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Désarmer le béton – Ré-habiter la Terre

Désarmer le béton – Ré-habiter la Terre, de Léa Hobson – Éditions La Découverte, 9 octobre 2025 – 208 pages

Dans Désarmer le béton – Ré-habiter la Terre, Léa Hobson engage une vaste réflexion militante et architecturale qui tient ensemble critique écologique, esthétique du sensible et appel à une transformation politique profonde, en partant du constat que le béton n’est pas un simple matériau parmi d’autres, mais l’expression concrète d’un rapport violent au monde, une arme structurelle du capitalocène. Mais surtout une « arme de destruction massive du vivant ».

Elle nous invite à « regarder le sol sous nos pieds » : à déconstruire la filière du béton depuis l’extraction massive du sable jusqu’à la diffusion des normes et des discours qui imposent cette “norme bétonnée” comme horizon indiscutable.

Aujourd’hui, ce n’est plus un secret, le béton est un des matériaux les plus polluants de la planète. Chaque seconde, 150 tonnes de béton sont coulées dans le monde. Pas de béton sans ciment, dont la production émet près de trois fois plus de CO² que le transport aérien. Pas de béton sans sable, deuxième ressource naturelle à être pillée, après l’eau. Pas de bétonisation sans artificialisation des sols, fatale pour la biodiversité et qui dévore les terres agricoles. Malgré ces constats alarmants, pointés depuis une décennie, il continue de couler à flots. La question devient urgente : comment faire tomber le béton ? 
Davantage produit que le plastique, il façonne un monde invivable. Face à cette arme du désastre écologique, l’auteure décrypte tout un système, en pointant, d’un côté, ses failles et, de l’autre, les forces qui permettent d’y résister. 

Dans cette enquête érudite et accessible, l’autrice met en lumière le rôle central des “bétonneurs” — non les maçons ou artisan·es, mais les décideurs, les industriels, les promoteurs, les technocrates — qui construisent les règles du jeu normatif, maintiennent les liaisons incestueuses entre puissance publique et capital du bâtiment, et perpétuent une logique de domination matérielle et écologique. Elle relie les grandes chaînes d’extraction, la production de ciment (avec ses émissions de CO₂ massives), l’artificialisation des sols, la destruction de la biodiversité, la dépossession des communs, pour montrer que le béton instaure un monde où le vivant est littéralement écrasé.

Mais elle ne se contente pas de cette dénonciation : elle cherche à dessiner les contours d’un possible “ré-habiter” — non le retour à une nostalgie rurale, mais la réaffirmation d’une relation à la terre comme matière vivante, d’un acte de bâtir conscient, collectif, frugal, contextuel. 
Elle appelle à des alliances entre architectes, écologues, mouvements sociaux, habitant·es, à repolitiser l’architecture, à penser des “murs à panser”, des réparations, des démantèlements, à remettre en question le patriarcat du béton (car Hobson souligne aussi que ce régime matériel est façonné par des normes genrées).

Son propos se fait sensible aussi par l’usage de schémas, d’anecdotes de luttes locales, d’exemples concrets : il ne s’agit pas de discours abstraits, mais de gestes, de vies, de sol. Si l’ouvrage impressionne par la force de son diagnostic — le béton comme arme de destruction massive du vivant — il demande aussi de penser l’échelle d’un changement matériel, social, politique : comment passer de la critique à l’action ? C’est dans cet espace que Hobson ouvre une brèche : refuser la norme imposée, reprendre la filière, inventer des manières d’habiter autres. Désarmer le béton se lit comme un manifeste, une cartographie du pouvoir matériel, et une invitation à l’émancipation de la Terre — à réapprendre à être avec le sol. Il s’agit de repenser l’acte de bâtir, pour « ré-habiter la Terre. Habiter autrement. Organiser la résistance pour démanteler le béton et son monde.

Lire un extrait

Léa Hobson est architecte, scénographe et militante écologiste franco-anglaise. Elle est diplômée de l’École d’architecture de Paris-Belleville en 2011 et de la Kingston University. Son parcours atypique et son engagement lui ont permis de développer une pratique créative contextuelle. Attachant une importance particulière à l’existant, elle travaille en architecture sur des réhabilitations et des rénovations. En parallèle, elle milite depuis une dizaine d’années pour défendre les terres face à la bétonisation et artificialisation de sols. Depuis 2021, elle est engagée dans le mouvement des Soulèvements de la Terre, lancé à Notre-Dame-des-Landes.

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