Déserts à la Grande Galerie de l'évolution - UP' Magazine

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Déserts à la Grande Galerie de l’évolution

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Au printemps 2025, le Muséum national d’Histoire naturelle invite à un voyage inédit au cœur des milieux désertiques de notre planète, de l’emblématique Sahara aux déserts polaires, en passant par les déserts de Sonora, d’Atacama, de Gobi… Le point commun à ces milieux : des conditions hors normes à priori hostiles à la vie. Et pourtant, animaux et végétaux y ont développé d’ingénieuses stratégies d’adaptation que le public découvre à travers les spécimens d’une biodiversité surprenante, issus de différentes régions du monde. L’exposition présente également les méthodes déployées par les humains pour vivre dans ces environnements contraignants, mais aussi les menaces qu’ils font peser sur ces milieux fragiles. L’occasion par ailleurs de faire découvrir l’expérience du désert comme terrain privilégié de recherche. À travers près de 200 spécimens et objets de natures variées, pour la plupart issus des riches collections du Muséum, ainsi que des dispositifs mécaniques et multimédias ou de grandes projections, l’exposition offre une approche scientifique, ludique et esthétique de ces milieux fascinants.

« De premier abord, le désert apparait comme un territoire hostile à l’Homme qui peine à y trouver sa place tant le climat y est rude, l’eau rare et la vie végétale et animale restreinte. Dans le langage courant, le désert est synonyme de vide et de dénuement. Dans les représentations collectives, il évoque des dunes de sable à perte de vue, de rares oasis, la cruauté des mirages pour le voyageur désorienté, une chaleur écrasante le jour et un froid paralysant la nuit. La réalité est pourtant bien plus contrastée. En effet, si tous les déserts ne se ressemblent pas, ils sont également des réservoirs d’une biodiversité méconnue composée d’espèces qui ont démontré des capacités d’adaptation étonnantes.
Depuis le Paléolithique, les premiers mouvements migratoires ont amené les hommes à traverser ces zones arides et certaines sociétés ont décidé de s’y implanter durablement. On pense au nomadisme ou au commerce caravanier qui ont vu naître des systèmes écologiques, techniques, politiques et culturels qui forcent l’admiration des citadins.
Plus proche de nous, Théodore Monod, professeur du Muséum, fut l’un des grands défricheurs du désert. Arpentant le Sahara pendant plus de 60 ans, cet homme de science infatigable a contribué à la connaissance de ce territoire à travers ses recherches préhistoriques, botaniques et géologiques.
Aujourd’hui, la communauté scientifique étudie le désert dans toutes ses dimensions et ce sont les fruits de ces recherches qui vous seront présentées dans cette exposition qui prendra ses quartiers dans la Grande Galerie de l’Évolution en avril. Quels sont les caractéristiques d’un désert ? Quelle biodiversité abritent-ils ? Comment les hommes s’y sont adaptés ?
Derrière la notion de désert viennent se nicher autant de métaphores de l’immensité comme de la vulnérabilité de notre environnement. En proposant cette réflexion sur le temps long, le Muséum est au cœur de sa mission de service public : celle de susciter l’émerveillement et la curiosité pour ces écosystèmes complexes mais également de transmettre des connaissances fiables pour défendre une véritable éthique pour la planète. »
Gilles Bloch, Président du Muséum national d’Histoire naturelle

Canyon Paria-Vermilion Cliffs Wilderness du plateau du Colorado © John Fowler – CC BY-SA 2.0

Vous avez dit « Déserts » ?

Qu’est-ce qu’un désert ? La réponse à cette question n’est pas évidente. Il ne suffit pas de considérer uniquement la température ou les précipitations, les critères les plus immédiats. Le point commun entre toutes ces régions du monde est leur aridité : une rareté permanente de l’eau sous forme liquide. Dans tous les déserts, qu’ils soient hyperarides, arides ou semi-arides, chauds ou
polaires, les précipitations sont rares. Dans les déserts chauds, le déficit en eau est accentué par une évaporation intense. Dans les déserts polaires, l’eau est le plus souvent immobilisée sous forme de neige ou de glace et ne peut bénéficier aux plantes et aux animaux.
Les déserts ne sont pas tous arides pour les mêmes raisons. Ils se répartissent en cinq grandes catégories, témoignant de leur diversité, selon leur situation géographique sur le globe et les facteurs qui ont contribué à leur formation (circulation océanique et atmosphérique, relief, forme des continents) : les déserts zonaux de la zone intertropicale, les déserts continentaux, les déserts d’abri,
les déserts littoraux et les déserts polaires.

