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Svalbard
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Le grenier de la planète pour un monde post-apocalyptique

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Il y a dix ans jour pour jour, le 26 février 2008, était inauguré le grenier géant de la planète. Situé à Svalbard, au nord de la Norvège, dans un paysage glacial, le bâtiment semble venu tout droit d’une planète lointaine. Un congélateur de proportions hors normes, capable de conserver toutes les semences du monde. Un gigantesque grenier de sécurité, enterré à l’intérieur d’une montagne sur les îles arctiques, pour faire face aux pires scénarios-catastrophe. Une réponse radicale si la guerre ou le réchauffement climatique menaçait les plantes dont dépendent les humains pour leur alimentation et leur survie.
 

Alors que les agriculteurs les ont cultivées pendant plusieurs millénaires, le fait de mettre l’accent sur la protection de la diversité des cultures ex situ est historiquement lié à Nikolai Vavilov, fondateur de l’une des premières banques de gènes en Russie, en 1921. Dans le but de mettre un terme aux famines, le botaniste a voyagé à travers plus de soixante pays, récoltant les témoignages des agriculteurs et collectionnant les semences, en gardant à l’esprit leur potentiel de résistance dans un monde en constante évolution.
Les nombreuses adhésions aux banques de gènes qui s’en sont suivies ont permis de cultiver des variétés de culture mieux adaptées à la production alimentaire, comme par exemple celles résistantes aux maladies de la rouille qui peuvent décimer des récoltes entières de blé et de maïs. Elles ont également permis de produire des variétés de riz capables de résister aux sols salins, de rendre des espèces très domestiquées encore plus résilientes et de contribuer aux innovations nécessaires afin de faire face au changement climatique, tels que le fait d’arriver à maturation plus rapidement ou encore une meilleure tolérance face à la sécheresse.
 
C’est l’adoption du Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture en 2001 qui a donné au gouvernement norvégien l’élan nécessaire pour lancer la Réserve de semences. Celle  du Svalbard fait office de grenier géant de la planète. Une véritable “chambre forte” située sur l‘île norvégienne du Spitzberg, à 130 mètres sous terre. L’objectif de cette structure consiste à conserver des graines des cultures vivrières du monde entier, afin d’assurer leur survie en cas de catastrophe naturelle. Cette réserve abrite toutes les semences, aussi bien celles que l’on retrouve dans l’agriculture (fruits, légumes), dans l’horticulture (fleurs, plantes) que dans la sylviculture (arbres, forêt, bois). Le but est de stocker ces ressources vitales afin de préserver la diversité génétique.
 
Gardées précieusement à l’abri, sous le permafrost, ces semences peuvent être conservées pendant au moins deux cents ans, même en cas de coupure d‘électricité. Depuis la création de la structure en 2008, les banques génétiques de toute la planète ont déposé près d’un milliond’échantillons issus de 4.000 espèces différentes, notamment de blé, d’orge, ou de pommes de terre. On recense plus de 120.000 germes, rien que pour le riz.
 
Et cette réserve a déjà prouvé son utilité, puisque fin 2015, des chercheurs syriens ont décidé de retirer leurs dépôts précédemment effectués, pour reconstituer une banque de semences ravagée par la guerre. Les échantillons ont été acheminés en passant par le Maroc et le Liban, et aucun État n’est exclu, pas même la Corée du Nord. Les considérations géopolitiques ne sont en aucun cas une condition pour venir déposer des échantillons. « Évidemment, on prend beaucoup de précautions, un soin extrême pour conserver les semences », développe Brian Lainoff, porte-parole de The Crop Trust, « mais cela montre aussi la nature mondiale du projet. Quand on est ici, la politique ne compte pas, ce qui compte, c’est de préserver les semences ».
 
La réserve a été créé par le gouvernement norvégien et l’organisation Crop Trust. Elle est ouverte au monde extérieur pour effectuer des dépôts, trois à quatre fois par an. De nouvelles semences arrivent régulièrement de toutes les contrées de la planète.
 
Véritable coffre-fort géant, des portes verrouillées par des codes garantissent la sécurité de cet immense grenier. La construction a été conçue selon les normes antisismiques les plus modernes afin de protéger des milliards de graines et plus de 4 millions et demi d‘échantillons qui peuvent y être stockés dans la plus parfaite sécurité.
 

