts, les lacs et les cours d’eau, en France et dans le monde. En aquarelle comme en gravure, il parvient à traduire de manière délicate et raffinée l’émotion ressentie devant ces instants fugaces où lumière et couleurs ravissent l’œil et d’où émanent sérénité et majesté.
Jacques Meunier est fondateur avec Nicole Guézou et Françoise Boullier de l’association de graveurs « Ombre et Lumière » qui s’est donnée pour but de promouvoir l’estampe. Ses gravures ont été récompensées par de nombreuses médailles au salon des Artistes Français et au Salon des Beaux-Arts. Passionné de technique, Jacques Meunier mettra à profit cette exposition pour animer aux côtés de Nicole Guézou et d’Hélène Baumel un atelier destiné à expliquer au public les différentes techniques de gravure.
Un brunch et un concert en plein air seront organisés le samedi 10 septembre afin de célébrer de manière festive le lancement de cet événement.
Sa clôture sera marquée, quant à elle, par un récital de piano interprété par Léopold Sers le samedi 17 septembre à partir de 18h à l’Orangerie. A l’honneur, un répertoire en lien avec le paysage, qui égrènera des compositions de Ravel, Debussy, Satie, Chausson et Liszt.
Cette célébration musicale sera suivie le dimanche 18 septembre par le partage d’un dernier verre autour duquel prendra fin ce moment de découvertes, d’échanges et de réjouissances.
Exposition du 9 au 18 septembre 2022, Orangerie du domaine national de Meudon – Rampe de Trivaux – 92190 Meudon (En RER, Ligne C : arrêt « Meudon Val Fleury »)
Photo d’en-tête : Christine Jean Série « Palimpseste »