Présents sur tous les continents, les déserts occupent aujourd’hui un tiers des surfaces émergées de notre planète. Qu’ils soient brûlants ou polaires, formés de roche, de sable, de sel ou de glace, ils ont tous en commun d’être des milieux ouverts, exposés à l’aridité et aux températures extrêmes. Quelles sont les limites géographiques des déserts ? Comment expliquer leur diversité et leur
large répartition à la surface du globe ?

En présentant au public des cartes, des maquettes tactiles de dunes, une collection de sables des déserts du monde ou encore des échantillons minéralogiques sculptés par les éléments ’exposition fait le point sur la définition même de désert. Plongé dans une extraordinaire palette de paysages, le visiteur découvre alors l’action des architectes du désert que sont l’eau, le vent et les chocs thermiques, de l’échelle des reliefs grandioses à celle de la roche…

Dendrocisyos socotrana, Socotra Island_Rod Waddington – CC BY-SA 2.0.

Une vie adaptée aux conditions extrêmes    

Il y a de la vie dans les déserts ! Les déserts sont des milieux a priori peu propices à la vie. Ils abritent pourtant une surprenante variété de plantes et d’animaux qui, au cours de l’évolution, se sont adaptés à ces conditions. D’un désert à l’autre, face aux mêmes contraintes, des espèces très diverses ont adopté des stratégies similaires.

La deuxième partie de l’exposition propose de partir à leur rencontre à travers les principales zones arides de la planète. Dans ces environnements a priori hostiles se cache une biodiversité discrète : des espèces qui au cours de leur évolution se sont adaptées à la rareté de l’eau, aux températures extrêmes et à la vie à découvert dans des milieux balayés par le vent. À travers des spécimens naturalisés, secs et en fluide d’animaux et de plantes, des dispositifs ludiques et des projections, l’exposition présente d’étonnantes adaptations morphologiques, physiologiques ou comportementales. On découvre ainsi la stratégie du lézard cornu ou du cactus pour profiter de la moindre goutte d’eau, le secret de la fourmi argentée pour endurer des chaleurs intenses ou encore l’art du camouflage chez le renard polaire.

Habiter le désert 

La troisième partie de l’exposition est dédiée aux humains qui ont également élu domicile dans les déserts, de manière permanente ou temporaire.. Mais comment se sont-ils adaptés à des milieux aussi contraignants ? Ils ont pour cela adopté deux grands types de stratégie : se déplacer à la recherche de ressources rares, dispersées et irrégulières – la mobilité –, ou transformer leur milieu de vie pour qu’il subvienne à leurs besoins comme dans le cas de l’oasis. Mais la mondialisation est venue bousculer les modes de vie traditionnels. Aujourd’hui, un large éventail de situations intermédiaires existe entre nomadisme strict et sédentarité permanente.

Arctique – Svalbard -Domaine public

En explorant des exemples issus de différentes régions du monde, l’exposition met en lumière deux grandes stratégies adoptées pour vivre dans un milieu où les ressources sont rares et dispersées : la transformation du milieu, avec notamment la création d’oasis, et la mobilité. Autour d’une tente touareg et d’une maquette d’oasis, une sélection d’objets et plusieurs projections témoignent de la vie humaine dans ces espaces singuliers. Des témoignages d’habitants de déserts chauds et polaires viennent compléter cette section.

