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Pour une clinique en management : prendre soin du devenir humain

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La posture managériale se réclame d’un nouveau souffle, plus humain. Dans le prolongement de l’article d’Olivier Fournout (L’urgence à dialoguer autrement pour agirparu dans UP’, et plus localement en ce qui concerne les limites du monde productif, la socio-anthropologue clinicienne de la Transition, Aude Montlahuc-Vannod, soutient l’idée que le concours d’une épistémologie clinique en sciences sociales permettrait au management de se réapproprier la dimension subjective et donc, par essence, ingérable de l’homme, qu’il semble appeler de ses vœux. Explications.

Un regain d’humanité ?

Travelling arrière – retour en 2018. Le monde des affaires poursuit impassiblement sa course effrénée. Business as usual. Il ne sait encore rien du coup de frein que lui imposera subitement, deux ans plus tard, une crise mondiale inédite liée à une pandémie : celle de la Covid-19.

Cette même année, sans peut-être savoir que son propos va alors devenir une maxime managériale, voilà ce que confie Javier Pladevall, directeur commercial de Volkswagen-Audi en Espagne, aux auteurs d’un article de la célèbre Harvard Business Review intitulé « Pourquoi autant de managers oublient qu’ils sont des êtres humains ? » (Hougaard, Carter, & Brewerton, 2018) (1) :

« Le leadership aujourd’hui consiste à désapprendre le management et à réapprendre à être humain » (2)

Cette formule de Javier Pladevall fait alors l’objet d’une véritable propagation sur le web et est relayée tant via des réseaux sociaux tels Twitter, LinkedIn ou Facebook, que par une multitude de sites de conseil en management (3).
Ce déferlement semble cristalliser une nouvelle tendance affichée à vouloir diffuser l’idée que le management relèverait désormais d’une pratique avant tout humaine, y compris pour ses plus hauts praticiens. Certains sceptiques verraient assurément en cet aphorisme managérial la répétition d’un credo de surface masquant la réalité d’une logique utilitariste sans échappatoire bien rodée : « on gère des ressources humaines et on investit dans du capital humain, et on ne compte plus les ouvrages, articles et autres rapports qui se proposent de transfigurer l’économie, la gestion, l’entreprise, en leur donnant un visage humain » (Généreux, 2006, p. 172). En somme, plus dure est la condition faite aux salariés des entreprises de la société hypermoderne (Aubert, 2010; Bauman, [2003] 2010), plus le discours managérial s’efforcerait de rappeler l’humanité de cette condition.

Nous pourrions, à l’inverse, voir dans les mots de Javier Pladevall une déconstruction interne de la pensée ou d’un état de conscience du management, la marque d’une rupture dans la continuité d’une pratique ou une suspension dans sa logique habituelle

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La force de cette proposition – telle une parole visionnaire – réside en effet dans le paradoxe qu’un dirigeant en appelle lui-même au désapprentissage de la science par laquelle il s’est construit : le management ; un double mouvement où en libérant sa parole de son carcan gestionnaire, il redonnerait sens à ses propres missions en tant qu’humain mais aussi à toutes celles et ceux à qui il demande engagement, afin de les accomplir pour le compte de l’entreprise qu’il dirige. Cette assertion, prise à titre d’exemple, semblerait dès lors tout empreinte d’une école de pensée gestionnaire spécifique, qui considère que la science n’est pas là pour enfermer et garantir la légitimité d’un savoir mais pour l’aider à se recréer, à se déplacer, à s’ouvrir à d’autres pratiques, à se réinventer (Chanlat, 2014).

« Réapprendre à être humains » : injonction oxymorique ou symptôme d’une société malade de la gestion ?

En saillie de cette innovation managériale (Rogers 1995 ; David, 1996) (4) que Pladevall semble appeler de ses vœux, éclate pourtant une injonction existentielle oxymorique : celle d’appeler des hommes à « réapprendre à être humains ». En contexte d’entreprise, l’action collective est pourtant par essence « artefactuelle » et ne se considère donc pas a priori « comme un phénomène social naturel ou comme une donnée anthropologique » (David, Hatchuel, & Laufer, 2012, p. 31). Alors, si l’humain devenait l’objet princeps des sciences de gestion, la gageure ne relèverait-elle pas d’une difficulté à le penser dans une épistémologie si rationnelle qu’est celle du management ? Cet objet, ingérable par essence, ne lui échapperait-elle pas car impossible à objectiver ?

