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Le turnover des employés, ou comment l’optimiser pour éviter la fuite des talents

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Le turnover des employés est un phénomène normal, car la vie dans les entreprises est naturellement faite de départs et d’arrivées de différents collaborateurs. Toutefois, le taux de turnover peut être considéré comme normal quand il reste bas. S’il est élevé, cela peut indiquer un dysfonctionnement dans l’entreprise.
 
Le turnover des employés dans les entreprises a tendance à augmenter au niveau mondial. Selon une étude publiée par HayGroup, 49 millions d’employés supplémentaires dans le monde quitteront leurs entreprises en 2018 par rapport à 2012, le nombre d’employés concernés s’élevant ainsi à 192 millions d’employés. En France, ce taux était de 13,7% en 2013, et devrait augmenter d’environ deux points, pour atteindre les 15,1% en 2018.
Globalement, le taux de turnover est plus élevé dans les économies émergentes que dans des économies plus matures. Il est souvent lié au taux de chômage, ce qui explique pourquoi il est actuellement moins élevé dans les pays d’Europe du Sud (Espagne, Italie, France), que dans les pays d’Europe du Nord. Il varie également de façon importante selon le secteur d’activité considéré : il est généralement élevé dans des secteurs jeunes comme les nouvelles technologies, et plus bas dans des secteurs traditionnels tels que l’industrie manufacturière par exemple.

Perdre ses meilleurs talents : un coût très élevé pour les entreprises

En effet, le turnover des employés n’en est pas moins très coûteux pour les entreprises, et ce d’autant plus que son taux est élevé. Selon une étude publiée en 2015, son coût s’élève aux Etats-Unis à 160 milliards de $ par an. Remplacer un employé peut coûter à une entreprise jusqu’au double de son salaire annuel. Les salariés les plus performants pouvant délivrer jusqu’à 400% de productivité en plus qu’un salarié moyen, perdre ne serait-ce que quelques-uns d’entre eux peut avoir de grandes conséquences financières pour les entreprises.
A cet égard, la situation française est paradoxale. Alors que le taux global de chômage y est élevé, les entreprises y ont beaucoup de difficultés à recruter des profils aux compétences pointues dans certains secteurs comme la mécanique, le bâtiment, l’hôtellerie-restauration ou le développement de logiciels faute d’une offre suffisante sur le marché du travail. Le nombre d’emplois non pourvus se chiffre en centaines de milliers.
Les collaborateurs les plus talentueux sont d’autant plus précieux que selon une enquête menée par SAP et Oxford Economics en 2014, moins de la moitié d’entre eux se disent satisfaits de leur emploi et un sur cinq déclare qu’il démissionnera probablement dans les six mois.
 
Le coût du turnover s’apprécie à plusieurs niveaux :
•         Coût du recrutement : annoncer les postes vacants, analyser les candidatures et faire passer les entretiens, au besoin via un chasseur de têtes. Le processus de recrutement représente une lourde dépense pour les entreprises. Par exemple, couvrir un poste vacant coûte 4000 $ et prend 52 jours en moyenne pour les entreprises américaines par exemple.
•         Coût d’intégration : les entreprises dépensent en moyenne l’équivalent de six à neuf mois de salaire d’un employé, pour trouver et former son remplaçant.
•         Pertes de productivité : ces coûts sont difficiles à quantifier, mais n’en sont pas moins réels. Les employés nouvellement embauchés sont naturellement moins productifs que les personnes qu’ils remplacent, du moins pendant un temps, qui peut atteindre plusieurs mois. Sans parler des erreurs potentielles que peuvent commettre les nouveaux employés par manque d’expérience.
•         Démotivation : lorsqu’un collègue s’en va, le reste des employés peut s’en trouver démotivé, et certains des employés peuvent même être incités à quitter eux aussi l’entreprise.
 
Pour traduire ces chiffres en termes simples, aux Etats-Unis par exemple, pour un salarié qui gagne 60.000 $ par an, son entreprise en dépensera 45.000 en moyenne pour le remplacer.

Le bien-être au travail, facteur principal

Ces faits établis, quelles sont les raisons qui poussent les salariés à quitter leur entreprise ?
Contrairement à une idée reçue, la rémunération n’est pas, et de loin, l’élément principal. En moyenne, seules 10% des personnes interrogées l’invoquent en première raison.
La donnée la plus importante est clairement le bien-être au travail, privilégiée par 35% des salariés sur le départ. Ces dernières années, il s’est produit un changement considérable dans la dynamique employés/employeurs : les jeunes professionnels envisagent de changer plusieurs fois d’entreprise au cours de leur carrière et recherchent avant tout un accomplissement personnel à chaque étape.
Bien sûr, le manque d’adaptation au poste lors du recrutement reste un élément important, et explique une grande partie des démissions au cours de la première année, mais l’adéquation culturelle entre l’employé et son entreprise est devenue un élément essentiel.
Les jeunes de la génération Y représentent désormais plus de la moitié de la main d’œuvre, et l’environnement de travail leur importe autant sinon plus que le travail lui-même. Ils veulent travailler aux côtés de personnes qu’ils apprécient, et dans un environnement où ils peuvent s’épanouir. S’ils ne trouvent pas cela dans leur entreprise, ils iront le chercher ailleurs.
 