Une garde-robe adaptée
Les vêtements constituent l’adaptation la plus immédiate des humains aux contraintes climatiques des déserts. En jouant sur les matières, les épaisseurs et les formes, les vêtements traditionnels protègent des températures extrêmes, du vent et des fortes amplitudes thermiques journalières. Pour protéger la peau du soleil et faciliter la circulation de l’air autour du corps, les Touareg portent généralement des habits longs et amples. Tandis que pour se protéger du froid et du vent, les Inuits superposent les couches de vêtements, en alternant la fourrure tournée vers l’intérieur et celle
tournée vers l’extérieur.
Cependant, avec la mondialisation, les vêtements traditionnels sont aujourd’hui souvent supplantés par des vêtements importés, parfois moins adaptés aux conditions climatiques, mais aussi moins chers et plus faciles à se procurer. Les tenues traditionnelles sont alors réservées à des circonstances particulières, comme les fêtes, ou, à l’inverse, à l’intimité de la maison.

L’art de la mobilité
Dans les milieux désertiques, où les ressources sont rares et dispersées, la mobilité peut être un atout majeur. Les déplacements se font de pâturage en pâturage, de point d’eau en point d’eau pour satisfaire les besoins des animaux, pour le mode du pastoralisme, ou en quête de gibier ou de plantes comestibles, pour le mode de la chasse et de la cueillette. Hier incontournables, les moyens de transport historiques – le dromadaire, figure emblématique des déserts du Sahara au Moyen-Orient, le Chameau de Bactriane en Asie Centrale ou le traîneau à chiens dans le désert arctique –
sont de moins en moins utilisés dans la vie quotidienne et sont remplacés par des véhicules à moteur. Les déplacements sont réguliers – souvent saisonniers – ou se font au gré des opportunités. Ce mode de vie tend cependant à disparaître : la plupart des habitants vivent aujourd’hui dans des villes ou des villages et sont devenus des nomades occasionnels.
Dans les espaces désertiques, des points de repère existent pour qui sait les identifier : arbres, rochers, reliefs sont de précieux indicateurs de position. Le soleil et les étoiles donnent le cap, tout comme le sens du vent dominant, qui imprime sa trace sur la roche ou la glace.

Transformer son environnement
Transformer son environnement est l’une des deux grandes stratégies des humains, avec la vie nomade, pour vivre en société dans le désert. C’est ainsi que sont nées des communautés agricoles sédentaires en milieu aride : les oasis. Tout y est apporté, construit et entretenu sans relâche, en mobilisant savoirs et savoir-faire locaux : l’habitat, les sols, les plantes, le réseau d’eau pour l’irrigation 

Des espaces fragiles

Les déserts sont des milieux vulnérables déjà fortement impactés par l’action humaine : tandis que la plupart des déserts chauds gagnent du terrain, les déserts polaires tendent à disparaître. En cause, les changements climatiques, la lente dégradation des terres liées à leur exploitation intensive, l’épuisement progressif des nappes phréatiques, l’extraction à grande échelle des ressources minières… Les menaces qui pèsent sur les écosystèmes fragiles des déserts constituent ainsi un fil rouge au sein du parcours de l’exposition.

Un terrain de recherche scientifique

Les déserts sont des terrains de recherche privilégiés pour de nombreuses disciplines représentées au Muséum, comme la biologie de l’évolution, l’anthropologie, la paléontologie, l’écologie ou encore l’astrophysique. Le climat sec est favorable à la conservation des météorites ou des pièces archéologiques. Les paysages naturels préservés facilitent les observations fauniques ou végétales.

La dernière partie de l’exposition donne la parole aux scientifiques : ils nous font partager leur expérience intime du désert et nous présentent un objet emblématique de leur recherche. L’exposition est une invitation à la découverte de la variété fascinante des déserts, dans une approche transversale qui place l’adaptation du vivant au centre du propos.
La muséographie permet une immersion au cœur des paysages, des couleurs, des matières et de la lumière, qui confère à ce voyage sa dimension sensible. Conçue par les équipes du Muséum, Déserts repose sur l’expertise scientifique d’une équipe pluridisciplinaire afin de proposer une expérience au plus près de l’état actuel des connaissances. De grandes projections, de nombreux dispositifs interactifs et ludiques et un parcours tactile viennent enrichir la présentation d’animaux naturalisés, de spécimens de minéraux et de plantes, d’objets ethnologiques et de photographies… L’exposition s’adresse à tous les publics dès 5 ans.