Dans le propos de Pladevall transparaît ce que des chercheurs cliniciens en sciences sociales ont pu identifier comme un symptôme préoccupant de la société à être devenue « malade de la gestion » (Gaulejac de, 2005). A gros traits, ce serait ainsi le tableau d’un trop-plein de « gestion » et d’un « pas assez d’humain » qui se dresse. C’est alors toute la construction d’ensemble d’actions, conduites de façon collective par des groupes humains organisés, qui réclamerait un nouveau souffle : quelque chose d’un détachement gestionnaire au profit d’un regain d’humanité.

Cette posture de recul affiché n’appellerait-elle pas alors à un nouveau cadre de pensée pour réaliser cette gageure, voire d’envisager une école de pensée alternative à celle répandue sur le marché du conseil actuel en organisations, issu de celui des big four (5) et reposant strictement sur l’épistémologie gestionnaire de l’expertise, la rationalité instrumentale et la programmation ?

Comment devenir leader d’actions philanthropiques, gérer des crises et désapprendre le management ?

Ne faisons pas l’économie de poser ce qui pourrait relever d’une double difficulté à affronter pour le management contemporain, et de taille. Dans pareil climat général actuel où règnent la culture de l’aléatoire et la montée des inquiétudes et des incertitudes (Clampitt & Dekoch, 2016 ; Castel, 2009), « faire travailler les autres devient aussi de plus en plus compliqué » (6) (Theron, 2008, p. 8).

Susciter l’adhésion et l’obéissance amène les managers parfois inévitablement à une envie de tricher avec cette réalité incertaine : « les dirigeants efficaces trouvent des options dans des situations désordonnées grâce à une réflexion multidimensionnelle et à des histoires parcimonieuses qui leur permettent de se concentrer et de donner une orientation » (Bolman & Deal, 2015). Bâtir, pour les autres, des explications d’une réalité de plus en plus incertaine les fait ainsi tantôt recourir à de « parcimonieuses histoires », tantôt à des habiletés stratégiques, habilement réfléchies en amont. Tout porterait alors à croire que nous sommes, a priori, face à des techniciens aguerris de l’évitement de l’incertitude.

A parler de contexte et à l’aune de celui multi-crises que traverse notre époque, la mutation à échelle micro du monde du travail rencontre des crises globales plus vastes telles que la démographie, la mondialisation, l’environnement, en passant par des transformations profondes en termes d’organisation et d’innovation technologique. Dans ce contexte, il apparaît judicieux de prendre la formule de Pladevall à sa valeur faciale comme disent les sociologues ; c’est-à-dire la prendre au mot afin d’interroger quelle modalité pourrait contribuer à la production d’une connaissance sur les ressorts anthropologiques qu’induit un tel changement de paradigme de pensée. L’enjeu est d’accompagner un mouvement qui serait utile à l’évolution du monde du travail que notre société souhaite ou imagine pour continuer d’y inscrire son histoire humaine.

Au-delà de l’intérêt purement professionnel et statutaire d’acteurs majeurs de l’économie à réussir à « réapprendre à être humains », il en va de leur engagement éthique à contribuer à la viabilité humaine en reconsidérant l’idée même d’objectifs et de performance pour l’entreprise, dans un monde où les ressources sont limitées.

Dans un monde où la nécessité d’une politique de « transition » s’instaure depuis 2015 (7), les leaders qui présentent une résistance identitaire à quitter un passé révolu, souffriront un jour ou l’autre de la portée de leurs choix et actes. Ceux qui accompagnent le mouvement de réapprentissage vivront ce que Guy Pelletier (8) nomme « l’innovation du troisième type » (1994), dont la réussite dépend substantiellement d’une capacité à « savoir désapprendre » (Barth, 2015).

A l’ère de ce que certains nomment « la grande transition de l’humanité » (Afriat & Theys, 2018), à devoir emprunter d’autres chemins, concevoir et mener des transitions – entendues comme actions philanthropiques (Porter & Kramer, 2002), il semble qu’il ne faille plus considérer ces leaders dans l’extériorité de leur fonction et de leur aspiration à changer de paradigme de pensée, mais bien plus comme des sujets pensant leurs pratiques et leur rôle. N’est-ce d’ailleurs pas une des préconisations que Henry Mintzberg avance lorsqu’il soutient que « c’est la réflexion des dirigeants sur leur propre pratique qui constitue le cœur d’une formation efficace » (2004) ?

