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Mobilisation pour conserver les forêts françaises

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A partir de la contribution de six ONG de conservation de la Nature au débat national sur l’avenir des forêts face aux crises climatique, écologique et sociale (1), le constat d’une rupture majeure de tendance climatique est aujourd’hui amorcée qui fait vivre à nos forêts des bouleversements prégnants. Des mesures doivent être prises et mises en place. L’une d’elles, Nature Impact, est une initiative innovante du WWF France destinée à financer les projets des propriétaires forestiers souhaitant agir en faveur de la biodiversité dans les forêts françaises. Sa mission : réunir les propriétaires forestiers et les entreprises désireuses de s’engager autour d’un projet de terrain commun ayant un impact positif réel sur la nature.

En Outre-mer comme en métropole, les forêts françaises méritent toute l’attention que la société et les politiques leur portent depuis quelques années. Elles vivent, comme les forestiers, un moment clé de leur longue histoire. Celle-ci est depuis toujours une affaire de diversité, de temps long et d’espace. Toutefois, une rupture majeure de tendance climatique est aujourd’hui amorcée. Son impact sur les forêts prend la forme d’une succession de phénomènes accidentels de plus en plus fréquents (dépérissement, tempêtes, incendies…) qui seront de plus en plus prégnants au cours de ce siècle. Si les modalités, temporalités et extensions géographiques des changements sont encore largement inconnues, la seule voie d’avenir sans regrets s’appuie sur un diagnostic permanent et partagé des évolutions en cours, et sur une gestion adaptative largement fondée sur la biodiversité des forêts comme facteur clé de leur résilience.

Mais la politique forestière est également une affaire de société. Il est donc impératif de partager entre les forestiers et la société un contrat social clair, afin de faire face ensemble aux crises climatiques à venir et à leur impact sur les territoires. Prendre en compte toute la diversité territoriale, l’attente et les inquiétudes fortes de la société sur l’avenir des forêts – y compris de la part des forestiers eux-mêmes – demande d’investir sans attendre et massivement dans une dynamique d’apprentissage collectif et un nouveau paradigme de la gestion des forêts.

Préserver la biodiversité et conserver les forêts françaises

Les forêts françaises métropolitaines couvrent aujourd’hui environ 16,9 millions d’ha, soit 31 % du territoire. Sur le plan du statut de la propriété, on distingue 1,8 million d’hectares (11 %) de forêts domaniales (appartenant à l’État), 2,9 millions d’hectares (17 %) de forêts des collectivités (essentiellement des communes mais aussi des départements). On compte 11 371 communes « forestières » (soit près d’un tiers des communes françaises), regroupées pour environ 6 000 d’entre elles au sein de la FNCOFOR (Fédération nationale des communes forestières). Enfin, 12,2 millions d’hectares (72 %) des forêts sont privées.

Ces forêts offrent de multiples services écosystémiques : rempart contre le réchauffement climatique, protection de la biodiversité… Face aux crises sociale, climatique et de la biodiversité, il est nécessaire d’agir. Les forêts françaises sont sous pression et il est important de s’engager pour leur conservation et pour la préservation de leur biodiversité. 

Nature Impact est une initiative innovante proposée par le WWF France, qui prend la forme d’un fonds dédié visant à la fois protection de la biodiversité et séquestration carbone. L’initiative finance des projets de préservation, restauration et gestion durable des forêts en France hexagonale. Objectif : la conservation effective de 15 000 ha de forêts (équivalent à 30% de la surface de forêts mises en réserves par l’État et gérées par l’ONF), sur des durées allant jusqu’à 99 ans.

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Soutenir les propriétaires et gestionnaires forestiers

Les forêts sont essentielles dans notre vie. Elles offrent de nombreux services écosystémiques qui garantissent et améliorent notre quotidien. Mais entretenir une forêt, se mettre dans une démarche de gestion durable et œuvrer pour la conservation et la restauration de sa biodiversité, demande de l’énergie et des ressources financières. Il est alors nécessaire d’accompagner les propriétaires et gestionnaires forestiers qui œuvrent pour l’intérêt général.

