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La presse en ligne locale en difficulté ? Le Spiil s’inquiète

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Marsactu en cessation de paiements : le Spiil rappelle la nécessité de créer les conditions du développement économique d’une presse locale indépendante

Raj Médias, la société éditrice du site d’information locale gratuit Marsactu et de la lettre économique sur abonnement Marséco, membre du Syndicat de la presse indépendante d’information en ligne (Spiil), s’est déclarée le 27 février dernier en cessation de paiements auprès du tribunal de commerce de Marseille, avec demande d’ouverture de redressement judiciaire. 
Fin 2014, c’était la Marseillaise and le Ravi en région PACA qui étaient placés en redressement judiciaire. Aujourd’hui, c’est au tour du site Marsactu. Média de référence local marseillais d’un journalisme de décryptage, comptabilisant jusqu’à 200 000 visiteurs uniques par mois, le site existait depuis cinq ans. Un écho supplémentaire à la fermeture récente d’autres pure-palyer comme Dijonscope, Rennes TV.info, Carré d’info à Toulouse,… 

Une crise globale 

On le sait, la presse en général va mal, face au virage des nouvelles technologies de l’information. La presse quotidienne régionale papier vit une érosion des ventes, une baisse des recettes publicitaires,… La compression des rédactions françaises se poursuit et le bilan est lourd depuis 2013 dans la presse régionale papier. Mais les pure-player locaux sont aussi en difficulté. Malgré un grand nombre de magazines web apparus ces dernières années, le dynamisme certain de ce secteur dissimule de plus en plus mal de grandes fragilités : selon une étude menée par Médiametrie / NetRatings, en mars 2011, seuls trois acteurs « tout en ligne » avaient réussi à franchir le million de visiteurs uniques par mois, à savoir Rue 89, Planet.fr et Slate. Le magazine dmoz.fr révèle aussi que d’autres études menées par le CEVIPOF – Centre de recherches politiques de Sciences Po – tendent à montrer que, seules 3 à 6 % des personnes interrogées, s’informent régulièrement sur les pure players. 

dmoz.fr conclut à une concurrence redoutable au sein du secteur de la presse en ligne : « Si les pure players ont l’avantage du numérique (faible coût variable, couverture géographique importante, appréhension fine des habitudes des lecteurs, etc.), ils connaissent d’autres problèmes. Même si les sites multi-thématiques rassemblent un large public, leur rémunération est entièrement dépendante – ou presque – de leur environnement publicitaire (marketing indirect et publicité).
Sans lui, ces plateformes peinent à trouver un modèle d’affaire rentable. Et dans ce secteur, les régies – très nombreuses – font la loi : à l’image de Google, qui impose une convention de performance autour du taux de clic. Imposant aux éditeurs de site, la recherche continue d’une optimisation des volumes d’audience, pour assurer la rentabilité de l’article.
A ce stade, les pure players peuvent, soit s’engager de cette compétition féroce d’audience, soit choisir d’autres options, telles que la diversification des sources de revenus ou l’adoption d’un modèle low cost, supposant la participation des internautes. Sans quoi, ils sont condamnés à disparaître. »

Les webzine locaux peinent encore davantage. Des difficultés de lire la presse locale sur le web sont identifiées début février 2015 par le blog nalius.fr, de François Lasselin. Difficultés liées au modèle économique non tranché qui briderait les utilisateurs par le blocage de contenus. Autre difficulté révélée par le blog de Jérémie Poiroux dans une interview avec des journalistes de la PQR : le manque d’originalité globale « car on s’est contenté de copier les contenus du print sur le web, sans originalité, sans plus-value. »

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Ce n’est pas toujours le cas car certains pure-player ont su trouver leur niche et savent jouer de créativité et d’originalité dans leurs angles éditoriaux. 

La presse dans les territoires est menacée

Malheureusement, aujourd’hui c’est donc le site Marsactu qui est en difficulté.  Le président de Raj Médias, Pierre Boucaud, indique que l’entreprise « n’a pas su trouver à temps un modèle économique » et compte proposer demain au tribunal de commerce « un projet de continuation dans un premier temps exclusivement basé sur Marséco, en espérant que d’autres projets puissent voir le jour, peut-être d’ailleurs à l’initiative des salariés. »
La rédaction de Marsactu souhaite « réinventer les conditions d’existence d’un média libre et indépendant à l’échelon local » et ainsi relancer Marsactu sur la base notamment d’un soutien de ses lecteurs.
Le Spiil espère que ces volontés de survie de Marsactu (reprise souhaitée par les salariés) et de Marséco (plan de continuation présenté par Pierre Boucaud) pourront aboutir.
Le Spiil s’inquiète cependant du tableau catastrophique du pluralisme de l’information dans les territoires.

Le Spiil regrette ainsi vivement l’existence de discriminations entravant le développement d’une presse locale indépendante et créative. Notamment, la presse locale tout-en-ligne reste exclue de l’essentiel de l’attribution des budgets de communication des collectivités territoriales et de la publication des annonces judiciaires et légales, pour lesquelles seuls les titres imprimés et leurs sites internet sont habilités. Comme le Spiil a déjà pu l’indiquer, cette situation est contraire au principe de non-discrimination technologique. Elle freine de plus le développement économique de la presse locale tout-en-ligne alors que cette dernière, comme le montre malheureusement l’exemple de Marsactu, représente un réel levier pour le renforcement du pluralisme de l’information, pourtant une obligation constitutionnelle.

Pour créer les conditions économiques d’existence d’une presse en ligne indépendante, il importe également que les avancées récentes soient confirmées. L’extension du taux de TVA de 2,1% à la presse en ligne favorise les abonnements et ventes d’articles en univers numérique ; son éventuelle remise en cause dans le cadre de la procédure d’infraction ouverte par la Commission européenne serait lourde de conséquences. Il est enfin essentiel que le Parlement confirme par son vote dans les prochaines semaines deux pistes intéressantes pour consolider les capitalisations des entreprises de presse : le nouveau statut d’entreprise solidaire de presse d’information et la création de défiscalisations pour les investissements en capital de particuliers. (Source : CP Spiil 3 mars 2015)

- Article « Peut-on encore sauver la presse ? » d’Alternatives économiques – Mars 2015
– Article de Contrepoints « La presse face aux défis du web »
- Book" Le journalisme numérique » de Alice Antheaume – Edition Nouveaux débats : SciencePo. Les Presses – Avril 2013 
- Book" A-t-on encore besoin des journalistes ? » de Eric Scherer – Edition PUF – Mai  2011
- Book « Dictionnaire amoureux du journalisme » de Serge July – Edition Plon – Janvier 2015

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