Pour conclure une année 2022 « Capitale française de la culture » placée sous le signe de la jeunesse, la ville de Villeurbanne organise, avec l’Observatoire des politiques culturelles, une rencontre nationale consacrée aux « cultures et politiques de la jeunesse » les jeudi 11 et vendredi 12 mai. Entre apports de spécialistes et animation de controverses, ces deux journées permettront de débattre des problématiques culturelles comme autant de perspectives pour renouveler les politiques de la jeunesse.
De l’enfance à l’entrée dans l’âge adulte, les différents moments de la jeunesse soulèvent des questionnements spécifiques : Quelles expériences esthétiques et éducatives peut-on proposer aux enfants ? Pour quelles constructions cognitives et sociales ? L’éducation artistique et culturelle est-elle en voie de dépolitisation ? Doit-on accompagner les cultures numériques des adolescents ? Les jeunes adultes réinventent-ils les formes et les motifs de l’engagement politique ?
Problématique générale du colloque
La préoccupation pour la jeunesse n’est pas nouvelle dans les politiques culturelles. Les besoins d’éducation et de médiation, de résorption des inégalités d’accès et d’usage, n’ont pas disparu, ils ont changé de nature. Mais la formulation des politiques culturelles supposées y répondre reste balbutiante, faute d’une véritable réflexion sur cet âge de la vie : les jeunes ne sont pas dépolitisés, ils font de la politique autrement. Ils ne se désintéressent pas des sujets culturels, ils en investissent de nouveaux, fabriquent leurs références culturelles entre eux, entre pratiques de sociabilité et de communication digitales. La jeunesse n’est pas uniforme, elle est traversée des mêmes inégalités économiques et sociales, des mêmes clivages sur le plan des valeurs, des mêmes fractures culturelles et numériques que les autres catégories d’âges.
Objectif du colloque : Changer d’optique pour (re)considérer les relations entre politiques, culture et jeunesse ; s’extraire des découpages sectoriels pour refonder une action publique culturelle pour la jeunesse et se départir des stéréotypes dont on affuble fréquemment les temps de la jeunesse pour mieux accompagner ses comportements culturels.
Autant de perspectives qui traversent les différentes séquences de cette rencontre nationale, structurées autour de trois types d’échanges : doubles regards entre spécialistes (entretiens croisés), controverses entre personnalités publiques sur les manières de politiser le sujet (débats-controverses), et des résultats d’enquête pour enrichir la compréhension des enjeux publics qui en découlent, avec en focus sur les expériences menées durant Villeurbanne 2022, Capitale française de la culture.
Les différents échanges seront nourris des interpellations préparées en amont de la rencontre par des groupes de jeunes et d’acteurs associatifs, culturels et éducatifs de Villeurbanne.
Présentation des différentes séquences
Ouverture : Prendre position : quelle politique pour la jeunesse ? /Jeudi 11 mai à partir de 10h
La « jeunesse » semble omniprésente dans les discours politiques. Chaque président de la Ve République a formulé, durant son mandat ou sa campagne, un grand discours à destination de la jeunesse. Pour autant, l’intervention de l’État en matière de politique de jeunesse est-elle cohérente ? Quelle politique publique pour la jeunesse faut-il porter aujourd’hui ? Les recommandations du Sénat en 2022 sur « Jeunesse et citoyenneté : une culture à réinventer » interrogent sur la manière dont la société considère sa jeunesse et sur le sens de la politique à mener autour d’elle. Entre Service civique et Service national universel (SNU), quel rôle doivent prendre l’État, l’Éducation nationale et les collectivités territoriales ? Ces intentions sont-elles en phase avec les aspirations des nouvelles générations ? Quelle est la situation dans les autres pays européens ? Si l’on considère la jeunesse comme une période de la vie où les individus sont vulnérables, sans doute faut-il continuer à penser collectivement et à agir publiquement pour elle : il est temps de prendre position.
