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DMLA, démêlée ou emmêlée – Le « point » sur le Parkinson de mes rétines

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La dégénérescence maculaire est une maladie de la partie centrale de la rétine, la macula. Elle apparaît à partir de l’âge de 50 ans et affecte progressivement les capacités visuelles des personnes atteintes. Cette maladie touche 1.5 millions de personnes en France et représente l’une des causes principales de malvoyance, voire de cécité dans le monde. Les causes de cette maladie sont encore inconnues et les médecins se trouvent dépourvus en traitements efficace. Aussi, quand une personne est diagnostiquée elle se trouve confrontée à un parcours du combattant médical éprouvant, tout en constatant la perte progressive de ce qui nous est le plus précieux : la vue.

Paule Pérez est éditrice et psychanalyste. Elle a éprouvé les premiers symptômes de cette maladie il y a plusieurs années et nous livre ici un témoignage rare sur ses épreuves et les pistes de solutions qu’elle appelle de ses vœux.   

 

On parle couramment de « la » rétine comme d’un organe assurant la fonction « miroir » de la vision, en transmettant les images au cerveau qui les traite et nous les transmet. 
La rétine (1) qui est constituée de tissu de type nerveux, de neurones, se compose d’une partie plus éloignée du centre, la rétine périphérique, et d’une partie centrale, la macula avec en son propre centre, une surface minuscule appelée fovéa (2). Entre la rétine périphérique et la macula-fovéa (3), la composition histologique diffère notamment en concentration et répartition des cellules cônes et bâtonnets.
Si un organe se définit par sa forme et sa fonction, alors on peut poser que, malgré la petitesse de sa taille, la rétine au sein de l’œil est à considérer à la fois comme un constituant physique de l’appareil oculaire-optique et comme un ensemble formé de deux éléments, qu’on pourrait appeler le « système rétinien », à la manière dont on parlerait de l’œsophage et de l’estomac dans le système digestif.
 
Système rétinien précisément formé de deux organes qui, bien que comportant des composantes semblables, se distinguent par leur composition et leur fonction : un pour voir globalement le monde, l’autre pour lire, voir le plus fin.
Prendre en compte radicalement cette distinction, entre les deux parties, on l’aura compris, est propre, voire nécessaire, à ouvrir des axes de travail féconds sur la DMLA, qui est principalement la « cécité de la lecture ».
En tout état de cause, il s’agit de ne pas accepter comme une fatalité la dégénérescence dans son ensemble, cause de malvoyances, pas davantage que la perte de la fovéa et sa fondamentale fonction, distinctive de l’espèce humaine, la lecture.
 

Etat des lieux

Il ne fait aucun doute aujourd’hui, que les changements de méthode impulsés à l’occasion de la crise sanitaire du Sida (4), et l’appel à la pluridisciplinarité au sens large, patients/médecins/chercheurs/laboratoires, constitue un exemple de réussite du travail en commun, qui a fait utilement avancer la recherche.
 
Pour ce qui concerne la DMLA (dont les estimations du nombre de personnes atteintes en France à court/moyen terme portent sur plus de 2 millions (5)), le cloisonnement ou ce qui est encore une bien trop faible coopération entre les disciplines médicales et scientifiques – en particulier ophtalmologie et neurologie – semble constituer un handicap sérieux pour le progrès en ces domaines. 
 
En ce qui me concerne, depuis quelque temps, j’avais toujours besoin de plus de lumière. Je savais aussi que j’avais des « druses » (6), mais tout le monde peut en avoir.
Un matin, une de mes rétines s’est comme auto-détruite : les lignes de mon ordinateur se sont mises à onduler et j’ai vu comme un trou devant moi.
C’était la « déclaration » d’une dégénérescence maculaire, pas tellement liée à l’âge (la petite soixantaine). J’ai perdu assez rapidement la vue, par paliers. Il semblerait donc que la maladie commence par la fovéa, puis qu’elle s’étende. C’est en tout cas mon expérience.
 

