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La réindustrialisation française passe par l’innovation

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Alors que le thème de la réindustrialisation s’est imposé dans la campagne présidentielle, l’industrie française s’attelle à relever le défi en multipliant les innovations. Aperçu de cette dynamique au travers de trois secteurs : énergie, BTP, transport, où startups et grandes entreprises rivalisent d’inventivité pour donner corps à cet objectif national.

Plan d’investissement massif de 70 milliards d’euros pour « réindustrialiser la France » et nous permettre de « redevenir une nation d’innovation et de recherche », le programme « France 2030 (1) » présenté par Emmanuel Macron, en octobre 2021, se veut particulièrement ambitieux. Il se propose de ramener l’industrie française sur le podium mondial, aux côtés de l’Allemagne, de la Chine et des États-Unis. Un plan d’investissement plus que bienvenu, si l’on considère que la part de l’industrie dans la richesse française a chuté de 10 points depuis les années 1980 (2). 

Alors que la puissance publique prend toute sa part pour donner l’impulsion, le secteur privé est loin de rester les bras croisés, notamment en matière d’innovation. Car si la réindustrialisation est une pétition de principe séduisante, encore faut-il que les efforts se concentrent dans les domaines nouveaux où la créativité entre en résonance avec les attentes des clients et de la société, notamment sur la question environnementale. Pour l’illustrer, trois secteurs différents, où les plus jeunes startups et les plus grands groupes industriels démontrent l’excellence à la française, avec le point commun de faire progresser l’industrie vers les mobilités de demain.

La startup française qui révolutionne les transports exceptionnels

Pratique, écolo, révolutionnaire, gigantesque (3)… Les superlatifs ne manquent pas pour parler du dirigeable LCA60T (pour Large Air Capacity 60 Tons) imaginé par la startup girondine Flying Whales. Le concept de l’engin est né à la suite d’une discussion avec l’Office national des forêts (ONF) qui souhaitait récupérer du bois dans des zones reculées, mais inaccessibles par voie terrestre, faute de route.

Beaucoup plus mobile que le camion, plus costaud que l’hélicoptère et globalement très peu polluant : le cahier des charges de l’engin, établi par l’ONF, est particulièrement exigeant. Pourtant, le LCA60T va bel et bien entrer en production dès l’année prochaine. Soutenu notamment par la Bpifrance et Safran, Flying Whales voit les choses en grand, à l’image de son invention : 200 mètres de long, 50 mètres de diamètre… Le LCA60T s’apprête d’ailleurs à devenir le plus gros engin volant du monde.

Derrière ces caractéristiques techniques impressionnantes se cachent de futures applications pleines d’espoir : démantèlement de pylônes électriques impossibles à emmener par hélicoptère, récupération en pleine mer de lanceurs spatiaux réutilisables… Le dirigeable se veut d’ailleurs autant ambitieux qu’écologique. Gonflé à l’hélium et propulsé de manière hybride à l’aide de quatre turbines produisant l’énergie nécessaire pour faire tourner ses hélices, le ballon devrait émettre « 20 fois moins de particules qu’un hélicoptère par tonne transportée » (4), indique le directeur de la communication de Flying Whales, Romain Schalk.

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Si le dirigeable fonctionnera en partie au kérosène à son lancement, la transition vers une énergie « propre » est d’ores et déjà à l’étude. Un objectif qui tombe bien, puisque c’est justement sur les énergies propres, comme l’hydrogène vert, que des PME et l’État français veulent miser pour alimenter les transports de demain. 

L’hydrogène vert, au cœur de la stratégie française de transition écologique

La France deviendra-t-elle le « leader mondial de l’hydrogène vert » ? C’est en tout cas le pari que fait Emmanuel Macron (5), comme il l’annonçait dans le programme « France 2030. 7 milliards d’euros (6) : c’est le montant de ce plan d’investissement massif qui devrait permettre de faire naître au moins deux « gigafactories » à hydrogène propre d’ici la fin de la décennie.