Séquence 1 : Le temps de l’enfance /jeudi 11 mai à partir de 13h30
La place accordée aux activités artistiques et culturelles à l’école renvoie plus largement aux types d’apprentissages et d’éveil que l’on souhaite promouvoir auprès des plus jeunes. Et donc à différentes conceptions de la pédagogie et de l’institution scolaire qui s’inscrivent dans des querelles sur l’école déjà anciennes. Quelle approche artistique y adopter ? Dans quels rapports aux savoirs « dits » fondamentaux ? La présentation des résultats d’une enquête en cours sur le dispositif des Minimixes, expérimenté à Villeurbanne, permettra de rendre compte d’une tentative à la fois originale, emblématique et symptomatique du développement de la pratique artistique à l’école. Le débat s’étendra à la petite enfance du fait de l’engouement récent pour les notions « d’éveil » et de « santé culturelle » des tout petits. Que recouvrent ces termes ? Sur quels présupposés politiques, sociologiques, éducatifs et philosophiques sont-ils fondés ? Qu’en est-il réellement des modes de transmission et de socialisation culturelle durant les premiers âges de la vie ? Que nous apprennent les études du Département des études, de la prospective, des statistiques et de la documentation du ministère de la Culture à ce sujet ?
Séquence 2 : La vie adolescente /Jeudi 11 mai à partir de 16h30
L’Éducation artistique et culturelle s’est imposée ces dernières années comme une priorité partagée de l’État et des collectivités territoriales. L’objectif « 100% EAC » dénote un volontarisme politique qui sous bien des aspects se présente comme l’ultime réponse aux promesses non tenues de la démocratisation culturelle. En devenant une compétence scolaire, l’EAC aurait-elle perdu sa visée politique émancipatrice, de résistance et d’attitude critique ? Une question qui se pose d’autant plus que le fossé se creuse entre les institutions scolaires et les cultures numériques des adolescents. Dès lors, comment caractériser l’environnement culturel des adolescents ? Qu’est-ce qui distinguent les pratiques culturelles digitales des générations récentes ? L’enquête menée auprès de collégiens de la Métropole de Lyon permettra d’éclairer les tendances les plus récentes sur les mutations des pratiques culturelles des jeunes. Elles consacrent les smartphones (et les applications qu’ils embarquent) comme les premiers « terminaux culturels » de cette catégorie d’âge. Comment mieux accompagner les adolescents au sein de ces espaces numériques ? Comment éviter leur mise en danger tout en favorisant la créativité et la sociabilité qu’ils y déploient ?
Séquence 3 : l’entrée dans l’âge adulte /Vendredi 12 mai à partir de 9h30
Décennie après décennie, la jeunesse inquiète. Considérée comme trop politisée et réactionnaire à la fin des années 1960, elle serait aujourd’hui « trop » dépolitisée et désengagée. 71 % des jeunes de 18-24 ans n’ont pas voté au second tour des élections législatives en 2022 (Ipsos). Focalisée sur l’abstention et ses chiffres, notre vision de cette jeunesse frôle parfois le catastrophisme. Aujourd’hui comme hier, la jeunesse cristallise les enjeux de son époque et se retrouve au cœur des discours politiques, tous bords confondus, sans qu’on ne lui dédie pour autant une politique publique cohérente. Et si nous changions nos représentations et cherchions à la comprendre dans sa complexité et sa réalité sociale afin de lui donner toute sa place ? Comment à l’intérieur d’une même génération l’engagement politique emprunte-t-il des chemins différents ? La défiance envers les institutions de la Ve République est-elle le signe d’une dépolitisation de la jeunesse ou l’expression d’une profonde aspiration au renouvellement démocratique ? Pour illustrer ses questionnements, la méthode employée pour la mise en place du Festival Réel (Villeurbanne, capitale française de la culture 2022), voulue avec, par et pour les jeunes, offrira un témoignage direct d’une démarche participative.
Clôture du colloque le vendredi 12 mai à 12h
Colloque les 11 et 12 mai 2023 au Théâtre national populaire – 8, place Lazare-Goujon à Villeurbanne
Gratuit sur inscription en ligne