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L'Arc de Triomphe de palyre

Comment reconstruire Palmyre ?

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L’armée de Bashar al-Assad, largement soutenue par l’aviation russe et les forces du Hezbollah libanais a repris le contrôle de Palmyre. La (re)prise de la ville, inscrite au Patrimoine mondial de l’Unesco, est ici un enjeu symbolique tout autant que stratégique. Libérée, il faudra maintenant reconstruire Palmyre.

La reprise de la cité antique a été saluée par la communauté du patrimoine culturel. Tout d’abord par la directrice générale de l’Unesco Irina Bokova, mais également par Maamoun Abdulkarim, directeur de la DGAM (Direction Générale des Antiquités Syriennes) qui décrit ainsi une victoire pour le monde entier. La présence de figures du monde culturelle célébrant une victoire militaire confirme bien le statut que Palmyre a acquis au cours des dernières années. La ville est devenue martyre culturel, symbolisant un patrimoine syrien à l’agonie tout en exemplifiant les exactions iconoclastes de Daech.

Le patrimoine culturel à Palmyre

Si l’accent a été mis sur les destructions idéologiquement motivées de Daech, l’état du patrimoine culturel de Palmyre ne peut s’expliquer sans l’implication de tous les acteurs du conflit. En effet, bien avant la prise de la ville par l’État islamique, la transformation de la cité antique en champ de bataille avait déjà mené à la destruction de colonnes, l’endommagement de temples et de couches archéologiques, ainsi qu’à la disparition de certains éléments architecturaux.

Cette destruction s’est amplifiée lors de la prise de la ville par Daech en mai 2015. Un rapport de septembre 2015 met en valeur le pillage d’éléments architecturaux et de sculptures funéraires, la destruction de tombes, d’autels sufis, et la très médiatisée démolition du temple de Baalshamin.

Au cours des derniers mois, l’intensification des combats et les bombardements syriens et russes semble avoir largement participé à la destruction d’une partie de ce patrimoine. Certaines colonnes ont été détruites au cours du mois de novembre par un bombardement russe. Plus récemment encore, mi-mars, certains groupes locaux ont tenté d’attirer l’attention sur le coût de la stratégie russe pour la ville de Palmyre.

LIRE DANS UP’ : La mémoire condamnée, ou le patrimoine mondial entre négligences et destructions 

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Premier état des lieux

Les photos de la ville antique nous sont parvenues dès vendredi. C’est tout d’abord les chaînes Mayadeen et Al-Manar qui nous montrent les colonnades, mais ne permettent pas d’évaluation plus poussée. Au courant de l’après-midi, Rossia 24 met en ligne un montage de vidéo plus précis d’Alexander Pushin et Yevgeny Poddubny.

Ces images nous permettent un premier survol de la situation du site archéologique depuis que les troupes Daech ont pénétré la ville. Elles montrent la destruction quasi-totale, bien connue, du temple de Beelshamin, à l’exception de l’enceinte et d’une partie de la porte d’entrée. La vidéo montre plusieurs impacts d’obus et certaines portions de murs écroulés dans la zone de l’agora et du « Tariff Court ». Le tétrapyle voisin semble intact, mais plusieurs colonnes de la grande colonnade sont à terre, corroborant les rapports. Le théâtre quant à lui reste relativement épargné. Lieu de réunion de Daech et scène d’exécutions de masse, ce dernier ne montre que quelques rares éclats d’obus ou de balles et un lieu généralement laissé à l’abandon.

Dimanche, quelques vidéos permettent enfin de pénétrer le musée. On y voit alors statues romaines défigurées, murs montrant plusieurs impacts d’obus et de balles, et quelques autres éléments architecturaux jonchant le sol sous un toit branlant. Si les quelques destructions de statues peuvent être probablement attribuées à Daech, il semble probable qu’une partie des dommages soient imputables à la bataille en cours.

Si la définition des vidéos ne permet pas d’étude approfondie, elle confirme cependant les informations récoltées sur le terrain et à l’aide d’images satellites par les différents groupes et institutions surveillant la destruction du patrimoine syrien. La collecte de différents types de données reliées à la destruction du patrimoine syrien au cours des dernières années a en effet pour but de préparer la phase de reconstruction qui prendra lieu dès la fin du conflit.

Quels chantiers maintenant ?

À cet égard, Palmyre pourra jouer le rôle d’expérience à petite échelle. Palmyre a été présentée comme martyre culturelle de la guerre civile et des exactions d’EI, c’est donc par elle que doit commencer la reconstruction.

Déjà, Irina Bokova précise le rôle que l’Unesco doit jouer, dès que la situation est stabilisée, et suggère le début du processus de reconstruction aussi tôt que possible. C’est cette même idée qui est défendue par Maamoun Abdelkarim. Dario Franchescini, le Ministre italien de la Culture quant à lui suggère l’emploi de ces casques bleus culturels, une force nouvellement crée composée de carabinieri et de professionnels du patrimoine culturel.

Tout au court du conflit déjà, différentes organisations (Unesco, ICOMOS, ICOM, ASOR, Syrian Heritage Initiative, Heritage for Peace, SHIRIN Project, et bien d’autres) se sont mobilisées pour participer à la protection du patrimoine syrien. Cette mission était limitée par l’incapacité des acteurs à agir à l’intérieur même du pays et s’est principalement concentrée autour de trois aspects : collecte de données sur le terrain, sensibilisation, et formation de professionnels syriens à la gestion du patrimoine en période de conflit.

Ces formations ont eu lieu sur Internet, à Beyrouth ou Gaziantep, et ont mis l’accent sur des aspects aussi variés que catalogage et transport des collections, techniques de conservation d’artefacts ad hoc, techniques de renfort architectural, protocole de collecte et d’organisation de données, sensibilisation aux cadres législatifs existants, préparation aux risques.

Le premier travail de ces organisations sera, dès la sécurisation de la ville, de travailler de concert avec les experts locaux pour organiser une évaluation des dommages et l’établissement d’une liste de priorité de conservation. Ces équipes devront décider de la nécessité et de la pertinence de reconstruire ce qui a été détruit au cours des dernières années de guerre.

Il est probable que les collections archéologiques resteront en sécurité dans les coffres loin de Palmyre. Les équipes en charge de la restauration du patrimoine devront également remettre sur pied le système de gestion culturelle de Palmyre, tout en intégrant les impératifs militaires des forces locales, car la guerre syrienne n’est pas finie. Les risques de pillages sont toujours présents, tant il a été démontré que cette activité était entreprise par tous les partis du conflit, incluant l’armée syrienne officielle.

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Si libérée et sécurisée, Palmyre jouera le rôle de Stunde Null à petite échelle. Elle sera l’opportunité de mettre en action les différentes stratégies élaborées par ONG et institutions internationales durant le conflit. Cependant, l’héroïsation des libérateurs et la hâte des institutions culturelles ne doivent pas minimiser les origines des dommages infligées à la ville. Une reconstruction des vestiges et de l’administration culturelle de Palmyre ne peut passer que par la prise en compte de tous les acteurs et moyens de la destruction du site.

Cet article a été mis à jour le 29 mars 2016.

Bastien Varoutsikos, archélogue, Université Paris Ouest Nanterre La Défense

La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.

Photo : L’Arc de Triomphe de PalyreThe Conversation détruit par Daech en octobre 2015 (photo prise le 27 mars 2016). Maher Al Mounes/AFP

 

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