Des spécialistes mis en échec dans leurs pratiques

Au fil des années, j’ai consulté plusieurs ophtalmologistes figurant sur des listes de « spécialistes de la DMLA ». Les uns après les autres m’ont dit que, dans mon cas, il n’y avait rien à faire. Sauf une fois, une injection d’un produit hors de prix, le Lucentis, employé dans une tout autre pathologie, et qui est ici utilisé pour scléroser dans l’œil des vaisseaux capillaires rétiniens, qui non seulement se sont multipliés mais ont éclaté. De là, l’appellation de la forme « humide » de la DMLA dite exsudative, tandis que dans la forme « sèche », dite atrophique, les capillaires n’ont pas éclaté, ou pas encore. Quand ces vaisseaux éclatent, cela produit une micro-hémorragie qui obère comme par une tache la fonction « miroir » de la rétine. Ce produit enraie donc, une fois celui-ci apparu, cet effet de la DMLA humide. Une forme sèche peut le rester. Le produit ne « guérit » pas : il n’agit pas sur le principe générateur de la pathologie, qui lorsqu’elle reste sèche obère également la vision par l’essentiel de la maladie qui est bien la détérioration des cellules en elles-mêmes.
 
Cette injection a donc enrayé une dégradation du tissu à son endroit précis, mais n’a pas restauré la fonction de l’organe rétine : la perte de vision liée à l’effet lésion de cette dégénérescence perdure, et la récidive à un autre endroit est possible. On connaît des patients qui reçoivent plusieurs injections en fonction des événements rétiniens, voire en prévention.  Effet partiel matériel sur le tissu, mais pas toujours sur le fonctionnement. On pique quand les capillaires se multiplient, aléatoirement, et éclatent ou menacent d’éclater, il faut donc faire et refaire ces OCT – examens hors de prix – en espérant passer devant l’appareil un jour où ce n’est pas trop tard pour piquer. Cela non plus n’a pas été précisément explicité ; je ne suis d’ailleurs pas sûre que cet aspect aléatoire le soit auprès des patients. Un de ces spécialistes m’a donc fait revenir plusieurs fois par an. Il (7) voyait « tellement de monde » qu’il restait planté devant son appareil, le nez dedans, au point qu’un jour, il m’a appelée du nom de la patiente suivante. Je me suis souvent demandé comment ces praticiens (8) pouvaient s’autoriser à se dire « spécialistes ».
 
Un jour, un nouvel ophtalmologiste, moins prétentieux et plus sérieux, m’a dit : « votre état a un nom : cécité légale », et il l’a écrit. C’est lui qui m’a appris et non pas ses confrères, que lorsque l’acuité visuelle est égale ou inférieure à un dixième, la Loi nous déclare bien en état de « cécité légale ».
Cela a été pour moi une « catastrophe » au sens logique, autant qu’un soulagement : mutation d’identité sociale autant qu’intérieure, et reconnaissance de ma situation par une Carte d’invalidité.
 
Contrairement à ce qui se passe dans le glaucome, c’est la vision centrale qui se dégrade dans la dégénérescence maculaire. Or, j’y reviens, la vision centrale est la seule qui permette de lire, c’est-à- dire de voir « le plus fin ». Dans l’ensemble du règne animal, la lecture est une activité spécifiquement humaine. Ce à quoi on ne pense pas, quand on n’en est pas privé.
 
La vision périphérique dans la DMLA est moins atteinte. Mais, probablement, comme elle ne bénéficie pas des apports conjugués de précision de la vision centrale, elle semble néanmoins diminuée.
 