Dès lors, comment les managers peuvent-ils créer et maintenir cet environnement épanouissant ?
Dans un article publié sur LinkedIn Pulse, Josh Bersin, fondateur de Bersin by Deloitte, conseille aux managers d’appliquer la pyramide des besoins de Maslow pour instaurer une culture d’entreprise riche qui réponde aux attentes des collaborateurs les plus performants. Cette pyramide distingue cinq niveaux de besoins : Survie ou besoins élémentaires, que l’on peut traduire par obtenir une rémunération juste ou suffisante ; Sécurité, que l’on peut traduire par disposer d’un emploi stable, sans anxiété ni crise ; Appartenance, que l’on peut traduire par s’intégrer dans une équipe de travail, en mettant en pratique ses compétences ; Reconnaissance ou Estime, que l’on peut traduire par se sentir apprécié dans son travail ; Accomplissement de soi, que l’on peut traduire par s’épanouir et donner du sens à son travail dans une entreprise à laquelle on est fier d’appartenir.
Ces cinq niveaux de besoins ne sont pas forcément hiérarchisés, le niveau inférieur ne prenant pas toujours le pas sur le niveau supérieur, mais chacun d’entre eux doit être satisfait à des degrés divers pour garantir le bien-être des individus.

Un nouveau mode de rétention du personnel

Alors que les deux premiers niveaux sont traditionnels et viennent immédiatement à l’esprit, la satisfaction des trois niveaux qui suivent ouvre la voie à un nouveau mode de rétention ou de fidélisation du personnel, pour adopter un langage Marketing. Les managers doivent l’adopter sous peine de rester impuissants face à la fuite de leurs meilleurs talents.
 
Certes les récompenses restent des moyens puissants et utiles pour créer une culture d’entreprise positive. En ce sens, les augmentations de salaire et les promotions sont toujours essentielles pour maintenir l’intérêt d’un collaborateur clé.
Mais établir une bonne ambiance de travail, maintenir une bonne cohésion dans les équipes et garantir une collaboration agréable et efficace entre ses membres le sont tout autant.
De même, la reconnaissance de la part des supérieurs, souvent oubliée, prend une grande importance. Les managers doivent trouver le temps pour des réunions régulières en tête à tête avec les meilleurs membres de leur équipe, au risque que ces derniers se sentent sous-estimés et freinés dans leur carrière.
La formation continue est également essentielle pour une culture d’entreprise qui favorise la rétention des employés les plus performants. Contribuant à maintenir leur intérêt et leur motivation, celle-ci doit faire partie de leurs priorités quotidiennes et de leurs agendas.
 
Mais la mise en œuvre de ces mesures ne garantira pas à elle seule la conservation des meilleurs talents. Car ceux-ci ne resteront pas longtemps dans une entreprise où ils n’auront pas l’opportunité de grandir et de s’épanouir. Même en adressant correctement des facteurs tels que le salaire, l’ambiance de travail et la reconnaissance, une étude réalisée par le site Glassdoor a constaté que les employés qui restent longtemps dans une entreprise en restant au même poste ont plus de chances de quitter celle-ci pour faire avancer leur carrière.
Les meilleurs employés, pour garder pleine confiance dans leur entreprise, doivent avoir de solides opportunités d’évolution, et être reconnus dès le départ comme de futurs leaders potentiels.
 
La mise en place d’une communication claire et harmonieuse entre les employés et leur hiérarchie est également indispensable pour garantir une pleine motivation des forces vives. Dans certaines entreprises, se donner le temps et les moyens de communiquer efficacement au sein des équipes est encore perçu comme un luxe, ou du moins comme d’une importance subalterne. Pourtant, une bonne communication inter équipes, en cultivant un capital relationnel entre les employés et leurs responsables, peut être un puissant moyen de mobilisation.
Cette mobilisation s’apprécie à trois niveaux. Au premier niveau, une communication adéquate est capable de susciter l’adhésion des salariés à l’entreprise, en leur transmettant le juste degré d’information, mais aussi en leur permettant de partager leurs préoccupations.
Au second niveau, elle peut amener les employés à s’approprier la mission et les objectifs de l’entreprise, en les consultant sur les meilleures stratégies ou décisions à prendre.
Au troisième niveau, enfin, elle peut contribuer à faire en sorte que les employés puissent s’identifier à l’entreprise, en leur donnant accès à de nouvelles responsabilités ou de nouveaux projets.
La prise en compte de cette dimension relationnelle suppose bien sûr que le rapport employeur/employé repose désormais sur une dynamique de collaboration plutôt que sur un encadrement traditionnel reposant uniquement sur une relation donneur d’ordre/exécutant, désormais obsolète.
 
Afin de retenir les employés les plus performants et rester compétitives, les entreprises sont aujourd’hui contraintes d’aller au-delà des stratégies de motivation traditionnelles qui passent par un salaire compétitif et des avantages sociaux attrayants. Les meilleurs managers doivent désormais reconnaître la nécessité de créer un environnement de travail stimulant, et de définir un nouveau modèle de leadership et de développement professionnel pour leurs équipes.
 
Andrew Filev, CEO de Wrike
 

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