Les forestiers ne peuvent faire cet effort seul. Un effort collectif est nécessaire et c’est pour cela que le WWF a créé Nature Impact. L’initiative a pour ambition de faire se rencontrer les propriétaires et gestionnaires forestiers et des contributeurs, tels que des entreprises ou des grands donateurs autour d’un but commun : la préservation des forêts françaises et de leur biodiversité.

La charte et la gouvernance de Nature Impact

La charte fondatrice de Nature Impact détaille le fonctionnement de l’initiative et les principes sur lesquels elle s’engage. Un audit annuel par une tierce partie est prévu afin de s’assurer que les principes énoncés dans la charte fondatrice sont respectés, et les objectifs d’impacts atteints.

La gouvernance de Nature Impact est constituée de manière à être à la hauteur des enjeux et de la nature de l’intérêt public au profit duquel elle travaille. Pour cela, elle est organisée autour :

  • d’une équipe pluridisciplinaire au sein du WWF France, qui assure la mise en œuvre de l’Initiative et de son Comex qui décide ;
  • d’un Comité des Parties Prenantes constitué de représentants du monde économique et de la société. Il vérifie le bon fonctionnement de l’Initiative et garantit sa contribution au bénéfice de l’intérêt général ;
  • d’un Comité Technique constitué d’experts forestiers, de scientifiques et de naturalistes. Ils discutent et valident les outils et méthodes proposées par l’équipe WWF, et sélectionnent les projets à financer.

Sur le plan de sa composition, la forêt métropolitaine est constituée en majorité de feuillus (62 % des surfaces). Les conifères représentent 21 % et les forêts mixtes 16 %. Les forêts publiques constituent, après le domaine public maritime, le principal patrimoine naturel public de notre pays. Elles sont souvent écologiquement anciennes, héritées d’une longue histoire royale ou ecclésiastique.

La forêt privée appartient à plus de 3 millions de propriétaires différents et est très morcelée du fait de son origine majoritairement récente (boisement post déprise agricole depuis le minimum forestier du XIXe siècle), aussi les peuplements forestiers y sont également souvent écologiquement jeunes.

Enfin, les forêts d’outre-mer sont une extraordinaire richesse. Trop souvent, la multitude de rapports de parlementaires et de hauts fonctionnaires sur la forêt, depuis de Jouvenel (1978) et Duroure (1982), ont éludé l’outre-mer. Pourtant, l’outre-mer, ce sont plus de 9,4 millions d’ha (tous types de forêts, mangroves et cocoteraies comprises), certes essentiellement en Guyane (8,1 millions d’ha). Mais c’est également et surtout une extrême diversité qui fait de la France l’un des rares pays du monde à avoir une part de responsabilité sur tous les biomes forestiers de la planète (némoral, méditerranéen, tropical sec et humide, sans oublier des mangroves et même une forêt boréale à Saint-Pierre-et-Miquelon). La biodiversité y est
considérable.

En outre-mer, les forêts sont majoritairement publiques. Elles sont indispensables à certaines populations (agroforesterie) et pour corriger certains des excès des hommes (phyto-extraction des polluants, purification des eaux) et certains caprices de la nature très prégnants notamment dans les îles fragiles (cyclones, vagues scélérates et tsunamis, pluies diluviennes, etc.). Les forêts d’outre-mer, c’est plus de richesse, plus de biodiversité mais également plus de menaces et des enjeux humains et écologiques spécifiques à chaque entité, qu’il est important de prendre le temps d’analyser finement. (Source : AgroparisTech.hal.science, 23 avril 2021)

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Les cinq principes de gestion d’un bien commun

Les six O.N.G. de conservation de la Nature (Humanité & Biodiversité, France Nature Environnement, LPO, Comité français de l’UICN, Réserves naturelles de France, et Fondation WWF) proposent un argumentaire suivant cinq grands principes de gestion du bien commun que sont les forêts. Ils sont illustrés d’exemples en métropole et dans les Outre-mer.

