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Des ONG environnementales dans le viseur du Parlement européen

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Face aux crises écologiques majeures de notre époque, telles que le changement climatique et l’effondrement de la biodiversité, l’Union européenne a mis en place des mécanismes de financement pour soutenir les initiatives visant à préserver l’environnement et le climat. Parmi eux, le programme LIFE, lancé en 1992, constitue un outil essentiel pour financer des projets sur le terrain, alliant acteurs publics et privés dans une démarche collaborative. Cependant, ce dispositif, bien que modeste au regard des défis globaux, fait aujourd’hui l’objet de vives critiques de la part de certains eurodéputés, mettant en lumière des tensions croissantes entre les impératifs environnementaux et des intérêts divergents car, selon le quotidien néerlandais De Telegraaf, la Commission européenne aurait indirectement financé des groupes de pression environnementaux pour promouvoir les politiques du Pacte vert. Cette remise en question soulève des interrogations cruciales sur le rôle de la société civile dans la transition écologique et sur les moyens nécessaires pour répondre à l’urgence environnementale.

Dans ce contexte, la LPO (Ligue pour la Protection des Oiseaux) a exprimé sa vive inquiétude face aux attaques de certains eurodéputés visant le programme LIFE. Ces élus remettent en cause l’utilisation des fonds alloués par ce dispositif aux associations de protection de l’environnement, les accusant d’influencer de manière indue les institutions européennes et le processus démocratique : un eurodéputé néerlandais membre du PPE, Dirk Gotink, lors d’une réunion de la commission budgétaire du Parlement européen, a évoqué des listes de « députés à influencer » que la Commission aurait transmises à certaines ONG pour influencer les décisions en faveur du Pacte vert européen.

L’une des ONG les plus visées par ces accusations est le Bureau européen de l’environnement (EEB), basé à Bruxelles regroupant 185 associations environnementales, qui, selon plusieurs observateurs, bénéficient de subventions considérables de l’UE, leur conférant un pouvoir disproportionné pour influencer les décisions européennes.

En réponse à ces accusations, 30 organisations environnementales ont adressé une lettre à la présidente de la Commission européenne pour protester contre la réduction du budget du programme LIFE. Ces ONG défendent l’idée que leur rôle est essentiel face aux multinationales et aux gouvernements, et qu’une réduction de leurs financements limiterait leur capacité à influencer les décideurs politiques.

La LPO dénonce la vision réductrice et infondée de ces eudodéputés, rappelant que les financements alloués aux ONG dans le cadre de LIFE représentent une part infime du budget européen et sont soumis à des normes strictes de transparence et de contrôle.
Selon la LPO, ces critiques s’inscrivent dans une dynamique plus large de résistance au Pacte vert pour l’Europe, orchestrée par des intérêts industriels et alimentée par des campagnes de désinformation. Elles constituent une menace directe pour le rôle crucial de la société civile dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques environnementales.
La Ligue appelle donc les institutions européennes et le gouvernement français à protéger ces financements, indispensables pour garantir une transition écologique ambitieuse et préserver l’espace démocratique face aux pressions exercées par des lobbies corporatistes.

Lancée en 1992, l’Instrument financier de l’Union européenne – LIFE – est le principal outil de financement de l’UE pour l’action environnementale et climatique, avec 5,45 milliards d’euros alloués pour 2021-2027. Cela ne représente toutefois que 0,3 % du budget de l’UE – un montant dérisoire compte tenu de la crise existentielle à laquelle nous sommes confrontés en raison du changement climatique et de l’effondrement de la biodiversité.

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La plupart des programmes LIFE soutiennent des partenaires publics et privés afin de mener des projets sur le terrain, auxquels la LPO participe depuis plus de 25 ans en tant que structure coordinatrice ou bénéficiaire. Par exemple, le LIFE VISON (2017-2023) a permis la sauvegarde du Vison d’Europe, le mammifère le plus menacé de l’Hexagone. Le LIFE SEABIL (2021-2024) s’est employé à réduire l’impact de la pollution plastique sur les écosystèmes marins. Les LIFE+ CAP DOM (2010-2015) et LIFE BIODIV’OM (2018-2023) ont renforcé la protection de la biodiversité exceptionnelle de nos territoires outremer. Le LIFE GYP’ACT (2022-2028) pérennise la fragile population de gypaètes barbus dans nos montagnes. Le LIFE SAFELINES4BIRDS (2023-2028) tente de réduire la mortalité des oiseaux due aux lignes électriques en France, en Belgique et au Portugal.

L’argument avancé par les eurodéputés pour réclamer une réforme, voire pour certains la suppression du programme LIFE est qu’il servirait à financer des ONG pour faire pression sur les institutions européennes, interférant ainsi avec le processus démocratique. La réalité est tout autre : une petite partie du budget – 15,6 millions d’euros par an, soit 0,006 % du total – est destinée à des subventions de fonctionnement pour les organisations de la société civile. Ces aides financières jouent un rôle crucial pour permettre à ces groupes de contribuer à l’élaboration des politiques de protection de la nature et de préservation du climat en Europe, en soutenant la participation citoyenne et la mise en œuvre d’objectifs ambitieux fondés sur la science. Les organisations bénéficiaires de projets LIFE respectent des normes strictes de transparence et d’imputabilité, garantissant l’utilisation rigoureuse des fonds publics.

Ces ressources restent modestes, mais essentielles pour garantir une représentation moins déséquilibrée des intérêts des citoyens quand en 2023, les lobbyistes industriels de l’UE ont collectivement dépensé 1,3 milliard d’euros pour défendre leurs entreprises. Les attaques actuelles contre les ONG environnementales s’inscrivent en réalité dans un contexte plus large de résistance au Pacte vert pour l’Europe, alimentée par des agendas corporatistes et de la désinformation délibérée.

Pour Allain Bougrain Dubourg, Président de la LPO : « La LPO appelle les eurodéputés et le gouvernement français à défendre le rôle vital de la société civile dans la transition écologique et à rejeter toute tentative visant à réduire l’espace d’expression démocratique au profit d’intérêts privés. »

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