En ce qui concerne mon déficit visuel : si je distingue les formes des immeubles, de ce qui bouge, si je parviens à différencier un gros véhicule d’un petit, je ne distingue pas un bus d’un autocar, et je ne peux pas lire le numéro de sa ligne. De même que je ne distingue pas toujours un homme d’une femme, ou une race de chien. Je ne peux pas reconnaitre les personnes qui parlent dans une conférence, ou dans certaines réunions. Je ne peux reconnaître un ami dans la rue… Mais on dit : « ha, elle a une autonomie… ». C’est vrai, mais souvent, je me trompe… et je tombe sur le trottoir, ou j’ouvre la porte d’une voiture qui n’est pas celle qui m’attend… Capter des formes m’est possible, mais non le détail… parfois une lettre, mais pas le mot. Pas la ligne du Métro si je dois en changer. C’est précisément cela qui me fait dire que la macula-fovéa fonctionne comme si ce n’était pas le même organe, parce que c’est seulement elle, j’y insiste, qui lit les lettres et repère le fin, comme un texte – ou encore les traits d’une personne.
 
La méthode des scores d’acuité visuelle indique bien que l’ophtalmologie considère la rétine comme une unité fonctionnelle homogène. Ainsi, selon la méthode de mesure en vigueur en France, on ne peut pas officiellement dissocier les deux acuités : dire par exemple qu’on a, ce qui est mon cas, 0,5 dixième de vue en vision centrale et ce que j’estime à environ 2,5 dixièmes en vision périphérique. Cela n’est pas dans les normes ou usages et même les spécialistes de la DMLA qui le savent bien, ne s’y sont pas investis. Nous devons nous plier à un examen codifié dans des méthodes de mesure qui ne peuvent pas bien rendre compte de notre fonction vision et justement de la particularité de la pathologie, cette différence d’état entre rétine centrale et périphérique. Le patient a conscience de cette dissociation d’acuité et s’en trouve troublé. Certains, par exemple, peuvent très difficilement lire mais peuvent encore conduire prudemment si leur rétine périphérique n’est pas trop atteinte. Ils savent qu’il n’est pas ici question de vision de près ou de loin, mais bien de centre et de périphérie. Quel paradoxe, ce fait que l’outil de mesure qui « règle » l’état de « cécité légale » soit basé sur la capacité de lecture, alors que les recherches, comme nous allons le voir plus loin, ne placent pas toujours cette fonction au premier plan.
 
Il est nettement insuffisant, de dire en supposée consolation à un patient atteint : « rassurez-vous, vous ne serez jamais aveugle ». Et d’ailleurs la cécité légale commence à 1/10ème. On est devant des contradictions politiques, médicales, sociologiques. On est également devant un constat sanitaire aussi flou que la « vision DMLA » : pour les pouvoirs publics, sans autre réflexion, la visée serait-elle, pour la population, de se contenter de performance moyenne, propre à maintenir un vrai ou un semblant de performance perceptive médiane. Cet objectif sert certes, à l’idée d’une moyenne dans une population. Avec la représentation que ces « moyennes » confèrent un certain niveau d’autonomie à la population globale. Et ainsi, cela exonère les pouvoirs publics d’inciter à creuser des voies et entre autres à éviter d’intégrer certaines pathologies dans des « causes nationales ».
 
Pourtant comment cela peut-il encore être considéré comme anodin pour les fondements de l’étude scientifique de la pathologie, au plan épistémique, dès lors que l’étude elle-même n’a pas offert beaucoup d’avancées récentes ?
 

Changer d’approche ?

L’histoire de la Médecine montre combien de découvertes se sont opérées quand la recherche a changé d’approche. Et c’est en se posant au plus près de l’observation et des phénomènes que la Science a fait des bonds.
 
L’actuelle approche médicale se perpétuera-t-elle jusqu’à ce qu’un praticien soit lui-même atteint de la pathologie ? On ne le souhaite à personne. De fait, alors que tant de chercheurs s’évertuent dans les labos sans « trouver », quel risque réel y-aurait-t-il à partir d’une autre hypothèse ?
 
