Alors que le marché de l’art a longtemps été épargné par le digital, car jugé incompatible, il entreprend depuis quelques années maintenant sa mutation numérique, notamment grâce au développement des ventes d’œuvres d’art en ligne, en très forte croissance. Il a d’ailleurs progressé de 24% l’an dernier, et sur la base de cette tendance, les ventes d’art en ligne pourraient atteindre 9,58 milliards $ d’ici 2020.
La digitalisation de l’art en ligne est aussi une question de génération. Certes les personnes âgées, de par leur pouvoir d’achat plus important, restent à l’heure actuelle les plus gros acquéreurs d’œuvres et pas seulement sur les canaux « traditionnels » puisque 51% des acheteurs d’art le font aussi en ligne.
Mais les digital natives, qui ont bientôt 30 ans, sont susceptibles de commencer, aujourd’hui, à s’intéresser à l’achat d’art. C’est une génération qui va de plus en plus sur le web pour chercher des informations ou pour effectuer des achats. Il était donc normal que les nombreuses plateformes et galeries d’art en ligne cherchent à répondre aussi à leurs besoins.
En se lançant, ces plateformes ont pour but de démocratiser l’art en le rendant accessible à tous. L’idée est de pouvoir leur permettre d’acheter de l’art facilement, et de proposer des œuvres pour tous les budgets. Il y a quelques années, il était encore difficile de se lancer dans l’achat d’art : on n’osait pas pousser la porte d’une galerie, le processus d’achat était très fermé à tel point que peu de personnes osaient franchir le pas. Mais aujourd’hui, l’art n’est plus réservé aux élites.
Grâce au digital, tout le monde peut commencer une petite collection, que ce soit pour le plaisir émotionnel, pour des raisons sociales ou pour investir, le passage à l’acte est facilité. On assiste donc à la « naissance » de nouveaux acheteurs, plus jeunes, moins élitistes. En 2016, on estime que 46% des 18-35 ans ont déjà acheté des œuvres d’art en ligne. Notre étude « Art Trade Report » révèle également que 68% des 18-35 achèteront davantage, à travers les sites de ventes en ligne (53%). Le plaisir émotionnel est le principal facteur qui les poussent à l’acte d’achat pour 92% d’entre eux.
La force de l’art en ligne est d’abord de proposer une diversité de choix extrêmement importante, bien plus que dans une galerie physique. Ce sont des milliers d’œuvres, partout dans le monde qui sont disponibles pour tous et chacun. Des milliers d’artistes internationaux sont désormais à portée de clic, de quoi démultiplier les chances de trouver le coup de cœur.
Les collectionneurs n’ont plus à écumer les galeries pour se renseigner sur un artiste qu’ils aiment. Ils peuvent simplement consulter des sites pour obtenir le plus d’informations avant de faire appel, si besoin, à un expert. Internet offre aussi plus de transparence aux acheteurs, notamment pour les prix. Les prix des œuvres sont indiqués clairement et les ventes aux enchères sont plus efficaces et plus ciblées. Par ailleurs, les galeries d’art en ligne offrent une discrétion qui peut être un critère important pour les acheteurs lorsque l’achat concerne des œuvres rares ou sensibles.
Enfin, on assiste à une ubérisation du marché de l’art en ligne qui voit cohabiter enchères et ventes à prix fixe, modèles de vente avec et sans intermédiaires. De nouveaux intermédiaires arrivent dans le secteur et les modèles établis bougent. Au Royaume-Uni par exemple, les antiquaires ont décidé de créer leur propre site de vente aux enchères afin de ne plus passer par les commissaires-priseurs. Les acheteurs passent maintenant directement via les sites internet dédiés et n’ont plus à payer de frais supplémentaires, comme lors de ventes aux enchères.
Lors de notre étude « Art Trade Report », nous avons interrogé 127 galeries et marchands d’art représentant une large gamme d’objets d’art et de collection. 63% de ces galeries étaient des galeries d’art contemporain. Si cet art rencontre un fort succès en ligne, c’est notamment parce que les plateformes mettent en avant de nombreux artistes émergents, qui n’ont pas encore de cote et dont les œuvres sont encore abordables.
En fonction des plateformes, on estime que les œuvres qui se vendent le plus sont comprises entre 500 et 2000€. Au-delà de ces montants, les acheteurs sont confrontés à une barrière psychologique, ils dépensent moins car ils ont encore besoin de voir l’œuvre en réalité.
Dans ce contexte artistique en pleine évolution, la place des galeries traditionnelles est amenée également à évoluer afin de s’adapter à ces nouveaux modes de distribution.
28% des interrogées dans notre étude ont indiqué qu’elles offraient désormais la possibilité à leurs clients d’acheter et de payer en ligne, un chiffre en hausse par rapport à 2013. Toutefois, il semble aujourd’hui qu’elles soient en retard car encore hésitantes. Elles n’ont pas encore su mettre en place de réelle stratégie.
En France, elles sont de plus en plus nombreuses à lancer leur site internet afin de se promouvoir au-delà des frontières physiques et de toucher de nouveaux clients.
Néanmoins, des frictions subsistent entre le modèle traditionnel fondé sur la relation avec la galerie/le marchand d’art et le modèle en ligne du « click and buy », où l’interaction entre l’acheteur et le vendeur est souvent limitée, quand elle n’est pas tout simplement inexistante. Les galeries traditionnelles ont néanmoins quelque chose que le digital ne pourra pas leur substituer : cette ambiance si spéciale, ce rituel excitant de la découverte d’une galerie et de ses œuvres.
Pour s’adapter au marché, certaines galeries font appel à des intermédiaires qui peuvent les soutenir dans leur présence digitale. 41% des galeries ont ainsi déclaré qu’elles réalisaient des ventes en ligne par l’intermédiaire de sites de vente tiers et 26% d’entre elles prévoient de s’associer à une plateforme d’e-commerce tierce dans un futur proche.Mais galeries en ligne comme galeries traditionnelles ne doivent pas négliger leur présence sur les réseaux sociaux, ceux-ci étant l’un des meilleurs moyens pour rester proche de ses clients et de ses acheteurs potentiels.
En bref, si les canaux digitaux sont indispensables pour que les galeries traditionnelles puissent toucher et renforcer la relation avec leur public et leur clientèle actuels, ils sont aussi une formidable opportunité d’accéder à de nouveaux marchés !
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