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changement climatique

Candidats à l’Elysée : A quand la transition écologique que les jeunes plébiscitent ?

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Le prochain mandat sera sans nul doute le dernier à même d’enrayer l’accélération du dérèglement climatique. En ce sens, la présidence qui vient aura une responsabilité historique.
C’est pourquoi à l’occasion de la parution de
L’Âge de la transition : en route vers la reconversion écologique (Les petits matins/Institut Veblen), Dominique BOURG et Dominique MÉDA ont organisé  ce 15 décembre une soirée pour questionner les candidats à l’élection présidentielle afin de donner à voir leurs propositions dans le domaine de la reconversion écologique. Tous reconnaissent un constat alarmant tant au sujet du climat que des pollutions. Au bord de l’effondrement, que faire ?
 
Les pics de pollution qui affectent les Français urbains, confrontent chacun au réel ! La menace a des effets  politiques puisque l’écologie revient sur les écrans radars des candidats à l’Elysée. Ce 15 décembre, la Fondation Maison des sciences de l’Hommeet l’Institut Veblenont justement sondé les intentions des divers représentants politiques, en organisant au pavillon de l’Arsenal un grand meeting (1). Avec comme maîtres de cérémonie, deux autorités incontestables : le philosophe et spécialiste d’écologie politique Dominique Bourg, et l’économiste Dominique Méda, engagée notamment dans la mise en place de nouveaux indicateurs de richesse avec le réseau FAIR.
 
Aurore Lalucq, codirectrice de l’Institut Veblen – et auteur Transition écologique, mode d’emploi – a introduit la soirée, laissant la parole à l’historien Michel Wieviorka soucieux de pointer les émergences dans notre époque décliniste – voir son livre publié l’an dernier « Retour au sens : pour en finir avec le déclinisme  » -. Puis Dominique Bourg et Dominique Méda ont questionné les candidats (voir leurs constats et demandes précises ci-dessous) sur les visions et réformes qu’ils entendent promouvoir.

Relocalisation et circuits courts

Il est frappant de noter que tous les candidats parlent d’urgence écologique. Il n’est donc plus question de tergiverser sur la gravité de la dégradation des écosystèmes ! « On a changé d’époque conviennent les candidats, rapporte Dominique Bourg. Ces derniers reconnaissent que les fruits de la croissance se sont mués en poison, comme l’a souligné Eloi Laurent dans son livre Comment sortir l’économie de la croyance ? »
 
A gauche, Martine Billard s’est exprimée pour Jean Luc Mélenchon qui veut mettre la « planification écologique » au centre de son programme. Le candidat du Front de gauche ne veut pas du principe de substitution, il veut « donner de la valeur à la nature » et considère que nos modes de consommation doivent être revus au prisme de l’utilité des produits. Dans son livre L’Avenir en commun (Seuil), Mélenchon promet la création de 3,5 millions d’emplois, notamment créés grâce à la transition écologique. Il prône un « protectionnisme solidaire », la fin du nucléaire et une relocalisation des activités industrielles. Ce dernier point fait d’ailleurs quasiment l’unanimité auprès les divers candidats : le changement de cap passe par une réappropriation par les citoyens de leurs territoires.
 
C’est d’ailleurs le sens de la proposition faite par Dominique Bourg de soutenir la création de coopératives d’initiatives énergétiques comme il en existe des dizaines au Danemark, aux Pays Bas, en Espagne, en Suisse. Ces Rescoop considèrent l’énergie comme un bien commun, financée et maîtrisée par les citoyens : en France, les rares initiatives existantes –  comme le parc éolien coopératif de Redon (au sud de Nantes) ou la Coopérative Energies partagées en Alsace (40 souscriptions aujourd’hui) – se sont heurtées à de nombreux obstacles.

L’impératif écologique : chercher les cohérences

Selon Arnaud Montebourg, « l’écologie doit rentrer dans la vie quotidienne et l’économie. C’est une ‘altercroissance’ qu’il nous faut, une mutation sociale ! » a-t-il insisté proposant une 6e République dotée d’un nouveau Sénat ou ‘Chambre du futur’ constituée par un tiers d’élus territoriaux, un tiers de membres du CESE et un tiers de citoyens tirés au sort.
L’ex-ministre du redressement productif pro-gaz de schiste doit veiller à ne pas se laisser déborder par la gauche de la gauche. Les discours sur les bienfaits du productivisme, qui ont longtemps fait vibrer ses troupes, n’y sont plus trop de mise…
 
Quant à Vincent Peillon, il voit dans les limites écologiques des risques géopolitiques majeurs. Il applaudit à la perspective d’une décentralisation énergétique et d’une taxe carbone « qui n’aura de poids que si elle est  reconnue par tous ».
 