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L’enjeu est donc de comprendre autant comment les acteurs centraux du monde productif vivent les limites et les perspectives des institutions qu’ils servent et incarnent, que la complexité du monde hypermoderne de l’intérieur, depuis leur point de vue situé et leur expérience professionnelle -leur parcours biographique et leur vécu subjectif.

La clinique pour libérer la subjectivité gestionnaire de sa rationalité instrumentale

Derrière cette bouteille lancée par Pladevall, transparaît le mouvement d’une pensée gestionnaire cherchant à se libérer des rets du rigorisme d’une rationalité instrumentale et d’approches solutions (Gaulejac, 2005). Une pensée qui, en dissociant l’humain du management pour lui-même, n’a cessé d’enfermer ses formulations – y compris de demandes – dans des définitions de problèmes et des finalités strictement objectivantes.

La posture clinique en recherche, tout comme en médecine, a conduit les chercheurs en sciences humaines et sociales à s’approcher au plus près du vécu, des affects, des émotions et de la subjectivité d’une situation dans une démarche pratique pour déterminer ce qui s’y joue (Gaulejac, 2009, 2014). C’est donc éminemment une posture d’intervention qui prend le parti d’incorporer la dimension du sujet non seulement dans son objet, mais également dans sa finalité de recherche (Rapoport, 1973). En cela, la clinique se révèle être une aide particulièrement propice au développement de pratiques managériales d’un nouveau type.

L’approche « clinique » assure aux sciences de gestion – et au management en particulier – une évolution lui permettant de replacer la complexité humaine au cœur du monde de l’entreprise pour mieux comprendre le travail dans son acception anthropologique, soit : les « diverses manières inventées par l’homme pour agir sur son environnement naturel et en extraire les moyens matériels de son existence sociale » (Godelier, 1991, p. 717).

C’est un truisme que de rappeler que cette jeune discipline, née en France dans les années 1970 (9), est intrinsèquement liée au monde du travail productif. Et puisqu’elle a pour visée d’actionner techniquement de nouvelles pratiques, elle peut dès lors considérer comme réel atout de pouvoir s’appuyer sur un héritage extraordinaire de sciences connexes, qu’elle peut s’employer à articuler pour l’aider à comprendre le monde gestionnaire contemporain et les individualités subjectives complexes, qu’il a engendrées.

Réapprendre à être humain et leader dans un monde aux ressources limitées

Au vu des questions relatives aux multiples transitions qui traversent la société et chaque individu qui la compose, il s’agit de penser en profondeur la notion de continuation humaine à travers la redéfinition d’un business model qui servirait cette cause. Le travail productif se trouve pris au cœur de ces questions, car il fait véritablement quelque chose au monde. Tous les acteurs du monde de l’entreprise et plus largement de la société sont concernés par ces sujets, bien qu’étonnamment « la question de l’utilité des productions [reste] la grande absente de l’agenda des négociations entre employeurs et employés » (Dujarier, 2021, p.217).

Ces questions appellent à un aggiornamento, offrant de produire autant de la compréhension que de la connaissance partagée. Telle est l’intention de cet article : montrer en quoi la clinique en management permet de produire une connaissance sur la complexité des humains qui peuplent les organisations (Courpasson, 2019), sur leurs doutes, sur leurs souhaits et sur les modalités de leurs activités ou empêchements transitionnels.

Il est, en ce sens, crucial de penser que des sciences sociales connexes, telles que l’anthropologie ou la sociologie clinique, rentrent en discussion avec des activités de ressources humaines, de coaching, d’organisation du travail dans son ensemble.

Une connaissance, par les acteurs mêmes du pouvoir et du leadership, offrirait une compréhension élargie sur l’intelligibilité de leur gouvernance. Cette intelligibilité, nous l’opposons délibérément à une certaine « intelligence de la gouvernance » qui a pu être fortement décriée (Boltanski, 2011). Elle permettrait de mettre au jour un ensemble de signaux faibles et implicites qui sont de réels leviers de réflexion sur le rapport pratique à la pratique dans le parcours managérial des leaders.

Aider l’accouchement d’un leadership de type nouveau

Plus largement sur la notion de gouvernance sociétale, la clinique rejoint l’idée d’une réflexion dialogique, chère à Edgar Morin et à d’autres qui s’inscrivent dans sa lignée (Latour, 2020 ; Detchessahar 2019 ; Bonnefond & Clot, 2015), reposant sur la coopération ou l’union de notions antagonistes. C’est ainsi que si changement de paradigme il y a en sciences de gestion, il ne peut s’envisager sans avoir intégré les caractéristiques clés d’une pensée complexe (Morin, 1990).