Visite guidée…

 
C’est proche du Pôle Nord (à 1120 km), dans l’océan Arctique, que la réserve a été construite :
Svalbard est un archipel de la Norvège dont les conditions climatiques et géologiques sont idéales pour la conservation des semences
 
Un lieu choisi pour le très faible taux d’humidité de son atmosphère
 
Enterré sous le permafrost, ce grenier peut rester congelé pendant plus de deux siècles, même en l’absence d’énergie électrique
 
Cette réserve conserve des graines de plus de 60 institutions de presque tous les pays dans le monde, recueillies auprès de plus de 1500 banques mondiales de gènes
qui stockent des échantillons de semences de toutes les cultures indigènes de la région où elles se trouvent.
 
Le Svalbard est devenu le coffre-fort sécurisé de toutes les banques de semences du monde
 
Robert Ziegler, directeur général de l’Institut de recherche internationale du riz (IRRI), basé aux Philippines, prépare des semences de riz destinés à Svalbard.
 
Les échantillons de semences sont envoyés à Svalbard dans des conteneurs sécurisés, qui sont analysés aux rayons X pour s’assurer qu’ils ne contiennent rien d’autre que des graines
 
Pour pénétrer dans le grenier, il faut traverser cinq portes blindées archi-sécurisées
 
La température intérieure est maintenue à moins 18 degrés Celsius, assez froid pour conserver les semences scellées viables pendant des milliers d’années.
 
Il y a assez de place dans les trois chambres fortes du grenier pour abriter des milliards de graines et 4.5 millions d’échantillons végétaux
 

Dans la nature aussi

Si mettre l’accent sur la protection via les banques de gènes est essentiel, de nombreuses ressources phytogénétiques nécessaires à la mise en place de systèmes alimentaires durables peuvent se trouver à la ferme, avec notamment des variétés et races primitives cultivées par les agriculteurs, sans oublier les espèces sauvages apparentées présentes dans la nature.

LIRA AUSSI DANS UP : La liberté des semences est l’avenir de l’agriculture

Prenons par exemple le tournesol, la plante est originaire d’Amérique du Nord où des échantillons de 53 espèces sauvages apparentées au tournesol ont été recueillies et stockées. Les variétés à haute teneur en huile ont d’abord été développées en Russie après qu’une série de bizarreries génétiques, menées par un scientifique français dans un pré de tournesols, ait conduit à une série d’améliorations. Aujourd’hui, le tournesol est cultivé dans plus de 70 pays et représente des recettes annuelles de 20 milliards de dollars.
 
Les plantes sauvages, et notamment celles comestibles, sont de plus en plus menacées et nécessitent davantage d’efforts en vue d’assurer leur protection et leur utilisation. Ces plantes font rarement partie des programmes intensifs d’amélioration des cultures. Les experts savent pourtant qu’elles possèdent des caractéristiques intéressantes en mesure de faire des merveilles sur les cultures.
 
C’est pourquoi les chercheurs parcourent l’Asie centrale à la recherche de variétés de pommes, partent en Papouasie-Nouvelle-Guinée pour sa canne à sucre et ont été ravis de découvrir une banane sauvage en Asie du Sud-Est qui pourrait les aider à mieux résister au champignon mortel, qui est actuellement en train de décimer la très populaire banane Cavendish.
 
Les chercheurs ont récemment découvert des informations sur l’histoire génétique des espèces sauvages apparentées au pois chiche, laissant ainsi présager un avenir promoteur pour cette légumineuse populaire dont les efforts en vue de l’améliorer ont été freinés par le manque criant de diversité génétique.
 
De nombreuses cultures alimentaires locales et importantes sont cultivées dans plusieurs régions du monde faisant face à des changements rapides et à des niveaux d’insécurité alimentaire élevés. Afin d’aider les pays à protéger les espèces essentielles à leur approvisionnement alimentaire dans leur propre habitat naturel – où elles pourront continuer à développer d’importantes caractéristiques utiles afin de s’adapter au changement climatique -la FAO a récemment publié des Directives volontaires pour la conservation et l’utilisation durable des espèces sauvages apparentées et des plantes alimentaires sauvages.
 
«Les espèces sauvages apparentées nous ont sauvé la vie de nombreuses fois et pourraient bien devenir des éléments centraux du kit de lutte contre le changement climatique», a déclaré M. Chikelu Mba, Phytogénéticien et responsable de l’équipe spécialisée dans les semences et les ressources génétiques à la FAO. Mettre en place des zones protégées représente la première étape. «De nombreux pays en ont et il est probablement possible d’associer conservation des espèces sauvages apparentées et conservation de la nature», a souligné M. Mba. «Mais peu de personnes savent vraiment ce que cela implique», a-t-il ajouté.
 
Les efforts de conservation doivent être intensifiés, alors que le changement climatique, l’urbanisation et la nature fluctuante de l’utilisation des terres représentent tous des menaces imminentes pour la survie de nombre de ces espèces méconnues.

Sources : euronews, techinsider, FAO
 

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