Jean-Luc Benhamias reconnait les progrès accomplis avec la loi sur la transition énergétique et la loi sur la biodiversité. Ces cadres soutiennent une évolution vers une croissance sobre, une économie circulaire. Mais il estime que des réformes constitutionnelles s’imposent pour redonner du pouvoir au Parlement et qu’il faudra relever le défi de regagner la confiance envers les politiques.
 
Gérard Filoche s’est contenté d’un discours anticapitaliste et de formules lapidaires : « pour sauver la banquise, il faut nous sauver des banquiers ». Ses bêtes noires sont le sur-armement (1 651 milliards consacrés à la Défense), la dette de 2 000 milliards et la fraude fiscale qui atteint 400 milliards… qui constituent sans nul doute les symptômes d’un système corrompu.
 
Le député et ancien membre d’Europe Ecologie les Verts, François de Rugy, plaide pour la transparence : « Non, nous n’avons pas les moyens de développer et les énergies renouvelables et le nucléaire. De même la fiscalité carbone va augmenter les prix et il faut en parler ! »
 
Du côté de Benoit Hamon, se manifeste une véritable cohérence entre questions sociales et questions écologiques. « Le modèle actuel est insoutenable : le symptôme du bisphénol A montre qu’il faut désormais substituer les substances qui perturbent nos hormones. Sans cette transition, les conséquences sanitaires seront insupportables », souligne-t-il.
L’ancien ministre est favorable aux Sociétés coopératives d’intérêt collectif (SCIC) et entend constitutionaliser les biens communs, en créant la base juridique nécessaire.  « Il faut sortir du PIB comme seul indicateur (ouvrir aux indicateurs de qualité de vie) pour faire des choix radicaux mais sans brutalité, a conclu Benoit Hamon qui a mis les pieds dans le plat, jeudi dernier sur France 2, en se posant en défenseur intraitable du principe de précaution, dont l’application est lourde d’enjeux dans les domaines de la santé et de l’environnement (OGM, gaz de schiste, pesticides, etc.).
Les esprits pourraient vite s’échauffer sur ce sujet (François Fillon propose en effet d’extraire ce principe de la Constitution).

Nucléaire et principe de précaution comme repères clivants

Le candidat écologiste Yannick Jadot a mis en exergue les ennemis de la transition : le charbon que le mouvement social rejette, le pétrole soutenu par la globalisation et le ‘big business’, le nucléaire qui marche avec l’opacité et la rente. « Il faut lutter contre le règlement démocratique », a lancé le député européen qui prône un plan d’investissement européen de 600 milliards avec la BEI et la BCE pour les nouveaux transports, les plans verts de production et de solidarité. Il veut promouvoir une loi de sortie du nucléaire, car « le projet de Bure est irresponsable. En Grande Bretagne, Hinckey Point c’est 35 milliards de rente pour EDF mais pas pour la France ! »
 
Si tous les candidats de gauche ou du centre sont favorables au principe de précaution, ce n’est pas le cas de François Fillon, qui le qualifie de « machine bureaucratique » et revendique de l’équilibrer par un principe de responsabilité. On peut s’interroger sur le sens de cette position quand on sait que le principe de précaution est ancré dans le droit européen (traité de Maastricht) et que la Cour européenne de justice s’y réfère régulièrement.
Quant au principe de responsabilité, il figure déjà dans la charte de l’environnement et l’on sait combien l’Europe encourage l’innovation responsable ! (voir les programmes Horizon 2020).
 
Serge Grouard, venu représenter le candidat des Républicains, a rappelé la « gravité de la situation d’autant que l’on fait face à l’accroissement de la consommation d’énergie qui a triplé depuis soixante ans. Nous devons passer à une économie décarbonée, quitter la logique de prédation pour aller vers une logique de protection ». Les 35 mesures que François Fillon propose en matière d’écologie sont rassemblées dans le document Environnement et transition énergétique, disponible sur le site des Républicains. 