Les relations essentielles entre le cerveau et les cellules rétiniennes en tant que neurones différenciés, sont capitales dans les diverses modalités de la vision. Avec la DMLA, on est bel et bien dans une pathologie neurologique, même si, comme nous l’avons vu, cela ne concerne qu’une surface infime. Je propose donc de l’envisager comme l’une des grandes maladies dégénératives neurologiques connues. Au fond, n’ayons pas peur des mots, un Parkinson rétinien (9).
 
Mes travaux épistémologiques sur l’évaluation de données médicales, viennent ici soutenir mon expérience personnelle de patiente atteinte d’une pathologie qui garde encore des zones d’ombre malgré l’intensité des recherches des spécialistes.
 
Comme on l’a vu, dans l’ensemble de la rétine, la répartition des bâtonnets et des cônes est inégale. Il y a bien plus de cônes dans la fovéa, et plus de bâtonnets dans la rétine périphérique. Plus de sensibilité à la lumière sur la périphérie, mais beaucoup moins de précision.
 
Aussi, je propose de prendre en compte une nouvelle approche, à partir de cette réflexion : partant de ce que rétine centrale et rétine périphérique présentent une différence, alors prendre pour base de travail, celle de considérer la rétine comme un système comportant deux organes liés et néanmoins distincts.
 
Et, du coup, il s’agirait d’étudier la DMLA et son éventuel traitement en s’attachant davantage à la rétine centrale et sa fonction « lecture-vison fine ».
J’y insiste, pour une surface infime qui se compte en quelques millimètres carrés, la fovéa et sa grande concentration en cônes, qui est une différence histologique, est bien   responsable de ce que, si je peux apercevoir une forme (avec ma rétine périphérique), je ne peux pas lire, ni distinguer les traits d’un visage.
 
Ayant étudié la pathologie, dans les limites de ma propre observation et la mesure de mes possibilités, j’ai constaté qu’il existe un « traitement » et non une thérapeutique de guérison pour certaines formes et certains cas, mais on n’a pas encore trouvé « la » modalité de traitement ou « la » chirurgie qui « guérirait », comme pour d’autres syndromes. Il est donc légitime de se demander si on a pris le bon angle méthodologique.
 

Point sur les recherches à ce jour

A priori, on pourrait dire que trois pistes orientées « confort de vision globale pour une autonomie minimum » émergent principalement des travaux : ralentissement de la dégénérescence, greffe de cellules naturelles, pose de prothèse. 
Ainsi, autant en France que, de la Californie au Japon, des chercheurs cherchent, notamment dans le sens de remplacer la rétine centrale atteinte, par une greffe d’une rétine artificielle ou de tissus.
 
Côté greffe de tissus, une « accélération » s’est produite dans la suite des travaux du Prix Nobel 2012 attribué à deux scientifiques (10) qui ont trouvé le moyen de dédifférencier les cellules. Mais pour cet éventuel protocole de thérapie génique, il faut d’abord trouver le moyen sûr pour empêcher les cellules souches de proliférer de sorte que la superficie reste égale à elle-même. C’est une voie, pour l’heure non maîtrisée, celle de la différenciation des cellules souches totipotentes et de leur incorporation efficace dans un organe. Cette piste « séduisante » constitue un espoir, mais pour le moment, le risque est patent.
 
Côté prothèse – et on peut saluer ici les travaux du Professeur Sahel et de son équipe- les tout- premiers implants (11)(cinq) ont récemment eu lieu, et permettent un certain espoir, bien que l’utilisation requière un appareillage extérieur complexe pour la transmission de « l’information » de la prothèse au nerf optique. Outre le fait que cet appareillage devra encore attendre les progrès de la miniaturisation, la tolérance à long terme de la greffe sur la rétine centrale, et son impact sur l’évolution de la vision périphérique, restent à découvrir. 
 
