« Bras de fer entre le CNN et le ministère de l’économie numérique » titre aujourd’hui le journal Le Monde. Explications.
Dans un communiqué publié tard jeudi soir, l’ensemble des membres du Conseil national du numérique (CNN), cet organe consultatif mis en place par Nicolas Sarkozy censé donner son avis sur tous les projets de loi touchant au numérique, ont annoncé (pdf) « remettre leur mandat à la disposition du président de la République et du gouvernement », afin de « faciliter [la] réflexion sur la gouvernance du numérique ». Seul l’ancien président du CNN, l’entrepreneur Gilles Babinet (remplacé depuis par Patrick Bertrand), n’a pas remis son mandat en jeu – officiellement en raison de sa récente nomination comme « champion du numérique » de la France auprès de la Commission européenne.
Le mot « démission » ne figure pas dans le texte, mais il s’agit bien d’un bras de fer engagé entre le CNN, essentiellement composé de patrons du secteur du numérique, et Fleur Pellerin, la ministre en charge de l’économie numérique. Car c’est la nomination au poste de secrétaire général du CNN de Jean-Baptiste Soufron, l’un des proches conseillers de Mme Pellerin, qui a mis le feu aux poudres ce jeudi 5 juillet. Dans son communiqué, le CNN « prend acte » de cette nomination, avant de « rappeler (… ) que depuis la création [du CNN], de nombreux rapports et avis ont été émis en toute indépendance ».
Le geste serait politique pour certains, d’autres y voient une querelle de personnes analyse le site IT Industrie et Technologies. La représentativité de ce conseil est parfois mise en cause dans certains commentaires. Le journal Le Monde soulève la question d’une « levée de boucliers face à une reprise en mains de l’éxécutif ». Le Figaro quant à lui déclare : « les membres de cet organe consultatif estiment que leur indépendance est remise en cause par la nomination imposée par le gouvernement d’un conseiller de la ministre délégué à l’Economie numérique au poste de secrétaire général. »
Au fond, peu importe : il va falloir renouveler les membres et trouver des personnages tout aussi emblématiques que le fondateur de Free, Xavier Niel, qui fait partie de la liste des 17 partants. C’est d’autant plus urgent que les travaux ne manquent pas. Les avis que rendra le CNNum sur une série de sujets qui fâchent impacteront directement les industriels du secteur.
Les sujets qui fâchent
– Contrefaçon
Soutenu par l’ancienne majorité ainsi que par la Commission Européenne, l’Acta, un texte négocié par 39 pays, vise à limiter la contrefaçon. Il focalise les critiques car il envisage une collaboration entre les fournisseurs d’accès à Internet et les industriels du divertissement. En février 2012, François Hollande appelait explicitement au rejet pur et simple de ce traité, rejeté par le parlement européen.
– La loi Hadopi
Mise en place sous la présidence de Nicolas Sarkozy, la loi Hadopi tente de lutter contre le téléchargement indu de contenus sur Internet. Inefficace selon certains, ce dispositif devrait être révisé. Cet engagement a été pris lors de la campagne présidentielle. Fleur Pellerin sur Twitter précisait même le 26 avril 2012 que « Hadopi sera bien remplacée par un autre dispositif non intrusif, sans surveillance généralisée ».
– La Fiscalité
Voici une question centrale qui vise des opérateurs internationaux comme Google ou encore Apple et Amazon, dont les taux d’imposition sont dérisoires en France. Un projet de taxe sur la publicité en ligne a été déposé par le sénateur Philippe Mariani. On table également sur une révision du système de perception de la taxe finançant la copie privée et François Hollande a évoqué une contribution des fournisseurs d’accès à Internet pour financer la création de contenu.
– Loppsi 2
Cette loi du 14 mars 2011 est vue comme liberticide par certains. En cause, la possibilité pour l’état d’imposer le blocage de l’accès à certains sites Internet sans décision de justice, l’élaboration d’une liste des sites à bloquer qui ne sera pas rendue publique, la possibilité pour la police d’utiliser des mouchards et autres espions électroniques sur autorisation d’un juge. Le programme officiel du parti socialiste y faisait explicitement référence en militant pour l’abrogation de ce dispositif. (Source : Mathieu Brisou / http://www.industrie.com).
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