Epoque charnière : les citoyens prêts à l’insurrection

Manuel Vals, Emmanuel Macron et Marine Le Pen n’ont pas cru bon de manifester leurs positions pour cette soirée. Manuel Valls, dans son discours d’Evry, a promis de répondre aux enjeux du réchauffement climatique. Avant lui, Emmanuel Macron, dans son livre Révolution, s’est fait le chantre de la transition énergétique. Le Front national et sa présidente ne sont pas en reste. Marine Le Pen défend une « écologie patriote » et soutient à toute force… le nucléaire.
« Nous sommes à une époque charnière, estime Dominique Bourg. Cohabitent actuellement les rêves les plus fous d’arrachement à la nature (colonisation de Mars, immortalité, manipulation du climat par géoingénierie) tandis que se manifeste un désir de ré-enracinement  avec l’attention aux animaux, le goût de la permaculture, de l’alimentation saine. Un gouffre se creuse entre les citoyens impliqués dans des transitions concrètes de leurs modes de vie en territoires, et les dirigeants d’entreprises ou gouvernants ».
 
Le Commissaire général de France Stratégie,  Jean Pisani-Ferry, ne dit pas autre chose dans sa tribune sur les incertitudes qui pèsent déjà sur 2017 : « la question du climat va dominer les cinq et même les dix années qui viennent. Les engagements pris dans cet accord sont 30% en dessous de ce qu’il faut faire pour tenir l’objectif prioritaire d’une hausse de la température limitée à 2 degrés. Le chantier est donc considérable. Il faudra par exemple adopter un prix de carbone entre 100 et 150 euros par tonne d’ici 2030, contre 20 euros seulement aujourd’hui. Cela impliquera des changements dans les prix et dans les modes de vie ».
 
Mutations profondes en vue donc qui est anticipée par la jeune génération. Dans l’enquête « Génération what » que Anne Muxel, directrice de recherches à Sciences-Po, a reprise pour voir l’évolution des mentalités des 18-34 ans, la première préoccupation est celle de … l’écologie (52%) dépassant l’accès à l’emploi (45%). 62% d’entre eux déclarent pouvoir « participer demain ou dans les prochains mois à un grand mouvement de révolte ».
L’urgence d’agir et agir avec cohérence est bien tangible. Selon la Banque Mondiale, la pollution atmosphérique s’est hissée au quatrième rang des facteurs de risque de décès prématurés dans le monde, et il s’agit de nos jours du type de pollution le plus meurtrier : 5,5 millions de décès  pour un coût de 5000 milliards de dollars.
 
(1) rencontre réalisée en partenariat avec les Éditions Les petits matins, l’Université Paris-Dauphine et la Fondation de l’écologie politique.
 

Constats et questions adressés par Dominique Bourg 

1er constat, environnemental :
Pour l’observateur des questions environnementales que je suis, l’évolution récente de la situation est effarante.
Le rythme d’élévation de la température moyenne a été décuplé durant les trois dernières années et la température moyenne s’est envolé en 2016, atteignant 1,2° de plus que les moyennes de la fin du 19ème siècle, au lieu de 0,85 ° encore en 2013. Nous atteindrons très probablement les 2° dès le milieu du siècle. La signature et la ratification de l’accord de Paris est certes une bonne chose, mais ni le timing, ni le niveau actuel des engagements nationaux, ni la conception de l’accord mettant l’accent sur la neutralité carbone ne sont des réponses satisfaisantes à la situation. A quoi s’ajoute le retour surprenant de Lysenko aux USA après l’élection de Trump.
Sur le front du vivant, la situation n’est pas moins dramatique. C’est désormais 58 % des vertébrés sauvages (en termes de populations et non d’espèces) qui ont disparu depuis 1970.
Sur celui des ressources, la situation est tout aussi inquiétante. C’est désormais jusqu’à 1800 mètres sous le sol que l’on va chercher certains métaux à un coût énergétique exorbitant, alors qu’on devrait baisser notre consommation énergétique. De récentes études sur l’interface production mondiale de blé/changement climatique ne laissent pas d’inquiéter. Etc.
Enfin, pour faire le lien avec les observations de Dominique Méda sur la croissance qui vont suivre et que je partage, je rappellerai les conclusions du rapport de l’ONU publié début juillet (Global Material Flows and Resource Productivity), la consommation de ressources croit au monde plus vite que le PIB depuis le début des années 2’000 ! Pas d’issue sans remise en cause de la croissance.
 
 
Face à ces défis inédits et gigantesques, nombre de dirigeants au monde se tournent vers le passé. Trump veut restaurer l’industrie des années cinquante et lorgne vers Lysenko, Poutine vers l’expansionnisme d’Ivan le Terrible et en France la primaire de droite ne souffle pas un mot de tous ces enjeux ! Et les cinq années du quinquennat qui s’achève n’ont guère connu d’avancées nationales en ces matières.
 