D’un point de vue du management, ce croisement épistémologique peut se révéler être une aide précieuse à l’accouchement, à une « co-naissance », d’une nouvelle figure de leadership en entreprise : un être social constitué d’individualités qui, au-delà de revendiquer une volonté apparente de réapprendre à êtres humains, continueront aussi peut-être de se réclamer inconsciemment d’appartenir à un groupe social à part, en cherchant une nouvelle forme de distinction des autres du monde commun.

Ces moments où sont déposés des incertitudes ou vacillements de la conscience, comme nous l’avons vu à travers les propos de Pladevall, ne sont-ils pas ceux qui permettent précisément de donner une forme à un sentiment de crise intérieure, une forme pouvant constituer le point de départ d’une prise en compte de la condition à proprement parler humaine de ces leaders, mais aussi une véritable opportunité de relier leurs inquiétudes et aspirations à celles des autres du monde ?

Pour « réapprendre à être humains », c’est en pratique d’une posture d’ouverture à l’expérience brute de l’altérité à laquelle lesdits leaders devront se préparer. C’est aussi à l’expérience de la réticence qu’ils peuvent opposer qu’ils devront s’acculturer, s’ils veulent avoir un rôle de réhumanisation dans le monde productif. Ceci amène donc à redéfinir la question du type de compétences, connaissances ou capacités que les institutions d’éducation dirigeante (écoles de management, executive education…) auraient à apprendre ou faire découvrir à ceux qui se destinent au leadership managérial. Car comment autrement se constituer comme un endroit permettant concrètement à des acteurs centraux du système d’être amenés à le reconsidérer de l’intérieur, comme acte véritablement résilient d’une réhumanisation du management, « au-delà des impératifs directs de l’organisation et de la simple rationalité économique » (Bouilloud, 2012) – et plus encore depuis la crise de la Covid 19, au service de la subsistance, voire de la viabilité humaine ?

La clinique présente cet atout majeur de ne pas opposer le social et l’individuel. Elle cherche plutôt à saisir conjointement la manière dont les sujets sont les produits et les producteurs des faits sociaux, et inversement. Elle offre ainsi à cette discipline qu’est le management, si cruciale pour le devenir du monde productif, de penser un objet qui lui échappe par définition, c’est-à-dire tout ce qui touche au registre subjectif -ingérable et irrationnel- de l’homme.

Aude Montlahuc-Vannod, Socio-anthropologue clinicienne de la Transition – Docteure en Sciences de gestion, ESCP
Membre de L’Association Française de Sociologie (AFS)
Membre du Bureau RT 16 : Sociologie Clinique 

(1) Traduit librement de l’anglais : « Why do so many managers forget they’re human beings ?”
(2) Traduit librement de l’anglais : “Leadership today is about unlearning management and relearning being human beings?”
(3) Via le moteur de recherche Google, nous avons recensé 13 100 résultats contenant la formulation complète : ”leadership today is about unlearning management and relearning being human beings” depuis 2018, date de la parution de l’article auquel nous faisons référence dans la Harvard Business Review.
(4) Le terme d’innovation managériale est ici à prendre au sens de Rogers comme une envie de nouveauté : « une idée, une pratique ou un objet perçu comme nouveau par les individus ou les organisations ». Voir, Rogers E.M. (1995). Diffusion of innovations, The Free Press, New York. Page 11.
(5) Les quatre plus grands groups d’audit financier à l’échelle mondiale dits The Big Four sont Deloitte, Ernst & Young (EY), KPMG et PricewaterhouseCoopers (PwC).
(6) Jean-Michel Théron est cadre dirigeant Français, auteur d’un livre qui s’adresse à ses pairs, acteurs du management.
(7) L’année 2015 a marqué un véritable tournant avec notamment la COP 21, l’Accord de Paris sur le climat, la diffusion des Objectifs de Développement Durable par les Nations Unies.
(8) Guy Pelletier est professeur en gestion de l’éducation et de la formation, à l’université de Sherbrooke. II mène des études au sein de grands organismes internationaux (IIPE, UNESCO, BIE, OCDE).
(9) Après l’apparition de la FNEGE (Fondation Nationale pour l’Enseignement de la Gestion des Entreprises), en 1968.

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