Il manque, pourrait-on dire, la limite, à savoir une vraie restauration de la lecture, les recherches devraient donc se centrer pour compenser ou réparer la fovéa. Ne pas accepter la dégénérescence/perte de la fovéa…le cœur de la maladie semble à priori ne pas être encore assez travaillé…
Sur les indications de mon orthoptiste (12), j’ai découvert l’existence de recherches dirigées par Alain Prochiantz, qui s’est consacré à l’étude de la morphogenèse cérébrale (13). Notamment, avec une expérimentation montrant une amélioration dans l’amblyopie de souris. Certes, l’amblyopie n’est pas la DMLA, mais on est bien là dans le registre neurologique et analogiquement, le « principe » de cette expérience, ne serait-il pas une voie à approfondir tout de même ?
 
Certes, je ne suis pas parfaitement informée sur les détails des programmes mais, dans l’esprit de la reconnaissance du savoir des patients sur leur pathologie, (cf. Loi(s) de Santé-publique « pour la prise en compte de l’expertise des patients »), à partir de mon expérience et de mon observation (14), j’en appelle à intensifier les coopérations transdisciplinaires entre les ophtalmologistes, et les chercheurs en neurotransmission, et plasticité, comme cela me semble être l’esprit, voire l’éthique du Collège de France (15).
 
J’y insiste, la DMLA est, au sein du système oculaire, une pathologie de tissus relevant du système nerveux. Ce qui est troublant, c’est que cette dégénérescence apparaisse dans une très petite surface du tissu nerveux. On a donc peine à la rapprocher de maladies qui touchent par exemple au volume du cerveau ou de la moelle épinière. Les cellules de la rétine sont des neurones, différenciés, mais des neurones, et en cela, il convient bien d’envisager la rétine comme une partie de notre système nerveux.
 
J’ai trouvé près de cent cinquante thèses avec le mot-clé « dmla » (16), soutenues entre 2009 et 2019. Une cinquantaine de ces thèses semblent centrées, même partiellement, sur la fovéa, et une demi-douzaine, parmi les plus récentes, sont orientées lutte contre la dégénérescence. Et j’ai noté que vingt-six thèses répondent aux mots clés « dmla » et « Parkinson » …  Et l’ensemble de ces thèses est réparti sur une vingtaine de « domaines universitaires » … C’est dire à quel point les recherches sont émiettées, et la culture de transversalité peine véritablement à émerger.
 
Parmi ces travaux, en 2011, dans sa thèse (17) présentée en Sciences d’approche psychophysique, Aurélie Calabrèse écrit pourtant au Chapitre 3 – Lecture et adaptation fonctionnelle à la présence d’un scotome : « Même en augmentant la taille des caractères, la valeur moyenne de la vitesse maximale de lecture diminue de la fovéa vers la périphérie. Legge et al. (1992) ont montré que parmi 141 patients intégrant une clinique basse vision, seulement 30 % atteignaient des seuils de vitesse de lecture normale pour des tailles de caractères très élevées. L’agrandissement de la taille des lettres n’est donc pas suffisant pour retrouver une vitesse de lecture standard. Ces résultats permettent de rejeter la théorie de la mise à l’échelle et de conclure que la taille des caractères n’est pas le seul facteur limitant les performances de lecture en vision excentrée ».
 
Ce travail confirme ce que je vis, l’agrandissement d’un texte pour le faire lire par la rétine périphérique, ne résout pas le problème de la lecture.
 
Comme nous l’avons déjà vu, il faudrait donc parvenir à « compenser » ou « réparer » la macula-fovéa.
 