Nous rappelons dans notre livre l’ampleur des défis auxquels nous sommes confrontés et nous proposons un certain nombre de solutions. Nous souhaitons comprendre dans quelle mesure vous les partagez :
 
1ère question : le constat reconnu ou non ?
Question préalable, connaissez-vous et reconnaissez-vous ce constat, la nouveauté et la hauteur des défis qu’il suscite ? Si oui,compte tenu des enjeux climatiques, et de l’état vieillissant du parc nucléaire national, pourquoi ne pas lancer un programme ambitieux d’énergies renouvelables impliquant sous forme coopérative citoyens et collectivités locales, en créant en outre nombre d’emplois ? Cette question recoupe celle qui vous sera posée par Dominique en termes d’investissement. Le verso de cette question est celle portant sur l’instauration d’une taxe carbone, pour dans le même temps accélérer la sortie des fossiles.
2ème question : Principe de précaution ?
Pourquoi le rejet du principe de précaution par une partie de la classe politique alors que c’est une protection bien fragile contre des substances ou des situations dangereuses ? Il aurait dû être notamment appliqué contre les néonicotinoïdes ou contre les perturbateurs endocriniens depuis longtemps et ne l’a pas été. Face aux désastres en cours en termes de déstabilisation des écosystèmes (effondrement des populations de pollinisatieurs notamment) ou aux dommages croissants en ternes de santé publique, nombreux sont ceux qui proposent la suppression de ce principe, alors que d’autres se contentent de l’ignorer dans les faits. Que comptez-vous faire en ces matières ? 
3ème question : réforme démocratique ?
La réponse aux enjeux écologiques ne peut être mise en œuvre à institutions démocratiques constantes. Elle exige en effet et une participation plus grande des citoyens et une meilleure information de ces mêmes citoyens face à des défis qu’ils ne peuvent appréhender par leurs sens. Comment concevez-vous l’évolution de nos institutions démocratiques afin de mieux répondre à ces défis nouveaux et gigantesques ? Quelles sont vos propositions concrètes dans ce domaine.

Constats et questions adressés par Dominique Méda

La plupart des responsables politiques continuent à adresser des suppliques pour que la croissance revienne « comme avant » et à considérer celle-ci comme la solution à tous nos maux. Or, en 40 ans, le taux de croissance des pays anciennement industriels s’est irrémédiablement tassé. Certains économistes comme Robert Gordon annoncent même que la croissance ne reviendra plus parce que nous ne connaitrons plus d’innovation technologiques radicales et parce que la dynamique se heurtera à des « vents contraires ». Mais la vraie question n’est pas là.
La vraie question est de savoir s’il est souhaitable que nous retrouvions des taux de croissance semblables à ceux des Trente Glorieuses alors même que nous prenons aujourd’hui conscience que la croissance a, certes, été à l’origine d’immenses bienfaits mais qu’elle a également été porteuse de maux et de dégradations tant du patrimoine naturel que de la cohésion sociale et du travail humain au point que certains auteurs proposent désormais de d’écrire Une autre histoire des Trente Glorieuses pour rendre visible le revers de la médaille.
 
Les années 1970 avaient déjà été le théâtre d’une semblable remise en cause. En juin 1972, lors d’un débat organisé par le Club du Nouvel Observateur, réunissant notamment Edmond Maire (le secrétaire général de la CFDT), Sicco Mansholt (le président de la Commission européenne), Herbert Marcuse et André Gorz, Edmond Maire affirmait : « la croissance comme but de l’économie marchande, l’idéologie de la consommation obsession, non seulement ne répondent pas aux besoins humains fondamentaux mais ne peuvent même plus être poursuivies sans conduire le monde à la catastrophe (…) Et nous contestons donc à la CFDT la conception actuelle de la croissance et son calcul, ce calcul qui élimine les services hors marché, la qualité des relations interpersonnelles, le type de conditions de travail, la valeur de l’urbanisme, mais qui par contre additionne, sans se gêner, le coût des bombes atomiques, celui des accidents de la route, et celui de la lutte anti-pollution. Au total les 5 % de croissance annuelle dont on nous parle n’ont aucun sens profond».
 
