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Grandes migrations et vie sauvage seront surveillées depuis l’espace

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La station spatiale internationale (ISS) va bientôt se voir confier une nouvelle mission : surveiller les grandes migrations des animaux à travers la planète. Oiseaux, mammifères, poissons, et même insectes seront donc suivis à la trace depuis l’espace. Une masse considérable de données souvent inédites sera ainsi récoltée pour mieux comprendre les phénomènes migratoires mais aussi les corrélations qui apparaissent avec le changement climatique et la propagation des épidémies.
 
La légende raconte qu’en 1250 le prieur d’une abbaye cistercienne attacha à la patte d’une hirondelle un message griffonné sur un petit morceau de parchemin : « Hirondelle, où vis-tu pendant l’hiver ? ». Quelque mois plus tard, la même hirondelle lui revint, porteuse d’une réponse : « En Asie, dans la maison de Petrus ».
Cette histoire rapporte le premier cas de marquage d’oiseaux migrateurs de l’histoire. Depuis, cette date, les scientifiques se sont toujours attachés à mieux comprendre ces déplacements massifs d’animaux d’un bout à l’autre de la planète. Aujourd’hui on sait tout des déplacements des hirondelles, on sait que des oiseaux sont capables de parcourir des milliers de kilomètres pour joindre l’Europe aux contrées de l’hémisphère sud. Mais une immense partie du monde animal reste encore mystérieuse sur la nature de ses déplacements migratoires.
 
À une époque où tout ou presque est tracké, surveillé, espionné, analysé sur notre planète, on imagine mal que des troupeaux entiers d’animaux, que des bancs immenses de poissons, ou des nuages d’insectes échappent encore à notre vigilance. Et c’est pourtant le cas. De très nombreuses espèces conservent encore le mystère sur le trajet de leurs déplacements. « Ils partent d’un endroit et nous ne savons pas ce qui leur arrive jusqu’à ce qu’ils apparaissent à un autre endroit » dit l’anthropologue, spécialiste des migrations, Meg Crofoot de l’Université de Californie.
 
Cette ignorance rend la protection des espèces menacées encore plus difficile. En effet, les mesures prises dans une partie du monde peuvent être complètement anéanties si les animaux se rendent dans un autre endroit de la planète, moins soucieux de leur préservation. Cette méconnaissance met aussi en danger notre propre santé. Où se déplacent les oiseaux porteurs de la grippe aviaire ? Où migrent les chauve-souris porteuses du virus Ebola ? Quelles est la logique de déplacement de ces millions de Quéléa à bec rouge, véritables nuages de petits pinsons, capables de causer des ravages dans les récoltes ?
 
Depuis les années 1960, les scientifiques tentent de répondre à ces questions en équipant certains animaux d’émetteurs radio. Au début, les animaux étaient suivis à l’aide d’antennes maladroitement orientées à la main. Puis vint l’heure des satellites permettant de suivre les animaux sur tous les terrains. Mais même après des décennies d’innovations, les systèmes de marquage et de balise des animaux sont encore imparfaits. Trop lourds pour être portés par certains animaux (la plus petite balise pèse 10 grammes, mais c’est encore trop lourd pour certaines espèces), trop chers, et encore trop imprécis.
 
Frustré par toutes ces limitations, l’ornithologue Martin Wiselski de l’Institut Max Planck, a donc travaillé sur de nouveaux concepts de marquage et de repérage. Il a conçu ainsi l’initiative ICARUS (International Cooperation for Animal Research Using Space). Son équipe a développé des étiquettes radio extrêmement légères pouvant être montées sur des animaux même minuscules. Ces balises émettent un signal vers un récepteur placé dans la Station Spatiale Internationale (ISS). Le système devrait être opérationnel dès l’été prochain. Il sera alors possible de cartographier les allées et venues de milliers d’oiseaux, chauve-souris, insectes et autres voyageurs, en temps réel. « Ce sera le meilleur réseau de détection de la vie sur la planète que l’on n’ait jamais envisagé » s’enthousiasme Martin Wiselski.
 
Pourtant, le montage financier de l’opération n’a pas été des plus faciles. Après un refus poli de la NASA, l’équipe a finalement obtenu un financement de 19 millions d’euros du Centre aérospatial allemand et 1.7 millions d’euros du Max Planck Institute pour la fabrication des étiquettes balises. Les premières générations pèsent 5 grammes mais les chercheurs pensent descendre à 1 gramme très rapidement. Cela leur permettra de placer ces balises sur des animaux très petits.
La gageure technique n’est pas triviale car chaque balise est un véritable centre d’observation équipé d’un panneau solaire, d’un GPS et d’une mémoire assez importante. Elle est conçue pour mesurer l’accélération, la température, l’altitude, la pression, l’intensité lumineuse et une quantité d’autres données précieuses. Ces données sont directement transmises vers l’espace et, détail important, chaque balise peut être reprogrammée depuis l’espace.
 
Les chercheurs du monde entier se pressent pour faire partie de ce programme. Déjà 40 à 50 équipes utiliseront ICARUS pour étudier les oiseaux, les chauve-souris, les tortues de mers, et plus encore. La condition pour participer à ce projet est de télécharger toutes les données récoltées sur MoveBank, une base de données gratuite en ligne, spécialement dédiée pour les études de suivi des animaux.
 
Les cas d’usage de ces recherches sont aussi variés que la diversité animale peut l’être.  Certaines équipes travaillent ainsi sur les migrations de chauve-souris en Amérique du nord. L’intérêt de leur recherche est important pour les opérateurs d’éoliennes. En effet, ces animaux, lors de leurs migrations, se font hacher menu par les pales de ces gigantesques moulins, causant, au passage des dégâts considérables au matériel. En connaissant mieux le trajet de leurs déplacements, il suffira d’arrêter les turbines le temps de leur passage pour éviter un massacre.  D’autres chercheurs travaillent sur la préservation des orang-outangs. Beaucoup d’argent est dépensé pour les reloger dans la nature afin de leur faire éviter la promiscuité fatale avec les hommes ; mais, une fois déplacés, il est impossible de savoir où ils se dirigent et s’installent.
 
ICARUS fournira des aux chercheurs des informations sur les animaux, mais les animaux fourniront, en retour, des informations sur la planète. « Nous pouvons considérer les animaux comme des capteurs » explique un des concepteurs du projet.  Les animaux utilisent l’ouïe, l’odorat, la vision et des sens plus ésotériques comme la réception magnétique ; ils détectent et réagissent aux changements de leur environnement. Ils sont comme une flotte vivante de thermomètres, baromètres et plus. À travers leurs mouvements, ils révèlent le monde.
Martin Wiselski pense même que certains animaux seraient en mesure de prévoir des catastrophes naturelles comme des éruptions volcaniques ou des tremblements de terre : « Il y a beaucoup de cas non vérifiés encore et d’anecdotes, mais je pense qu’il y a quelque chose » dit-il.
 
L’engouement pour ce projet n’en n’est, pour l’heure qu’à ses débuts. Déjà, une Société Internationale de Bio-Logging vient de se former, projetant de démarrer une « décennie du bio-logging » en 2018. Des pourparlers sont en cours avec d’autres agences spatiales pour équiper leurs satellites de capteurs ICARUS, voire même de construire un réseau de satellites dédiés. On est loin de la note manuscrite attachés à la patte d’une hirondelle.
 
Cet article est adapté du texte de Ed Young publié dans The Atlantic
 

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