C’est d’ailleurs, me semble-t-il, sous cet angle qu’en mars 2018, Hugo Charles-Messance, a présenté sa thèse en Physiologie, physiopathologie et thérapeutique : « Rôle de l’interleukine -1 bêta (18) dans la dégénérescence des photorécepteurs associée à la dégénérescence maculaire liée à l’âge ». Charles-Messance rappelle que « l’une des formes tardives de la DMLA – est caractérisée par la perte de l’épithélium pigmentaire et la dégénérescence des photorécepteurs », également que « dans l’atrophie géographique, les phagocytes mononucléés (PMs) s’accumulent dans l’espace sous-rétinien, et induisent la dégénérescence rétinienne », et il démontre que « la présence de PMs sous-rétiniens est associée à la perte des bâtonnets et la dégénérescence des segments de cônes dans la zone de transition de patients atrophiques ». Puis, après avoir trouvé et décrit un processus de neutralisation des causes de dégénérescence des segments de cônes et la perte des bâtonnets dans l’inflammation sous-rétinienne, il conclut : « Cette étude permettra la mise au point de thérapies innovantes, afin de lutter contre la forme atrophique de la DMLA, pour laquelle il n’existe actuellement aucun traitement » (19).
C’est aussi le sens de la recherche de ces petits facteurs protéiques qui peuvent inhiber l’atrophie et la destruction de certains segments des cônes de la fovéa.
 

Conclusion

Je ne doute pas que les professeurs d’ophtalmologie soient attentifs aux travaux des neurologues, mais on n’entend pas parler, ou très peu, comme à l’occasion de thèses, de groupes de chercheurs travaillant ensemble.
J’entends par « pluridisciplinarité » (ou transdisciplinarité), non pas comme l’accueil à d’autres disciplines, d’un Centre déjà dédié à une spécialité médicale, mais comme un cadre structurant de vraies coopérations plurielles.
 
S’il est un lieu commun de rappeler que la recherche en France est découpée en disciplines, ce constat se transforme en désespérance pour les patients atteints de pathologies qui relèvent de plusieurs d’entre elles.
Il s’agit donc bien d’aborder la DMLA comme une maladie neurologique. Et de considérer la rétine comme un système de deux organes, avec pour objectif de restaurer la fonction « lecture-vision fine » de la macula-fovéa des patients atteints.
 
De plus, en tant que patiente atteinte de DMLA, j’espère également que le partenariat patients/corps médical parviendra, à l’instar de ce qu’on a vu pour d’autres maladies, à réaliser tout son potentiel.
On peut estimer qu’il y aura plus de quatre millions de personnes de plus de cinquante ans touchées dans vingt ans. Aussi, pourquoi ne pas déclarer « endémie » la DMLA ?
 
J’en appelle à considérer comme une grande cause nationale, celle de « Restaurer la lecture au quotidien », c’est-à-dire : recouvrer la lecture, comme « bien spécifique à l’humanité ».
 
