Certains observateurs pensent que l’armée russe « patine » en Ukraine. Elle y trouve une résistance sous-estimée et ses capacités militaires ne seraient pas au niveau de ce que le Kremlin prétendait. Il faut prendre garde de juger l’armée russe dans les premiers jours de ce conflit. En revanche, les spécialistes commencent à bien connaître la rhétorique russe et il faut s’en méfier. Ainsi quand ils disent que l’Ukraine dispose d’armes chimiques fournies par les États-Unis, il faut craindre qu’ils ne jettent un leurre pour justifier a priori l’utilisation de telles armes par leurs troupes. Ce ne serait pas la première fois, souvenons-nous de la Syrie.
Les responsables occidentaux estiment que l’avancée militaire de la Russie a été « très lente » ces derniers jours, en raison d’une résistance ukrainienne plus importante que prévue et d’une mauvaise planification et logistique de la part de Moscou. Mais ils reconnaissent que les forces russes progressent et tentent de « resserrer l’étau » autour de Kiev, la capitale. Selon le quotidien britannique The Guardian, Poutine serait néanmoins de plus en plus frustré par la résistance de l’Ukraine. L’Occident craint donc désormais qu’il ne se tourne vers des mesures de plus en plus extrêmes pour parachever l’invasion.
Guerre d’intox
La Grande-Bretagne et les Etats-Unis craignent ainsi que la Russie, pressée par le temps, ne soit en train de préparer l’utilisation d’une arme chimique en Ukraine. Cette inquiétude vient après que des responsables du Kremlin ont affirmé, sans preuves tangibles, que les Etats-Unis avaient soutenu un programme d’armes biologiques dans le pays.
Le secrétaire de presse de la Maison Blanche, Jen Psaki, a déclaré mercredi 9 mars que la Russie avait fait « de fausses allégations sur de prétendus laboratoires d’armes biologiques américains et sur le développement d’armes chimiques en Ukraine », et a ajouté que ces allégations avaient été reprises à Pékin. « Maintenant que la Russie a fait ces fausses déclarations, et que la Chine semble avoir approuvé cette propagande, nous devrions tous être attentifs à ce que la Russie utilise éventuellement des armes chimiques ou biologiques en Ukraine, ou crée une opération sous faux drapeau en les utilisant », a-t-elle tweeté.
We took note of Russia’s false claims about alleged U.S. biological weapons labs and chemical weapons development in Ukraine. We’ve also seen Chinese officials echo these conspiracy theories.
— Karine Jean-Pierre (@PressSec) March 9, 2022
Plus tôt dans la journée de mercredi, la porte-parole du ministère russe des affaires étrangères, Maria Zakharova, a déclaré que la Russie disposait de documents prouvant que les États-Unis avaient soutenu un programme d’armes biologiques en Ukraine, impliquant la peste, le choléra et l’anthrax. Washington et Kiev ont tous deux démenti ces allégations, que Mme Psaki a qualifiées de « grotesques ». Le même jour, l’agence de presse russe RIA Novosti a affirmé que 80 tonnes d’ammoniac avaient été livrées au village de Zolochiv, près de Kharkiv, deuxième ville d’Ukraine, par des « nationalistes ukrainiens ». Le rapport cite le général Igor Konashenkov, porte-parole du ministère russe de la défense, qui affirme que l’Ukraine « prépare une provocation en utilisant des substances toxiques … afin d’accuser ensuite la Russie d’utiliser des armes chimiques ».
« La Russie a l’habitude d’accuser l’Occident des violations mêmes qu’elle commet », a tweeté Mme Psaki. « Tout cela est un stratagème évident de la Russie pour tenter de justifier sa nouvelle attaque préméditée, non provoquée et injustifiée contre l’Ukraine. »
Mariupol, car son invasion initiale a été lente à progresser.
Crimes de guerre
Les responsables occidentaux ont lancé à plusieurs reprises des avertissements sur l’utilisation possible par la Russie d’armes particulièrement meurtrières au cours des deux dernières semaines, comme les bombes thermobariques qui causent de graves dommages aux corps humains en raison de l’intensité de leurs détonations.
Ces mises en garde très médiatisées de l’Occident sont autant destinées à avoir un effet dissuasif que fondées sur une évaluation de l’utilisation effective de ces armes. Mais la Russie a montré une volonté apparente de cibler les civils dans les villes ukrainiennes telles que Kharkiv et
Les attaques directes contre des civils ou des infrastructures civiles sont considérées comme des crimes de guerre. Le développement, la production, le stockage et l’utilisation d’armes chimiques sont interdits par un traité international signé par 193 pays. Les armes chimiques ont néanmoins été utilisées à au moins 17 reprises au cours de la guerre civile en Syrie, selon l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), qui a accusé le régime de Bachar el-Assad, soutenu par la Russie, d’être à l’origine de plusieurs attaques très médiatisées.
Un fonctionnaire occidental confie : « Je pense que nous avons de bonnes raisons de nous inquiéter d’une éventuelle utilisation d’armes non conventionnelles, en partie à cause de ce que nous avons vu se produire sur d’autres théâtres, par exemple en Syrie, et en partie parce que nous avons vu un peu de mise en scène pour cela dans les déclarations sous faux drapeau qui sortent ».
Il existe en effet des parallèles avec le travail de fond effectué par Moscou avant une attaque chimique à Douma en Syrie, lorsque la Russie a utilisé ses médias d’État pour diffuser des allégations selon lesquelles les rebelles syriens préparaient des armes chimiques avec l’aide de l’Occident.
Bob Seely, député conservateur britannique et observateur de longue date de la Russie, a déclaré dans The Telegraph qu’une telle attaque en Ukraine serait désastreuse. Il a déclaré : « Vous ne pouvez pas vivre dans les métros de Kiev et de Kharkiv lorsque des armes chimiques sont utilisées, car le chlore et le sarin sont plus lourds que l’air. Ils s’infiltreront et couleront comme de l’eau dans les sous-sols et étoufferont ces personnes. Le seuil de risque de Poutine est plus élevé. Sa volonté d’endurer des pertes civiles et militaires dépasse presque notre entendement. »
Que fait l’OTAN aussi près des frontières russes? Et dans le Donbass vous savez comment sont maltraités les habitants par les autorités depuis 7 ans?