Le président de la Commission européenne n’était pas en reste qui ajoutait : « La crise actuelle du pétrole n’est qu’un heureux avertissement ! Il était évident que les sociétés industrielles ne pouvaient poursuivre leur croissance au rythme actuel. Grâce à cette crise… nous pouvons nous rendre compte de la vraie situation alors qu’il est encore temps de prendre les mesures qui s’imposent (…) Le temps est venu d’entamer une lutte sans pitié contre le gaspillage : réduire le parc automobile au strict nécessaire, et pour cela développer les transports collectifs. Lutter contre le gaspillage de chauffage en isolant les maisons. Il s’agit véritablement d’une discipline individuelle, d’un nouveau code civique ! En un mot : consommer moins de tout ! »
 
Cette forme de lucidité a été éclipsée, d’une part, en raison de la crise économique de la fin des années 70 mais aussi parce que par construction, notre indicateur fétiche, celui avec lequel nous mesurons la richesse des sociétés – le PIB – rend les dégâts invisibles. Par construction, le PIB néglige quantité d’activités essentielles à la reproduction de la société (activités bénévoles, domestiques, familiales, amicales, de loisirs…) ; il ne tient pas compte des inégalités dans la répartition de la consommation ou de la production ; il laisse dans l’ombre les évolutions des patrimoines, naturels et humains mobilisés pour fabriquer la somme des valeurs ajoutées. Tout le monde, nous dit-on, le sait, la Commission Sen-Stiglitz l’a confirmé, mais rien ne change.
 
Les fruits traditionnels de la croissance – amélioration du bien-être, création nette d’emplois et réduction des inégalités – ont disparu les uns après les autres et se sont métamorphosés en poisons : inversion du sentiment d’accroissement du bien-être, destruction nette d’emplois et intensification des inégalités. Mieux, il existe une corrélation nette entre croissance et émissions de C02 et plusieurs études montrent aujourd’hui que les objectifs du GIEC sont incompatibles avec des taux de croissance élevés, voire même que leur atteinte exige une croissance nulle sinon négative. Dans notre livre, nous montrons pourquoi cela n’est pas une mauvaise nouvelle mais peut au contraire constituer une formidable opportunité de renouer avec le plein emploi, et de conjuguer résolution de la question écologique et de la question sociale. Nous plaidons pour un changement fort, un engagement dans la reconversion écologique de la société, et nous montrons que c’est une alternative crédible.
 
Questionnement en trois volets :
 
1/ Etes vous d’accord pour dire que « le tout croissance » ne marche plus, et pour cesser de considérer que la seule solution pour sortir nos sociétés de la crise consiste à compter sur le retour de la croissance d’après-guerre. Etes vous prêts à proposer une véritable rupture avec ce discours, y compris avec la notion de croissance verte  qui est une façon de considérer qu’il est possible de concilier taux de croissance élevé et amélioration de l’environnement? Etes vous prêts à tout mettre en œuvre pour que nous poursuivions, comme le propose l’économiste Jean Gadrey, des gains de qualité et de durabilité plutôt que des gains de durabilité et pour que nous adoptions d’autres indicateurs de richesse ?
 
2/ Une des craintes liées à la remise en cause de la croissance comme seule voie possible concerne l’emploi. Sans croissance, nous dit-on, il serait impossible de créer des emplois. Etes vous prêts à reconnaître au contraire que la reconversion écologique peut être fortement créatrice d’emplois comme le montrent plusieurs études et qu’un programme massif d’investissement dans la transition écologique (reconstruction de notre système énergétique ; de notre système productif ; verdissement des processus industriels ; rénovation thermique des bâtiments, agro-écologie…) est de nature à relancer l’activité et l’emploi. Il s’agirait donc d’une forme de relance très différente d’une relance classique dans la mesure où les dépenses seraient ciblées sur l’investissement écologique mais aussi d’un usage plus intelligent des sommes que certains économistes songeaient à une époque à répandre sur le bon peuple par hélicoptère. Etes vous prêts à soutenir et promouvoir en Europe un programme du type « 1000 milliards pour le climat » tel que proposé par Jean Jouzel ou par Alain Grandjean dans notre livre.
 
3/ Contrairement à ce qui s’est passé avec les restructurations industrielles en Europe ces quarante dernières années, où des pans entiers de la population ont été sacrifiés, il nous faudra défendre l’idée, proposée par la CSI d’une « transition juste » permettant que les travailleurs des secteurs en déclin ne soient pas exclus. Que proposez vous comme solution pour eux : programme massif de requalification ? Revenu de base ? Réduction du temps de travail ? 
 
 
 

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