Paule Pérez, Psychanalyste     
 
Image d’en-tête : Illustration ©Giacomo Bagnara
 
(1) Rétine : « membrane interne du bulbe oculaire provenant de l’épanouissement du nerf optique. Elle constitue l’organe de réception des sensations visuelles grâce à ses cellules à cône et à bâtonnet (les photorécepteurs). Elle est constituée de 10 couches …Les photorécepteurs forment la 2ème à partir de l’extérieur… Les cônes, localisés au centre de la rétine, fonctionnent en ambiance éclairée (photopique) et perçoivent les couleurs…Les bâtonnets, plus nombreux et répartis surtout en périphérie, sont adaptés à une vision scotopique (càd une vision nocturne) et ne permettent pas la vision des couleurs. » (Référence : dictionnaire des termes médicaux Garnier Delamare 2002 Ed Maloine)
 (2) Macula : « pôle postérieur de la rétine ayant l’aspect d’une tâche jaunâtre ovalaire à grand axe horizontal. Elle présente en son centre une dépression, la fovea centralis. C’est à cet endroit que l’acuité est la meilleure. » (Référence : dictionnaire des termes médicaux Garnier Delamare 2002 Ed Maloine)
(3) Dans la littérature que j’ai consultée, la distinction entre macula et fovéa n’est pas très nette. On parle tantôt de l’une et tantôt de l’autre, parfois comme synonymes : parfois on les utilise indifféremment, et parfois on les différentie.
(4) Le chiffre officiel du nombre de personnes porteuses du VIH est estimé à environ 200.000 personnes.
(5) Base référence INSEE « Situations démographiques et projections de population 2005-2050. Scénario central » : population en 2025 des plus de 75 ans avec ¼ des personnes atteintes de DMLA : 66.123.000 X 10,5% : 4 = 1.735.729. Sans compter les personnes atteintes avant 75 ans… Et « dans les pays occidentaux, la DMLA est la cause principale de perte sévère de la vision chez les personnes de plus de 50 ans. Environ 25 à 30 millions de personnes souffrent d’une forme ou l’autre de DMLA. Du fait du vieillissement de la population, ce chiffre pourrait doubler dans les 35 prochaines années ». Référence 🙁https://lasante.net/fiches-conseil/pathologies/degenerescence-maculaire-liee-age-dmla.htm).
(6) Druse : « Petite excroissance blanchâtre siégeant dans la région maculaire de la rétine au cours de la dégénérescence sénile de la macula ». (Référence : dictionnaire des termes médicaux Garnier Delamare 2002 Ed Maloine)
(7) Anecdotiquement, chaque fois, je constatais qu’il n’avait pas même informé ses caissières sur le besoin d’éclairage : celles-ci refusaient systématiquement d’allumer une lampe lorsque je peinais à remplir le chèque d’honoraires !
(8) Une autre supposée spécialiste, dans un Hôpital international, et dont le cabinet était dans la pénombre m’a crié dessus en m’ordonnant de lire le tableau des lettres… Elle ne se souvenait pas que les « patients DMLA » avaient besoin de plus de lumière.
(9) Commentaire de mon médecin, qui est aussi biologiste et docteur en pharmacie : « parler du Parkinson, est surprenant au premier abord, mais pourquoi pas puisqu’il s’agit, dans le Parkinson, de la destruction des cellules du locus niger et du corps strié pour une raison encore inconnue, et là aussi on note l’intervention du système immunitaire et pour certains le rôle à distance d’une infection par le virus EBV, celui de la mononucléose infectieuse, qui comme le virus du SIDA, persiste dans certaines cellules du système immunitaire ».
(10) Le biologiste britannique John Gurdon et le médecin japonais Shinya Yamanaka.
(11) Création de la société Pixium Vision, la découverte consiste en un implant sous-rétinien miniaturisé sans fil, photovoltaïque et composé de 378 pixels, qui fonctionne avec une paire de lunettes, munie d’une caméra et d’un projecteur, et d’un mini-ordinateur. La caméra enregistre les images, qui, une fois simplifiées, vont être projetées, via la lumière infrarouge, sur l’implant. Ce signal infrarouge est ensuite traduit en signaux électriques pour être transmis au cerveau par le nerf optique. « Il s’agit du seul implant utilisant cette technologie », souligne le Pr Sahel. – Réf. : https://www.lequotidiendumedecin.fr/actualites/article/2019/03/08/dmla-seche-les-resultats-de-notre-implant-depassent-nos-attentes-selon-le-pr-jose-alain-sahel_866716
(12) Qui m’a signalé l’ouvrage de Norman Doidge : « Guérir grâce à la neuroplasticité », dans lequel il signale avec intérêt les travaux d’Alain Prochiantz.