Autour de l’exposition

Image dérobée 4 – Silvère Jarrosson

« Silvère Jarrosson : Peindre le désert »
Exposition à découvrir du 2 avril au 30 novembre 2025, à la sortie de Déserts

Fruit d’une collaboration entre le peintre Silvère Jarrosson et le Muséum national d’Histoire naturelle, l’exposition « Silvère Jarrosson : peindre le désert » se présente comme un prolongement artistique de l’exposition Déserts.
Issu du monde la danse, Silvère Jarrosson est également titulaire d’un master de biologie sur la morphogénèse phylogénétique. Venu à la peinture dès ses 20 ans, passé par la collection Lambert à Avignon ainsi que par la villa Médicis à Rome, l’artiste, lauréat de la Fondation Claude Monet en 2018, a exposé à la chapelle Saint-Louis de la Salpêtrière à Paris, au Musée Unterlinden de Colmar
en 2023 et à Art Basel en 2024.
Le projet de Silvère Jarrosson s’inscrit pleinement dans la démarche du Muséum qui consiste à soutenir et promouvoir des œuvres artistiques s’appuyant sur des connaissances scientifiques et des processus de recherche.
Cette approche s’aligne parfaitement avec le mouvement « art-science », une tendance émergente où l’art et la science se rejoignent pour créer de nouvelles formes d’expression. Huit peintures monumentales créées pour l’occasion sont exposées dans le prolongement de Déserts. Elles proposent un voyage sensible dans l’univers de l’artiste, où les déserts sont imaginés, réinventés et créés par le mouvement et la combinaison du hasard et de la contrainte. Pour créer ses œuvres, l’artiste a échangé avec des experts scientifiques, tel Guillaume Lecointre, professeur au Muséum, et Maël Crépy, géoarchéologue, pour nourrir sa réflexion sur la représentation artistique des phénomènes naturels.

Au sein de cette exposition, l’artiste propose d’explorer trois grands thèmes : 
La morphologie des paysages : Silvère Jarrosson s’inspire des méthodes scientifiques de la morphogénèse, l’étude de l’origine des formes, pour exprimer l’immensité du désert. Comment les paysages et les formes naissent-ils ? À travers son processus de création (coulures, dripping, brossage, ponçage, corrosion chimique), l’artiste dévoile des reliefs et des paysages désertiques réinventés.
Le jeu du hasard et des contraintes :  Le hasard joue un rôle assumé dans chaque étape de la création artistique de Silvère Jarrosson, des coulures de la peinture sur la toile à la façon dont elles se mélangent et se superposent, puis se révèlent au cours du ponçage des œuvres qui vient découvrir des couches enfouies.
Ce processus fait écho à celui de la formation des déserts, pour lesquels le hasard des phénomènes naturels se déploie dans la limite des contraintes des règles physiques. En faisant du hasard et de la contrainte une méthodologie de création, l’artiste s’appuie sur une démarche scientifique pour donner à voir des phénomènes naturels.
Une expérience à l’échelle de la perception humaine : Silvère Jarrosson a vécu l’expérience du désert au cours de ses voyages. Une expérience qu’il entend mettre à la portée du public en ouvrant la porte à une pérégrination sensible parmi les vastes espaces. À travers ses œuvres, l’artiste propose ainsi un moment d’introspection et de contemplation.

Commissariat scientifique :

  • Aude LALIS, chercheuse en biologie de l’évolution de la biodiversité au Muséum.
  • Anthony HERREL, directeur de recherche CNRS, spécialiste en anatomie comparée, morphologie fonctionnelle et biologie de l’évolution au Muséum.
  • Denis LARPIN, responsable scientifique des collections végétales tropicales des jardins botaniques du Muséum.
  • Vincent BATTESTI, chercheur CNRS en anthropologie sociale, ethnoécologue au Muséum.
  • Maël CRÉPY, chercheur en géoarchéologie au CNRS (HiSoMA).

Exposition Déserts du 2 avril au 30 novembre 2025 à la Grande Galerie de l’Évolution – Jardin des Plantes 36, rue Geofroy Saint-Hilaire – 75005 Paris

Photo d’en-tête : Sahara avec renard polaire (originaire d’Islande) – Domaine public

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