Avant même l’annonce de ce grand plan d’investissement public, des PME françaises s’étaient en réalité déjà lancées dans la course à l’hydrogène décarboné. C’est le cas de l’entreprise McPhy, créée en 2008 dans la Drôme. Cette startup produit des électrolyseurs et des conteneurs permettant de stocker l’hydrogène « de manière très dense et à très basse pression », comme l’explique Pascal Mauberger (7), le président du directoire de McPhy Energy. Rare entreprise européenne à s’être lancée dans l’aventure aussi tôt, McPhy a réalisé en octobre 2020 une levée de fonds de 180 millions d’euros (8). Une somme qui lui permettra d’ouvrir sa propre « gigafactory » d’ici à 2024. « Cette future usine aura vocation à jouer un rôle majeur dans le passage à l’échelle industrielle de l’électrolyse, condition indispensable pour que l’hydrogène vert atteigne les objectifs de décarbonation fixés par le gouvernement », estime Pascal Mauberger.

Effectivement, si la France tient tant à ouvrir ces fameuses usines de production gigantesque, c’est surtout pour pallier le défaut majeur de la production d’hydrogène vert. Ce dernier est réalisé à partir d’un procédé d’électrolyse, qui consiste à séparer des molécules d’eau en utilisant un courant électrique. Le problème, c’est que cette technique coûte quatre fois plus cher que les procédés traditionnels de production de l’hydrogène. L’ouverture des gigafactories a donc surtout pour but d’exploiter à grande échelle l’électrolyse pour espérer réaliser des économies… d’échelle précisément. 

Et si l’hydrogène vert attire autant l’argent des investisseurs privés et publics, c’est parce que ses utilisations actuelles et futures ont de quoi faire rêver, notamment dans le secteur des transports. Flying Whales avec son dirigeable, Alstom et ses rames Regiolis H2 utilisées par la SNCF (9) L’hydrogène vert est déjà là et ne demande qu’à être développé davantage. Le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, imagine d’ailleurs déjà un « avion neutre en carbone » (10) produit d’ici 2035.

En attendant les vols Paris – New York sans émission de gaz à effet de serre (GES), les Franciliens pourront bientôt profiter des quatre nouvelles lignes de métro actuellement en construction sur les chantiers du Grand Paris Express. Un chantier colossal où les entreprises du BTP attributaires des différents lots font assaut d’innovations tous azimuts, notamment pour — là encore — réduire les émissions de gaz à effet de serre.

Le Grand Paris Express, le chantier qui transforme le BTP

Le secteur des travaux publics a effectivement opéré de nombreuses mutations ces dernières années, motivé notamment par la réduction de son empreinte carbone et des nuisances qu’il peut engendrer. Emblématique du secteur, le Grand Paris Express (GPE), plus grand chantier urbain d’Europe (11), cristallise ces nouvelles exigences, tant les contraintes techniques, environnementales et sociales sont nombreuses. Un défi triplement ardu, que s’efforcent de relever les acteurs du BTP, à l’image d’Eiffage, « major » du secteur, qui profite des lots qui lui ont été attribués pour montrer la compréhension des enjeux et l’inventivité dont le secteur est capable.

Emblématique de cette créativité, la filiale Génie Civil d’Eiffage a notamment mis au point l’outil de caractérisation des sols Carasol (12), pour procéder en un temps record — moins de deux heures — à l’analyse des matières extraites des sous-sols, contre une semaine pour les outils d’analyse traditionnels. Fruit d’une collaboration de deux ans entre Eiffage et le Commissariat à l’énergie atomique (CEA), Carasol contribue notamment à faciliter la gestion logistique des déblais excavés et fluidifier leur orientation vers les lieux de destination pertinents pour chaque variété d’éléments identifiés. Un bond en termes de délais absolument indispensable si l’on considère que 90 % des nouvelles lignes sont souterraines, avec des volumes inédits de matériaux à déplacer. Le cas du tronçon 1 de la ligne 16 (13) pour lequel Carasol a initialement été mis au point illustre ce défi, puisque les tunneliers du groupement emmené par Eiffage devaient extraire quotidiennement 4500 tonnes de matériaux.

