Dans une étude publiée le jeudi 7 septembre dans le journal scientifique Climatic Change, par l’ONG américaine Union of Concerned Scientists (UCS), des chercheurs ont analysé la contribution des émissions historiques des pays industrialisés et des pays en développement à l’augmentation de la température de la planète. Des résultats selon lesquels près des deux tiers des émissions industrielles totales de CO2 (carbone) et de CH4 (méthane) peuvent être attribuées à 90 grands producteurs industriels de carbone : ils sont responsables de près de 50 % de la hausse des températures et d’environ 30 % de l’élévation du niveau des mers observées depuis l’ère préindustrielle.
Photo © Owen Byrne – Flickr
Cette étude jette les bases de la traçabilité des émissions provenant des producteurs industriels de carbone par rapport aux impacts climatiques spécifiques : Ainsi, selon UCS, les 90 principales entreprises productrices de pétrole, gaz, charbon et ciment sont responsables de 57 % de la hausse de la concentration atmosphérique en CO2, de près de 50 % de la hausse de la température moyenne mondiale, et d’autour de 30 % de la hausse du niveau moyen des mers observées depuis 1880. Parmi ces 90 entreprises, les 50 entreprises privées, dont Exxon, Chevron, Shell BP et Total, sont responsables de 16 % de la hausse de la température et 11 % de la montée des mers.
Déjà en septembre 2013, une étude publiée par le Carbon Disclosure Project (CDP) déclarait cinq groupes français dans la liste des 50 plus gros émetteurs de CO2 dans le monde : Total, Saint-Gobain, Air Liquide, EDF et GDF Suez. Seize entreprises de ce « top 50 » étaient américaines (Wal-Mart, ExxonMobil Corporation…), et six anglaises.
L’étude de l’UCS renforce la prise en compte scientifique et politique des responsabilités historiques en matière de changement climatique. La question de la responsabilité en matière de changements climatiques est au cœur du débat public et politique sur les mesures à prendre pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et limiter les effets néfastes. La Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) a établi le principe des « responsabilités communes mais différenciées » entre les nations, signalant la reconnaissance du fait que les nations qui ont produit la plus grande part des émissions historiques avaient une plus grande responsabilité pour éviter « l’interférence anthropique dangereuse avec le climat » (CCNUCC 1992; CCNUCC 1998).
Conformément à ce principe, l’Accord de Paris établissait des engagements communs, par exemple en ce qui concerne les émissions nettes mondiales de gaz à effet de serre dans la seconde moitié du siècle, tout en laissant une certaine souplesse dans les efforts d’atténuation pour tenir compte des différentes capacités et circonstances nationales.
En dehors du domaine de la CCNUCC, des discussions sociétales plus larges ont commencé à considérer les responsabilités des acteurs non étatiques en matière de climat. Il s’agit notamment des grands émetteurs individuels, quelle que soit leur nationalité et les industries à forte émission, quel que soit l’endroit où elles sont constituées.
Il s’agit également des grandes multinationales d’énergie fossile à la base de la chaîne d’approvisionnement en carbone, qui, à ce jour, n’ont aucune responsabilité à l’égard des produits commercialisés dans le cadre des régimes politiques existants, mais dont les responsabilités futures font l’objet d’une attention croissante dans les sphères savantes, politiques, institutionnelles, juridiques et publiques.
Sur ces 90 grands producteurs de carbone, 50 sont détenus par des investisseurs, 31 appartiennent majoritairement à l’État et neuf sont des industries d’État en cours ou anciennement planifiées par l’État. La plupart de ces 90 principaux producteurs de carbone sont toujours en activité, à quelques exceptions près (par exemple, les industries gérées par le gouvernement dans l’ex-Union soviétique).
« Nous savions depuis longtemps que les énergies fossiles sont le principal contributeur au changement climatique. Maintenant, nous savons aussi dans quelle mesure les produits de telle ou telle compagnie ont fait monter les températures et le niveau des mers », déclare Brenda Ekwurzel, auteure principale du rapport et directrice des sciences du climat de l’UCS.
L’UCS estime que ces compagnies devraient prendre en charge une partie des coûts gigantesques liés aux impacts du changement climatique et aux investissement nécessaires pour l’adaptation au réchauffement à venir.
(Source : Reporterre – 08/09/2017)
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