BILLET D’HUMEUR
La France et le Vanuatu ont lancé ce jeudi 27 juillet, à l’occasion de la visite d’Emmanuel Macron dans l’archipel du Pacifique, un appel commun pour « une action immédiate face au changement climatique », illustration de la diplomatie environnementale que le président français veut renforcer dans cette région ; sans craindre la contradiction. En effet, La France ne baisse toujours pas suffisamment ses émissions de gaz à effet de serre pour faire sa part de la lutte contre le changement climatique et n’est pas non plus « prête à faire face » à ses effets. C’est notamment le Haut Conseil pour le climat qui le dit.
Le Premier ministre du Vanuatu Ishmael Kalsakau avait exhorté, en mars à l’ONU, les dirigeants du monde à « réagir, et vite », contre le changement climatique pour éviter « l’Apocalypse ». Il était parvenu à faire adopter une résolution à l’Assemblée générale des Nations unies visant à faire clarifier par la Cour internationale de justice, plus haute juridiction du monde, les obligations des États en matière de lutte contre le changement climatique. L’objectif étant de pousser les pays à accélérer leur action pour prévenir les dommages causés à l’environnement par leur inertie.
Le président français a voulu rencontrer le dirigeant vanuatais, lors d’une escale dans son voyage de retour de Nouvelle Calédonie, pour lancer l’ »appel d’Ifira », du nom d’un îlot face à Port-Vila, la capitale vanuataise. Les deux dirigeants appellent tous les acteurs mondiaux à une accélération de « la transition énergétique à l’échelle mondiale en abandonnant progressivement les énergies fossiles« . La France et le Vanuatu soulignent de concert « la nécessité urgente de faire face aux conséquences des changements climatiques » et notamment « l’élévation du niveau des mers » qui menace des îles de la région. Parmi les « priorités » évoquées, figure aussi « la protection de la biodiversité marine, notamment s’agissant des grands fonds marins » dont ils veulent bannir totalement « l’exploitation » minière.
À l’étranger, ou dans les grandes instances internationales, le président français se pose en chantre de la lutte contre le dérèglement climatique et de la protection de la planète. Pourtant, en France, les résultats sont loin d’être à la hauteur de ses discours. Le Haut Conseil pour le Climat (HCC), autorité indépendante, a ainsi publié son rapport annuel fin juin. Ses conclusions ne sont pas tendres avec les politiques françaises en matière de climat : « on n’a pas été capable de gérer (…) on a été dépassé« , résume pour l’AFP sa présidente, la climatologue Corine Le Quéré.
Avec 2,7% de recul en 2022, la baisse des émissions nationales se poursuit, mais à « un rythme insuffisant pour atteindre les objectifs« , regrette le HCC. « Le gouvernement ne peut plus se défausser et doit réagir avec des mesures enfin structurantes« , scandent les ONG qui poursuivent l’Etat dans « l’Affaire du Siècle ».
Ce 27 juillet, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, s’est alarmé des températures extrêmes enregistrées sur la planète ces derniers jours : « L’ère du réchauffement climatique est terminée, place à l’ère de l’ébullition mondiale » a-t-il lancé, répétant ses appels incessants à agir radicalement et de façon urgente. « L’air est irrespirable, la chaleur est insoutenable. Et les niveaux de profit des énergies fossiles et l’inaction climatique sont inacceptables », a-t-il martelé. « Les dirigeants doivent diriger. Assez d’hésitation. Assez d’excuses. Assez d’attente que les autres bougent en premier. »
Emmanuel Macron, porte des discours pleins d’ambition et d’apparente conviction à l’étranger. Mais il est empêtré, en France, dans une politique entravée par des puissances d’influence redoutables : des groupes pétroliers, agroalimentaires, industriels, arcboutés sur la défense d’un système de production et de fonctionnement qui leur assure croissance et profit. Quand le président français accordera-t-il courageusement les paroles qu’il tient à l’extérieur et les actes, ici et maintenant ? Assez d’hésitation. Assez d’excuses. Assez d’attente.