Plus globalement, Carasol permet de répondre aux ambitions du maître d’ouvrage en matière de recyclage des déchets. « Notre objectif est de valoriser les déblais à hauteur de 70 % », expliquait lors d’une audition au Sénat le président la SGP Jean-François Monteils (14). « Ce taux est très ambitieux. […] Je ne pense pas qu’il sera possible de progresser sans un vrai effort d’innovation ». 

Enfin, toujours sur la question environnementale, c’est plus généralement concernant les émissions de GES que la SGP a demandé aux entreprises d’être irréprochables, et donc innovantes. Pour trouver des alternatives au béton traditionnel, dont la fabrication représente la majorité des émissions de CO2 des chantiers, les entreprises ont recours à la fois au béton fibré pour fabriquer les voussoirs (15) des tunnels, et au béton (ultra) bas carbone. Pour ce dernier, la France est en pointe, notamment avec la startup française Hoffmann Green Cement Technologies, qui fabrique le ciment décarboné, ingrédient fondamental du béton bas carbone. Elle rencontre un grand succès commercial, avec des clients comme KP1, ou le géant mexicain du BTP Cemex, ou encore… Eiffage, notamment pour le chantier du GPE (16).

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Anna DABROWSKA, Université de Varsovie

(1) https://www.huffingtonpost.fr/entry/france-2030-macron-30-milliards-lindustrie-et-innovation_fr_61655488e4b0c1ab4bb840ca
(2) https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/le-mot-de-l-eco/la-reindustrialisation-de-la-france-enjeu-majeur-de-ces-prochaines-annees_4900685.html
(3)https://www.20minutes.fr/planete/3117099-20210906-gironde-comment-cargos-volants-flying-whales-veulent-conquerir-monde
(4) https://www.futura-sciences.com/tech/actualites/transport-flying-whales-relance-dirigeable-revolutionner-transport-marchandises-88188/
(5) https://www.huffingtonpost.fr/entry/france-2030-macron-30-milliards-lindustrie-et-innovation_fr_61655488e4b0c1ab4bb840ca
(6) https://www.lesechos.fr/industrie-services/energie-environnement/plan-de-relance-la-france-change-dechelle-dans-lhydrogene-1239179
(7) https://www.lesechos.fr/2014/03/specialiste-de-lhydrogene-mcphy-se-lance-en-bourse-274659
(8) https://www.lesechos.fr/industrie-services/energie-environnement/mcphy-leve-180-millions-deuros-pour-lancer-sa-giga-factory-delectrolyseurs-1255503
(9) https://www.sncf.com/fr/engagements/enjeux-rse/sncf-accelere-train-a-hydrogene
(10) https://twitter.com/brunolemaire/status/1270279128382668800
(11) https://www.societedugrandparis.fr/nouveau-metro/grand-paris-express
(12) https://www.journaldunet.com/economie/immobilier/1499019-le-grand-paris-express-laboratoire-d-innovations-et-de-technologies-pour-la-construction/
(13)https://www.sensemaking.fr/Une-histoire-d-ingenieurs-dans-les-entrailles-de-l-Ile-de-France_a439.html
(14) http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20210308/atdd.html
(15) https://www.latribune.fr/entreprises-finance/services/transport-logistique/moins-de-co2-et-plus-de-beton-bas-carbone-le-grand-paris-express-veut-se-verdir-894713.html
(16) https://www.capital.fr/entreprises-marches/eiffage-et-hoffman-signent-un-partenariat-de-3-ans-pour-la-fourniture-de-ciment-1386589

Image d’en-tête : Dirigeable LCA60T de Flying Whales (France)

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