PRINCIPE 1. Assurer une gestion multifonctionnelle valorisant tous les services écologiques des forêts.
Tout en relevant du droit de propriété, la forêt est également sous certains aspects un bien commun car pourvoyeuse de services, riche d’une biodiversité intrinsèque, et d’une capacité de résilience dont tout propriétaire ou gestionnaire est dépositaire, et dont il a la responsabilité devant la société. Ce fait impose une approche multifonctionnelle pour répondre aux enjeux.

PRINCIPE 2. Mettre la biodiversité au cœur de la politique forestière pour faciliter l’adaptation de la gestion.
Que cela soit dans les forêts exploitées ou les forêts protégées visant la pleine naturalité, la biodiversité a un rôle central, encore plus clé en temps
de crise climatique : elle est le moteur de la production de ressources et de services de l’écosystème forestier. Elle représente également une valeur en soi, valeur d’existence du vivant mais aussi une valeur culturelle (beauté, symphonie naturelle, pédagogie) et psychologique (émotions, émerveillement etc.) pour la société.

PRINCIPE 3. Mettre forêts et forestiers en capacité de répondre aux enjeux de la crise climatique.
Les forêts sont au cœur des enjeux de la politique climatique d’atténuation et d’adaptation. Elles ont un rôle clé à jouer dans l’atteinte de l’objectif de neutralité-carbone de la France en 2050 et dans la transition écologique de notre économie. Plus que jamais, les politiques climatiques et de préservation de la biodiversité sont liées aux enjeux de transformation de l’économie.

PRINCIPE 4. Accroître l’écoute des attentes de la société, pour mieux y répondre.
Les inquiétudes et les attentes de la société évoluent au sujet de la forêt. Elles sont depuis quelques années très vives : certaines pratiques de gestion ne sont plus partagées par nos concitoyens (ex. des coupes rases, de la substitution d’essences et de la malforestation) ; les premiers dépérissements du fait des changements climatiques les inquiètent. Ces attentes renvoient aux interrogations de certains forestiers eux-mêmes.
Rapprocher les forestiers et la société nécessite de mettre les politiques forestières au diapason des évolutions démocratiques de la société.

PRINCIPE 5. Insérer les forêts dans l’aménagement du territoire comme infrastructure verte de l’économie.
Enfin, d’un point de vue économique, l’exploitation des forêts irrigue une économie fondée sur des ressources forestières renouvelables que les six
O.N.G. reconnaissent importante pour la France, y compris pour le développement local des territoires d’Outre-mer. Les forêts sont ainsi le support essentiel à une filière économique créatrice de valeurs (dont l’emploi) dans les territoires. Les politiques publiques doivent viser à valoriser les filières de qualité.

Le dérèglement climatique et l’érosion de la biodiversité nous appellent à trouver des réponses à des questions extraordinairement complexes : les enjeux écologiques, économiques et sociaux n’y sont plus dissociables les uns des autres, pas plus que le court terme ne l’est du long terme.
C’est pour cette raison que l’initiative de Nature Impact repose sur  deux éléments, liés entre eux : les arbres ne doivent pas nous cacher la forêt, pas plus que la forêt ne doit nous faire oublier la dynamique complexe du vivant dont elle est la manifestation. Ensuite, évoquer les services écosystémiques offerts par la forêt appelle à s’interroger sur ce que la société en attend. Parmi ces attentes de la société, l’atténuation des changements climatiques et l’adaptation à ceux là entraînent une responsabilité majeure des acteurs forestiers, solidaires de toute la société dans ce combat vital.

(1) Rapport « Forêts françaises en crise »

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