(13) Comme l’indique sa biographie sur le site du Collège de France : « Ses contributions scientifiques majeures sont la découverte de l’hétérogénéité topologique des astrocytes cérébraux et celle d’un nouveau mode de signalisation par transfert intercellulaire de facteurs de transcription de la classe des homéoprotéines. Son équipe s’intéresse au rôle de cette voie de signalisation au cours du développement cérébral, mais aussi chez l’adulte, ainsi qu’aux pathologies associées à ses altérations. Un résultat particulièrement frappant est la possibilité de rouvrir des périodes de plasticité du cortex cérébral en bloquant transitoirement l’internalisation de l’homéoprotéine Otx2 par des interneurones de la couche IV du cortex cérébral. Cette réouverture a permis de rétablir la vision binoculaire chez des souris porteuses d’une amblyopie expérimentale. À partir de l’analyse des mécanismes de sécrétion et d’internalisation de ces protéines, son équipe a découvert les premiers peptides capables de traverser les membranes cellulaires et de servir de vecteurs pour l’adressage intracellulaire de substances pharmacologiques. Dans cette veine, elle étudie la possibilité d’utiliser certaines homéoprotéines comme protéines thérapeutiques dans plusieurs pathologies, dont la maladie de Parkinson ». (https://www.college-de-france.fr/site/alain-prochiantz/biographie.htm).
(14) Depuis une douzaine d’années je prends divers traitements. Avec ce recul respectable, voici ce que je peux en dire cliniquement : je distingue mieux les couleurs (mais mon entourage n’en est pas convaincu), et mon acuité visuelle a baissé. Quant à ma compétence ambulatoire à l’extérieur, si elle s’est maintenue, je le dois assurément au travail d’une remarquable et généreuse orthoptiste.
(15) « L’organisation de la biologie au Collège de France n’est pas disciplinaire et ne favorise pas tel ou tel domaine. Cependant, les équipes de recherche de l’Institut, dans toute leur diversité, ont le souci constant de développer des lignes de recherche communes et de traduire des recherches fondamentales en découvertes ouvrant des voies nouvelles à la compréhension des grandes pathologies et à la mise au point d’approches thérapeutiques originales ». (Extrait de la plaquette de l’Institut de biologie). 
(16) Lien vers la référence : http://www.theses.fr/fr/?q=dmla
(17) Présentée et soutenue à l’Université de la Méditerranée : « Désorganisation fonctionnelle des systèmes oculomoteur et visuo-attentionnel chez les patients basse vision – Approche psychophysique – » (http://www.theses.fr/fr/personnes/?q=aur%C3%A9lie+calabrese).
(18) Mon médecin me précise : « la présence de phagocytes mononucléés et d’interleukine 1 signe l’intervention du système immunitaire localement, ne serait-ce que pour faire le ménage, càd éliminer les cellules mortes du fait des petites hémorragies locales. Mais il signe l’existence d’une réaction inflammatoire locale ».
(19 : Résumé de thèse : La Dégénérescence Maculaire Liée à l’Age (DMLA) est la première cause de cécité légale dans les pays industrialisés chez les personnes âgées. L’atrophie géographique – l’une des formes tardives de la DMLA – est caractérisée par la perte de l’épithélium pigmentaire et la dégénérescence des photorécepteurs. Nous groupe a montré précédemment que dans l’atrophie géographique, les phagocytes mononucléés (PMs) s’accumulent dans l’espace sous-rétinien, et induisent la dégénérescence rétinienne via la production d’IL-1β. Dans un premier temps, nous montrons que la présence de PMs sous-rétiniens est associée à la perte des bâtonnets et la dégénérescence des segments de cônes dans la zone de transition de patients atrophiques. Nous montrons ensuite dans différents modèles in vivo et ex vivo que les macrophages récapitulent ces effets, et qu’IL-1β est nécessaire à la perte des segments externes des cônes induite par les PMs. Dans un deuxième temps, nos résultats montrent qu’IL-1β induit indirectement la mort des bâtonnets, en perturbant l’homéostasie rétinienne du glutamate. L’inhibition des récepteurs glutamatergiques pour prévenir l’excitotoxicité du glutamate, ou la supplémentation en cystine favorisant la restauration de la machinerie neuronale antioxydante, permettent de protéger les bâtonnets de la toxicité induite par IL-1β. L’ensemble de nos résultats démontre le rôle joué par IL-1β dans la dégénérescence des segments de cônes et la perte des bâtonnets dans l’inflammation sous-rétinienne. Cette étude permettra la mise au point de thérapies innovantes, afin de lutter contre la forme atrophique de la DMLA, pour laquelle il n’existe actuellement aucun traitement. (Référence : https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-02132148).
 

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