Prendre un avion comme on prend un taxi. C’est le principe du PPlane, un projet mené par des chercheurs européens. En libre-service, comme aujourd’hui les vélos ou Autolib’, il sera piloté à distance. Sa trajectoire sera surveillée par des opérateurs au sol. Sa conception devrait demander encore vingt ans.
Le projet PPlane a pour objet d’explorer un concept de transport personnel utilisant des avions de quelques places, automatiques, pour tout public. L’enjeu : compléter le transport multimodal du futur par un maillon aérien, pour plus de flexibilité et de rapidité.
De nombreuses œuvres de science fiction l’affirmaient : avant le 21e siècle, nous devions tous nous déplacer en voitures volantes ou autres engins aériens individuels. On en est loin : seuls quelques très riches disposent de jets privés, quelques pilotes passionnés utilisent de petits avions privés ou d’aéro-clubs pour leurs déplacements ou s’amusent sur leurs coucous, les autres se contentant d’avions collectifs. Et les contraintes en matière d’énergie, de pollution et de bruit ne plaident pas en faveur d’un développement de l’aviation individuelle telle qu’elle est aujourd’hui.
Dans le cadre de son programme de recherches prospectives, la Commission européenne a lancé en octobre 2009 un projet, baptisé PPlane, afin d’étudier la possibilité de développer une aviation semi-individuelle, de deux à huit personnes, pour un large public. L’Onera en est le coordinateur.
Pour savoir à quoi pourrait bien ressembler cet avion du futur, les chercheurs ont d’abord pris en compte uniquement des critères techniques, mais ils ont très rapidement ajouté des critères sociaux et environnementaux. Et là, le nombre de solutions a drastiquement chuté. « Il est inenvisageable que cet avion soit bruyant ou polluant, explique par exemple Claude Le Tallec, responsable du programme PPlane à l’Onera. Il sera donc forcément électrique. »
L’autre grande question est celle du degré d’automatisation de cet avion. « Beaucoup de partenaires de ce projet sont des pilotes, qui ont une vision de l’aviation de loisir, remarque le chercheur. Mais ici, il s’agit de transport, à la portée du plus grand nombre, avec une grande exigence de sécurité. Il faudra donc qu’il soit très automatisé, afin que des passagers non pilotes puissent l’emprunter. »Ces avions ressembleraient donc aux drones, la seule différence étant qu’ils accueilleraient des passagers. Tous les travaux actuels sur la conception des drones, leur résistance aux pannes, sont donc très utiles pour PPlane. Il est encore bien trop tôt pour vérifier si un tel système de transport aérien individuel est techniquement faisable, et plus encore pour juger de sa pertinence économique.
Le projet vise surtout à identifier les difficultés techniques à surmonter. Il en existe essentiellement deux : concevoir des automatismes capables de se débrouiller en toutes circonstances, et fabriquer des batteries avec deux à trois fois plus d’autonomie. Les chercheurs tentent aussi d’imaginer comment on utilisera cet avion : faudra-t-il une assistance au décollage ? Partira-t-on du centre ville ou de l’extérieur comme pour les avions actuels ? Quel sera le type de piste et sa longueur ? Faudra-t-il utiliser une catapulte ? Y aura-t-il des pilotes et des contrôleurs à terre, ou seulement ces derniers ? Comment planifier les vols en fonction de la météo ?
« Autant nous avons des idées plutôt précises de l’avion techniquement, autant nous sommes encore dans le flou sur cette gestion », précise Claude le Tallec. Une certitude : de tels avions automatiques ne sont pas compatibles avec le système actuel de contrôle aérien, qui reste très peu automatisé. Ce système interagit notamment avec le contrôle aérien [ATC]. Le consortium PPlane, fort de cinq centres de recherche, de quatre universités et de petits et grands industriels a été idéalement constitué pour orienter son activité dans la perspective d’innovation tracée par la Commission Européenne.
Le projet PPlane permet d’ores et déjà d’identifier un futur prometteur pour une telle composante du transport aérien des années 2050, économiquement viable, socialement acceptable et environnementalement soutenable. L’accessibilité à ce futur est néanmoins encore dépendante d’efforts de recherches qu’il convient de poursuivre tant dans les domaines techniques que sociétaux.
(Source : Onera.fr)